jueves, 15 de mayo de 2014

PTE ANTHOLOGIE DES SAINTS POETES SOUFIS AU MAROC






Dr. SOSSE ALAOUI MOHAMMED




PETITE ANTHOLOGIE
DES SAINTS POÈTES SOUFIS 
POPULAIRES
AU MAROC







Tétouan
2013



INTRODUCTION

   Pour  embrasser le champ des œuvres poétiques souvent méconnues – ignorée ou déconsidérée - par la littérature  érudite écrite, léguée oralement par «Les Saints poètes soufis populaires au Maroc», dont le corpus en général oral, il y a lieu d’en retracer les grands traits et d’en pourchasser les ombres et les traces effacées à travers les traditions, les us et coutumes, les hommes et les femmes qui les ont avantageusement conservées et que conservent encore jalousement les rites, les chants, les légendes, les confréries et l’oralité des adeptes et du vulgaire aux quatre coins du pays.
    À cet égard, Sakina Rharib notifie en l’occurrence : «Le Maroc comme toute l’Afrique du Nord, a connu les trois monothéismes, le judaïsme, le christianisme et l’Islam (…). La sainteté est un concept profondément enraciné dans la mentalité marocaine. Les saints et les saintes encadrent l’ensemble du territoire national, selon une sorte de géographie du sacré. Dans chaque ville, dans chaque village, en montagne comme en plaine, dans les régions côtières comme à l’intérieur du pays, des sanctuaires ont été élevés sur les tombes de personnages  tantôt légendaires, tantôt historiquement attestés[1]
      Dans cette petite anthologie populaire, nous essaierons d’en rapporter autant que possible l’itinéraire biographique et la création poétique à la fois récitée et chantée, tant érudite que dialectale – arabe dialectal, l’amazigh et le hassani -, de Tanger Lagouira (au Sahara marocain). Soulignons d’emblée que la diversité linguistique en question recouvrent globalement : l’arabe classique et dialectal (au Maroc et au Sahara), conjointement au berbère et au hassani (au Maroc et au Sahara).
      Selon le portrait qu’en fait schématiquement S. Rharib, ces poètes soufis populaires sanctifiés (ou saints) n’ont parfois qu’un rayonnement local, cantonné dans le quartier d’une ville, d’un territoire tribal, dans les villages d’une vallée, ou d’une région plus étendue. D’autres ont acquis des figures véritablement nationales. Beaucoup font l’objet de célébrations annuelles par des foires, ou moussems. Il y aurait plus de 600 manifestations de ce genre au Maroc, drainant des milliers de pèlerins et de visiteurs, telles celles de : Moulay Abdellah Amghar (à El Jadida), Moulay Idriss I-II (à Zerhoun et à Fès),  Imilchil (au Haut Atlas), Moulay Abdesalam Ben Machich (à Jbel Laalam au Nord du Maroc), Sidi Hmad Ou Moussa (au Souss) et, Moulay Brahim (dans la région de Marrakech), Sidi Ahmed Laâroussi (à Tbila au Sahara marocain) [2], etc.  

         C’est à cela que s’attèlera autant que possible l’effort de cette brève anthologie, ouvrant une fenêtre, parmi d’autres, sur la poésie des saints poètes soufis populaires marocains, tant écrite qu’orale dont les traces se perdent le plus souvent, dans les dédales séculaires de l’oubli et de la transmission orale occulte et/ou occultée. Que cela serve de coup d’envoi à d’autres et à d’autres contributions plus exhaustives, plus représentatives et plus approfondies, en vue d’élaborer un futur panorama de ces poètes soufis populaires du Maroc, et d’ailleurs.
                                                                                   L’auteur
   











                                                                     
SAINTS POÈTES SOUFIS
POPULAIRES
D’EXPRESSION ARABE
CLASSIQUE AU MAROC
ET AU SAHARA










    Les saints poètes soufis  populaires d’expression arabe classique au Maroc et au Sahara nous font penser à cette réflexion historique sur cette répartition linguistique de leurs poésies que Mohamed Kahlaoui ramène à la mission d’encadrement avant tout religieuse et didactique du peuple par l’Islam et ses valeurs spirituelles fondamentales :

    «Nous essayons de faire revenir ici le lecteur à une part de l’histoire des réputés ascètes, des anachorètes et des saints soufis, ceux dont s’est imprégnée la réalité sociale et l’ont marquée sans le vouloir car ils avaient privilégié les valeurs d’amour, de pitié et de fraternité, ce qui leur a valu l’amour des gens, la remémoration de leurs biographies et leurs œuvres  (…). Certes, les cités du Sud du Maroc : Marrakech, Essaouira, Tata, Ouarzazate (…), ont joué un rôle éminent dans l’expansion du dhikr [l’invocation divine], le récital et la tenue de séances de chorals rituels, étant donné que la majorité d’entre eux ont embrassé l’Islam et appris l’arabe [classique à côté du berber et du hassani] par le biais des soufistes et l’allégeance aux  adorateurs et aux ascètes[3].» Aussi verra-t-on successivement :

   








SAINTS POÈTES SOUFIS
POPULAIRES
D’EXPRESSION ARABE
CLASSIQUE AU MAROC










ABDESSALAM IBNU MACHICH AL ALAMI

     Abdesalam Ibnu Machicich Al Alami (ou Moulay Abdesalam Ibnu Machîch) est saint et poète populaire soufi d’expression arabe classique marocain, est originaire de Djebel Al Alam, dans la région de Béni Arouss, au Sud de Tanger et décédé dans un attentat dirigé contre lui, v. 626 H/ 1228 C, par une bande à gage à la solde d’Abu Tawajine al Kétamide as-Sérifide, uns sorcier et se prétend prophète. Du milieu du XIIe siècle au début du XIIIe siècle, ce saint, surnommé le cheikh des Jbalas  (patron des montagnards), s’y était retiré à djebel La’lam, lieu de ermitage, son meurtre et de son mausolée actuel. Son moussem (pèlerinage) a lieu chaque année au début du mois de juillet. Sa généalogie remonte a saint roi du Maroc  Idriss II et à Fatima Zohra, la fille du Prophète Mohamed (PS). De sa poésie, citons ces deux vers, issus d’un poème de 40 vers :

SUPPLICATION

«J’ai commencé par le nom d’Allah au début de la ligne/
Ses dénominations sont une fortification contre  le mal//
Et j’ai prié dans la seconde sur le meilleur de ses créés/
Mohamed l’envoyé portant l’ouverture et le triomphe//».

PRIÈRE MACHICHIENNE

«Qu’Allah prie pour celui dont se sont dévoilés les secrets/.
Et ont éclaté les lumières. En qui se sont hissées les vérités/.
Et sont descendus les savoirs d’Adam incapcitant les êtres/.
Et pour qui se sont réduits les intellects passés et suivants/.
Le jardin des royaumes divins de ses fleurs est si élégant/.
Et la chute de la tyrannie du flux de ses lumières s’écoule/.
Nul être n’existe sans qu’il soit en soi par lui circonscrit/.
Vu que sans le médiateur le médian se serait dit-on perdu/.
Une prière digne de Toi sur lui telle qu’il en est alors digne/.
Ô mon Dieu, c’est Ton secret entier la preuve qui t’exprime[4]/.»








ABU AL HASSAN AL MUSAFFIR AS-SEBTI

   Abu Al Hassan Al Musaffir As-Sebti est un saint poète soufi populaire marocain d’expression arabe classique, d’origine hassanie de Fès, né et décédé au début du XIIIe siècle, à Ceuta, sous le règne des Almohades. Il prônait l’unicité de l’existence et a rencontré Ibn Arabî, avant 598 H/ 1230 C. De sa poésie mystique, on rapporte notamment ces vers autodidactiques :

Ô TOI QUI POUR ÉPROUVE DU MÉPRIS

«Ô toi qui pour moi éprouves du mépris/
Certes Allah savait déjà  ce que tu as dit//
Si le langage se fait léger sur ma langue/
Il me ferait peur par son poids si lourd//
Vu l’ange conservateur scripteur témoin/
Qui prend acte de tout ce je prononce//
Qui s’intro-inspecte à tous les instants/
Ne se laisse guère aller dans ce qu’il dit//».

