LE DARWINISME SOCIAL DES POÈTES
ARABES DE TOUS LES TEMPS
Paradoxalement, il serait évident de dire, depuis l’homicide prédateur d'Abel
par Caïn (Le Coran, la Table servie, v.30, pp.111-112) que le darwinisme
social n’ait pas hanté, bien avant Charles Darwin (1809-1882) et Herbert
Spencer (1820-1903), la société des hommes à l’image de celle des animaux en
lutte pour la vie. En est la preuve parmi d'autres, les œuvres des poètes
arabes précurseurs et chantres de cette compétitivité humaine pour la survie de
tous les temps. "Dans le domaine social, le darwinisme [de Charles Darwin
– 1809-1882], selon Denis Touret, a donné naissance, au XIXème siècle, à une
théorie – le darwinisme social – dont le représentant principal est l'anglais
Herbert Spencer [1820-1903] (…). Le darwinisme social affirme que la
compétition, la lutte pour la vie, affecte, à l'intérieur de l'espèce humaine,
les différents groupes sociaux qui le compose (familiaux, ethniques, étatiques)
de telle sorte que des hiérarchies se créent, qui sont le résultat d'une
sélection sociale qui permet aux meilleurs de l'emporter [de survivre]." –
"Herbert Spencer (1820-1903) : Darwinisme social", www.denistouret.fr
, p.1. Ainsi est-il
possible de relever chez les poètes arabes de tous les temps les traits du
darwinisme social suivants :
I- LES TRAITS
DES ÉCRIVAINS GRÉCO-LATINS ET ARABES PRÉCURSEURS DU DARWINISME SOCIAL CHEZ
POÈTES ARABES DE TOUS LES TEMPS :
Il va sans dire que les traits du darwinisme social chez les
poètes arabe de tous les temps avaient eu des racines chez les écrivains tant
gréco-latins qu'arabo- musulmans. En ce sens, il faut noter :
1- LES TRAITS DES ÉCRIVAINS
GRÉCO-LATINS PRÉCURSEURS DU DARWINISME SOCIAL ET POÈTES ARABES DE TOUS LES TEMPS :
Parmi les principaux les traits
du darwinisme social et les poètes arabe de tous les temps, il y a lieu de
remarquer que l'idée d'évolution biologique remonte aux époques antiques où
certains philosophes grecs croyaient à cette idée comme Anaximandre (v. 610-
547 av. J.-C.), Epicure (v. 341-270 av. J.-C.) ainsi que des philosophes
indiens tel Patanjali (IIe s. av. J.-C.). –"نظرية
التطور" , www.wikipedia.org, p.1. A ce sujet Martin Godon indique
que "les penseurs de l'antiquité
gréco-latine n'ont pas élaboré l'idée d'une nature en évolution, mais certains
d'entre eux avaient tout de même émis à titre hypothétique des idées [des
traits] qui se rapprochent de quelques aspects [traits] de la théorie de
Darwin. Par exemple, plusieurs présocratiques tels : Héraclite [v. 540-480 av.
J.-C.] et Empédocle [v.490-435 av. J.-C.], prétendaient que l'univers se
transforme sans arrêt. Plus tard, Epicure et Lucrèce [v. 98-55 av. J.-C.] vont enseigner une doctrine selon
laquelle le hasard intervient d'une certaine façon dans le développement de la
nature.
Au quinzième
siècle, Léonard de Vinci [1452-1519] imagine que des transformations
successives de la terre et des êtres vivants expliqueraient la présence des
fossiles marins en montagne." – "La théorie de
l'évolution", www.cvm.qc.ca, p.1. Quant aux traits du
darwinisme social des écrivains européens précurseurs du darwinisme social, on
peut citer :
2- LES TRAITS DU DARWINISME SOCIAL DES ÉCRIVAINS
EUROPÉENS CO-PRÉCURSEURS DES POÈTES ARABO-MUSULMANS DE TOUS LES
TEMPS :
Pour ce qui est des traits
écrivains européens co-précurseurs du darwinisme social, Martin Gordon rappelle
: ""Les chercheurs qui ont élaboré des hypothèses et des théories qui
ont dû influencer la réflexion darwinienne sont assez nombreux. Carl Von Linné
(1707-1778), Buffon (1707-1788) et Georges Cuvier (1769-1832) ont tous plus ou
moins adhéré à l'idée que des transformations limitées affectaient peut-être
les êtres vivants (…). S'inspirant de la théorie de Darwin, le philosophe
anglais Herbert Spencer (1820-1903) a appliqué l'idée de survie du plus apte à
la morale, la politique et la psychologie (…). En contrepartie, le philosophe
français Henri Bergson (1859-1941) critiquera radicalement le darwinisme social
sans remettre en doute la théorie de l'évolution sur le plan biologique."
