domingo, 14 de octubre de 2012

La transculturalité entre les deux rives de la Médierranée


LA TRANSCULTURALITÉ LITTERAIRE ET SAVANTE ACTIVE
 ENTRE LES DEUX RIVES DE LA MEDITERRANÉE

     "La transculturalité littéraire et savante active entre les deux rives de la Méditerranée", est à parier avec Paul Balta et Thierry Fabre, non pour une réappropriation transculturelle littéraire active d'un passé, mais pour un avenir d'échanges transculturels des possibles entre les sociétés des deux rives de la Méditerranée retrouvée. "Pour décrire les dominantes culturelles possibles en Méditerranée d'ici l'an 2020, écrit  Mustapha Naïmi, Paul Balta et Thierry Fabre signent une étude intitulée 'Cultures et représentations'. C'est à travers les confrontations de tout ordre que les socles culturels traditionnels peuvent être distingués. Carrefour d'échanges, la Méditerranée est la mer de tous les métissages, tous les syncrétismes." – "La Méditerranée inquiète, Ed Aube, 1993", in "Maroc Europe", Ed. La Porte, N°4, 1993, p.280. Pour garantir ce pari, il y a lieu de dévoiler le profond ancrage transculturel littéraire active, encore vivace, entre les deux rives de la mer Méditerranée. Cela pourrait être pratiquement appréhendé historiquement à travers les œuvres de la littérature à la fois philosophique, populaires, savante et fictive des âges classiques et des temps modernes. Cela pourrait être articulé comme suit :

    I. La transculturalité littéraire active des âges classiques entre les deux rives de la Méditerranée :       

     Il est à souligner d'emblée que la transculturalité littéraire active des âges classiques entre les deux rives de la Méditerranée est le fait d'une coexistence culturelle comme l'affirme R.P. Chenu en ces termes : "Une fois de plus, pour observer et qualifier la coexistence culturelle dont nous avons décrit les ressources humaines, arrêtons-nous avec complaisance devant l'un des faits majeurs, devant un grand événement de l'ère de la civilisation que nous avons choisie comme terrain d'observation." – "La coexistence culturelle de la civilisation arabe maghrébine et de la civilisation occidentale au Moyen Age", in "Confluent", n°14, Juin-Juillet 1961, p.366. Il s'agit plus précisément de déceler l'articulation pivot de l'héritage arabo-gréco-latin des âges classiques antique et chrétien, dont témoignent notamment :

     1. La transculturalité littéraire active de l'âge classique antique dans la littérature philosophique entre les deux rives de la Méditerranée :

       En fait, tel que le montre Sigrid Hunke, la transculturalité littéraire active de l'âge classique antique entre les deux rives de la Méditerranée est historiquement repérable chez les auteurs philosophique antiques des deux rives en rappelant que :

      * "Al Kindi (mort en 873), compatriote d'Ibn al-Haïtham dont en aucun point la renommée n'éclipsa la sienne, se livra également à maintes études scientifiques. Sous le nom d'Alkindus, il fut considéré comme 'le philosophe des Arabes'. Au nombre de ses deux cents soixante-cinq ouvrages, consacrés à toutes les disciplines scientifiques, figure un traité sur la rétrogradation des planètes, cette très ancienne énigme de l'astronomie sur laquelle les Grecs s'étaient tous cassés les dents." – "Le soleil d'Allah brille sur l'Occident", Ed. Albin Michel, 1963, p.100.

       * "Ibn Badcha (Avempace) [dit Saragone : 1050-1138], le philosophe de Saragosse donne le signal de la révolte et suscite un désir d'explication 'plus naturelle' des phénomènes célestes, désir qui se transmettra à travers trois générations de savants. La lutte entre deux conceptions, celle d'Aristote et celle de Ptolémée, menée au nom d'Aristote par les disciples d'Avempace [Ibn Baja] : Ibn Toufaïl (Abubacer), Ibn Rouchd (Averroès) et Al-Bitroudchi (Alpetragus), cette lutte se poursuit aux XIIIe et XIVe siècles en France, en Allemagne et en Angleterre. Mettant en lice des combattants tels qu'Albert le Grand, Thomas d'Aquin, Roger Bacon, Jean Buridan et Dietrich de Freiberg, elle ébranlera fortement les esprits à travers tout l'Occident." – Op.cit., pp.101-102.

       * "Al Ghazzali [Algazel : 1058-1111], maître en tasawwuf, indique R.P. Chenu, cherchait [selon le mode des sophistes grecs] l'équilibre entre l'expérience et 'l'intelligence' de la foi, l'accord de la foi et de la raison, dans une espèce de sublimation de l'esprit analogue à l'expérience prophétique. Dressé contre le pharisaïsme des fuqha de son temps, il exaltait l'intelligence, mais sous l'emprise totale de la lumière reçue de Dieu. Ce qui l'amena à se dresser contre les 'philosophes', contre les philosophes du kalam, destructeurs à son avis de la vivification de l'esprit. Il composa un ouvrage contre eux : Destruction de la philosophie.

      Mais voici qu’au Maghreb [v. en Andalousie], contre ce grand docteur se dresse à son tour Ibn Roschd [Averroès : 1126-1198] dont nous avons vu s'engager le destin et la puissance. Ce lecteur et interprète d'Aristote ne peut consentir à pareille 'mystique' de l'intelligence, à une conception de l'homme où l'émanation de la lumière divine semble ruiner les méthodes de la raison, la valeur de la science, la connaissance du monde dans ses causes, l'autonomie de l'esprit. Ibn Roschd riposte violemment à Ghazzali dans son ouvrage : Destruction de la destruction des philosophes. Querelle des des Tahafot (= destruction).