DIS À AUX FRÈRES QUI M’ONT VU MORT

«Dis aux frères qui m’ont vu mort/
Et m’ont pleuré et loué de chagrin//
Est-ce pour  l’absent en moi votre peine/
Ou de ce qui est présent là avec vous//
Croyez-vous donc que je suis votre mort/
Je ne suis point ce mort par Allah moi//
Je suis en images et voici mon corps/
C’était mon habit ma chemise un temps//
Je suis un trésor et mon voile un talisman/
De terre qui s’est préparé pour le néant//
Je suis une perle qu’abrite un coquillage/
Je m’en suis envolé et qui m’a laissé otage//
Je suis un oiseau et cela est ma cage/
C’était ma prison et je m’étais habitué à elle//
Je remercie Allah qui m’en a délivré/
Et a édifié pour moi dans les cieux un coin//
J’étais avant ce jour mort parmi vous/
Je me suis ressuscité et débarrassé du linceul//
Et j’invoque aujourd’hui un grand auditoire/
Je vois Allah explicitement au grand jour//
Je m’attache à lire et à voir dans la table/
Tout ce qui a été qui arrive et s’éloigne//
Et mon manger et mon boire est unique/
C’est un symbole comprenez-le bien//
Ce n’est ni un vin ni un miel appétissants/
Ce n’est pas une onde mais c’est un lait//
Le breuvage du Messager d’Allah lors/
Du voyage nocturne créé comme nous//
Discernez le secret portant une nouvelle/
Quel sens est tapi sous mon énoncé[5]//».    




















MOULAY LARBI DERKAOUI

     L’Idrisside, Moulay Larbi Derkaoui est un saint poète soufi populaire marocain, né en 1760, dans la tribu des Béni Zeroual de Bou Brih (au Maroc). Il crée l’ordre des Derkaoua (une confrérie soufie) au XIIIe siècle. Sa doctrine procède de la tarika (doctrine) chadiliyya jazouliyya. Il est mort en 1824 dans sa zaouïa de Bou Brih où il a été enterré. Il a eu comme disciples : Sidi Ahmed El Badaoui El Fassi (S. Zouiten), Sidi Mohammed El Bouzidi, Sidi Mohammed El Harraq, Sidi Abdelouahed Debbagh El Fassi (du Maroc), Sidi Bouazza Al Mhaji (d’Algérie), etc. De sa poésie spirituelle, citons :

Ô VOUS AMANTS DE LA PRÉSENCE SUPRÊME

«Revisitez-nous et tentez en nous l’union/
Ô vous amants de la présence suprême//
Louange à Allah qui de nous fait ses gens/
C’est le temps d’éveil au plus illustre  état//
Quand l’être a été nous avons ouï son dire/
Nous étions appelés par Allah avant d’être//
Et nous étions unis en cet Allah sans gré/
Pigeons d’union on est après la désunion//
On a sacrifié âmes et proches à son amour/
Nous sommes rois de la terre à sa proximité//
Nous avons une vue aiguë là où il se révèle/
Nous étions en plein soleil et autrui au soir//
Allah mène à la lumière de saint qui le mérite/
Et nous avons de Dieu lumière sur lumière//
Mages du vrai dans les premières nations/
Ne t’en étonne pas car Il était avant nous//
Les jours se sont écoulés et les gens distraits/
Délaissés parmi le peuple sans ouïr leur dire//
C’est la loi d’Allah dans sa création immuable/
À la mort du cheik apparaît son homologue//
Le passé est ce passé assuré après transfert/
Si tu rates l’occasion d’arriver  de son vivant//
Tiens de lui des sciences au rabais à valoriser/
Retrousse tes manches et obéis à son ordre//
Qui est doué de raison a recours à la raison/
Et ceci est observable chez tout connaissant//
Qu’on se dresse à servir le vrai même révélé/
Et dise j’avais été dépassé par le temps hélas//
Que les arrivés  trouvent secours dans l’union/
Et dise je suis noyé et n’ai ni à moi ni en moi//
Ils ont le flux du Clément et un breuvage doux/
Certes ils sont vu leur soif en droit de le boire//
Dans les fers de l’ignorance on croit l’ignorance/
Qui n’enrichit le disciple au moment de sa vue//
Veillant sur le disciple le préférant à soi-même/
Il n’y a de cheikh que celui qui livre son secret//
Il est difficile d’arriver au stade de l’état suprême/
Et soulever sur soi les voiles qu’avait son cœur//
Il voit l’apparition du vrai partout  où il se dirige/
Et entre dans la présence d’Allah après désunion//
Il n’adore ni houris frappés de myopie ni autres/
Et s’anéantit au mépris du monde tout entiers//
Il est le seul l’unique de son temps par sa beauté/
Il est le cheikh par Allah un cheikh sans pareil//
Si ton âme t’est chère il en est lui le plus cher/
Il est l’étoile perçante si de lui tu te rapproches//
Il s’était vêtu de cette étoffe après avoir quitté/
Le Messager d’Allah l’a vêtu de l’habit de Khalife[6]//».
 








MOHAMED AL HARRÂQ

    Mohamed Al Harrâq est un saint poète soufi populaire marocain d’expression arabe classique, né  en 1186 H, à Chafchaouen et décédé en 1261 H, dans sa zaouïa,  à Tétouan (au Nord-Ouest du Maroc).  Il a laissé un grand patrimoine de poésie soufie fine et émouvante, réunie en un recueil, après être devenu un prédicateur appelant à la voie des maîtres éducateurs les adeptes se vouant à Allah, glorifié soit-IL. De sa verve poétique mystique, mentionnons :

SOIS INFORORTUNÉ HORS L’UNIVERS

«Sois infortuné hors la vue de l’univers tout entiers /
Tu seras en Dieu du Trône le plus riche de la créature//
Jusqu’à ce que tu vois ce dont tu étais alors dénudé/
Par ton intellect ce dont la vue de la même la vérité//
Et tu perçois un Maître cernant tout ce que tu vois/
Une existence réellement fondée sans être visible//
Et tu observe une lumière débordante d’une vérité/
Colorant tant de couleurs pour révéler une sagesse//». 

SERAIS-TU EN QUÊTE DE LEÏLA ?

«Serais-tu en quête de Leïla, alors qu’Elle se manifeste en toi? La prendrais-tu pour un Autre, alors qu’Elle n’est autre que toi ?/
Cela est une évidente niaiserie dans la religion de l’Amour. Sois circonspect, l’Autre est la rupture même!/
Ne L’as-tu point aperçue déployer Sa beauté sur toi ? Elle serait évanouie si Elle ne procédait de toi-même ?/
Tu La sommes de se rapprocher, alors qu’Elle est ta totalité. La voilà qui s’incline, qu’Elle te chérit et t’affectionne./
Sa rencontre est très précieuse. Seul succède à Son amour celui qui perçoit un sens dépourvu d’identité./
Je suis tellement épris d’Elle que je suis anéanti par Son amour. Elle aurait dit vrai si Elle jurait que j’étais Elle./
J’ai induit les hommes en erreur sur Son compte, après que je me sois assuré de Sa présence en mon sein./
À cause de ma jalousie extrême, je L’ai dissimulée sous les étoffes de  mes Univers, à l’abri des envieux et de moi-même./
Elle est extrêmement belle. Telle est apparue la lumière de Son visage à un aveugle qui désormais discerne tous les atomes./
Elle se revêt de tous les atours de la grâce. Les amoureux L’adorent, où qu’Elle se manifeste./
Mon impatience à son égard se délie en fervent amour. Je n’accepte dorénavant que de purs liens./
Parmi les amoureux, qui pourrait égaler ma passion envers Elle ou atteindre mon rang ?[7]»



  















EL LARBI BEN SAÏH

     El Larbi Ben Saïh Charqaoui est un saint poète soufi marocain d’expression arabe classique, né en 1229 H/ 1913 C, et décédé en 1334 H/ 1988 C, à Meknès. De sa poésie mystico- apologétique et engagée islamique, citons notamment :

LE MEILLEUR DE TOUS LES GENS

«Le meilleur de tous les  gens est Mohamed/
Et les meilleurs dires des mondains son dire//
Par lui on guérit de toute maladie et  méfait/
Et atteigne le cœur concerné sa destination//».

