LA MAROCANITÉ DE CEUTA ET MELLILA ET
DES ÎLES
ZAFFARINES DANS LA POÉSIE MAROCAINE
ARABOPHONE ET FRANCOPHONE
En tant que
porte-parole populaire de
la lutte nationaliste du
Maroc, pour la décolonisation de toutes les parties usurpées de son territoire national, la poésie marocaine
arabophone et francophone n’a pas cessé, jusqu’à ce jour, de revendiquer la
marocanité et la décolonisation des enclaves de Ceuta,
Mellila et des îles Zaffarinées spoliées encore par
l’Espagne post-féodale et poro-franquiste, à la suite du Protectorat tripartite
franco-espagnol et international imposé au Maroc, entre 1912 et 1956.
Or, tel que l’affirme
Tzvetan Todorov la poésie nationaliste exerce un effet mobilisateur certain sur
son public d’élection: “La poésie nationaliste de combat partage avec les
autres arts [populaires] la représentation, l’expression, l’action sur le
récepteur.” – “La notion de littérature et autres essais”, Paris,
Ed. du Seuil, 1987, p.30. Paradoxalement, le retard injustifié de la
décolonisation des enclaves du Nord du
Maroc, met en cause l’Espagne coloniale post-féodale et post-franquiste faisant
fi encore de la marocanité de ces territoires, malgré les luttes séculaires et
les revendications marocaines ininterrompues, ainsi que les décisions réitérés
de l’ONU, les traités et accords passés avec le Maroc jusqu’en 2007 – Mohamed
El Alami, “Allal El Fassi, Patriarche du nationalisme marocain”,
Casablanca, 1975, pp.233-234 et “Sabtatu
wa Malîliatu wa al juzur” de Hussaïn al Majdûbî, Tanger, Ed. Chirâa,
1999, p.23. En est la preuve flagrante la visite officielle de parade, vivement
contestée par le Maroc, du roi d’Espagne Juan Carlos I, du 5-6 novembre 2007,
à Ceuta et Mellila, visant à exhumer
l’âge féodal de la Reconquista et des croisades coloniales anti-marocaines des
rois catholiques hispano-portugais, initiées par la papauté fanatique et
belliqueuse, en 1492.
C’est
ainsi que la poésie marocaine tant arabophone que francophone proclame la marocanité des presides (ou
prisons de criminels espagnols déportés) de Ceuta, Mellila et des îles
Zaffarines du Rif, encore occupés par l’Espagne coloniale post-féodale et
pro-franquiste invétérée, au nom de la nation marocaine toute entière. “La
compréhension du poème [de la poésie de combat], suggère Frantz Fanon, n’est
pas seulement une démarche
intellectuelle, mais une démarche politique. Comprendre ce poème [v.
cette poésie marocaine de combat] c’est comprendre le rôle qu’on a à jouer,
identifier sa démarche, fourbir ses armes [ses moyens de lutte anti-coloniale].
Il n’y a pas un colonisé [au monde] qui ne reçoive le message contenu dans ce
poème [cette poésie de combat].” – “Les damnés de la terre”,
Paris, Ed. Payot, 1968, p.162. Aussi verra-t-on successivement: I) La
marocanité de Ceuta, Mellila et les îles Zaffarines dans la poésie marocaine
arabophone (1959-2007), II) La marocanité de Ceuta, Mellila et les îles
Zaffarines dans la poésie marocaine francophone (1969-2007).
I- La
marocanité de Ceuta, Mellila et les îles Zaffarines dans la poésie marocaine
arabophone (1959-2007):
Compte
tenu de la position récalicitante de l’Espagne coloniale post-féodale et post-franquiste, affectant sourdemrnt d’ignorer les
luttes et revendications marocaines réitérées ainsi que les décisions de l’ONU, depuis 1960, pour la décolonisation
des territoires encore sous sa puissance administrante au Maroc: le Sahara (au
Sud) et les enclaves de Ceuta, Mellila et des îles du Rif (au Nord) du Maroc,
S.M. Hassan II souhaita vainement, en 1976, une reconnaissance raisonnable par
celle-ci de la marocanité des enclaves
marocaines du Nord, de façon similaire à
celle qu’elle fît à propos du Sahara, en 1975, au Sud du Maroc. “Je conjurai la
vieille [la post-féodale]et la jeune [la post-franquiste] Espagne, note-t-il,
de s’en remettre à l’arbitrage juridique impartial qui ne laisse aucune
rancoeur [post-Reconquista et post-franquiste], car il est rendu au nom du
Droit (…). Je suis heureux, que le bon droit ait finalement et pacifiquement
prévalu en ce qui concerne notre Sahara [en 1975]. J’ai bonne espérance qu’un
jour [proche] on reconnaîtra de même que Sebta, Mellila, les îles du Rif sont
territoires marocains. Bien loin de menacer, c’est au bon sens et à la raison,
à l’amitié aussi, que nous ne cesserons de faire appel.” – “Le défi”,
Paris, Albin Michel, 1976, p.88.
Mais,
c’est à contre-courant et à coup de mystifications démagogiques, d’allégations pseudo-géo-historiques dénigratives qu’une partie de la presse, des universitaires,
des juristes et des dirigeants espagnols pro-franquistes, nostagiques d’un
passé féodal et colonial révolu rejettent à tort la décolonisation des territoires occupés du
Rif marocain. L’étude du GEES (Groupe espagnol d’études stratégiques), parue en
2007, en est la parfaite illustration. “«L’étude », remarque Abdellatif
Mansour, porte la griffe de Carlos Ruiz Miguel, professeur de droit à
l’université de Saint Jacques de Compostelle. Les commandiaires [notamment
algériens] et les auteurs de ce texte [injureux] n’auraient pas mieux choisi
que la capitale de la Galicie, haut lieu de la mythologie chrétienne où la
dépouille de Jacques le Majeur [mort à Jérusalem vers 42 apr.-JC], fut
miraculeusement déposée [1492] pour commettre [accomplir] un parchemin aux
relents de Reconquista qui lorgne sur les rives du Sahara marocain [par
Polisaro interposé] pour faire jonction avec les Iles Canaries (…). Il [C.-R.
Miguel] rappelle lui-même [dans ce rapport]; et il signe: «L’indépendance du
Sahara [selon une visée séparatiste hispano-algérienne] aura pour conséquence
l’abandon par le Maroc de ses revendications sur Sebta et Mellila [le mythe
féodalo-franquiste, carte sur table].».” – “Le Sahara, entre Alger et Madrid”,
www.hebdo.press.ma, pp.1,4. Or, la poésie marocaine arabophone
articule parfois la marocanité de Ceuta, Mellila et des îles Zaffarines autour
du Sahara marocain, rérocédée pacifiquement au Maroc par l’Espagne
post-franquiste, en 1975. D’où d’un côté la marocanité de Ceuta chez certains
poètes marocains arabophones, cités ci-dessous.