    Or, il s'est produit  ce fait sensationnel, dans le sol le plus profond de la coexistence culturelle de la pensée arabe et de la philosophie occidentale : c'est la prise de position d’Ibn Roschd qui va, sinon déterminer, du moins alimenter la plus dure crise philosophique et religieuse de la Chrétienté [en Europe]. Et cela à deux reprises : au XIIIe siècle d'abord, à l'Université de Paris, alors centre animateur et régulateur de l'Eglise, où Thomas d'Aquin se trouva à la fois compromis par Averroès et dressé contre les Averroïstes latins, discuté par son collègue et ami Bonaventure; puis au XVe siècle, au cours de la Renaissance italienne, où l'école de Padoue [en Italie] explicita, en doctrine et en méthode, l'œuvre du maître arabe. Ainsi se fit-il que l'entrée d'Aristote en Occident, sa double entrée, est solidaire d'une double entrée d'Ibn Roschd polarisant toutes les énergies dans cet éveil de la raison en Chrétienté, éveil suscité dans les deux cas au cœur même d'une renaissance évangélique, tout comme, chez les Musulmans, l'éveil de la raison se fait dialectiquement au cours de la renaissance religieuse." - "La coexistence culturelle de la civilisation arabe maghrébine et de la civilisation occidentale au Moyen Age", in "Confluent", Op.cit., p.367.           

      On peut observer parallèlement dans la transculturalité littéraire active de l'âge classique antique populaire et savante ce qui suit :

      2. La transculturalité littéraire active de l'âge classique antique dans la littérature antique savante entre les deux rives de la Méditerranée :

        A propos de la littérature antique savante transculturelle entre les deux rives de la Méditerranée, M. Naïmi rappelle : "En Europe, tout au long de ces siècles [médiévaux] domine la barbarie. Il faut attendre le règne de Charlemagne [742-814] pour voir s'amorcer une évolution (…). L'Occident médiéval prend conscience, autour de l'an mille, qu'il ne dispose ni des concepts ni des instruments indispensables à son développement. Il va donc aller les chercher là où ils se trouvent, dans le monde musulman, en commençant par celui qui est à proximité : Sicile, Maghreb, Andalousie." - "La Méditerranée réinventée. Réalités et espoirs Sous la direction de Paul Balta", in "Maroc Europe", Op.cit., p.286. On pourrait citer, suivant S. Hunke dans ce sens :

       * "Ainsi, grâce à leurs traductions, les érudits arabes préservent de la disparition un grand nombre d'ouvrages anciens que sans eux la postérité [européenne] n'aurait jamais connus, entre autres livres d'anatomie de Galien [v. 131-201], les ouvrages de mécanique et de mathématiques de Héron [1er siècle apr. J.-C.], Philon [v.20 Av. J.-C.] et Ménélaüs, l'optique de Ptolémée [v. 90-168], un ouvrage d'Euclide [IVe -IIIe siècles Av. J.-C.] sur l'équilibre, d'Archimède [287-212 Av. J.-C.] sur la clepsydre et les corps flottants. Le grand mathématicien et médecin Thabit ben Qourra [835-900 Apr. J.-C.], le plus réputé des élèves de Hounaïn [IXe siècle] qui sont plus de quatre-vingt-dix, sauve de l'oubli trois ouvrages d'Apollonius [262-180 Av. J.-C.] sur les sections coniques." - "Le soleil d'Allah brille sur l'Occident", Op.cit., p.234.

      * "A l'école arabe, d'élève Frédéric [II] est passé maître, relève également S. Hunke. Alors que la Renaissance [XVIe siècle] se cramponnera obstinément aux autorités du siècle [littérature savante antique gréco-latine], Frédéric n'a pas plutôt appris à marcher qu'il se débarrasse de ses béquilles (…). C'est comme tel qu'il inaugure toute une lignée de penseurs qui, à l'écart de la scolastique, de l'humanisme et de d'une réforme [XVe siècle] opiniâtrement cramponnée aux autorités annonce les temps modernes (…). Deux chemins mènent directement de l'Orient au 'Docteur admirable' anglais [Roger Bacon : 1214-1294]. Le premier passe à travers deux Anglo-Saxons, Athelhart de Bath, qui voyagea beaucoup en Orient et traduisit des ouvrages de mathématiques arabes, et le professeur d'optique arabe de Bacon : Robert Grossetête. Le second passage à travers son maître français Pierre Maricourt, 'le croisé' qui avait rapporté d'Orient un compte rendu des travaux arabes sur le compas et le magnétisme. Parallèlement à ces chemins, un large pont conduit au grand Anglo-Saxon à travers la cour de Sicile et son compatriote Michel Scotus. C'est dans la Sicile des Normands et de Frédéric [II : 1194-1250] qu'est né l'Occident moderne dont l'esprit arabe fut l'accoucheur." – Op.cit., pp.301-303.
   
     De là, il serait possible d'étendre ce bref tour d'horizon à une exploration similaire de la transculturalité littéraire  active de la littérature antique populaire entre les deux rives de la mer Méditerranée.

       3. La transculturalité littéraire active de l'âge classique antique dans la littérature antique populaire entre les deux rives de la Méditerranée :
                                                    
        Attestant de la transculturalité littéraire active de l'âge classique antique populaire entre les deux rives de la Méditerranée, I. Hunke remarque à cet égard : "Quant aux juifs, ils ne sont ni les derniers ni les moindres intermédiaires. Qu'ils soient marchands [littérature populaire], érudits ou médecins, ils [les Arabes musulmans] rapportent en Occident les fruits de la science et de la littérature arabes et prennent une large part à l'œuvre de traduction entreprise à Tolède ainsi qu'à sa diffusion. C'est par tous ces canaux qu'un grand nombre de récits arabes parviennent en Occident où, sous un nouveau travesti, ils apparaissent dans les contes, légendes et ballades [‘Arud al balad] d'Europe (…). Au cours de l'expansion islamique, à travers deux, trois et quatre générations, une partie de l'Aquitaine et surtout de la Provence a été occupée par les Arabes, et leur domination y a laissé des traces." - "Le soleil d'Allah brille sur l'Occident", Op.cit., p.377. Citons, à propos de la littérature populaire antique trans-méditerranéenne  à titre par exemple :