AU SEUIL DU TOMBEAU DU CHEIKH TÎJANÎ

«Je suis venu à votre seuil tout effrayé/
Et il n’y a d’autre refuge à part vous//
Veuillez repousser ce dont je me plains/
Que mon cœur s’apaise de cette frayeur//».

    Puis, une fois la permission spirituelle agréée, il entre au sein de la zaouïa et clame sen direction de l’illustre tombeau :

AU SEIN DU TOMBEAU DU CHEIKH TÎJANÎ

«Ô ma joie je suis bien au-delà de/
La porte du généreux campant//
Et l’hôte en toute vérité  s’il vient/
À la porte des généreux est servi//
Notre Prophète le meilleur des gens/
Qui est bien le plus Grand Messager//
A dit celui qui est vraiment croyant/
L’hôte est obligatoirement à servir//
Or tu es le maître le plus privilégié/
De qui l’hospitalité et due et servie//».

   De même qu’il compose un poème dédié au Prophète d’Allah (PS) l’invoquant lors du déclenchement de la guerre entre la Russie et la Turquie, en 1294 H/ 1877 C, qui s’est achevée par la victoire des Turcs, en ces vers :

Ô CLÉMENCE DE L’UNIVERS !

  «Ô Clément de l’Univers et le Meilleur dont/
On écarte de nous les malheurs et les peines//
Et le plus noble qui protège des maux et qui/
Vers son sanctuaire fuit celui qui a des peines//
Aie pitié de Ta grâce d’une nation n’ayant plus/
Que Ta protection face aux épreuves de fuite//
Elle est persuadée que sans votre intercession/
De l’océan de ta générosité que péril et perte//
Intercède pour elle auprès du Sublime de grâce/
Invoque Dieu de grâce pour qu’IL Te l’accorde[8]//».




    





           
















SAINTS POÈTES SOUFIS
POPULAIRES
D’EXPRESSION ARABE
DIALECTALE AU MAROC











    Les saints poètes soufis  populaires d’expression arabe dialectale au Maroc et au Sahara nous font également réfléchir à cette réalité socio-historique et linguistique de leurs poésies orales que dédaignent les codificateurs savants des la poésie soufie d’expression classique écrite depuis les XIIe et XIVe siècles, tel que le consigne le site Roaaad (leaders), en affirmant que la poésie populaire marocaine occupe en plus de l’art du récit et de la légende une place centrale parmi les traditions orales, et ce à côté de la poésie classique, car il a su conserver son universalité spécifique. Dans ce cadre, s’inscrivent les œuvres de Sidi Abderrahman El Majdoub (…), d’autant plus que des générations de poètes qui composent leurs poèmes en tamazight ou en arabe dialectal ont généré des expressions populaires d’une richesse infinie (…).

   Ibn Khaldûn a mentionné la façon selon laquelle a été traitée la poésie des Béni Hilal que les fukahas n’osaient pas codifier, et c’est ce qui a occulté les traces écrites de la langue et de la littérature populaires de cette période, telle que celle qu’a créée un des intellectuels Az-Zaghali Abu Yahia, qui codifiait les contes et les proverbes, mort en 1296 H (…). Quant au malhoune (poésie dialectale chantée), il a été créé par des poètes marocains populaires [v. soufis], parmi lesquels Al Kafif Zarhouni [poète aveugle], à l’époque mérinide, et Al Maghrawi, d’origine sahraouie, mort en 1605, dont le plus éminent était Sidi Qaddur El Alami, à la fin du XVIIIe siècle, qui a chanté l’amour soufi et Duayyef, mort en 1820… et tous sont issus de ce long lignage qui a permis à ce genre de poésie d’embrasser l’éternité[9]        



















            MUHAMMAD BEN AÏSSA

   Le fondateur de la confrérie des Aïssawa, Muhammad Ben Aïssa est un poète soufi populaire marocain d’expression arabe dialectale, né à Meknès (882-933 H/1465-1526 C) et surnommé le ‘Maître Parfait’ (Cheikh al-Kâmil). Il était originaire de la ville de Taroudant. De sa poésie dialectale prosaïque rimée, citons sa litanie rituelle scandée par le choral des danseurs et parmi ses disciples en état de transe : 

VERSET  D’OR PUR

«Ô mon Dieu prière à notre Seigneur Mohammad/
Or pur Triomphe et incommensurable Victoire/
Iris de l’œil d’une beauté éblouissante et parfaite/
Acquéreur de ce que l’intellect ne perçoit en sens/
Pour avoir déjà acquis depuis l’antique éternité/
Le soleil de la vérité rayonnant sourire de grâce/
Et la fin de la fin de la sincérité omniprésente/
Fanion de rêve cerné de lumière vue de vie doué/
De  bienfait noblesse prière irradiant son diseur/
Par ses levers dotés des vertus de la miséricorde/
De Toi ô Miséricordieux  par la francise des francs/
À Ton égard et par la part des créatures élues par/
Toi et par l’invocation des prophètes apparentés/
À Toi en Vérité et par la majesté de Ta grandeur/
L’orgueil de Ta sublime beauté de pitié et de paix/
De sorte que la Majesté s’est confondue avec Lui/
Pour gérer la Clémence quand frappe le destin/
Et décider du procès quand le verdict est exécuté/
Et que les livres du salut ont été déjà retranchés/
Alors qu’apparaît Ta beauté en parfaite vision/
À l’œil de l’observateur et à ceux que le désirent[10]/».









      




OTHMAN ECH-CHARQI (SIDI BAHLOUL)

     Othman Ech-Cherqi (Sidi Bahaloul) est un saint poète soufi populaire marocain d’expression arabe dialectale, du 17e siècle. Il était joaillier connu. Et une  fois, le roi lui confie un dimant pour le tailler en faire une rivière (hulla) pour le nouveau prince qui allait naître. Mais en voulant le faire, il coupe accidentellement la pierre en deux. Il passe la nuit plein d’inquiétude ne sachant que dire au roi et ce qui allait lui arriver. Tout à coup, on frappe à la porte, c’était un émissaire du roi. Il s’attendait au pire et voilà qu’on lui demandait de couper le diamant en deux. Miracle, car la reine vient d’accoucher de jumeaux! C’est ce qui a inspiré au saint le poème ‘Al fiyachia’, voici un extrait :

JE NE SUIS PAS VANTARD

«Je ne suis pas vantard que faire par moi-même
 M’en faire pour ma subsistance Dieu y pourvoit
Je suis l’esclave d’un Maître apte à tout vaincre
Si je suis un vil esclave  mon Maître est puissant

Moi-même que faire je suis un esclave possédé
Toute chose est accomplie vérité sans nul doute
Mon Maître me voit mais ma vue est éclipsée
À la matrice et au sein de caillot Il m’a formé

Il dit à tout sois et tout se fait Il l’initie et refait
Il juge ses créatures et décide de Son royaume

À l’ombre de la matrice Il me forme d’un caillot
Et me dote de biens un bien de chaque espèce
Il me crée eau et nourriture et aliments variés
Je nais déshabillé et Il me couvre de vêtements

Je ne suis pas vantard que faire par moi-même
M’en faire pour ma subsistance Dieu y pourvoit
Il ne cesse de me couvrir Omniscient loué soit-il
Je n’ai moyen ni force qu’Allah haut et grand[11]».