I.1- La
marocanité de Ceuta dans la poésie marocaine arabophone (1959-2007):
En
effet, la fonction de la poésie marocaine arabophone comme moyen de propagande anti-coloniale remonte, selon
Abdellatif Laâbi, à l’époque anté-islamique. “Il est bon d’ailleurs,
assure-t-il, de rappeler que la poésie a toujours eu, dans le monde arabe, une
fonction particulière. «Le poète [de combat] reconnaissait un spécialiste
colonial de la littérature populaire marocaine, est un redoutable agent de
propagande.» Aussi, les services de renseignements coloniaux [franco-espagnols
et internationaux: 1912-1956] l’ont-ils écoutée pour prendre la température de
la colère populaire [marocaine contre leur diktat] et tenter de déchiffrer les
mots d’ordre mobilisateurs (…). Le poète est redevenu le porte-parole
[anti-colonial] de son peuple [sa marocanité]. A l’instar de ces poètesses
arabes d’avant l’Islam, il se doit d’être aux premières lignes, hurlant à la
face de l’ennemi le poème-cri de guerre [pour une totale décolonisation du
territoire national marocain].” – “La poésie palestinienne de combat”,
Honfleur, Ed. PJO, 1970, p.28. En émanent les poèmes-cris revendicatifs de la
marocanité de Ceuta, chez:
a- Allal
El Fassi (1910-1974) tels que:
-“Dhikrâ
mawqi‘ati wâdî al makhâzini, aw ghazwatu al mulûki ath-Thalâth ” (La
Commémoration de la Bataille des trois Rois, ou l’Incursion des des Trois Rois
- 1959). C’est la bataille qui mit fin à l’occupation du Maroc par les
Portugais (1574-1578). “Déjà de 1434 à 1464, rapelle M. El Alami, de nombreux
événements eurent lieu annonçant la
prochaine prise par les Chrétiens des derniers bastions arabes en Andalousie
[la Reconquista - 1492]. Au Maroc, les Mérinides, successeurs des Almohades,
étaient devenus la nouvelle proie [des croisades papales] des Portugais.
L’empire fut divisé en trois principautés indépendantes de Fèz, Marrakech et
Sijilmassa. Les Portugais, maîtres de Ceuta [1415], entreprirent une croisade
contre Tanger [1471]. Les trois sultanats proclamèrent la guerre sainte aux
Portugais et leur infligèrent un désastre [mort de leur roi don Sébastien -
1578]. L’infant don Ferdinand fut laissé en otage (1437). En 1458, les
Portugais s’emparèrent d’El Ksar Séghir. Le roi Alphonse-V du Portugal s’y
rendit en 1464 et se porta contre Tanger sans succès.” – Op.cit., p.16. Le
poème consacre la victoire marocaine des Trois Rois et prône le parachèvement
de l’intégrité territoriale au Sahara, Ceuta, Mellila et les îles du Rif,
encore spoliées par l’Espagne post-féodale et pro-franquiste au Nord et au Sud
du Maroc indépendant, depuis 1956:
+
“Grâce à vous héros de «Oued El Makhazine»/ Se répercute parmi nous aujourd’hui
la voix des minarets (…)// Ils [les
Portugais] marchèrent de Ceuta notre terre/ Sur notre terre la marche d’un
puissant querelleur// Ils nous prirent «Larache» de vive force/ Aidés par tout
niais pacifiste (…)// Le vent de la
victoire souffla vers la voie du salut/ Et terrassa Sébastien parmi ses moulins
à vent (…)// Ne pensez-vous pas que le
Sahara vous reviendrait/ Même si vous la défendiez d’armes transperçantes// Le Sahara est notre terre et
notre demeure/ Et ses fils sont nos frères et nos compatriotes.” – “Dîwân
Allâl Al Fâsî, 4” (Le recueil 4 d’Allal El Fassi), Rabat, Ed.Arissala,
1989, pp.175-179.
Puis,
le poète A. El Fassi s’adresse au souverain du Maroc pour demander au nom
l’unanimité du peuple marocain la libération de Ceuta et Mellila encore sous le
joug colonial espagnol, dans:
- “Dhikrâ mawlid an-Nâbî al karîm”
(La Commémoration de l’anniversaire du Prophète vertueux - 1961). Le poète
y considère comme un affront national le
maintien des enclaves de Ceuta au Nord du Maroc, sous la domination
anachronique espanole, à l’ère de la décolonisation généralisée préconnisée par
l’ONU, en entonnant:
+ “Ô, souverain qui héritiez la sagesse et la bravoure/ Et enrichissiez
la vie de vertu (…)// L’intégrité territoriale ne cesse de vous solliciter/
Conduisez-nous à elle, nous en serions la rançon (…)// Restituez au pays Ceuta et Mellila/ C’est un
affront leur maintien dans l’affliction.” – Op.cit., p.232.
Il en
vient à
revendiquer la libération des
frontères grignotées à l’Est par l’Armée française en Algérie, avant 1962, du
Sahara marocain au Sud (récupéré pacifiquement par la Marche Verte, en 1975),
des villes de Ceuta, Mellila et des îles méditerranéennes marocaines spoliées
par l’Espagne post-féodale et pro-franquiste au Nord du Maroc, en dépit du
traité de l’indépendance du 7 avril 1956. Dans “Le défi”, S.M.
Hassan II indique en ce sujet: “D’avril 1958 à mai 1960, il [S.M. Mohamed V]
dut surmonter les difficultés les plus diverses. Les premières furent d’odre
territorial et intéressent d’abord les invasions dont les troupes françaises
s’étaient rendues et se rendaient coupables à l’est et au sud. Notre frontière avait reculé jusqu’aux
remparts d’Ich et de Figuig et des villages comme Marguella, Hassi Beïda, Hassi
Zarzour, étaient menacés d’occupation. L’entrée en dissidence de l’armée
française d’Algérie [l’OAS] ne devait rien simplifier.
“Le 10
avril 1958, mon père annonça que le gouvernement espagnol nous avait restitué
la province de Tarfaya (Cap July). Il ignorait que nos troupes de
reconnaissance envoyées pour prendre possession du territoire se trouvaient
bloquées par les Espagnols et que leurs lignes de communication étaient
coupées.
“Je
ressentais une émotion d’autant plus vive que cette région de Tarfaya est avec
le Sahara voisin le berceau des Lemtouna [les Almoravides marocains], les
hommes qui portent le litam (le voile).” – Op.cit., p.71. De la même façon A.
El Fassai réitère dans:
- “Rithâa
al Malik Mohammadi ql Khâmis” (Oraison funèbre du roi Mohamed V - 1961) .