     * "Ouraj bnu Inaq" (Longues jambe fils de long cou) est le conte populaire ancien marocain d'un bébé qui vite se fait homme géant et s'érige en défenseur de sa cité contre les envahisseurs à coups de troncs d’arbres arrachés et de rochers soulevés à tour de bras. Mais en contrepartie, ses parents et les habitants de la ville doivent à grands frais entretenir son gigantesque estomac en y mettant tous leurs réserves en denrées alimentaires et en tissus aidés des agriculteurs et maîtres artisans pour lui façonner vêtements coiffes et chaussons à sa taille. Des armées d’éboueurs doivent à tour de rôle et nettoyer les environs des immondices qu’il délaisse et qui bouchent les artères de la ville, dès qu'ils cessent de subvenir à ses énormes besoins. Ceci finit épuiser leurs ressources, au point que ces parents lui ordonnent de quitter le pays. On raconte qu’il est-il parti par monts et vallées pour finir ses jours dans une contrée inconnue où il finit ses jours à vivre de la chasse et la pêche de la cueillette. On ne l’avait plus jamais revu depuis ce jour – in Littérature orale populaire marocaine. C'est en quelque sorte une parodie du mythe d’Hercule chez les Grecs dont l’une de ses colonnes (ou Djbel Musa) se situent à Ben Yunach, près de Tanger, dominant la seconde de l’autre côté du détroit de Gibraltar.

     * Ce récit ressemble curieusement par son héros gigantesque au roman de François Rabelais (1383-1552), "Gargantua" (1535). Il s'inspire pour l'écrire de quelques Almanachs [littérature orale populaire] et de deux ou trois brochures  (littérature populaire antique), selon F. Brunetière et M. Pellisson. Le géant gargantua, comme Ould Inaqa,  livre bataille herculéenne à ses ennemis en rasant leur Château de Vede. En témoigne cet extrait du conte rabelaisien : "Adoncques monta Gargantua sus sa grande jument,… Et trouvant en son chemin un hault et grand arbre (lequel communément on nommoit l'Arbre de Sainct Martin, pource qu'ainsi estoit creu un bourdon que jadis Sainct Martin y planta), dist : «Voicy ce qu'il me falloit. Cest arbre me servira de bourdon et de lance». El l'arrachit facilement de terre, et en osta les rameaux, et le para pour son plaisir...

       Gargantua, venu à l'endroict du bys de Vede, feut advisé par Eudemon que dedans le chasteau estoit quelques restes des ennemys, pour laquelle chose sçavoir Gargantua s'escria tant qu'il peut : «Estez vous là, où n'y estez pas? Si vous y estez, n'y soyez plus; si n'y estez, je n'ay que dire» (…). Ponocrates l'adivisa que n'estoient aultres mouches que les coups d'artillerie que l'on tiroit du château. Alors chocqua de son grand arbre contre le chasteau. Par ce moyen feurent tous rompuz et mis en pièces ceulx qui estoient en icelluy." – "Morceaux choisis du XVIe eu XIXe siècles", Ed. Librairie Delagrave, 1922, pp.11-12.    

      * "L'histoire de du roi Seif du Leisel", roman anonyme populaire et épique antique arabe remonte par les faits évoqués relatifs au prophète Abraham (XIXe av. J.-C.), légende dont les périples et les aventures du héros Seif du Leisel, élevé par une gazelle, après avoir été abandonné dans les bois par sa mère régicide et reine du pays par la suite. Il  participe tant au monde céleste (par le biais de prophète Khadir…), au monde des démons qu'à celui des hommes, avec l'aide de créatures démoniques (‘Aqisa, Aïrud, les magiciens Sqardis et Sqardiun…), dans la traversée magique et  fulgurante des lieux, dans ses guerres saintes avec pour alliés et adversaires d’autres rois incrédules, des magiciens et des chevaliers sabéens, dans le but de sauver des vies ou la récupération d'objets sacrés et miraculeux, jusqu’au triomphe final des stratagème de sa mère et la récupération du son trône paternel. – www.annales.univ-mosta.dz , p.2.

       Cela rappelle paradoxalement le roman breton des Chevaliers de la Table ronde de Chrétien de Troyes (1130-1180), "Perceval" (1189). Il conte les aventures de Perceval, élevé comme un sauvageon dans les bois par sa mère, qui veut le tenir à l'écart du risque des tournois et des combats de la chevalerie. Un jour cependant Perceval voit passer dans la forêt des chevaliers du roi Arthur. A leur suite, il se rend à la cour du roi Arthur. Il accomplit des exploits. Il reçoit l'instruction de la courtoisie. Puis, il part à l'aventure. Arrêté au bord d'une rivière, Perceval y voit un pécheur qui l'invite chez lui. Il s'engage sur la route indiquée, mais n'aperçoit nulle habitation. Soudain se dresse devant lui la haute tour d'un château : il passe le pont-levis; des serviteurs s'empressent autour de lui et le mènent dans une salle somptueuse où l'accueille un vieillard infirme [v. le prophète Khadir de du Liezel, ci-dessus], celui qui tout à l'heure péchait. Le lendemain, lorsqu'il s'éveille, le château est désert. Il franchit le pont-levis et entre dans la forêt et rencontre une jeune fille qui s'étonne de le voir frais et dispos, alors qu'il n'existe pas de château dans ce lieu. A la réponse de Perceval, elle comprend qu'il a été reçu chez le roi Pécheur et a vu la Lance qui saigne et le Graal [La survie du Christ]. – "Moyen-Age", Ed. Magnard, 1954, pp.80-84.

    * "Dib Lgartit kaygatatha a’la dyab kulha" (Le loup à la queue coupée coupe celles de tous les loups), conte populaire ancien marocain appartenant à la série animale ayant pour héros des animaux pour l'instruction des enfants, des hommes et des princes. Dans celui-ci, le loup affamé s'était laissé aller sur la trace des hommes braconniers pour leur voler le gibier qu'ils attrapaient dans leurs pièges. Mais par mégarde, il se fait prendre la queue dans un piège. Il avait beau tirer dessus, le piège tenait ferme. Tandis qu'il essayait de se tirer d'affaire sans mal, le braconnier arrive sur les lieux. Le loup pour sauver, tira tellement fort qu'il se coupe la queue et s'enfuit. Il était devenu reconnaissable parmi les loups et lieu de tous les soupçons. Pour échapper à cette marque infâmante, celui-ci organise le tournoi du loup le plus fort. Il attache solidement les loups de son clan par la queue à un arbre géant, car le plus fort sera celui qui se détache la queue le premier. Mais au lieu de suivre la règle du concours, il se mit à crier : «Les braconniers! Les braconniers!». Pour s'échapper, ils avaient eu tous la queue coupée comme lui. De la sorte, le loup à la queue s’était lavé de tout soupçon.