- "La théorie de l'évolution",
Op.cit., p.1. Du côté des traits du darwinisme social des écrivains
arabo- musulmans co-précurseurs des poètes arabes de tous les temps, on peut constater
:
II- LES
TRAITS DU DARWINISME SOCIAL DES ÉCRIVAINS ARABO-MUSULMANS CO-PRÉCURSEURS
DES POÈTES ARABES DE TOUS LES TEMPS :
Des écrivains arabo- musulmans co-précurseurs de du
darwinisme social des poètes arabes de tous les temps, on constate en
particulier, dans un article de Wikipédia : "De même que parmi ceux [les
écrivains] qui vécurent dans le monde musulman, au troisième et quatrième
siècles [de l'Hégire/ neuvième siècle], comme Al Djahiz et Al Masudi croyaient
en cette théorie [le darwinisme social avant la lettre]. Mais aux dix-huitième
et dix-neuvième siècles, Jean Baptiste Lamarck [1744-1829] (et Charles Darwin (1809-1882)
ont ressuscité cette ancienne théorie avec quelques modifications." –"نظرية التطور" , Op.cit.,
p.1.
Ainsi
citera-t-on Al Djahiz qui, selon Kahm Piankhy, affirmant à propos des
Ethiopiens (dont il est lui-même) : "Une couleur brun pâle, qui est la
plus heureuse et la plus appropriée. Ce sont ceux qui sont amenés juste à point
dans le sein de leur mère. Ils ne sont pas, comme les bébés tombés du ventre
des Slaves ou d'autres femmes de complexion analogue, d'une couleur située
quelque part entre blond, chamois, blême et lépreux; il n'y sont non plus trop
cuits dans la matrice jusqu'à en être brûlés en sorte que l'enfant sorte noir
et fuligineux…" – "Essai de Kahm Piankhy : L'esclavage des noirs en
terre d'Islam", www.piankhy.com,
p.1.
Par ailleurs, Kahm Piankhy
indique que beaucoup d'auteurs musulmans utiliseront la "théorie des
climats" pour justifier des aptitudes ou des inaptitudes des peuples qu'il
croient connaître. Sur ce point, ils sont quasiment tous d'accord pour ranger
les Slaves authentiques et les Africains tous en bas de l'échelle humaine (…). Lorsque
Saïd al- Andalusi (11029-1070), cadi de Tolède, parle de l'influence du climat
sur les aptitude des peuples du monde, il évoque les Slaves d'un point de vue
ethnique (…). Au sujet des Africains, à ses yeux, ils sont encore plus arriérés
encore que les Slaves et les Bulgares…" – "Essai de Kahm Piankhy :
L'esclavage des noirs en terre d'Islam", Op.cit., p.1-2.
Pour Ibn
Khaldun (1332-1406), il asserte au sujet des Noirs dans ses "Prolégomènes"
: "Au-delà du pays des Lemlem, dans la direction du sud, on rencontre une
population peu considérable; les hommes qui la composent ressemble plutôt à des
animaux sauvages qu'à des êtres raisonnables. Ils habitent les marécages boisés
et les cavernes; leurs nourriture consiste en herbes et en graines qui n'ont
subi aucune préparation; quelquefois même, ils se dévorent les uns les autres :
aussi ne méritent-ils pas d'être comptés parmi les hommes." – Ibid., p.2.
Il ressort la manifestation des traits poétiques du
darwinisme social dans les textes des poètes arabes de tous les temps suivants
:
II- LES TRAITS
POÉTIQUES DU DARWINISME SOCIAL CHEZ LES POÈTES
ARABES DE TOUS LES TEMPS :
La manifestation
des traits poétiques du darwinisme social dans les textes des poètes arabes de
tous les temps suivants est comme dit Jean-Luc Dancy : "Si la poésie
fictionne, c'est en tant que théorie : vision productrice de ses visions."
– "Lapsus judicii", in "Communications", N°26, Ed.