Là, le poète interpelle le défunt roi et son successeur au sujet de l’intégrité
territoriale encore sous le joug colonial rétrograde espagnol.
+ “Ô, Hassan descendant de Mohamed, nous suffisent/ En
lui cette doublé de prodige
et de titre de noblesse// Nous le prîmes à notre satisfaction pour roi et pour guide/ Et lui
prêtames l’allégeance de Ridwân due au Prophète (…)// Pour
récupérer les frontières [orientales]et défendre sur quoi l’ennemi [espagnol] a
encore main basse/ Le Sahara [marocain] et les villes [de Ceuta et
Mellila] l’appellent pour les délivrer
de l’agression.” – Op.cit., p.287.
Lui font écho dans l’affirmation de la marocanité, outre du
Sahara, de Ceuta, Mellila et des îles Zaffarines, les poètes marocains
arabophones (1972-1987), tels que:
b- Ahmed
Tribak (né en 1945), dans:
- “Sabtatu
al qarâsinah” (Ceuta la cité des corsaires - 1972). Dans ce texte, le poète
évoque l’étymologie mythique du nom de la ville marocaine de Ceuta spoliée:
Ceuta/ Ceit (petit fils de Noé) / Sabt/ Samedi, son allégorie de captive de
guerre colonialiste et des croisades des rois catholiques hispano-portugais,
dans l’attente sa délivrance, pleurée par la bourgade voisine de Benyounech, de
la ville de Tétouan et son “Riâd al Ochâq” (ou Jardin des amants), métropole du
Nord du Maroc méditerranéen. “Les chercheurs qui tentèrent de décrire
l’ancienne médina [de Ceuta], dit
Alejandro Correa da Franca, avaient divergé sur son antiquité
[mythico-biblico-coranique]. Il y eut parmi eux qui affirmaient – en s’appuyant
sur Abî al Abbâs [un auteur musulman originaire de Ceuta - XVe
siècle] – qu’elle fut fondée par l’un des fils de Noé, 230 ans avant le grand
Déluge. D’autres disaient qu’elle fut fondée par «Exila», petit fils de Noé. La
ville portait son nom en son temps. D’autres disaient qu’elle fut fondée par
(Ceit), l’un des petits fils de Noé, et c’est lui qui donna son nom à la
ville.” – Henrique Gozalbes Cravioto, “Notas para la historia de los
Judios en Ceuta (siglos XI-XVI)”,
arabisées par Mohamed Cherif, in “Mulâhadâtun hawla târîkh al
yahûd fî sabtah,” Rabat, Ed. Dar abi Raqraq, 2007, p.32. Le poète en
exalte la marocanié dans ces vers:
+ “Je dis ce qu’on dit de la nue des ténèbres [v. l’habit noir porté au Maroc en signe
de deuil, depuis la chute de Ceuta aux mains des
croisés]:/ Et voici la captive aux
racines emprisonnées par la guerre [des croisades coloniales
anti-marocaines des rois catholiques hispano-portugais],// Sortant de son
sommeil, oubliée de la fête du carnaval [commémorant le Ve centenaire
d’occupation des presides marocains, par l’Espagne post-féodale et
post-franquiste, en 1997]/ Le jour du samedi [nom de Ceuta] (…).// Se dissipe
la nue du plumage,/ D’une colombe (…),// Volant de la blancheur du Rif [Ceuta
soeur de Tétouan, la Colombe blanche du Rif], se précipitant,/ Semant le
roucoulement, dans les montagnes du «Haouz-Benyounech» [la colonne
d’Hercule-Moussa, dominant Ceuta],// Pleurant les jeunes filles captives de la
guerre du Feddan [de Tétouan: 1859-1860]./
Qui effraya les colombes [la gardiennes de la paix]?// L’amour et la mélodie,
comme des rameaux,/ Fondent [sous les canonnades espagnoles] à l’ombre des
grands arbres, à Tétouan// Au Jardin des
Amants [les deux rives de Gibraltar]??? ” – “Al Andalusu wa
al asîratâni
fî al Ibdâî al maghribî”, (L’Andalousie et les deux captives dans
la créativité marocaine),
Anthologie poétique
arabophone, présentée par Abdellah Jbilou et préfacée par Dr. Mohamed Al Kettani,
Tanger, Ed. Fanar, 1988, pp.136-137.
c- Mohamed Mounib Al Bourimi
(né en 1945),
dans:
- “Fî ‘uyûni Sabtata al hazînah”
(Dans les yeux Ceuta affligée -
1974). Le poète
y fustige la vie obscurcie de la cité de Ceuta, sous le colonialisme post-féodale et pro-franquiste,
quadrillée de soldats armés et se policiers hargneux et insultants à la gloire
de Madrid, nostalgique de la Reconquista et des croisades des rois catholiques
hispano-portugais (1492-2007).Il promet d’y revenir en reconnaissance de sa
marocanité, pour pavoiser des couleurs nationales marocaines ses minarets encore
affligés sous l’occuption étrangère. “L’homme colonisé [v.le poète marocain],
préconise F. Fanon, qui écrit pour son
peuple quand il utilise le passé doit le faire dans l’intention d’ouvrir
l’avenir, d’inviter à l’action, de fonder l’espoir [de la décolonisation des
enclaves marocaines spoliées]. Mais pour assurer l’espoir, pour lui donner
densité, il faut participer à l’action, s’engager corps et âme dans le combat nationale [en rappelant
ses droits territoriaux légitimes et inaliénables].” – Op.cit., p.162. Ainsi
dénonce le poète:
+
“Mes yeux scrutent les frontières
de la ville/ Je tente d’esclader les murailles de Ceuta de// Me faufiler à travers les ombres des rues anciennes de/
Me retrouver sur les balcons des maisons affligées [par les croisades coloniales des rois
catholiques hispano-portugais]!// J’en viens à la captive [Ceuta] j’y pénètre/
Je l’essuie de son sang (…)// «Madrid» [la métropole coloniale post-franquiste]
te crache à la figure …/ «La police hargneuse» [raciste et xénophobe] (…)// Je
reviendrai à elle [Ceuta]… je reviendrai…/ Avec entre les mains de
l’embrasement [l’amour patriotique] de mon envie/ Des jardins de fleurs… ayant crû…/ s’étant
suspendues aux balcons des minarets [de Ceuta libérée]// De Ceuta affligée [aujourd’hui encore spoliée].”