   * Le conte analogue médiéval occidental, du loup à la queue tranchée, héros du "le Roman de Renart", est inspiré de l'ouverture d'immenses débouchés commerciaux du côté de l'Orient par les Croisades. On lui impute aussi pour origine les fables latines de Phèdre (15e-5e siècles, Av. J.-C.), Esope (VIIe -VIe siècle Av. J.-C.), ou l'indien ou persan Piplay (Baïdaba), arabisé par le persan islamisé Ibn al-Moqafae (mort vers le milieu du VIIIe siècle). De la branche III du roman, on peut citer en vieux français par analogie : "Renart voit, sur la route, une voiture chargée de poissons. Il contrefait le mort et les marchands, tout joyeux, chargent le cadavre pour en vendre la peau. Le goupil se gave de harengs, se passe autour du corps trois colliers d'anguilles et tire sa révérence aux marchands ébaudis.

    Rentré chez lui, il prépare une succulente friture quand frappe à la porte de son castel Ysengrin le loup, affamé comme toujours : attiré par l'odeur, il vient quêter pitance. Mais il faut, pour être admis au festin, qu'Ysengrin entre au préalable dans la confrérie de moines à laquelle appartient maintenant Renart (…). Fort en colère, Ysengrin se résigne pourtant à passer la «nuit d'épreuve» qui doit marquer la fin du noviciat. Ysengrin [le loup] et Renart, cheminant de concert, arrivent auprès d'un vivier dont l'eau est gelée. Qu'Ysengrin s'attache un seau d'eau à la  queue: on fera passer le seau par un trou qu'ont ménagé dans la glace les bergers pour faire boire les troupeaux – au matin, dit Renart, le seau sera plein de poissons. Ysengrin s'accroupit, le seau à la queue et Renart le regarde goguenard : «son groin entre ses pieds».  Au matin, l'eau a gelé. Ysengrin est prisonnier. Des chasseurs surviennent et Renart détale. Ysengrin par maladresse d'un des chasseurs, a la queue tranchée net et s'échappe en hurlant, jurant bien qu'il tirera vengeance de Renart." - "Moyen-Age", Op.cit., pp.105, 109.

      C’est aussi le cas de la littérature active des temps modernes  transculturels entre les deux rives de la Méditerranée.

   II. La transculturalité littéraire active des temps modernes entre les deux rives de la Méditerranée :

    Il est à remarquer avec I. Hunke que malgré les vicissitudes de l'histoire la transculturalité littéraire active des temps modernes entre les deux rives de la Méditerranée s'ancre profondément dans son héritage arabe en constatant : "Deux siècles durant, les Arabes resserrent si fortement leur étau autour de l'Italie que celle-ci semble bien destinée à partager le sort de l'Espagne. Après la Sicile, appelés à l'aide par Naples et les comtes Bénévent, ils occupent l'Apulie et la Calabre, menacent Rome et même la puissante Venise. En dépit de certaines vicissitudes, ils demeurent jusqu'en 915 les maîtres de l'Italie du Sud. Entre-temps toutes les îles de la Méditerranée occidentale étant passées sous la domination arabe, la Méditerranée elle-même est devenue une mer arabe, à l'exception de sa partie orientale où Byzance maintient sa souveraineté." – Op.cit., p.213. Cela se préfigure à précisément travers :

     1. La transculturalité littéraire active des temps modernes dans la littérature philosophique entre les deux rives de la Méditerranée :

      On saisit plus particulièrement la transculturalité littéraire active des temps modernes dans la littérature philosophique entre les deux rives de la Méditerranée, à travers cette notion des temps modernes, définie par Marcel Braunschvig en ces termes : "Depuis la Renaissance et la Pléiade [XVIe siècle] la croyance à la supériorité des anciens était comme un dogme dans notre littérature [européenne]. Mais vers la fin du XVIIe siècle une réaction se produit contre cette admiration superstitieuse du passé : c'est la Querelle des anciens et des modernes (…). Mais (…) il y a eu au XVIIe siècle des attaques isolées contre les anciens : cette opposition à l'antiquité se rencontre soit chez des philosophes [v. Descartes, Pascal…] qui, posant la question du progrès, en viennent à mettre en doute la supériorité jusque-là incontestée des anciens; soit chez des littérateurs qui, pour des raisons d'esthétique et de morale, revendiquent le droit d'employer dans leurs œuvres le merveilleux chrétiens [en Occident] au lieu du merveilleux païen [v. arabe]…" – "NOTRE LITTERATURE étudiée DANS LES TEXTES I, DES ORIGINES A LA FIN DU XVIIe SIECLE", Ed. Lib. A. Colin, 1962, pp.808-809. Voyons ainsi :

       * "Le doute méthodique" chez le philosophe Al Ghazzali (1058-1111) est nommé ainsi parce qu'il ne s'arrête pas au doute en soi, mais parce qu'il a été trouvé à l'origine par ce dernier pour servir de point d'appui en vue d’atteindre la certitude, c'est-à-dire qu'il constitue un procédé transitoire à travers lequel nous orientons vers la vérité, la vérité certaine non partielle – "Achchaku al minhajiu min al imam Ghazzali ila dikart", www.dahsha.com , p.1. Mais il conclut, selon R.P. Chenu, à la vérité mystique projetée par Dieu dans son cœur [l’égo]. "Ghazzali, maître en tasawuf (soufisme), écrit-il, cherchait l'équilibre de l'expérience religieuse et de 'l'intelligence' de la foi, l'accord de la foi et de la raison. Ce qui l'amena à se dresser aussi contre les 'philosophes', contre les théologiens du kalam, destructeurs à son avis de la vivification de l'esprit  [dupe du recours à la connaissance incertaines des sens, de la raison ou des dogmes]. - "La coexistence culturelle de la civilisation arabe maghrébine et de la civilisation occidentale au Moyen Age", in "Confluent", Ibid.