Seuil, 1977, p.82. Cela pourrait être saisi plus chronologiquement au niveau de
leurs textes comme suit :
1- LES
TRAITS POÉTIQUES DU DARWINISME SOCIAL DANS LES TEXTES DES POÈTES
ARABES ANTÉ-ISLAMIQUES DE TOUS LES TEMPS :
Toutefois, comme l'assure Mohamed El Fassi et alii :
"L'homme de lettres subit l'influence comme la littérature est influencée
par des facteurs culturels du pouvoir et
du milieu, des conditions sociales, politiques et religieuses qui prédominaient
leur époque (…) et l'écriture signifie l'écrivain, l'état de son monde de joie,
de tristesse, de pauvreté ou de richesse et désigne son origine digne ou indigne, s'il est
né à la campagne ou en villes. C'est pourquoi on dit : le miroir de l'homme de
lettres, c'est son origine." – "Al Adab wa al Nusus, t.4",
Casablanca, Ed. Maktabat Al Wahda Al Arabiyya, 1962, p.16. De la sorte, nous
verrons successivement les traits poétiques du darwinisme social dans :
a- Le
trait du darwinisme social marquant la sélection et de la lutte pour la survie numérique
du clan roturier au dépens du clan aristocratique guerrier chez le poète arabe
israëlite anté- islamique Samaw'al Ibn
Adiyya (1ère moitié du 6ème siècle Chr.) :
Le poète Samaw'al réplique, dans son poème
satirique, à la femme bourgeoise au clan numériquement supérieur qui traita son
clan chevaleresque de numériquement inférieur et de minoritaire. Il se spécifie
cela par le caractère guerrier des siens, ignorant la mort naturelle,
protecteurs de leur voisin et par la pureté de leur naissance légitime, noble
et chaste, comme dans ces vers pleins verve :
"Elle nous reprochait d'être peu
nombreux/ Je lui ai dit que les nobles sont peu nombreux//. Il ne nous nuit
guère d'être peu nombreux et/ notre voisin protégé et le voisin des plus
nombreux avili//. Nos âmes s'écoulent sur le tranchant des sabres/ et non sur
d'autre chose ne s'écoulent//. Purs sans tâche, secret que gardent mâles et/ femelles
qui bien nous portèrent//. Nous sommes comme l'eau des nuées, nulle sénilité/ dans notre érection et nul n'est avare parmi
nous//." – "Al Adab wa al Nusus, t.4", Casablanca,
Ed. Maktabat al Whada al Arabiyya, 1961, pp.228-229.
Ainsi, comme
le souligne Yvan Lepage : "Le darwinisme social affirme que la
compétition, la lutte pour la vie, affecte, à l'intérieur de l'espèce humaine,
les différents groupes sociaux qui la composent (familiaux, ethnique, étatique)
de telle sorte que les hiérarchies se créent, qui sont le résultat d'une
sélection sociale, qui permet au meilleur de l'emporter [démographiquement]."
– "Théorie de Spencer et le darwinisme social", www.YvanLepage@ulb.ac.be
, p.1.
b- Le trait du
darwinisme social marquant la sélection par la vieillesse et la lutte pour la défense
de l'espace vital chez le poète arabe anté- islamique Zuhaïr Ibn Abi Salma (1ère moitié
du 6ème siècle Chr.) :
Dans son
épître (Al Mu'allaqa), le poète arabe anté- islamique alors octogénaire Zuhaïr Ibn Abi Salma (1ère
moitié du 6ème siècle Chr.), se plaint de son dépérissement par la
vieillesse et ressasse la lutte que doit mener tout un chacun pour défendre son
espace vital, sans cesse menacer par les hommes prédateurs. Il en relate
notamment dans cet extrait très instructif sur la vie sauvage des hommes du
désert :
"Las des
dépenses de la vie pour/ qui vit quatre vingts ans certes las//.
Je vis la mort errer au hasard, qui elle atteint/ périt
et qui elle délaisse vivre et vieillir//. Qui se montre délicat dans maints
faits/ se fait lyncher par des crocs et fouler aux pieds// Qui ne lutte pas
pour défendre son espace vital/ se fait dévaster, et qui ne n'agresse pas se
fait agresser//. La langue de l'homme est sa moitié et son cœur/ l'autre et il
n'en reste plus qu'une image de chair et de sang//. "Al Adab wa al
Nusus, t.3", Casablanca, Ed. Maktabat Assalam, 1961, pp.30-35.