AHMED AT-TIJANI ECH-CHARIF

     Ahmed Ibnu Mohammed At-Tijani Ach-Charif, descendant du Prophète de l’Islam par Ali et Fatima Zohra (SS), né en 1738 en Algérie et décédé à Fès, lieu de son tombeau en 1815, est un saint poète soufi populaire marocain d’adoption, d’expression arabe dialectale et fondateur de la confrérie ‘At-Tijâniyya’, au rite d’obédience malékite. Il est l’auteur de textes et prières rituels et mystiques assonancés, nommés ‘Awrâd’ (Abreuvoirs), dont ‘Jawharatu al Kamâl’ (La Perle de la Perfection). Ce dont voici un bref extrait :

«Ô mon Dieu, prière et paix sur la Source de la clémence divine/
Et L’Hyacinthe accomplie englobant le milieu des intellects et des sens/ et les lumières des univers constituées Éclair rutilant des nuées de biens/ emplissant de toutes parts les mers et les récipients de Ta lumière flamboyante/ L’Adamique Porteur de la Vérité divine dont Tu remplis Tes univers environnants et le lieu des lieux/ Ô mon Dieu, prière et paix sur la Source de la Vérité d’où émergent les rameaux des Vérités source[12]/».    


QADDOUR AL ALAMI

     Sidi Qaddour Al Alami est un saint poète soufi populaire  marocain d’expression arabe dialectale, né en 1742 et mort en 1850, à Meknès. Il y a fondé la zaouïa d’Al Alamiyyine d’où a émané et s’est répandu le malhûn (poésie dialectale populaire chantée) au Maroc et en Afrique du Nord. Il y restitue la sagesse de son expérience mystique du monde, de la vie, et des gens de la communauté autour de lui. D’où les extraits suivants :

            COMMENT NE PAS AFFECTER MON CŒUR DE LA RANCUNE DES GENS

«Comment ne pas affecter mon cœur de la rancune des gens
Comment ne pas m’affliger ô malheur des titres de propriété
Comment après mon expulsion pouvoir affronter les publics
Au Haouz et au Bou Taîba où j’ai acquis tellement de butins
Soleils de ma vue les nobles pusillanimes les plus précieux
Je suis par Allah à cause de leur séparation plein de regret
Comment échappera-t-il celui qui m’a fait la risée des gens
Comment sera indemne celui qui me laisse perdu et errant
Mes protecteurs mes proches ma famille mes plus chers amis
Ma séparation d’eux m’est au cœur si difficile injurieuse

Que cette honte par vous cesse ô hommes saints de Meknès
Ma maison est perdue dans votre sanctuaire ô gens de bien
Ma cause et ma perte totale est ma confiance dans l’homme».

Ô CELUI QUI M’A MIS À L’ÉPREUVE GUÉRIS-MOI

«Ô Celui qui m’a mis à l’épreuve guéris-moi par Ta grâce
Allège mon fardeau qu’il se délie et détende mes muscles

Ô Celui qui est présent à tout appel en cours de détresse
Que sublime soit notre Maître l’incomparable Toi le Haut
Viens à mon secours dissipe mon mal  je rejette les périls
Mon esprit se tranquillise et mon cœur devient insouciant
Où donner de la tête pour  qui tous les moyens ont failli
Celui dont le divan était devenu débordant de tristesse
Ô mon Dieu par le biais des Prophètes et des Messagers
Et par ô mon Maître l’entremise de tout saint pris à part
*****
Si tu sollicites sollicite un Maître qui n’est guère avare
Généreux à celui à qui Il donne Ses portes sont ouvertes
N’est que noblesse à celui qui invoque un Bienfaiteur
Car qui tant sollicite sa sollicitude finit par être exaucée
Qui jamais n’oublie ne s’endort ne manque d’attention
M’a affublé de sa satisfaction d’un habillement complet
Il m’a attribué un don achevé une sagesse et une raison
A élevé mon rang et ne m’a guère privé de triomphe
Que  tous les sceptiques en sont demeurés stupéfaits[13]».

  


















LARBI AR-RAHOUI AL FILALI

     Al Haj Larbi Ar-Rahoui Al Filali (de son vrai nom Haj Larbî Sossé Alaoui), né à Fès, à la fin du XIXe et au début du XXe siècle,  sous le règne du roi Hassan Ier (1873-1894) et celui de Moulay Abdelaziz (1894-1907),  est un poète soufi populaire marocain d’expression arabe dialectale. Il était rahwî (meunier), avant son éclipse de Fès, à l’insu de son père Mohamed et de son frère aîné Mehdi, dont le moulin à eau était au quartier Berrajine (ou Bellajine), dans l’ancien médina de Fès. Il était adepte de la confrérie Hamdûchiyya et Aïssawiyya. Il a composé des poèmes dédiés au Prophète Mohammed (PS) et à cheikh Al Kâmil patron de la confrérie Al Aïssawa, ainsi qu’à l’invocation divine. Voir les extraits suivants :

VOICI LA NAISSANCE DE LA SOURCE DE CLÉMENCE

«Voici la naissance de la source de clémence
Le Prophète Hachémite l’Arabe le Mecquois
La lumière du salut l’Imam de la communauté
Le Soleil du grand  jour le marié  de rang royal
À Son anniversaire l’obscurité s’est dissipée
Et s’est parfumée d’une l’ambre musquée».

À CELUI QUI EST AÏSSAWÎ

«À celui qui est adepte Aïssawî voici le mois
Du Mûlûd lève-toi pour visiter au sanctuaire
L’Hôte de Maître Mûlay Mhamed le saint
Ben Aïssa le saint au secret sur les deux rives».

JE N’AI NI FORCE NI EFFORT

«De force je n’ai ni pouvoir ni puissance
Ni mesure face au destin ni expédient
Qui m’a intimé patience et résignation
Dissipera les soucis de mon moi enlisé
De moi l’appel de Toi le consentement
La satisfaction d’un besoin sans retard
Par Allah je n’ai débuté cette imploration
Que convaincu de Ta capacité sublime
De me donner ce que j’ai requis cette nuit[14]».
  












 
SAINTS POÈTES SOUFIS   
POPULAIRES
BERBÈRES ET SAHRAOUIS
D’EXPRESSION ARABE
CLASSIQUE AMAZIGHE ET
HASSANIE AU MAROC
ET AU SAHARA









     Parallèlement, la diversité linguistique des saints poètes soufis populaires marocains arabes les a répartis en poètes de souche arabe d’expression arabe classique et dialectale, et en saints poètes populaires marocains de souches berbère et sahraouie  d’expression arabe classique, berbère et hassanie. C’est ce que souligne un article de Roaaad : «La poésie populaire tant qu’en arabe dialectal [v. classique], qu’en amazighe révèle des traits essentiels même si elle chante l’amour ou les saints ou les confréries, elle relate les espérances et les événements,  son caractère ambulant et nomade, et cela revient à la situation du poète en imitant Al Majdûb (l’illuminé  errant) dont font preuve la poésie amazighe [et hassanie en autres][15]».  

