– A. Jbilou, Op.cit., pp.131-133.
d- Ahmed
Benmaïmoun
(né en 1949),
dans:
- “Bukaâu al mudun”
(Les pleurs des villes - 1977). Ce poème exalte
l’amour patriotique du poète pour Ceuta qu’il pleure en dénonçant ses spoliateurs
croiséd hispano-portugais et le sang des martyrs versé dans ses rues anciennes
qu’il considère à la lumière du cycle des saisons, qui après l’automne et
l’hiver de l’occupation coloniale, reverdira le printemps de la libération et
vaincra l’ennemi qui étend (l’Espagne colonialiste post-franquiste), armé
jusqu’aux dents de fusils et de viol ses doigts criminels à la porte sur les
côte nord de la patrie marocaine (sur Ceuta, Mellila et les îles Zaffarines).
Et comme disait le poète [patriote] chinois Miu Han (né en 1923): “Mon
processus de création [poétique] est celui de la méditation de la vie et du
combat.” – “Quelques idées et souvenirs sur la vie et la poésie”, “Littérature
chinoise”, Trim.1, 1988, Pékin, Ed.RPC, p.39. Alors, retentit cette
interpellation combative de Ceuta par le poète:
+ “Tes
yeux Ceuta sont dans mes bras/ Une rose dans les miroirs de l’enfance// Une
larme sur les paupières
qui y dessécha la
verdure de l’âge./ La rougeur de mon sang [du martyr de la marocanité de la
ville] fut une verdure qui paraît hors de l’oeil [du colonisateur
hispano-portugais] (…)// C’est le fusil qui verdit entre les doigts olivier /
Planent à l’horizon de Ceuta des colombes [la lutte libératrice de Ceuta source
de paix future maroco-espagnole] (…)// A l’ouïe de ma mémoire tempête
maintenant une chanson étrangère/ Et ses cabarets tempêtent de mongols [les
croisés fanatiques et les colons hispano-portugais aux moeurs inciviles] et mes
envies l’emportent (…)// Et je vaincrai en elle [pour Ceuta] celui qui s’étend
à la porte de la patrie/ Armant jusqu’aux dents de fusils et de viol ses doigts
criminels [les soldats colonanialistes espagnols criminels de guerre].”
– A. Jbilou, Op.cit., pp.140-141.
e- Ali
Skalli (né en 1932),
dans:
- “Sabtah…!”
(Ceuta…! – 1982 ). Ici, le poète,
incarnant une sorte de Tarik ibn Ziad [Chef marocain ayant quitté Ceuta avec ses navires pour les
brûler et pousser ses soldats à conquérir l’Andalousie, en 711]
sans navires, brosse le portrait mythique de la ville de Ceuta, en passant en revue les hauts faits historiques dont celle-ci fut le théâtre et les personnages marocains
légendaires qui y virent le jour ou vécurent (Tarik Ibn Ziad, Atlas, cadi
Ayyad, Ceit, petit fils de Noé, son fondateur mythique),
tout en revendiquant sa marocanité et rétrocession à la mère patrie marocaine. “Par ailleurs, souligne un article de l’Opinion, il
faut rappeler que les causes qui étaient à l’origine de cette occupation [de
Ceuta, etc.] s’inscrivaient dans cette idéologie des Croisades: la lutte entre
pays de l’Islam et pays de la chrétienneté. Espionner les pays musulmans et
prévenir les attaques corsaires [maghrébines], c’était le rôle assigné à ces
colonies [v.presides]qui servaient de concentration des armées et de lieux
d’incarcération des criminels les plus dangereux. Cet esprit des Croisades n’a
plus aucun fondement dans les relations internationales [maroco-espagnoles] du
XXIe siècle. En 1991, le Maroc et l’Espagne avaient bien signé un traité
d’amitié et de bon voisinage.” - “Le
Maroc «espagnol»,
www.lopinion.ma, p.1. C’est ce que dépeint le poète comme survivances de
cette ère de la Reconquista fanatique et de croisades coloniales anti-marocaines des rois
catholiques et du franquisme révolus, en ces strophes:
+ “Je
[Ceuta]suis la fille du Maroc [j’affirme ma marocanité] / Et par moi [Ceuta] il [le Maroc] eut sa
gloire [son rayonnement arabo-musulman méditerranéen]// Et sur les épaules de
mes lions [héros mythiques]/ Il porta la charge… et marcha [comme Atlas]// Et
par leurs mains il prévint tant de croix [les croisades coloniales
hispano-portugais, etc.] faisant incursion/ Ainsi jamais n’acclama la gloire de
devise égal à mon nom [Ceit/ Sabta/ Ceuta] (…)// Ô, notre demeure Ceuta, faites-nous
oublier par ton souvenir les demeures (…)/ Que d’«Ayyâd» [savant musulman
originaire de Ceuta, du XIIe s.] et de «Siqillî» [Jawhar Sakilli,
originaire de Sicile, général musulman fatimide du Xe s.] exalté que
nul n’égalât// Que ce soit la bataille du droit/ Qu’on prenne en
considération!// D’où nous ne reviendrons jamais/ Ou que le jour se lève sur
une victoire [la décolonisation de Ceuta et ses consoeurs]!// ”- A. Jbilou,
Op.cit., pp.125-126.
f- Mohamed
El Haloui (1922-2005), dans:
-
“Al asîratâni” (Les deux captives - 1984). Là, le poète se voit en sit in séculaire devant la porte et les
murailles de Ceuta (et Mellila), configurant chacune une belle captive,
enchaînée par le colonialisme archaïque des rois catholiques hispano-portugais,
pullulante de hauts faits almoravides
dont elle fut jadis témoin, sous Youssef Ibn Tachfine (1055-1145),
contrastant avec l’état de dépravation inhumaine auquel est réduite la
population marocaine colonisée sous l’occupation. Il en appelle au roi du
Maroc, S.M. le roi Hassan II (1929-1999) et au peuple marocain pour la délivrer
du joug colonial à brève échéance. L’engagement du poète (l’intellectuel
colonisé) n’a de sens, selon F. Fanon,
que dans sa partcipation à la lutte [politique active] contre les forces
d’occupation étrangères. “L’intellectuel colonisé [le poète] cependant tôt ou
tard se rendra compte qu’on ne prouvera pas sa nation [v. la marocanité de son
territoire national] à partir de la culture mais qu’on la manifeste dans le combat [multiforme] que
mène le peuple contre les forces d’occupation.” – Op.cit., p.154. De la sorte,
M. Al Haloui claironne:
+ “Mon [le Maroc] sit in [l’attentisme] a
longtemps duré à la porte de la captive [de à Ceuta spoliée]/ Et il s’éleva de
sa plainte ma plainte [son cri anti-colonial]// Voici les frontières et voici
leurs vigiles/ A leurs seuils se figeaient mes pas// Entre moi et les proches
dans ses murailles [ma marocanité]/ L’extension d’une main et le périple des
ans!// Une belle dame dans les fers soupirant [Ceuta ou Mellila]/ Pleurant sans
larmes ses drames// Parmi les conquérants sur les côtes leurs palais
[coloniaux]/ On dirait les salles hautes du paradis (…)// Mon peuple vit dans des grottes comme/ S’il y
était descendu du royaume des morts// Ibn Tachfine y courut sur leurs vagues /
Et s’y était maintenu et ce fut le plus sûr des ports (…)// Quand
reviendra-t-elle au bercail [à sa marocanité] ma Ceuta?/ Et quand s’élèveront
au-dessus d’elle [la ville] mes drapeaux [symoles de sa délivrance]?// Quand
embrassera-t-elle de joie sa soeur [Mellila également libérée]?/ Patriotique
vivifiant ma vie inanimée [d’ancien colonisé]? (…)// A Vous Hassan [II] aux
mains bienfaisantes de restituer ce que/ Le temps [le colonialisme] avait pris
au prix de tant d’épreuves// Tendez les mains pour briser les fers/ De nos
voisins [coloniaux et adversaires] ensanglantant nos poignets [nos enclaves
spoliées] .” – A. Jbilou, Op.cit., pp.123-124.