Autrement
dit, selon Philippe Deval : "Sa définition [la société humaine] est plus
compliquée à proposer (…). Mais surtout, une société ne peut être définie sans
que l'on précise sa dynamique. Elle aspire en effet, à se reproduire [contre la
vieillesse et mort] et se maintenir [la défense de son espace vital] (…). Elle
se caractérise par différents niveaux, intégrant en sein la famille, le clan,
l'ethnie…" – "LE CHOC
DES CULTURES",
Paris, ED.ESKA, 1993, p.17.
d- Le trait du darwinisme
social marquant la sélection par la dégénérescence juvénile et la lutte pour la
préservation du clan chevaleresque puritain chez le poète arabe anté-
islamique Tarafa Ibn Al Abd (542-569
Chr.) :
"Si le clan
dit : qui est le vaillant? Je crus que je/ suis visé et je ne faiblis ni ne
m'abrutis//. Je ne fréquente pas les vals par crainte/ mais dès que le clan se
déplace, je me déplace//. Si tu me veux dans le cercle des gens, tu m'y trouves/
et si tu me sollicite dans les buvettes, tu m'attrapes//. Et je ne cesse de
boire les vins de mon goût/ en vendant et dépensant mes deniers et mon legs//. Au
point que tout le clan m'expulse/ et m'isole tel un chameau vil, marqué de
goudron//. Pourquoi vois-je mon cousin Malek/ quand je l'approche me fuir de
loin?// L'injustice des proches est plus douloureuse/ sur l'âme d'un homme
qu'un coup de sabre indien//.
En ce sens,
Walter Müller- Seidel citant Nietzsche note: "Quand la lutte est à l'ordre
du jour, comme dans (…) le darwinisme social, la jeunesse est la bienvenue (…).
Les positions de Nietzsche ne font aucun doute (…), il expose ainsi sa position
: 'Les natures dégénérées sont d'une grande importance chaque fois qu'on est à
la veille d'un progrès [mutation]…il est rare qu'une dégénérescence, une
atrophie, voire un vice [délinquance, alcoolisme, gaspillage d'argent], et
d'une façon générale une défaillance physique ou morale [les us du clan], ne
s'accompagne d'un avantage en contrepartie [mort du mutant]…" –
"Critique de la science origine de la modernité et partition des cultures
dans les années 1900", www.rgi.org, pp.6-7.
d- Le trait
du darwinisme social marquant la sélection guerrière et la lutte pour la préservation de la hiérarchie
du clan prédateur et sa domination de l'espace vital chez le poète arabe anté-
islamique Amr Ibn Al Kalthoum (545-début du 7ème s. Chr.) :
"Nous
héritâmes la gloire du haut Maâdi/ nous combattîmes pour lui jusqu'à sa
matérialisation//. Nous possédons la terre et celui qui y vit dessus/ et nous
nous attaquons quand nous attaquons avec aptitude// Nous occupâmes la terre à
la rendre exiguë/ et l'eau de la mer nous remplîmes de navires// Lorsqu'un l'un
nos bébés atteint le sevrage/ les géants s'effondrent pour se prosterner à ses
pieds//.
A cet égard, il
faut marquer avec le prince anarchiste russe, Pierre Kropotkine une réserve :
"Kropotkine, sans nier la théorie de l'évolution de Darwin, y précise que
les espèces les mieux adaptées ne sont pas nécessairement les plus agressives,
mais peuvent être les plus sociales et solidaires (…). Kropotkine ne nie pas
non plus l'existence de compétition [de guerre], mais pense que la compétition
est loin de constituer le seul facteur de l'évolution, et que l'évolution
progressiste est plutôt due à la socialisation et à l'entraide mutuelle [v. le
clan du poète Amr]". – "Darwinisme social", www.wikipedia.org
, p.4.
Par ailleurs, il est également possible
d'observer la manifestation des traits poétiques du darwinisme social dans les
textes des poètes arabo- islamiques de tous les temps, en relevant :
2. LES TRAITS POÉTIQUES
DU DARWINISME SOCIAL DANS LES TEXTES DES POÈTES
ARABO- ISLAMIQUES DE TOUS LES TEMPS :
Pour ce qui est des traits
poétiques du darwinisme social dans les textes des poètes arabo- islamiques de
tous les temps, il y a lieu de rappeler le thème de l'anthropophilie animale
avancé par Frans de Waal dans Wikipédia : "Le primatologue neerlando-
américain Frans Waal, qui a étudié au début du XXIème siècle le
sentiment d'empathie [d'anthropophilie] chez les animaux, en déduit que le
darwinisme social ' est une interprétation abusive : oui, la compétition [la
lutte] est importante dans la nature mais, on l'a vu, il n'y a pas que cela.