SAINTS POÈTES SOUFIS  
POPULAIRES
BERBÈRES D’EXPRESSION
ARABE CLASSIQUE
 AU MAROC












ABD ER-RAHMAN EL MAJDOUB

     Sidi Abd  Er-Rahman El Majdoub Es-Sanhaji  Doukkali est un poète soufi populaire berbère marocain d’expression arabe dialectale. Beaucoup des vers de ses poèmes sont connus à travers le Maghreb et sont la source de beaucoup de proverbes. Il a vu le jour à Tit Moulay Abdallah, d’une famille berbère, sur la côte atlantique, entre El Jadida et Azemmour. Il a vécu durant la montée de la dynastie saâdienne (1554-1659) et sous le règne de Mohamed Ach-Cheikh (1540-1557) et Abdellah Al-Ghâlib (1557-1574). Il est mort à Merdacha, Jbel Aouf. Sa tombe est à Meknès, près de Bab Aïssa, qui reçoit beaucoup de visiteurs chaque jour. De sa poésie citons ces aphorismes pleins d’une sagesse lumineuse:

LA VIE ET LA MORT AU MAROC  DÉSERT

«Je me pointe à Sarsar
Je vois le Maroc désert
La vie juste à Meknès
À Fès vivre et mourir».

L’INSOUCIANCE FACE À L’INSTABILITÉ DU MONDE

«Ne pense ne gère ne porte souci toujours
L’astre n’est pas cloué ni le monde résident».

IL M’ONT VU NOIR COUVERT

«Ils m’ont vu noir couvert
Et pensé que je suis vain
Or je suis tel un livre écrit
Qui contient tant d’utilités
J’ai acquis du temps cherté
Et apporté dire en quatrain
Celui à qui Dieu a donné
Dit je le dois à mes bras
J’ai poussé un cri attendri
Qui a réveillé qui dormait
S’éveillent les cœurs tendres
S’endorment les cœurs bêtes
Tout se mêle et ne se clarifie
Et sa lie flotte sur son onde
Des chefs élus sans mérite
Sont les causes de sa viduité
Le bienfaiteur congratule-le
De joie remercie-le toujours
Et le malfaiteur délaisse-le
Son acte lui revient en amende
Tout bavard est insipide
Il apporte à soi son deuil
Mérite un coup de rasoir
À lui faire voir les molaires
Le mal à nul n’est injuste
Sauf à qui à soi se l’attire 
En hiver il dit c’est froid
En été il est au sommeil
J’ai tapé des deux mains
Et pensé une heure au sol
J’ai trouvé que le peu use
Et chasse de l’assemblée
La chéchia  incline la tête
Et le visage rasé s’illumine
L’attifé s’assoit au monde
Le nu doit nous quitter[16]».







EL HAJ MOHAMED EL HABIB

    EL Haj Mohamed EL Habib El Idrissi, né au douar Aït At-Tâleb Ibrahîm, dans la tribu Aït Malek Al Hachtûkiyya, vers 1285 H/ 1817 C, est un saint poète soufi populaire berbère marocain d’expression arabe classique. Son père meurt en laissant encore enfant à un village près de Biogra  à Hachtouka, où son grand-père s’est installé et a reçu, malgré sa pauvreté, une saine et excellente éducation. La vie du savant EL Haj Mohamed EL Habîb était entièrement consacrée à la résistance et à la guerre de libération de la patrie et l’Islam en compagnie du Cheikh Ahmed El Hiba, à Tiznit, en 1330 H/ 1912 C, à Marrakech et le remplace à Kardous, avant de se réfugier chez les Aït Ba Amrane.  De sa poésie mystique, citons notamment :
      
À TOI MESSAGER D’ALLAH JE ME PLAINS

«À toi Messager d’Allah je plains mes désirs/
Nous en espérions voir réaliser toutes les fins//
La plus sublime d’entre elles est ta visite qui/
Sauvegarde ses pratiquants des sombres périls//
Et une cohabitation en entière respectabilité/
De votre bonté éclatante le plus haut des rangs//
Et des subsistances de chasteté et de décence/
Et aisance de vie en faveur des gens de talents//
Enseigner le droit musulman et l’inculquer à/
Ceux qui sont fidèles le plus pur des acquis//
Et se servir de ce monde et cette foi autant/
Je vais quêter guide de la meilleure doctrine//
En délaissant  par Allah l’écho que tu ne voies/
Sur la voie de la vérité l’erreur des ténèbres//
Et protégeant mon être du hardi de l’injuste/
Inique  si oppressif vainqueur par injustice[17]//».
  

















                                                                                 




SAINTS POÈTES SOUFIS
POPULAIRES
BERBÈRES D’EXPRESSION
                                    ARABE DIALECTALE AU                                        
                                 MAROC                                  












LAKHDAR BEN KHLOUF

    Sidi Lakhdar Ben Khlouf, saint poète soufi populaire berbère marocain d’expression arabe dialecte, est né au XVe siècle dans la tribu des Maghraouas, l’une des premières tribus à s’islamiser, au Tafilalet, au Sud du Maroc. Il est connu en Algérie, en Tunisie et en Lybie, au XVIe siècle. Il meurt à l’âge de 125 ans, laissant quatre garçons et une fille auxquels il transmet son message à travers un poème ‘El mout lahghatni, ouel-ard et barda’ (La mort m’atteint, et la terre est froide). De sa poésie, citons :

L’INDISCRET DOIT S’OCCUPER DE SES AFFAIRES

«L’indiscret doit s’occuper de ses affaires/
Qui s’occupe d’autrui est de race satanique//
Dieu l’exproprie de toutes sortes de biens/
Lépreux  il aura  toujours un rang inférieur//
Sa langue ne respecte nullement sa bouche/

Songe à la mort et à la tombe ô bonhomme/
Combien d’insouciants se sont alors repentis//

Combien d’insouciants t’ont en fait précédé/
Ils ont donc sombré dans l’océan de l’Enfer//
Pourquoi ne t’occupes-tu pas de ta religion/
Et t’épargnes-tu pas alors ces turpitudes//
Ta dernière heure viendra au bon moment/
Ta finalité est le voisinage des tombeaux//

Les gens sensés ont tous obtenu leur butin/
Alors qu’en public tu te démènes et souffres//  

Les chevaux des vainqueurs sont hennissants/
Contournant bassins, jardins et les vergers//
Combien d’insouciants se sont alors repentis[18]











MOHAMED BEN DAM AL AZEMMOURI

    Sidi Mohamed Ben Dam Al Azemmouri  est un saint poète soufi berbère marocain d’expression arabe classique et dialectale, né au début du XIXe siècle, dans la ville d’Azemmour (El Jadida) et mort à Médine (au Hedjaz), en 1284 H/ 1867 C. Il a pratiqué le soufisme, suivant confrérie moukhtarite, tout en restant attaché aux  confréries Ouezzanide  et acéride.  Ses poèmes sont recueillis dans les ouvrages comme : «Hdîqatu al Azhâri fî Muatamidy mina al Akhabâr» (le Jardin des fleurs sur mes références en nouvelles), «Al ialâm biman halla Murrâkucha wa Aghmâta mina Al Aalâm», (Chronique sur les célébrités ayant résidé à Marrakech et Aghmât) et « Ar-Rihlatu al Hijâziyya» (Le périple hedjazien). De sa poésie soufie, citons notamment :

CONDOLÉANCE

«La mort de notre maître au rang sublime/
Avant qu’on ait entendu l’appel à la prière//
Le salut des mondes le père des lumières/
Le pôle de l’existence et l’élite des bons//
Notre seigneur notre guide al Moukhtar/
Notre professeur notre imam visionnaire//
Le remerciement devance ce qu’il a récité/
Pour lui nos louanges noble et haut soit-il//
Il est Notre seigneur Ahmed Al Bakaï/
Descendant du noble Calife Abu Al Alaï//
La jacinthe du savoir la perle de coquille/
L’aisance du savoir l’arbre de noblesse//
Le pôle des gens le soutien des nobles/
La caverne des gens l’appui des veuves[19]//».
