      * "Le doute méthodique" chez le philosophe Descartes (1596-1650) est défini dans le "Discours de la méthode pour bien conduire sa raison et chercher la vérité dans les sciences, II" (1637). "…Descartes après avoir mis systématiquement et provisoirement en doute toutes les opinions reçues jusque-là dans son esprit [connaissance incertaine des sens, de la raison et des dogmes], note M. Braunschvig, (à l'exception cependant des opinions religieuses, politiques et morales), essaye de reconstruire l'édifice de sa vie intellectuelle, en s'appuyant sur la première proposition certaine qu'il rencontre [le cogito/ le moi] : «Je pense, donc je suis.» - "NOTRE LITTERATURE étudiée DANS LES TEXTES I, DES ORIGINES A LA FIN DU XVIIe SIECLE", Op.cit., pp.518.
   
       * Geber, Djâbir ibn Hayyan (721-825) appuyant le groupe religieux Ikhwan as-Safa (IXe siècle) et Blaise Pascal (1623-1662) le groupe religieux de Port Royal (XVIIe siècle) montrent la transculturalité philosophique active moderne entre les deux rive de la méditerranée. En effet, "les Rasâla'il al-Ikhwan al-afâ' (Les Épîtres des frères de la pureté), indique un article de Wikipédia, sont composées de cinquante deux épîtres (…) incluant (Al-Risâla al-jâmi'a) (…).

       Les auteurs [de ces épîtres] vivaient à Bassora en Irak et étaient liés à la da'wa shî'ite ismaélienne. C'est dans cette période complexe pré-fâtimide que Jâbir ibn Hayyân [721-825] (…) a écrit de nombreux traités [farcie d'une propagande ismaélienne incorporée des épîtres] sur l'alchimie et la science mystique (…). Les Ikhwan al-Safâ' sont restés un groupe anonyme, mais quand on a demandé à Abû Hayyân al-Tawhîdî de les identifier, il a énuméré certains d'entre eux : Abû Sulaymân al-Bustî, Älî b. Hârûn al-Zanajânî, Muhammad al-Nahrajûrî …– "Ikhwan al-Safa". Ils développent leurs épîtres des thèmes liés à l'homme en tant que microcosme, le développement des âmes dans le corps, la limite de connaissance, la mort, le plaisir, l'intelligence et l'intelligible, la résurrection, l'appel à Dieu, la hiérarchie, la politique, etc. – "Ikhwan as-Safa",www.wikipedia.org, p.1; "Le soleil d'Allah brille sur l'Occident", Op.cit., p.199.

      * Blaise Pascal [1623-1662], entré à Port-Royal [foyer des jansénistes partisans de la prédestination de l'homme voué, dès sa naissance, au salut ou à la damnation, en lutte contre les jésuites partisans de la grâce suffisante de l'homme doué, en naissant, d'une volonté humaine dans l'œuvre du salut], en janvier 1655, selon M. Braunchvig, il ne tarde pas à être mêlé à la lutte. Le Grand Arnault [membre janséniste du groupe de Port-Royal] écrit, le 24 février et le 10 juillet, ses deux Lettres à un duc et pair (le duc de Luynes), pour protester contre le refus des sacrements par le curé de Saint-Sulpice au duc de Liancourt, simplement coupable de faire élever sa petite-fille à Port-Royal. A la suite de ces lettres Arnault est exclu de la Faculté de Théologie (janvier 1656). C'est alors pour soumettre le cas à l'opinion publique, il [Arnault] prie Pascal d'intervenir (…).

      Et Pascal compose, du 23 janvier 1656 au 24 mars 1657, ses dix-huit Provinciales ou Lettres écrites par Louis de Montalte [Blaise Pascal lui-même] à un provincial de ses amis et aux RP. PP. Jésuites sur le sujet de la morale et de la politique de ces pères. Le miracle de la sainte Épine, le 24 mars 1656, soutint l'énergie de Port-Royal, qui crut y voir la preuve que Dieu se prononçait en sa faveur. L'ouvrage de Pascal, condamné par le pape et par la Sorbonne, lacéré et brûlé par Arrêté du Conseil d'État, n'en fut pas moins un grand succès pour la cause janséniste et un rude coup porté aux jésuites. De plus, Pascal traite comme Jâbir et Ikhwna al-Safa, dans les Pensées, de la place de l'homme dans le monde, de la vérité, du bien et du mal ou du bonheur, de l'imagination, de la raison, du divertissement, des prophéties, de l'intelligence, de la grâce, de la volonté, de la croyance, de Dieu…" - "NOTRE LITTERATURE étudiée DANS LES TEXTES I, DES ORIGINES A LA FIN DU XVIIe SIECLE", Op.cit., pp.574-586. Ainsi est-il de la littérature savante entre les deux rives de la Méditerranée :

    2. La transculturalité littéraire active des temps modernes dans la littérature savante entre les deux rives de la Méditerranée :

    Pour souligner la transculturalité littéraire active des temps modernes dans la littérature savante entre les deux rives de la Méditerranée, S. Hunke remarque notamment : "Depuis trois siècles, les Arabes fournissaient en manuels toutes les universités d'Europe. Les incomparables biens spirituels d'un ennemi qui, bien que militairement vaincu [depuis 1492], n'en restait pas moins profondément admiré n'exerçaient-ils pas plus que jamais leur attrait, et ceci bien que l'aveu d'une trop vive sympathie risquât d'être dangereuse?" - Op.cit., pp.156. On relève dans ce sens notamment par exemple :

   * "Le chirurgien andalou Abou-Qasim (mort en 1013), écrit-elle, n'enrichit-il pas considérablement la médecine par sa description de l'hémophilie dont il a observé plusieurs cas dans une même famille? Sept cents avant Percivall Pott (1713-1788), il poursuit des recherches sur la tuberculose des vertèbres, maladie qui parut plus tard, sous le nom de mal de Pott, perpétuera la mémoire du savant anglais. En plus de ses nombreuses innovations en matière de chirurgie générale (cautérisation des plaies, destruction des calculs de la vésicule, dissections et vivisection), il contribue largement au développement de la gynécologie, spécialité que les Grecs avaient laissé stagner, et cela grâce à de nouvelles méthodes et de nouveaux instruments. – Op.cit. p.164.