(…) Nous sommes aussi programmés pour être empathiques, pour être en résonance
avec les émotions des autres…" - "Darwinisme social", Op.0cit., Ibid. Illustre cet aspect
anthropophile :
a- Le trait du
darwinisme social marquant l'anthropophilie animale et la lutte pour la défense de l'espace vital
chez le poète arabe arabo- islamique Ibn Rumi
(870-913 Chr.) dans son poème satirique :
"Dans ta face, O Amr il y a un allongement/ et dans la face des chiens il y a un
allongement//. Les défauts du chien sont tous en toi unis / il les abandonne,
mais tu ne les abandonnes point// Il y a en lui des choses utiles/ Dieu t'en a
privés et ainsi que le Prophète//. Le chien est fidèle et en toi il y a
traîtrise/ et tu es à un degré plus bas de son indignité//. Il peut défendre
les troupeaux/ mais tu ne défends guère ni tu ne triomphes//." - "Al
Adab wa al Nusus, t.4", Op.cit., p.264.
Il s'agit en fait dans l'anthropophilie animale
du rôle de la morale dans la loi de la sélection naturelle et sociale chez
l'homme que Darwin attribue à la civilisation, fondé sur l'éducation, la
raison, la religion, et la loi morale en concluant : "Si importante qu'ait
été, et soit encore, la lutte pour l'existence, cependant, en ce qui concerne
la partie la plus élevée de la nature de l'homme, il y a d'autres facteurs plus
importants. Car les qualités morales progressent, directement ou indirectement,
beaucoup plus grâce aux effets de l'habitude, aux capacités de raisonnement, à
l'instruction, à la religion, etc., que grâce à la Sélection Naturelle; et ce
bien que l'on puisse attribuer en toute assurance, à ce dernier facteur les
instincts sociaux, qui ont fourni la base du développement du sens morale [v.
anthropophilie]." - "Darwinisme social", Op.0cit., p.3.
b- Le trait du
darwinisme social marquant l'anthropomorphie animale et la lutte pour la défense de l'espace vital
chez le poète arabe arabo- islamique bédouin Ali Ibn Al Jahm (788-863 Chr.) dans son poème apologétique dédié
à au Calife omayyade Abd el Malik ibn Marwan :
"Tu es
comme le chien à conserver l'amitié/ et le bouc à affronter les malheurs//."
Il faillit le châtier être châtier par les
gens de la cour. Mais le Calife intervint et leur dit : "Patience! Il nous
a donné de ce qu'il tient de son origine. Menez sur les bords de l'Euphrate un
bout de temps et ramenez-le moi. A son retour, six plus tard, il chanta au
calife son poème, ayant incipit érotique :
"Les yeux d'antilopes entre le pavé et
le pont/ ont possédé le charme de ce que je sais et de ce que ne je sais//."
A constater que
la "participation de l'État (le calife) n'est pas un nécessité dérivé de a
condition humaine : un individu [le poète bédouin Ibn Al Jahm] peut vivre sans
autorité supérieure [la cour du calife hostile à l'anthropomorphisme animal du
poète], et plusieurs individus peuvent vivre sans autorité supérieure. La
participation de l'Etat, quand elle se produit, se produit, est donc forcément
contrainte. (…) C'est l'essence du darwinisme social : forcer sur l'homme une
contrainte non – nécessaire, l'obliger à répondre à des critères antinaturels car
situés en dehors de sa condition [son milieu rural], imposer l'adaptation de
l'homme à des conditions arbitraires et évitables [milieu urbain], plutôt que
de le laisser s'auto- déterminer." - "Qu'est-ce que le darwinisme
social?", www.jesrad.wordpress.com, p.2.
c- Le trait
du darwinisme social marquant l'animisme anthropomorphique et la lutte pour la défense de l'espace vital
chez le poète arabe arabo- islamique Abu Tammam (803-845 Chr.) dans son poème sur
le siège d'Ammuria, prise par le Calife abbasside Al Mutassim contre l'avis des
astrologues, l'ayant fixée au mûrissement des figues et des raisins :
"Le sabre informe plus sincèrement que
les livres/ sur son tranchant il y a la limite entre le sérieux et l'enjeu//. La
blancheur des sabres plats non la noirceur des tables sur/ les bords desquels
la dissipation du doute et des suspicions//. Soixante dix mille comme des lions
de brousse ont mûri/ leurs peaux avant la mûrissement des figues et raisins//. Certes,
tu y délaissa prince des croyants/ au feu, un jour de roc et bois humiliés//
- "Al Adab wa al Nusus, t.4",
Op.cit., pp.287-288.