SAINTS POÈTES SOUFIS
POPULAIRES
BERBÈRES D’EXPRESSION
TAMAZIGHE
 AU MAROC













    À propos des saints poètes soufis populaires berbères marocains d’expression amazighe, il y a lieu de rappeler avec Ahmed Omari citant Roger Chaban : «Les hommes des sommets ne sont pas frustes, mais simples, au sens le plus intelligent et le plus élevé qui soit. Dans le grand large perpétuel de leurs hautes vallées où aucun écran moderne ou agitation factice ne leur cachent jamais leurs valeurs essentielles. Ils restent dans le balancement paisible de la vie de chaque jour, intégrés au grand rythme  naturel… Ils chantent avec humour, amour, gaillardise ou tendresse les astres et la nature, leurs travaux…  le plus admirable enfin est que la verve poétique de ces montagnes n’est pas rude comme leur terroir mais qu’ils savent manier un art infiniment gradué où, le ciselé et la vigueur du trait se fondent, quand nécessaire, dans une exquise délicatesse de touche [20][mystique]».  En témoignent spirituellement :  






SIDI HMAD OU MOUSSA

    Sidi Hmad Ou Moussa al Jazûlî As-Samemlâlî est un saint poète soufi populaire berbère marocain d’expression arabe classique, né vers 1460, chez les Id Ousemlal, dans l’Anti-Atlas. Il avait 55 ans lorsque les Portugais ont débarqué à Santa Cruz (à Agadir) et Cap Ghir. Il devient résistant contre l’occupant et adopta la méthode du gymnase dont ses adeptes se font les champions en tant qu’arme physique contre l’ennemi. De sa poésie, on rapporte cette tirade qu’il fait contre une faute de grammaire arabe que lui a reprochée un cheikh de Taroudant :

LA LANGUE ET L’HOMME PIEUX

«Voilà que j’ai mis l’accusatif sans savoir la grammaire !
La langue que seule vocalisent les mots, celle-ci périra
Allah veuille qu’elle soit sauvée au jour du rassemblement
À celui qui n’a pas de pitié à quoi servira la grammaire
Quel tort une langue barbare fera-t-elle à un homme pieux?»

À SIDI MOHAMED BEN ABDALLAH
(EN 1557)

«Ô Arabes ! Ô berbères !  Ô plaines et montagnes !
Obéissez au Sultan Abdallah n’ayez querelle avec lui».
LE MÉPRIS DU MONDE

«Celui qui regardera là entrera au Paradis
Nul n’accomplit son affaire en ce monde
Et nul n’y atteint non plus donc son désir
Quel malheur d’être l’esclave de l’ici-bas
Quel malheur d’être l’esclave de l’argent[21]».




  










HAMMOU OU NAMIR

     Sidi Hammou Ou Namir est un saint poète soufi populaire berbère marocain d’expression amazighe, du XVIe siècle, né à Aoullouz et mort chez les Iskrouzen, dans le Sous. Il est le patron des chanteurs et n’a pas laissé une œuvre écrite et probablement plus personne ne saurait réciter ses poèmes aujourd’hui. Certains de ses longs poèmes ont été recueillis dans certains ouvrages. En traversant l’Atlas par Aoullouz, il chante ses craintes et ses espérances :

AH ! MA MÈRE MISÉRICORDIEUSE!

«…Ah ! ma mère miséricordieuse,
enfin je suis arrivé à être un taleb!
Avec quelle fierté je me promène
mes tablettes entre mes mains.
Mais la chanson sur moi descend,
Et mon érudition me profite peu.
Avec les maîtresses de boucles
D’oreilles. Dois-je revenir à Ouijjan,
à Tiki-ouin et à Ighli Mallan, là
où j’ai vu ces adorables gazelles,
reposant là sur leurs couches ?
C’est un spectacle qui vaut des
Quintaux d’or ! Quand la caravane
se fatigue, il faut qu’elle repose.
Si le moulin travaille lentement,
qu’on ajoute de l’eau dans le
ruisseau. Si l’amitié se refroidit,
au bout du compte lâche-la !»

CELUI QUI N’A PAS D’AMI

«Qu’il ne dise plus qu’il a passé sa vie,
Celui qui n’a pas d’ami,
Parce que la vie, ce sont les amis qui la
font passer.
Un cœur quand il est brisé, qui le guérira,
Si ce n’est, d’un ami, la parole ou le rire ?
Le laurier-rose est amer. Qui, jamais, en
Le mangeant, a trouvé qu’il était doux ?
Je l’ai mangé pour mon ami. Je ne l’ai
Pas trouvé amer.
Que le fusil ne soit jamais loin de la
Balle, et les yeux peints de l’antimoine.
Et le cœur loin de ses amis
Jusqu’à ce qu’il entre sous terre[22]».








SAINTS POÈTES SOUFIS
POPULAIRES
SAHRAOUIS D’EXPRESSION
ARABE CLASSIQUE
DIALECTALE ET
HASSANIE AU MAROC












    Pour ce qui est des saints poètes soufis sahraouis populaires marocains d’expression arabe classique, dialectale  et hassanie, le site Bakrim relève notamment : «Il y a toujours eu un lien entre le Nord du Maroc et son Sud saharien. L’histoire en témoigne ainsi que d’un lien culturel. Les habitants du Sud du Maroc, le Sahara, parle langue arabe. Leurs poèmes [même mystiques] sont dans la langue qu’on appelle ‘Chear Alhassani’, ‘la poésie hassanite’(…). Les habitants de cette région du Maroc sont musulmans de religion et les rois qui ont gouverné le Maroc sont issus du Sud marocain saharien.  Le lien s’est fait aussi par la musique. C’est un moyen pour les villageois d’accompagner la poésie [souvent mystique] avec leurs chants et rythmes et parfois avec des instruments de musique locaux come ‘l‘oud’ [le luth], la guitare et les traditionnels rythmes (…). On ne trouve pas un festival national ou religieux [soufi populaire] où cette musique [v. cette poésie des saints soufis populaires] n’est pas représentée[23]













SAINTS POÈTES SOUFIS
POPULAIRES
SAHRAOUIS D’EXPRESSION
ARABE CLASSIQUE
AU MAROC











AHMED BEN MOUSSA KARZAZI

    Le saint poète soufi populaire sahraoui marocain d’expression arabe classique, Cheikh Ahmed Ben Moussa Karzazi est né en 863 H/ 1443 C, à Seguia El Hamra (Rio de Oro), au Sahara marocain. Il fait ses études à Fès (en 949 H/ 1529 C) et à Miliana (959 H/ 1589 C), avant de revenir à  Seguia El Hamra Seguia El Hamra, au-delà du Souss, pour rencontrer Sidi Ahmed Laâroussi (m. 1002 H/ 1593 C), qui a été son maître éducateur, puis à Touat, chez cheikh Sidi Moussa Ben Massaoud Tasfaouti  (m. en 968 H/ 1543 C), son maître en vision mystique. Après quoi, il retourne à son pays natal (en 908 H/ 1483 C), où il fonde sa fameuse zaouïa en vue de répandre la science, recueillir les démunis et les passagers. Il meurt, en 1013 H/ 1620 C, à l’âge de 90 ans. De sa poésie mystique, citons en particulier :

J’AI VU MON DIEU PAR L’ŒIL DE MON CŒUR

«J’ai vu mon Dieu par l’œil de mon cœur/
Et je Lui ai dit avec certitude Toi c’est Toi//
Toi qui détiens la possession tous les lieux/
Partout où se trouve le lieu tu trouves Toi//
Il n’y a pas de lieu émanant de  Toi un lieu/
De sorte que l’illusion sache comment Tu es//
Dans le néant le néant de l’anéantissement/
Et dans l’anéantissement Tu T’es trouvé Toi[24]//».  