i- Ahmed Al Majjati
(1936-1965), dans:
- “Sabtah” (Ceuta - 1987). A travers ce texte, le poète met à nu la
décrépitude dans laquelle le colonialisme post-féodal des rois catholiques
hispano-portugais et post-franquiste avait précipité la cité marocaine de
Ceuta, devenue un repaire de tous les vices, de la contrebande et du crime
organisé (v.les presides) et compâtit à son sort indigne qu’aggravent les manoeuvres algéro-polisario-espagnoles au
dépens de la marocanité et de l’intégrité territoriale marocaine, en prédisant
la décolonisation ultime du Sahara et des enclaves marocaines spoliées, encore
contrecarrée par les nostalgiques du franquisme militariste colonial périmé. “A
cela [à l’émigration clandestine], signale en 2002 Pierre Vermeren, s’ajoute la situation très tendue qui prévaut
[entre le Maroc et l’Espagne] autour ds enclaves de Ceuta et Mellila, sur la
côte nord [v. l’île de Leïla ou de Perjil]. Accessibles aux gens du nord du
Maroc sur présentation d’une carte d’identité, ces territoires [spoliés]
suscitent une vigoureuse contrebande [produits fabriqués, drogue, devises,
etc.]. Ceuta enregistre 25 000 passages quotidiens de contrebandiers.”– “Les
Marocains rêvent d’Europe”, www.monde.diplomatique.fr, p.2. Ce
dont évoquent, les nombreux méfaits, les
vers suivants:
+ “Je viendrai [pour rétablir la marocanité de
Ceuta] sur le dos des nues [en faisant l’impossible]/ Je viendrai sur le dos de
l’oppression [malgré les
forces oppressives coloniales] (…)//
J’offrirai à
tes yeux l’assaut [l’héroïsme]
de Tarik/ Je sombrerai au-delà des
cendres du temps// Au-delà des cendres des navires [de 711] (…)/ Ah,
tu [Ceuta]es ma tueuse [tu me fais mourir d’indignation]// Quand je traverse
tes bas-fonds/ Les cabarets et les maisons closes [la débauche]// Quand je te vois
parfums de contrebande/ Liqueurs// et tabacs [le trafic informel]/ Et je te
vois à l’entrée du port// Une amante gitane / Foulée sous les
bottes du viol [ville dépersonnalisée et dévoyée]// L’attaque décisive n’y
pourrait rien (…)/ La fierté arabe [la morale chevaleresque] n’y pourrait
rien…)// Tétouan grisée [du parfum de sa marocanité]/ Je sens mon âme telle une
enfant muette [réduite à l’impuissance et au silence]// Ecrivant son nom
[Ceuta]/ Sur le corps du Sahara [pour affirmer leur marocanité] (…)//
Je viendrai sur le dos des nues [en faisant l’impossible]/ Je viendrai sur le
dos de l’oppression [malgré les
forces oppressives coloniales]
.//” – A. Jbilou, Op.cit., pp.127-129.
J- Ahmed Sabri (né en 1939), dans:
- “Nachîdu al achjâri al wâqifati fî ‘uyûni Sabtata wa
Malîliah” (L’hymne des arbres debout dans les yeux de Ceuta
et Mellila – 1987). Le poète stigmatise dans cette pièce les mystificateurs coloniaux de la
marocanité du Sahara (récupéré en 1975) et des enclaves rifaines, encore
occupées par l’Espagne post-féodal et post-franquiste et ses acolytes, promus
légataires universels du colonialisme franco-espagnol et international dans la
région. “Le monde colonisé, explique F. Fanon, est un monde coupé en deux . La
ligne de partage, la frontière en est indiquée par les casernes et les postes
de police [des frontères minées, dites «intangibles» par les pays avantagés
indépendants]. Aux colonies [et entre colonies d’une même métropole],
l’interlocuteur valable et institutionnel du colonisé, le porte-parole du colon
et du régime d’oppression [colonial] est le gendarme ou le soldat [v. le
militarisme artisan du tracé infidèle des frontières du Maghreb précipitemment
décolonisé].” – Op.cit., p.7. A cet égard, le poète s’interroge:
+
“Qui pourrait en toute lucidité
chasser l’Histoire [v. la marocanité de
Ceuta, Mellila et des îles Zaffarines colonisées]/ Et abandonnerait les nuées
d’oiseaux tissées par l’Atlas [le repère géographique]// Le Rif et les
hyacintes du Sahara [la marque de la faune et la flore inaliénable du Maroc]?/
Qui pourrait jurer en plein midi [devant tout le monde]// Que le soleil [la
marocanité] se couche [s’éclipse] à Ceuta et Mellila et que l’absence [le vide
se fait devant l’emprise coloniale]/
Dame chauve [la marocanité de Ceuta dénaturée] y vit.// Arbre sans
feuilles, ni ombre, ni oiseaux [une réduction de son être géo-historique
réel]?/ Qui pourrait à l’aube écrire l’hymne de la liberté [qui oserait clamer
sa marocanité]? (…)// Des cimes sous les gourdins des phalangistes / Et les
balles des fascistes [les enclaves marocaines opprimées par le colonialisme
post-féodal franquiste] (…)// Qui sait Abdelkrim [1882-1963] / Poursuivant du
bord du Rif [la guerre de 1919-1926] / Dissolvant le sel de l’histoire mensongère