Là, on pourrait
parler évidemment d'animisme anthropomorphique et de lutte pour la défense de
l'espace vital chez le poète arabo- islamique Abu Tammam. "Je pose la
question avec le pressentiment, écrit Lothar Käzer, que l'expérience poétique
offre des analogies avec l'expérience animiste (…). La poésie crée un double
monde, de ses espaces, de son histoire, de ses êtres vivants (…). D'autres
types d'expériences pourraient être évoquées pour démontrer que le phénomène
"animiste" n'est pas à reléguer au magasin des accessoires
"primitifs" [du darwinisme social], mais qu'il est toujours
d'actualité, sous des formes, des intensités de volumes très variables." –
"Animisme : Introduction à la conception du monde et de l'homme dans les
sociétés axées sur la tradition orale", www.missiologie.net, p.1.
d- Le trait du
darwinisme social marquant la sélection raciale
et la lutte pour la défense de l'espace vital chez le poète arabe arabo-
islamique Abu Taiyyeb Al Mutanabbi (935-986 Chr.) dans son poème satirique
contre le roi noir d'Egypte Kafur Al Akhchidi qu'il avait glorifié auparavant
sans en être gratifié :
"Est-ce
chaque fois qu'un vil esclave tue son maître/ ou le trahit trouve en Egypte un
préliminaire//. L'eunuque devint le leader des esclaves fugitifs/ l'homme libre
est asservi et l'esclave adoré//. Les nobles d'Egypte se sont assoupis face ses
renards/ qui se sont saturés de grappes inépuisables//. L'esclave ne peut être
frère d'un homme libre vénérable/ même s'il est né dans l'habit d'un homme
libre//.N'achète l'esclave qu'accompagné d'une bâton/ car les esclaves sont souillons
et ingrats//." - "Al Nusus Al Adabiyya wa Al Qiraâ, t.2",
Casablanca, Ed. Maktabat Al Wahda Al Arabiyya, 1970, p.28.
Il s'avère ici
que le darwinisme social s'inscrivait dans la politique esclavagiste et raciale
avant la lettre chez le poète Al Mutanabbi. "Herbert Spencer, lit-on dans
Wikipédia, 'voit dans les luttes civiles
et la guerre de conquête [l'esclavage des noirs, leur accès sanglant au
pouvoir] rien moins que l'application à l'espèce humaine de la sélection
naturelle'. Spencer fournit ainsi une explication biologique aux disparités [inéglités
raciales] observées entre les sociétés sur la trajectoire prétendument unique
de l'histoire humaine : les peuples les moins 'adaptés' à la lutte pour la
survie [Kafur en Egypte, un espace vital] seraient restés 'figés' au stade
primitif conceptualisé par les tenants de 'l'évolutionnisme
anthropomorphique." - "Darwinisme
social", Op.0cit., p.2.
Quant aux
traits poétiques du darwinisme social dans les textes des poètes arabes
modernes de tous les temps, ils sont observables notamment dans ce qui suit :
3- LES TRAITS POÉTIQUES
DU DARWINISME SOCIAL DANS LES TEXTES DES POÈTES
ARABES MODERNES DE TOUS LES TEMPS
A propos des
traits poétiques du darwinisme social dans les textes des poètes arabes
modernes de tous les temps, il faut d'abord éclairer à cet l'idée de modernité
dont Walter Müller- Seidel note : "Le terme de 'modernité' est apparu pour
la première fois en 1886, à Berlin,
centre du naturalisme allemand (..). Comme pour les savants naturalistes
eux-mêmes, l'idée de progrès demeure le critère et la norme de la pensée, des
écrivains naturalistes (…). Cet attachement indéfectible aux principes du
progrès, de la causalité et de l'unicité universelle débouche sur une croyance
en la science qui caractérise tout autant les savants naturalistes que les
écrivains du naturalisme. Elle prend parfois des formes plus ou moins
religieuses; les théories de Darwin, en particulier, font souvent l'objet d'une
sorte de culte nouveau…" – "Critique de la science origine de la
modernité et partition des cultures dans les années 1900", Op.cit.,
p.2. Ainsi verra-t-on à ce sujet des
poètes arabes modernes suivants:
a- Le trait du
darwinisme social marquant la sélection naturelle par le progrès de la
modernité dans la lutte pour la survie chez le poète arabe libanais moderne
Ilia Abu Madi (1889-1957 Chr.) dans son poème satirique "L'argile"
:
"L'argile
oublia une heure qu'il était argile/ vile et devint vaniteux et se fit orgiaque/ La soie vêtit son corps, il se vanta et l'argent
remplit son sac il se rebella// O frère, ne détourne ta face de moi/ je ne suis pas charbon et toi étoile polaire//
tous mes espoirs sont-ils en terre/ et tous tes espoirs en or massif ?//. O argile tu n'es pas plus pur,
plus élevé plus noble/ qu'une terre que tu foules que tu prends pour
oreiller//. Que tu règnes ou que tu ne règnes pas tu n'es qu'un/ animal à la fois prédestiné et asservi//."