     Il [Abou-Qasim] invente également de nouveaux procédés de manipulation et d'intervention obstétricales destinés à donner au fœtus une présentation normale. Il est le premier à recommander pour l'accouchement une position à laquelle Soranus comme ses prédécesseurs s'étaient fortement opposés et que l'on nomme aujourd'hui la «position Walcher» du nom d'un gynécologue de Stuttgart (1856-1935) : allongement sur le dos, jambes écartées et surélevées. Il la recommande d'ailleurs pour toute intervention obstétricale (..).Il enseigne le traitement des malformations de la bouche et de la mâchoire (…). Quant à la ligature des artères qui fit la renommée du grand chirurgien français Ambroise Paré (1517-1590), le premier dit-on à l'avoir entreprise en 1552, en réalité Abou-Qasim l'effectuait déjà six cents ans plus tôt dans les cas d'amputation, ouvrant de ce fait à cette opération une ère de progrès considérables. – Op.cit., pp.164-165.

     * Son professeur [de Michel Servet : 1511-1553] d'Anatomie, Sylvius, compose en 1545 un commentaire aux ouvrages de Rhases (…) [854-925]. Entre 1486 et 1542, seulement paraissent cinq éditions complètes du Contens [al Hawi], la volumineuse œuvre maîtresse de Rhases, pourtant si onéreuse, sans compter de nombreux tirages de certains extraits de l'ouvrage. Son Traité sur la variole et la rougeole est imprimé plus de quarante fois entre 1498 et 1866 : voilà donc un ouvrage qui a réussi à retenir l'attention et la faveur des érudits un millénaire durant! Aujourd'hui encore [en 1963], il est considéré comme un classique.

    A vrai dire, sur le plan de l'expérience chimique personnelle, Roger Bacon [1214-1294] L'influence directe des Arabes sur la pharmacopée occidentale survécut à l'humanisme et à la Renaissance [XVIe siècle]. Elle poursuivit  son action jusqu'au XIXe siècle. En 1758 parut une nouvelle édition d'une partie de l'ouvrage de pharmacologie d'Ibn al-Baïtar  (…) [1197-1249]. En 1830, les nouvelles pharmacopées européennes continuaient encore à puiser aux sources arabes. En 1832, parut une nouvelle édition du manuscrit arabo-persan de l'Arménien Mechithar, datant du XIIe siècle." – Op.cit., pp.206-207. - "Le soleil d'Allah brille sur l'Occident", Op.cit., p.191.            

   3. La transculturalité littéraire active des temps modernes dans la littérature de fiction entre les deux rives de la Méditerranée :

    Concernant la transculturalité littéraire active des temps modernes dans la littérature de fiction entre les deux rives de la Méditerranée, il siérait d'évoquer avec S. Hunke l'amour de pure fiction du troubadour provençal imitant l'amour sincère du poète arabe originel : "Il y a néanmoins une différence essentielle : ce qui chez les Arabes est sincérement et profondément ressenti n'est en Occident qu'une mode. Lorsqu'un troubadour provençal proclame que rien ne pourrait le rendre plus heureux que d'être «le serviteur et l'esclave obéissent et soumis» de sa dame, que d'être «entièrement en son pouvoir», si elle voulait seulement daigner «l'accepter  pour esclave», il sacrifie à une fiction purement poétique [imitation factice], une nouvelle forme de galanterie dénuée d'authenticité qui vise seulement à décrire le plaisir d'un jeu mondain auquel s'adonne le chevalier et sa dame." - "Le soleil d'Allah brille sur l'Occident", Op.cit., p.371. Il en est-t-il de même de :
  
   * "La saison poétique en enfer d'Abu al Ala' al Ma'ari (995-1081) et Dante d'Alighieri (1265-1321), comme  furent des exemples éloquents de cette transculturalité littéraire active des temps modernes dans la littérature de fiction entre les deux rives de la Méditerranée.  Dans "Risalatu al-Ghufrän" (l'Épitre) al Maâri expose ses opinions critiques littéraires. Il y dicte en réplique à l'un de ses contemporains, Ali ben Mansour al Halabi, surnommé ibn al Qarih, une épître composée de deux parties : la première narre le voyage céleste d'ibn al Qarih au paradis et en enfer; la seconde la réplique d'al Maâri à ibn al Qarih. Il expose dans l'épître des questions linguistiques, des confrontations entre les poètes défunts : al Aâchâ (530-629), al Nâbigha Djaâdî, Qaïs  ben Abdallah, Imru'u al Qaïs (m. en 540), Abû Nawas (762-813). Il campe Djaâdi jugeant al Aâchâ : "T'infatues-tu car des ignorants te comptent le quatrième des quatre grands poètes arabes? Tes électeurs ont menti. Je suis plus prolifique que toi, plus entreprenant, ayant atteint un nombre de vers que nul arabe n'a atteints avant moi." – "Al Adabu wa al Nusûs, V", Maktabatu al Rachad, 1971, p.136-141.