   















CHEIKH MAÂ EL AÏNAÏN

     Le saint poète soufi populaire sahraoui marocain d’expression arabe classique, Cheikh Maâ El Aïnaïn, de son vrai nom Mohamed Al Mustapha, dont le son père Cheikh Mohamed Fadel Ben Mimine, et la mère ‘Man’ Bent El Maalûm, est né en 1246 H/ 1878 C et mort en 1328 H/ 1910 C. Il a laissé 300 ouvrages touchant tous les domaines du savoir de son temps et a fondé un mouvement de résistance qui a mis à rude épreuve le colonialisme étranger au Sahara et au Maroc. De sa poésie mystico-érotique, citons cet extrait :

J’AI PASSÉ LA NUIT LE CŒUR DÉCHIRÉ D’AMOUR

«J’ai passé la nuit le cœur déchiré d’amour/
Et de brûlure d’envies je l’ai passée incliné//
Je l’ai passé d’un feu attisé  dans un paradis/
Le paradis d’un souvenir ravisant l’oublieux//
Se dégage d’elle le musc d’une fille de gazelle/
Si le spectre tend à le rendre et les malheurs[25]//».


AHMED EL HIBA MAÂ EL AÏNAÏN

     Ahmed El Hiba Maâ El Aïnaïn, fils du Cheikh Maâ El Aïnaïn, est un saint poète soufi populaire sahraoui marocain d’expression arabe classique, né à Seguia El Hamra, en 1338 H/ 1875 C et mort en martyr, à Kardous, près de Tiznit, en 1292 H/ 1919 C, en poursuivant la lutte, entamée par son père, contre le colonialisme français, englobant la Mauritanie et le Maroc. De sa poésie dédiée au Prophète Mohammad (PS), citons ce poème :

 LUMIÈRES MAHOMÉTHABNES

 «J’ai arrêté la coulée des larmes qui fusent et se répandent/
Et se changent en agate après avoir été comme des perles//
Et échange pour moi la passion de l’écart et de la tristesse/
Le sommeil de l’assoupissement en insomnie et en veille//
Et m’envoute un casuel du a  à changer en un casuel du o/
Ce qui ne devait jamais être ni casuel du o ni casuel du i//
J’avais un intellect soigneusement gardé et je l’ai induit/
Plut à Dieu que je ne l’eusse égaré et qu’en est-il advenu//
Venez lire en moi ce qu’est l’amour et la passion de l’âme/
Ce qu’est l’adoration qu’ils sont tous doux et le plus amer//
Que se rafraîchisse ce qu’éprouve l’amant de feu ardent/
Et s’enflamme de son rafraîchissement du feu de l’enfer//
Il m’est indifférent en lui l’approche ou l’écart alors qu’Il/
a éclipsé le caché et fait paraître ce qu’il a fait paraître//
Je me passionne quand je perçois un éclair yéménite/
Et quand les branches se balancent au zéphire de l’aube//  
Et mon cœur à l’Est hedjazien plein de rayonnement/
Y a-t-il  pour eux une rencontre et si elle se fait se brise//
Il me manque de rappeler mon Bienaimé Mohammed/
Si des peuples ont manqué d’humilité et de pudeur[26]//».
  






   















SAINTS POÈTES SOUFIS
POPULAIRES
SAHRAOUIS D’EXPRESSION
HASSANIE  AU MAROC














AHMED BEN MOUSSA KARZAZI

    Le saint poète soufi populaire sahraoui marocain d’expression hassanie, Cheikh Ahmed Ben Moussa Karzazi, déjà cité plus haut en langue arabe classique, a aussi composé une poésie en langue hassanie, assez proche de l’arabe dialectal marocain. En voici l’exemple, dans l’extrait spirituel et mystique suivant :

PRIÈRE SUR AHMED AU SUBLIME NOM

«Prière ô notre Grand Maître/
Sur Ahmed au Sublime nom//
D’une prière complète et paix/
Ô  notre bien Porteur du Sceau//
Qui Dieu aime doit L’honorer/
Il sera pour la foi un gardien//
Il n’est tel la pierre de rivière/
Mouillée et son cœur tout sec//
Qui n’a point vu ne peur conter/
Ce qu’il a vu d’où nous apporter//
De l’absence allant et percevant/
Derrière les voiles nous fait signe//
De par mon Seigneur ô mon Dieu/
Je n’ai vu marché qui me plaise//
De celui qui vent je suis l’acheteur/
Qui s’enquiert de ce que je possède//
Nos Saints qu’on proclame la vérité/
Les gens de l’égarement l’ont reniée//
Notre rendez-vous au foyer du Juste/
Chacun recevra le lot de ses actes//
Le don du Généreux est sans peine/
Ce qu’Il aime  ce qu’Il veut lui-même//
Nous avons vu que la peine est vaine/
Sauf ce que lui concède son Maître//

Qui ne raconte ont dit les Saints/
Retour de qui veut la guérison/
Et enflamme les feux du cœur/
Guérit son mal en un clin d’œil/
Le marché est plein de ses Gens/
Jusqu’à le voir conforme à la Loi/

Priez sur Celui qui est né orphelin/
Celui qui est la perle des orphelins//
Qui est le Lieu de la glorification/
Le Hachémite le Père de Fatima[27]//».

 AHMED LAÂROUSSI

    Le saint poète soufi populaire sahraoui marocain d’expression arabe classique, Cheikh Sidi Ahmed Laâroussi, descendant du prophète Mohamed (PS), par Ali et Fatima, est né et mort au Sahara marocain (1438-1593). Il est enterré au Seguia El Hamra, à 30 km de la ville Smara.  Il était le disciple, à Meknès, de Cheikh Sidi Abd Er-Rahman El Majdoub, de la confrérie Al Jazouliyya à Marrakech et du Cheikh Abou Al Azm Rahal El Kouchi, connu sous le nom d’El Boudali. Il quitte Marrakech vers le Seguia El Hamra, à la suite de la rude épreuve imposée aux zaouïas, sous le règne du Sultan saâdien Mohamed Cheikh (1540-1557), dit le sultan El Khal (le sultan noir). De sa poésie mystique militante citons : 

MES NOBLES MIENS L’HUMILATION
N’EST PAS MÉDISANCE

«Mes nobles miens l’humiliation n’est médisance
Ceux qui tirent le rabab l’étirement vers la marge
J’ai quitté mes propres habits et endossé sa livrée
Et me suis imbibé de parfum en musc et aromate
Et arrive le tyran en s’appuyant sur la médisance
Et je l’ai frappé du sabre bleu d’origine rhinienne
Et laissé le sang de son artère aorte couler à flots
Ne sachant ô mon fils ni sa perte ni son malheur[28]».





















TABLE DES MATIÈRES

Introduction                                                                            2

POÈTES SOUFIS POPULAIRES
D’EXPRESSION ARABE
CLASSIQUE AU MAROC
ET AU SAHARA                                                                  5


POÈTES SOUFIS POPULAIRES
D’EXPRESSION ARABE
CLASSIQUE AU MAROC                                                   7

Abdesalam Ibnu Machicich Al Alami                                        8
Abu Al Hassan Al Musaffir As-Sebti                                       10
Larbi Derkaoui                                                                        13
Mohamed Al Harrâq                                                                16
El Larbi Ben Saïh                                                                    20

POÈTES SOUFIS POPULAIRES
D’EXPRESSION ARABE
DIALECTALE AU MAROC                                                22

Mohamed Ben Aïssa                                                                25
Othmân Ech-Charqi (Sidi Bahloul)                                            27
Ahmed Tijani Ach-Charif                                                          29
Qaddour Al Alami                                                                    30 
Cheikh Larbi Rahoui El Filali                                                     33                                                                                                                          


POÈTES SOUFIS POPULAIRES
BERBÈRES ET SAHRAOUIS
D’EXPRESSION ARABE
CLASSIQUE AMAZIGHE ET
HASSANIE AU MAROC
ET AU SAHARA                                                                     35