- "Al Jadid fi Al Adab Al Arabi", Beyrouth , Ed. Maktabat Al Madrasa,
1957, pp.69-70.
Dans cette
optique, on relève à propos du darwinisme social marquant la sélection
naturelle par le progrès de la modernité dans la lutte pour la survie des
humbles contre des forts dans la société humaine chez Darwin lui-même : "Douze
ans après 'L'Origine des espèces'", et alors que tout le
monde en a déjà déduit que "l'homme descend du singe" [l'argile
animal du poète Abu Madi], Darwin y soutient entre autres que l'homme est bel
et bien le produit de l'évolution, ce qui s'oppose à la doctrine créationniste :
'On ne peut plus croire que l'homme soit l'œuvre d'un acte séparé de la
création' (ibid., p.728), et replace celui-ci au sein du processus de sélection
naturelle, en dépit de son apparente supériorité évolutive 'avec toutes ses
capacités sublimes, l'homme porte toujours dans sa construction corporelle
l'empreinte indélébile de sa basse origine (ibid., p.741 [v. l'argile]." -
"Darwinisme social",
Op.cit., p.3.
b- Le trait du
darwinisme social marquant la sélection sociale par le progrès de la modernité
dans la lutte pour la survie par la volonté de puissance chez le poète arabe tunisien
moderne Abu Al Qasim Chabbi (1889-1957 Chr.) dans son poème "La
volonté de vivre" :
"Qui ne
fut embrassé par l'envie de vivre/ s'évapora dans son air et s'anéantit//. Ainsi
m'avaient parlé les êtres/ et m'avaient parlé leurs esprits secrets//. 'Si tu
aspires à un objectif/ tu te vêts d'espoir et tu écartes la prudence//. Qui
n'aime l'ascension des montagnes/ vit à jamais parmi les crevasses//. La terre
m'a dit en l'interrogeant/ mère est-ce que tu hais les hommes:// C'est
l'univers vivant qui aime la vie/ et méprise le mort qui s'anéantit//. Ni
l'horizon ne couve les oiseaux morts/ Ni les abeilles n'embrassent les fleurs
mortes//. Malheur à qui n'a envie de vivre/ de la malédiction du néant
attendu//." - "Al Jadid fi Al Adab Al Arabi", Op.cit.,
pp.10-11.
On peut
rappeler ici avec W. Seidel- Müller en l'occurrence qu' "Il s'agit dans
une grande mesure de la référence aux théories de Darwin et à l'idéologie
qu'ils introduisirent, le darwinisme social, tel qu'ont pu le propager
Haeckel et les siens (…). L'esthétique de la lutte [pour la vie chez Chabbi],
propre à la littérature naturaliste est à mettre en rapport avec le darwinisme
et le darwinisme social.(…) Chez Hauptmann également, l'univers poétique est
empreint de l'idée que la lutte est le père des choses.(…) Il nous faut ici
parler de Nietzsche (…). Dans ses premiers écrits, déjà, il oppose à
l'optimisme quant à la civilisation – un optimisme nourri par la croyance en la
science et dans le progrès…" - – "Critique de la science origine de
la modernité et partition des cultures dans les années 1900", Op.cit.,
p.2-3.
d-
Le trait du darwinisme social marquant la sélection sociale par le progrès de
la modernité dans la lutte pour la survie par la science et la volonté de
puissance chez le poète arabe marocain moderne Abu Al Qasim Chabbi (1889-1957
Chr.) dans son poème "Enfants de ma patrie" :
"Enfants de ma patrie, les peuples et leurs gens/ se
sont certes tous réveillés et vous êtes endormis//. Le temps de la vile
ignorance a passé son temps/ Et ce temps est le moment de s'instruire//. Par la
science, ils bâtirent dans les mers des logis/ et par eux ils nagèrent et
firent nager//. Par la science, leurs montures dans le ciel avancèrent/ alors
qu'ils sellèrent le dos des vents et le bridèrent//. Par la science, alors
qu'ils séjournent à l'Est/ avec qui ils veulent parler à l'Ouest, ils parlent//
Par la science, les deux camps anéantirent certains d'entre eux/ et les flèches
n'avaient guère différés entre les deux partis //" - "Al Adab wa
al Nusus, t.3", Op.cit., pp.462-463.