   Quant à l'italien Dante d'Alighieri (1265-1321), a par la suite écrit la Divine comédie (la Commedia : en1555) sous forme d'un poème en témoignage de la civilisation médiévale, en s'inspirant du sanglant conflit qu'il a lui-même vécu en Italie entre les Guelfes (Guelfi) et les Gibelins (Ghebellini) (1125-1300). Il se réfère à l'Éneide à l'Apocalypse de Paul comme récit de voyage, selon Wikipédia, non à un contemporain immédiat arabe al Maâri, passé sous silence, sur la rive Sud méditerranéenne. Le poème est divisé en trois parties : inferno (l'Enfer), Purgatorio (le Purgatorio), et Paradisio (le Paradis). Le poète narre un voyage à travers les trois règnes supraterrestres qui le conduira jusqu'à la vision médiéval du monde. Dante, selon Philippe Sollers, insiste sur l'exception qui permet de dévoiler la règle (Virgile – poète latin rencontré), dans  l'Éneide, fait de même : Énée était conduit aux enfers par la Sibylle (organe signifiant), et Dante précise que le langage de Virgile est  la clef de son pouvoir sur le monde d'en-bas (…). Outre Virgile son guide, il y rencontre les poètes : Stace (45-96 Apr. J.-C.), Cavalcanti (1225-1300) et Béatrice [1265-1290] (langue latine/ langue italienne). "C'est peu dire, en effet, ajoute Sollers, que de constater l'appel constant de la Comédie au lecteur (…) : «O toi qui lis tu entendras un jeu nouveau»/ de l'enfer." – "Divine Comédie", www.wikipédia.org, pp.1-2; "L'écriture et l'expérience des limites", Ed. du Seuil, 1968, pp.17, 33, 38.  

       * De "Haï ibn Yaqdan" d'Ibn Tofaïl (m. en 1185) à "Robinson Crusoé" de Daniel Defoe (660-1731) ou l'homme à l'état de nature. Dans le récit utopique "Haï ibn Yaqdan", Ibn Tofaïl conte la vie d'un enfant nommé Haï ibn Yaqdan (le Vivant fils l’éveillé) qui grandit seul sur une île, symbolisant l'homme en rapport avec l'univers et la religion. Sa naissance demeure une énigme, mais  la version la plus répandue est qu'il l'enfant de la sœur du roi de l'une des îles indiennes et d'un de ses parent nommé Yaqdan, le fruit d'un mariage secret interdit par le roi. A sa naissance, elle met l'enfant dans une boîte et le jette à la mer. La boîte dérive sur le rivage de l'île environnante d'al Waqwaq. Une antilope ayant perdu son petit entend ses pleurs et l'allaite et l'adopte. A sept ans celle-ci meurt et en la disséquant, il découvre le sens de la vie et de mort, la diversité des êtres, le feu, l'espace, l'âme et le corps, pour aboutir à la foi en Dieu. Le conte conclut à la compatibilité entre la raison et la foi englobant des opinions philosophiques et mystiques dans le texte. – " Haï ibn Yaqdan", www.wikipédia, p.1.
               
       * De la même manière, le roman "Robinson Crusoé" (1719) de l'anglais Daniel Defoe (660-1731) raconte la vie et les aventures étranges de Robinson Crusoé, un marin qui allait vivre 28 ans sur une île déserte. Robinson quitte York, en 1659, en Angleterre pour naviguer, contre la volonté de ses parents qui voulaient qu'il devienne avocat. Le navire arraisonné par les pirates de Salé (les fameux Sallee Rovers) et Crusoé devient l'esclave d'un Maure. Il parvient à s'échapper sur un bateau et se fait sauver par un navire portugais sur la côte ouest de l'Afrique. Il devient propriétaire d'une plantation au Brésil. Lors d'une expédition partie à la recherche des esclaves africains, il est naufragé par la tempête sur la côte de l'Amérique du Sud, près de l'embouchure du grand fleuve Orénoque. Il est le seul survivant avec quelques outils et armes récupérés dans l'épave. Il réussit à survivre grâce à sa créativité, ses découvertes et son ingéniosité. A la visite des cannibales à l'île Désespoir, il adopte et instruit un de leur prisonnier évadé, qu'il nomme Vendredi. 28 ans plus tard, il est sauvé par un navire anglais, en prenant le contrôle d'une mutinerie à bord et retourne en Angleterre – "Robinson Crusoé", www.wikipédia.org, p.1.  
         
    En conclusion à ce bref panorama de "la transculturalité littéraire et savante active entre les deux rives de la Méditerranée", des littératures philosophiques, savantes, populaires et de fiction, des âges classiques aux temps modernes, il siérait alors à notre sens de poser la pierre angulaire des échanges universitaires autour ces deux rives ouvertes sur le passé, le présent et l'avenir de cette communauté méditerranéenne antique et moderne que nous appelons de tous nos vœux aujourd'hui, en avisant avec M. Naïmi dans cette perspective : "Intense entre Européens, la coopération universitaire est fort limitée au Sud et entre les deux rives. Que faire? Ces thèmes, rarement abordés, sont traités par Salvino Busuttil, coordinateur du plan d'action pour la Méditerranée, depuis 1991, ancien directeur de l'Unesco (1977-1987), puis directeur de la Fondation pour les études internationales (Malte). Son étude intitulée "Vers un projet Averroès des universités" insiste sur le droit des universités méditerranéennes d'exercer une influence décisive des sociétés vivant sur les deux rives [de la Méditerranée]." - "La Méditerranée réinventée, in "Maroc Europe", Op.cit., p.292.   

                                         Dr. SOSSE ALAOUI MOHAMMED

martes, 9 de octubre de 2012

Resonancias d'Ahmed Mohamed Mgara et l'hispanisme marocain


«Resonancias» d'Ahmed Mohamed Mgara
Un hommage commémoratif de l'hispanisme marocain en 2009