SAINTS POÈTES SOUFIS  
POPULAIRES
BERBÈRES D’EXPRESSION
ARABE CLASSIQUE AU
MAROC                                                                                   37

Abd Er-Rarahman El Majdoub                                                    38
EL Haj Mohamed Lahbib El Idrissi                                              41

SAINTS POÈTES SOUFIS  
POPULAIRES
BERBÈRES D’EXPRESSION
ARABE DIALECTALE AU
MAROC                                                                                    43

Sidi Lakhdar Ben Khlouf                                                              44
Sidi Mohamed Ben Dam Al Azemmouri                                        46

SAINTS POÈTES SOUFIS  
POPULAIRES
BERBÈRES D’EXPRESSION
AMAZIGHE AU MAROC                                                         48

Sidi Hmad Ou Moussa al Jazouli                                                    50
Hammou Ou Namir                                                                       52

SAINTS POÈTES SOUFIS  
POPULAIRES
SAHRAOUIS D’EXPRESSION
ARABE CLASSIQUE ET
HASSANIE AU MAROC                                                            54

SAINTS POÈTES SOUFIS
POPULAIRES
SAHRAOUIS D’EXPRESSION
ARABE CLASSIQUE
AU MAROC                                                                                 56

Ahmed Ben Moussa Karzazi                                                            57
Cheikh Maâ El Aïnaïn                                                                     59
Ahmed El Hiba Maâ El Aïnaïn                                                         60 

SAINTS POÈTES SOUFIS
POPULAIRES
SAHRAOUIS D’EXPRESSION
HASSANIE  AU MAROC                                                            62

Ahmed Ben Moussa Karzazi                                                            63
Cheikh Sidi Ahmed Laâroussi                                                          65                                                                                             


[1] «Les sept saints de Marrakech», www.couleurs-maroc.com , p.1.
[2] «Les sept saints de Marrakech», Op.cit., Ibid.

[3] Alarabmag : «Al Hikmatu wa as-Salâh… wa al Fannu al-Jamîl… At-Tasawufu bi al-Gharbi al-islamî», www.alarabimag.com , p.1.
[4] Wikipedia : «Abdesalam Ben Mchich Alami», www.wikipedia.org , p.1; Pr. Abdesalam Chakor : «Jabal Al Alam baïna ach-Chi’ri wa at-Târîkh», «Majallattu Kulliyyati al Âdâbi bi Titwan», N°5, 1412 H/1992 C, pp.65-66;
Rouhaniyat : «As-Salâtu al Machîchiyyatu li Qutbi al Aqtâbi mawlânâ Abdusalam Ibnu Machîch, radia Allah ‘Anhu wa qaddasa sirrahu al’adhîm», www.rouhaniyat.7olm.org , p.1.
[5] Dr. Jamal Bami : «Abu Al Hassan Al Musaffir As-Sebtî», www.amithaq.ma , pp.1-2.
[6] Wikipedia : «Moulay Larbi Derkaoui», www.wikipedia.org , p.1; Karkariya : «At-Tarîqatu al Mohammadiyyatu al fuzawiyyatu al karkariyyatu : Moulay Larbi Derkaoui», www.karkaria.com , pp.1-2.
[7] Karima Ben Saâd : «Cheikh at-Tariqati wa lisânnu al Haqîqa, sidi Mohamed Al Harrâq : 1186-1261 H», www.aljounaid.ma, pp.1-2; Cheikh Sidi Mohamed Ben Mohamed El Harraq El Hassani (1772-1845) : «Serais-tu en quête de Leïla? », www.spiritpartage.forumactif.com , p.1.
[8] Tidjania : «Sidi El Larbi ben Saïh, radidya Allahu Anhu», www. tidjaniya. com , p.1.
[9] Roaaad : «Ach-Chi’ru ach-Cha’biyyu : mudhakkirâtu ath-Thurâti al Maghribî», www.roaaad.com , pp.1-3.
[10] Wikipedia : «Aïssawa Aissaoua», www.wikipedia.org , p.1.;  «Hizbu al ibrîz li ac-Chaïkh al Kâmil Sidi Muhammad ben Aïssa, Radiya Allah Anh», www.aissaoua.ahlamountada.com , p.1.
[11] Musique Arabe : «Cheikh Sidi Othman Ibn Yahya el Cherki Sidi Bahloul et sa qasidat ‘al fiyachia’», www.musique.arabe.over-blog.com , p.1.
[12] Wikipedia : «Al Imâm Abul’Abbâs Ahmad ibn Mohammad At-Tijânî Ash-Sharif», www.wikipedia.org , p.1; Etteyssir : « Al Awrâd al kâfatu wa al Awrâdu al-Lâzimatu… », www.atteyssir.com , pp.1-2.
[13] Wikipedia : «Kaddour El Alamy», www.wikipedia.org, p.1; Montada :  «Al maknasiyya, Kaddûr Al Alamî», www.montada.echoroukenline.com , p.1; Char3 : «Sidi Kaddûr El Alamî, rahimahu Allah», www.char3-almutanabi.com , p.1.
[14] Mohmed Al Bûyahiyâwî Al Idissî Uthba : «Madmûn ‘Ad-dhikrât’ wa al qsâïd al Aïssawiyya », www.aljabriabed.net , p.3 ; Alkherat : «Al qasâïd al Aissawiyya », www.alkherat.com , p.3 ; Notice biographique de l’auteur de ces lignes.    
[15] Roaaad : «Ach-Chi’ru ach-Cha’biyyu : mudhakkirâtu ath-Thurâti al Maghribî», Op.cit., p.3.

[16] Wikipedia : «Abderrahman El Majdoub», www.wikipedia.org , p.1; Aslama : «Min Aqwâl Sidi Abderrahmân Al Majdûb», p.1; Wata : «Min rubâ’iyyati Sidi Abderrahmân Al Majdûb», www.wata.cc , p.1.
[17] Wikipedia : «El Haj El Habîb », www.wikipedia.org , pp.1-2.
[18] Musique arabe : «Sidi Lakhdar Ben Khlouf, chantre de la poésie populaire à l’échelle maghrébine », www.musique.arabe.over-blog.com , pp.1-4.
[19] Al Moajam : «Sidi Mohamed Ben Dam Al Azemmouri», www.almoajam. org , pp.1-2.   
[20] Ahmed Omari : «Témoignage sur la culture berbère marocaine», www.omari.ahmed.free.fr , p.1.
[21] Aujourd’hui ma : «Sidi Ahmed Ou Moussa, un défenseur de la paix», www.aujourd’hui.ma , p.1.
[22] Clicnet : «Hammou Ou Namir», www.clicnet.swarthmore.edu , pp.1-2.
[23] Bakrim : «Les chansons du Sahara marocain », www.bakrim76. canalblog. com , p.1.
[24] Laroussine : «Tarif Cheikh ‘Ahmed Ben Moussa Karzazi», www.laroussine.forumr.biz , p.1; Sidi Amhamed Ben Djrad : «Min rumûz cheikhina al Qutbi al Akbari sidi Ahmed Ben Mûssa al Karzazî», www.sidiamhamedbendjarad.montadarabi.com , p.1.
[25]  Youssef El Haloui : «Cheikh Maâ El Aïnaïn», www.almassae.press.ma, p.1.
[26] Al Moajam : «Ahmed El Hiba Maâ El Aïnaïn», www.almoajam.org , p.1.
[27] Sidi Amhamed Ben Djrad : «Rumûz Sidi Ahmed Ben Mûssa», www.sidiamhamedbendjarad.montadarabi.com , p.1.

[28] Ahmed Salem : «Nsabu al Wâli As-sâlih Ach-Charîf ‘Cheikh Sidi Ahmed Laâroussi», www.ahmedsalem1.wordpress.com , p.1.