A vrai dire, le
darwinisme social rejoint ici l'idée du progrès et de la science porteuse de la
volonté de puissance de l'humanité moderne et facteur de sa destruction
éventuelle par la guerre, ou comme dit W.S. Müller : "Résoudre les
problèmes [du sous-développement dans le tiers-monde et le monde développé],
c'est là une notion clé de la science moderne, et l'une des grandes promesses
de cette fin du siècle précédent est qu'elle parviendra à résoudre toutes les
énigmes de notre monde. La littérature moderne se montre sceptique et ironique
à l'égard de telles promesses [v. ici le poète Ibn Brahim face à la guerre]."
- "Critique de la science origine de la modernité et partition des
cultures dans les années 1900", Op.cit., p.4-5.
e- Le trait du
darwinisme social marquant la sélection naturelle par le progrès de la
modernité et la lutte pour la survie contre le colonialisme et les guerres de
conquête chez le poète arabe algérien moderne Mufdi Zakaria (1913-? Chr.), dans
son poème "Fidèle à la promesse d'arabité"
"Va dans le Maghreb arabe, une mélodie/
dans la guitare des festivités une race//. Messager d'Orient…dis en Orient
qu'on/ est fidèle à la promesse d'arabité, nous demeurons//. Mais si en Algérie
on nous avait dénié/ nous percerons (l'unanimité) de bout en bout//. Nous
bondîmes comme des bêtes fauves et nous prîmes/ pour voie de l'indépendance
toutes les âmes//. Nous sommes en Algérie un bon peuple/ son arabité le long
des générations ferme//. Que la grande unité au cas où/ l'Algérie se libère
demeurera/." - "Al Adab wa al Nusus, t.5", Casablanca,
Maktabat Rachad, pp.572-573.
A propos du
darwinisme social et le colonialisme des temps modernes, Wikipédia évoque
notamment : "Sur le plan politique, le darwinisme social a servi à
justifier scientifiquement plusieurs concepts politiques liés à la domination
par une élite [une nation, la France], d'une masse [une autre nation, le Grand
Maghreb] jugée moins apte [par des armes plus sophistiquées]. Parmi ceux-ci, on
trouve le colonialisme (…), le fascisme, et surtout le nazisme [l'impérialisme
et la compétition mondialiste]. En effet, cette idéologie considère légitime
que les races humaines et les êtres les plus
faibles disparaissent [ou soient exploités] et laissent la place aux
races et aux êtres les mieux armés pour survivre. De nos jours, le darwinisme
social inspire certaines idéologies d'extrême droite [raciste]." - "Darwinisme
social", Op.cit., p.2.
Pour conclure, il
y lieu de dire littérairement qu'il est possible de relever chez les poètes
arabes de tous les temps les traits du darwinisme social comme dans d'autres
domaines de la société humaine en générale dont cette doctrine scientifique
semble avoir puiser ses fondements poétiques et socio- politiques avant la
lettre. Car comme le souligne sciemment Walter Seidel – Müller : "Dans son
livre "Kant et Goethe", "une contribution à
l'histoire de la vision moderne du monde", Georg Simmel soutient la
thèse qu'il s'agit de "reconquérir, sur une base supérieure, l'unité
perdue entre nature et esprit, entre mécanisme et sens intime, entre
objectivité scientifique d'une part et sens et évaluation subjective de la vie
et des choses, d'autre part (…). C'est encore plus évident lorsque l'on
considère une autre notion fondamentale cette doctrine issue de la science : la
lutte pour la vie. On retrouve ce motif [trait] de la lutte (…) dans
l'acception que lui donne le darwinisme social (…). Le rejet de la lutte, de la
victoire et de la domination sont des thèmes [des traits] récurrents de la
modernité [comme de l'antiquité arabo- islamique et arabo- moderne] en
littérature." - "Critique de la science origine de la modernité et
partition des cultures dans les années 1900", Op.cit., pp.5-6.
Dr.
SOSSE ALAOUI MOHAMMED
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