[le déni de la propagande anti-marocaine coloniale]...?// ”-
A. Jbilou, Op.cit., pp.145-148.
I.2- La marocanité de Mellila et des îles Zaffarines dans la poésie
marocaine arabophone (1971-2007):
Certes, la moracanité de Mellila et des îles Zaffarines, comme celle de
Ceuta évoquée plus haut, est aussi hautement glorifiée par la poésie marocaine
arabophone (1971-2007). Le 1er février 1975, le représentant permanent du Maroc
à l’ONU adressa une lettre au président de la Commission Spéciale de l’ONU de
Décolonisation dépendant des Nations-Unies pour demander la liquidation du
colonialisme espagnol dans les enclaves spoliées au Nord du Royaume du Maroc,
en précisant notamment: “Et sur la façade nord, l’Espagne poursuit son
occupation de quelques enclaves, le long de la côte africaine sur la mer
Méditerranée, et ces parties continuent d’être les derniers bastions de
l’occupation espagnole dans le pays et comprennent: Ceuta, Mellila, l’île
d’Alhoceima [l’île de Nekkor], le rocher de Velez [le rocher de Badis Ghomara],
les îles Zaffarines [l’archipel de Kebdana]. Ces zones constituent des bastions
colonialistes à l’intérieur du territoire marocain, comparables dans leur
situation du point de vue historique, politique et juridique, à la situation de
Gibraltar.” “Los Presidios”, Nº1, Diciembri 1988, Rabat, Ed. El
Litoral, p.127. C’est ce qu’immortalise:
a- Allal
El Fassi (1910-1974) dans le poème:
- “
’ughniatun mina al bâtin” (Chant intérieur
- 1971). Le poète raille ici les conjurateurs
locaux dupes du colonialisme (les Polisario) et régionaux (algéro-espagnols, etc.), hostiles
au retour du
Sahara marocain à la mère-patrie et à la décolonisation des
enclaves du Rif spoliées par l’Espagne post-féodale et post-franquiste au nord du Maroc indépendant, depuis
1956. Il met en cause la sincérité de leur patriotisme affichés pour dévoyer la
légalité et la vérité géo-historique,
y compris le
verdict de la Cour Internationale de Justice de La Haye d’octobre 1975. Et
comme le décèle justement F. Fanon: “Le colonialisme utilise sans
vergogne toutes ces ficelles [v.les rivalités], trop heureux de dresser les uns
contre les autres les Africains qui hier s’étaient ligués contre lui. La notion
de Saint-Barthélemy prend corps dans certains esprits et le colonialisme [v.
espagnol] ricane quand il entend les magnifiques déclarations sur l’unité
africaine [l’OUA divisée sur le Sahara marocain, etc.].” – Op.cit, p.105. Sur ce, le
poète les interroge dans cette strophe pleine de verve:
+ “Pourquoi ne hâtez-vous pas [compatriotes et pays frères] le départ de l’armée étrangère [v.espagnole]?/ En
libérant les bases de notre chère patrie [les enclaves marocaines spoliées]// Dites-nous:/ Etes-vous de notre peuple, de notre sol [des patriotes
marocains et africains]?// Dites-nous:/ Si vous étiez de notre sol, pouquoi
n’avanceriez-vous pas pour organiser notre lutte [au lieu de la contrecarrer]//
Pour récupérer ce qu’ils [les Espagnols] ont pris [spolié] De nos régions [nos presides
du Rif], notre Sahara [marocain],// Qu’on évacue les Espagnols de ces villes,
Ceuta, Mellila et Layoune/ Et rattache à notre sol
Oued Ed-Dahab [Rio de Oro]// Et les enclaves du Nord [les îles Zaffarines, etc.]et du
Sud/ Et malgré cela êtes-vous des nôtres?// De notre sol [des
patriotes marocains et africains]?/ Dites-nous// ” – “Dîwân Allâl al Fasî 4 ”,
Op.cit., p.130.
b- Al Hussein amari (né en 1944),
dans:
- “Raqsatu al flamenco … fî Malîliah” (La danse du flamenco … à Mellila - 1975). Le poète transfigure la ville de Mellila en magistère
coranique et en aimée captive, en martyre crucifiée et en fillette gitane
musulmane, traquée par la garde impériale
d’un César
romain (papal) chrétien sans pitié (Ferdinand V le Catholique, époux d’Isabelle
la Catholique -1452-1516/ 1451-1504), fermant les frontières devant elle (niant sa
marocanité), mais sans cesse rajeunie dans ses exils prolongés (revendiquée avec la même ardeur), elle ne peut voir ses
proches (rejoindre sa marocanité), depuis mille ans (depuis
longtemps), dans l’attente d’une main modarite (arabe d’ascendance prophétique)
libératrice. Or, tel que le stipule Eric Hobsbawn, le temps des empires
coloniaux espagnol, britannique, etc.,
est révolu dans le monde du XXIe siècle: “La situation mondiale
actuelle est sans précédent.Les grandes empires [coloniaux] mondiaux de jadis,
tels l’Empire espagnol des XVIe et XVIIe siècles et, tout particulièrement l’Empire britannique
des XIXe et XXe siècles, ont peu en commun avec
l’actuel Empire américain. La mondialisation a atteint un
stade inédit sur trois plans: l’interdépendance, la technologie et la politique
(…). Le bras
armé de l’empire mondial en ces temps-là [XIXe siècle] étant
la marine, l’Empire britannique s’empara de bases maritimes et de relais d’importance
stratégique dans le monde entier. C’est pourquoi l’Union Jack flottait – et
flotte encore – de Gibraltar [1704] aux Malouines [1832] en passant par
Sainte-Hélène [v. l’Espagne à Ceuta, Mellila et les îles Zaffarines – 1415 ].” – “Où va l’Empire américain”, “Le Monde
diplomatique”, Nº591, Juin 2003, pp.1-20. De là cette mise en apostrophe du
poète sur la marocanité de Mellila, dans cet extrait:
+ “Mellila…/ Les vents de
l’affliction et de la barbarie [des croisades coloniales anti-marocaines des
rois catholiques hiapano-portugais] m’abêtissent…// En franchissant tes rues crucifiées
[martyrisées]
et mélancoliques/ Puisque le dessous des années d’errance et d’éloignement [la
domination coloniale]// De la séparation des proches les teind/ de la couleur
de la nuit terne [le deuil]// Mais un jour Mellila/ J’ai entendu des voix
d’enfants dans un de tes coins// Psalmodiant le saint Coran/ Et lentement
souffla sur moi un parfum du paradis [la résurrection de sa marocanité par le saint Coran]
(…)// Je soupire après elle [Mellila] mais elle ne cesse d’être une fillette
gitane [une petite ville marocaine spoliée par l’Espagne franquiste]/ Que pourchasse la garde césarienne [en fuite
devant la garde impériale coloniale espagnol]// Et ferme
devant elle [et sa marocanité] – tant elle endure…- toutes les
frontières [de grillages et de barbelés]/ Que de malheurs pour la
fillette gitane [la petite ville marocaine travestie en gitane]! (…)// Dans
l’attente d’une main modarite [arabe d’ascendance prophétique libératrice]/ Lui
rendant la lueur de ses espérances dispersées par les longs exils [nourrissant
l’espoir]// Depuis mille ans mon aimée ne vit ni parents ni réunion familiale
[Mellila coupée
de sa marocanité]…” – A. Jbilou, Op.cit.,
pp.153-154.