Il serait judicieux de convenir qu'au sens où on l'entend aujourd'hui, les termes «hispanismo» (hispanisme) et «hispanista « (hispaniste) désigneraient de façon générale, l'écriture, l'étude en langue, littérature espagnoles à l'étranger, ou l'équivalent d'une hispanophonie d'outre–mer, notamment au Maroc.
C'est ce que laisse du moins entendre cette argument d'Antonio Candido lorsqu'il avance à propos de l'autonomie enrichissante des littératures extra – métropolitaines : «Si nous laissons de côté les fluctuations de l'orgueil national, nous verrons que nos littératures, malgré l'autonomie qu'elles commencent à avoir vis - à - vis des littératures métropolitaines, elles persistent à en être le reflet à un grand degré. Et dans le cas le plus répandu numériquement dans les pays hispanophones et lusophones, l'opération d'autonomie se résumerait, à un grand degré au changement de la dépendance, à tel point qu'elles sont devenues des littératures européennes autres, non pas métropolitaines...» – «Littérature et sous – développement», in «Americana latina en su Literatura », Kuweit, Ed. CNCAL, 1988. Toutefois, cela nous conduit à traiter ici du livre «RESONANCIAS» (Résonances), publié par la ‘Diputation de Cadiz' et la ‘Fundacion Dos Orillas', en hommage commémoratif à l'œuvre polygraphique Mohamed Ahmed Mgara (né en 1954, à Tétouan) et à l'hispanisme marocain en général, en 2009.
Dans le Prologue de ce livre, Paloma Fernández Goma indique notamment : «L'écrivain, journaliste et poète Ahmed Mohamed Mgara, dans le livre «RESONANCIAS» (Résonances), une série d'articles où les pensées qu'il exprime deviennent un engagement pour ses convictions, et avec son temps, tiennent lieu de valeurs vitales, à son hispanisme, à la convivialité interculturelle et au legs andalou, dans la culture actuelle. Mgara se réfère à une série de réflexions s'acheminant vers une meilleure compréhension de notre présent, et que nous vivons en tant que peuples riverains de la Méditerranée et autour du Détroit de Gibraltar, dans une perspective toujours ouverte sur des tendances distinctes ou des situations où le respect de l'‘autre' est un point de référence aux prémisses à partir desquelles dérivent ses conclusions.». Or, le livre en question comprend 18 parties regroupant thématiquement:
1 - «El mito como prejuicio profano» (Le mythe comme préjugé profane) .
2 – «El Protectorado Español en Marruecos : Lo que supuso, Lo que recuerda, Tetuán en Protectorado, Tetuán tras los años 70» (Le Protectorat Espagnole au Maroc : Ce que cela suppose, Ce que cela rappelle, Tétouan sous le Protectorat, Tétouan après les années 70).
3 - «¿Cómo se ve al ‘otro' por parte de la literatura marroquì espresada en español.» (Comment se voit l' ‘autre' de la part de la littérature marocaine exprimée en espagnol?).
4 - «El Hispanismo Marroquì. Divagaciones de un emigrante : Visiones sobre el Hispanismo Marroquì, Catalogación et problemáticas, Momento del Hispanismo, El Hispanismo nuestro orgullo, Conclusión.» (L'hispanisme marocain, Divagations d'un émigré : Vues sur l'hispanisme marocain, Classement et problématiques, Un moment d'hispanisme, l'hispanisme notre orgueil, Conclusion).
5 - «Hispanismo» (Hispanisme).
6 - «Como ser hispanista y no morir en el intento» (Comment être hispaniste et ne pas mourir en tentative).
7 - «La palabra divina ... comedia.» (La parole divine ... comédie).
8 - «Paloma Fernández Goma... Poesìa en ardor.» (Paloma Fernández Goma ... Poésie ardente).
9 - «Al poeta Abdeslam Mesbahi.» (Le poète Abdeslam Mesbahi) .
10 - «Josefa Parra... el amor hecho versos.» (Josefa Parra... l'amour fait des vers).
11 - «Mohamed Choukri» (Mohamed Choukri).
12 - «Espaldas mojadas» (Dos mouillés).
13 - «Amor a la Patria.» (Amour de la patrie).
14 - «Intelectualidades diafanas.» (Intellectualités diaphanes).
15 - «Todos somos migrantes.» (Nous sommes tous des émigrés)
16 - «Tetuán... Canto sobre Ilanto» (Tétouan, Chant en larmes).
17 - «Ideales perdidos» (Idéaux perdus).
18 - « Tetuán en la fotografìa» (Tétouan en photographie).
Il paraît assez clairement au bout de cet index que cet hommage commémoratif dédié à l'œuvre de M. A. Mgara et à l'hispanisme marocain grandissant, en ce printemps 2009, verse parfaitement dans le sens de ce qu'A. Candido considère comme l'influence réciproque, exercée par la littérature hispaniste sur la littérature métropolitaine espagnole, dont celle issue du Nord et du Sud du Maroc actuel, reliant favorablement l'ère coloniale maroco - espagnole à nos jours. «L'une des étapes fondamentales de dépasser la dépendance, écrit- il, c'est la capacité de produire des œuvres de première classe, influencées non par des modèles étrangers, mais par des exemples antérieurs nationaux. Ce qui signifie l'adoption d'une causalité interne, rendant plus féconds les emprunts à d'autres cultures.».
Plus généralement, il y a lieu d'augurer avec Roger Caillois, pour une audience future de la littérature hispano – marocaine, comme il le fait pour la littérature latino – américaine en assurant dès 1965 : «La littérature d'Amérique latine usera la grande littérature de demain, comme le fut la grande littérature russe de la fin du dernier siècle [du XIXème siècle] et la grande littérature nord – américaine des années 1925 – 1940, l'heure a sonné maintenant pour l'Amérique latine [pour le Maroc]. Et de là naîtront les chefs – d'œuvres que nous en attendons tous.» - «Americana latina en su Literatura ».
En conclusion, à l'occasion de cet événement majeur, qu'est l'édition à Algésiras, de «RESONANCIAS» (Résonances), en hommage commémoratif à l'œuvre féconde de l'écrivain M. A. Mgara et à l'hispanisme marocain, qu'il nourrit avantageusement entre les deux rives du Détroit de Gibraltar, on ne saurait mieux dire que cet éloge humainement ouvert et plein d'optimiste que lui réserva P. F. Goma, dans le prologue de son livre : ««RESONANCIAS» est un livre d'approximation et de rencontre, d'amitié sincère qui s'étend entre les deux rives du Détroit, ainsi qu'un cumul de moments vécus et de pensées de son auteur, Ahmed Mohamed Mgara, qui a son environnement si proche et si lointain, et comme se le disait John F. Kennedy, Ahmed Mgara aussi est un ‘citoyen du monde', d'un monde de paix et de respect entre les hommes, rendant toutes les frontières, inexistantes, et ce grâce à la valeur que transmet le mot prononcé par des hommes comme Mohamed Ahmed Mgara.».

                                                                            Dr. Mohammed SOSSE ALAOUI