c- Abderrahman Bouali (né
en 1954), dans:
- “Baïna yadaya tiflatun ismuhâ Maliliah”
(Entre mes mains une fillette nommée Mellila -
1977). Le poète
réincarne la ville marocaine spoliée de Mellila par les rois
catholiques hispano-portugais et le colonialiame franquiste, sous l’apparence
d’une filletoute enlevée par des barabares (Tatares croisés ibériques)
et que seule les glaives marocains sauraient délivrer – tout en respectant
l’écologie végétale des
lieux - de ses ravisseurs coloniaux, pour
mettre fin la tension et l’explosion qui en découlent continuellement. “L’unité
africaine [v. unité inter-africaine], commente F. Fanon, formule vague mais à
laquelle les hommes et les femmes d’Afrique étaient passionnellement attachés
et dont la valeur opératoire était de faire terriblement pression sur le
colonialisme [notamment espagnol], dévoile son vrai visage et s’émiette en
régionalismes [le Maghreb, etc.] à l’intérieur d’une même réalité nationale [v.
le Sahara et les enclaves spoliées par le colonialisme ibérique au Maroc] (…).
Le colonialisme, qui avait tremblé sur ses bases devant la naissance de l’unité
africaine [l’OUA, l’UMA, etc.], reprend ses dimensions et tente maintenant de
briser cette volonté en utilisant toutes les faiblesses du mouvement [enclaves
spoliées, faux tracés frontaliers pot-coloniaux, balkanisation et séparatismes
télécommandés, etc.].” – Op.cit., p.104. Encore A. Bouali en dvoile-t-il les
méfaits dans ces vers pathétiques:
+ “Ô, mes frères [marocains et africains] avez-vous en ces contrées
[ces enclaves spoliées]./
Une patrie libre ou des geôles pour des hommes libres [une mère-patrie indépendante ou un pays d’hommes libres sans défense].// Hier je suis venu à vous./ Et aujourd’hui à
vous [je sollicite votre appui] // Portant entre mes mains une enfant nommée
Mellila [pour parrainer la marocanité de Mellila sous tutelle coloniale].
/ Qui se réjouit un jour.// Hurle un jour [oscillant entre la joie et la colère
dans l’attente d’une délivrance]./ Et les Tatares [les croisés hispano-portugais]
l’ont enlevée [l’ont colonisée].//
Ô, mes frères./ Pourriez-vous
prendre les glaives [engager la lutte pour la décoloniser]./ (Mais ne coupez ni les palmiers ni les arbres [sans nuire à la nature].)// Pour que revienne notre enfant captive [pour
la rétrocession
des enclaves spoliées]./
Et que cesse le temps de tension et d’explosion [et que la paix règne dans la
région].”// -
A. Jbilou, Op.cit., p.158-159.
c- Larbi
M’hamed Charkani (né en 1943), dans:
- “Malîliatu fî al qalb”
(Mellila dans le coeur - 1977). Dans ce poème, le poète épanche son
coeur débordant d’amour patriotique pour Mellila dont le séparent les
frontières factices du coloniales hispano-portugais et post-franquistes.
Il promet de ne revenir la voir qu’une
fois débarrassé de sa timidité [son
impuissance à combattre pour sa marocanité] , de sa patience [de son
attentisme]et doté d’une affliction [son deuil] changée en combattivité [en
aptitude à lutter] en marchant sur le feu [en acceptant le martyr] avec son couteau
affûté [armé
de tous les myens nécessaires], sans sûreté [sans nulle réserve].
“Le problème, atteste F. Fanon, est clair: il faut que les étrangers partent
(…). Tant que dure l’inquiétude du colonialisme [hispano-portugais et
post-franquiste des enclaves marocaines spoliées], la cause nationale [la
marocanité des
presides du Rif spoliés] progresse et devient la cause
de chacun [de tous les Marocains mobilisés jusqu’au dernier pour la faire aboutir].”
– Op.cit., p.81. Aussi le poète procède-t-il à une autocritique collective
décisive:
+
“Mellila…/ Je ne saurais être
digne de ton amour [patriotique en te laissant sous le joug colonial espagnol]
que si je navigue …// Sur le feu vers toi, que j’affûte mon couteau [en me
vouant au martyr par tous les moyens de lutte]… / Sois sans pitié pour moi maintenant et attends [n’aies aucune
indulgence envers moi et attends la reconnaissance de ta marocanité],// Je reviendrai à toi [pour te décoloniser] à l’aube [à brève échéance] si j’ai appris…/ Comment vaincre en moi la timidité
[mon impuissance au combat]…// Comment nier la patience [l’attentisme vis-à-vis
de l’occupant ibérique
récalicitrant]./ Comment apprendre à mon affliction [mon deuil] à combattre [à
poursuivre la lutte de décolonisation].// Ne m’accorde pas – maintenant
– de sûreté
[de réserve
contre le colonialisme post-féodal et post-franquiste]…/ Ne m’accorde pas
la sûreté
[sans réserve].//
” – A. Jbilou, Op.cit., p.157.
d- Omar
al Mehdi (né en 1947),
dans:
- “Malîliah”
(Mellila - 1987). Le poète
lance dans ce texte son défi
de rattacher indéfectiblement Mellila, sa ville natale spoliée par les croisés
hispano-portugaises et les colonialistes post-franquistes, à sa marocanité et clame son amour fou pour
elle en répliquant
à ceux qui le contrarient d’aller boire la mer. “A un autre niveau, commente F.
Fanon, la littérature orale, les contes, les épopées [la poésie épique et de
combat], les chants populaires autrefois répertoriés et figés commencent à se
transformer (…). La méthode allusive se fait de plus en plus fréquente (…).
L’épopée, avec ses catégories de typification,
reparaît (…). Le colonialisme ne s’y est pas trompé qui (…), a procédé à
l’arrestation systématique de ces conteurs [v. poètes nationalistes marocains:
Allal El Fassi, Mohamed El Kourri, etc. ]. ” – Op.cit., pp.169-170. Alors,
le poète dialogue avec Mellila, partagé
entre elle et Casablanca et leur
marocanité
commune qui le sollicite instamment aujourd’hui:
+ “Le
jour je t’[Mellila spoliée] ai quittée
pour Casablanca [la partie du Maroc indépendante]./ Tu étais le réel et rêve./
Tu étais l’être, le possible et l’impossible [le centre de la controverse de sa
marocanité
en Espagne
post-féodale et post-franquiste]./
Tu étais la tunique de Joseph qui me fît recouvrer ma lumère [la vue perdue de
Jacob, la mémoire
nationale]./ Hélas, toi et hélas, mes
compatriotes./ Les envahisseurs [les
croisés des rois catholiques hispano-portugais] te rendirent licite [passible
de tous les méfaits]./
Et tu oublias ton jeune amant [le poète, substitut du Maroc]./ Comme tu es
vaniteuse [devenue amnésique par l’idéologie franquiste coloniale tonitruante]
Ô, esclave fugitive ingrate [enclave spoliée, fermée à son arrière-pays et inféodée au régime colonnial
hispano-portugais]./ - Le fou [de la marocanité]
de Mellila. Dirent les camarades./ Jai dit: Buvez la mer./ - Possédé par [la
marocanité]
Mellila. Dirent les camarades./ Jai dit: C’est ma bonne cause [nationale],
buvez la mer!/ ” – A. Jbilou, Op.cit., pp.166-167.
En
somme, la poésie marocaine arabophone (1959-1987)
manifeste ici radicalement et passionnément la
marocanité de Ceuta, Mellila et des îles Zaffarines, spoliées par la
Reconquista et les croisades anti-marocaines des rois catholiques
hispano-portugais et du franquisme colonial décadent, détenteur des ultimes
colonies d’Afrique décolonisée,
du début
du XXIe siècle. Et c’est avec la même ferveur patriotique que cela est
exprimé dans la
poésie marocaine francophone (1969-1983). Il suffit de rappeler poétiquement, dans ce sens, la position prise en 1924 par les poètes surréalistes français
contre la guerre du Rif, menée par Abd-el-Krim (1882-1963), contre les troupes
coloniales franco-espagnoles de Lyautey (1854-1934) et de Primo de Rivera
(1870-1930). Or, Philippe Olivera note à ce sujet: “C’est en effet en 1924,
avec la guerre du Rif qu’Abd-el-Krim mène contre les troupes coloniales de
Lyautey [et de Primo de Revera], que les [poètes] surréalistes entre vraiment
en politique (…). En revanche, avec l’affaire du Maroc, la politique entre
vraiment dans l’horizon du groupe [poétique]désormais
élargi (…). Ils se tournent alors vers les communistes qui sont à l’avant-garde
de la lutte anti-militariste et anti-coloniale [franco-espagnole].” – “Loui
Aragon”, livret réalisé en marge de l’exposition réalisée sous le même
titre, Paris, Ed. l’adpf, 1997, p.33.
II- La marocanité de Ceuta, Mellila et les îles Zaffarines dans la
poésie marocaine francophone (1969-2007):
Définissant la poésie de
combat francophone issue de la domination coloniale, le poète martiniquais Aimé Césaire
(né en 1913) énonce:
“Tous les rêves, tous les désirs, toutes les rancunes accumulées, toutes les
espérances informulées et comme refoulées pendant un siècle de domination
colonialiste, tout cela avait besoin de sortir, et quand cela sort et que cela
s’exprime et que cela gicle, charriant indistinctement l’individuel et le
collectif, le conscient et l’inconscient, le vécu et le prophétique, cela
s’appelle poésie [de combat].” – “Liminaire”, “Nouvelle Somme de
la Poésie du Monde noir”, Nº66, 1957, p.4. Effectivement, la poésie
marocaine francophone (1969-2007) traite également de la lutte pour la marocanité des enclaves de Ceuta, Mellila
et des des îles Zaffarines, aujourd’hui encore colonisées par
l’Espagne post-féodale
et post-franquiste (1415-2007). Cela s’articule précisément autour de: I) La marocanité de Ceuta dans la poésie marocaine
francophone (1969-2007), II) La marocanité de Mellila et des îles Zaffarines
dans la poésie marocaine francophone (1972-2007).
II.1- La
marocanité de Ceuta dans la poésie marocaine francophone (1969-2007):
Pour
mieux saisir la vision de la poésie marocaine francophone de combat pour la
marocanité de Ceuta, encore sousle joug colonial espagnol, il faut, selon
Abellatif Laâbi, se rappeler le rôle qu’il lui incombe aujourd’hui à cet égard.
“La poésie de combat actuelle, spécifie-t-il, en prenant la relève
[de la lutte politique de décolonisation], aborde, quant à elle, ce problème
d’une manière plus synthétique.
Aujourd’hui le poète est appelé à faire le bilan de la colonisation [v.la
marocanité de Ceuta, notamment], à rassembler et rationaliser les éléments
épars de son drame national, afin de déboucher sur un projet [de combat
culturel] historique renouvelé de fond en comble (…). La conscience tragique de
dépossession [territoriale par le pays administrant], tout en restant vivace,
apparaît sous un éclairage plus précis. La terre symbolise maintenant, en
profondeur, la patrie [le Maroc et la narocanité des
presides]. Elle
n’est perçu qu’en fonction du Retour , c’est-à-dire de la
libération [par leur totale décolonisation].” – “La poésie palestienne…”,
Op.cit., pp.18-19. C’est ce que manifeste:
a- Mohammed
Khaïr-Eddine (1941-1995), dans:
- “Description d’un drapeau”
(1969). Il y est question de guerre coloniale maritime entre les rois
catholiques hispano-portugais, depuis 1492, et les corsaires musulmans
marocains de Salé et de Ceuta, sur ordre
papal pour l’occupation des enclaves musulmanes marocaines, dont
notamment Ceuta en 1415. “Les Chrétiens de la péninsule ibérique (…), rapporte
Jean Wolf citant Charles-André Julien, eurent tôt fait de comprendre , à la
faveur de la Reconquista, l’intérêt que présentait, surtout pour le négoce,
l’occupation des territoires marocains. Mais la tentative des Castillans contre
Salé [et ses corsaires], en 1260, s’était révélée hasardeuse (…). Le roi [portugais] Jean Ier va foncer. Il
lance ses chevaliers (…) sur Ceuta, qui est alors la plus grande place
commerciale du Maroc, fréquentée par les les boutres gênois et les galères
vénitiennes. La ville est prise en 1415 (…) et pillée, très méticuleusement
(…). Mais pour ce qui est du Maroc lui-même, les Portugais entendent en faire
une chasse gardée (…). Car le but des Portugais est de s’assurer l’or qui
traverse le Sahara [Sakiet el Hamra] et parvient en Afrique du Nord.
“Dès
1493 et 1494, deux bulles d’Alexandre VI apportaient à la croisade africaine
[marocaines] la bénédiction pontificale et lui fournissaient ses titres de
prétention. Plus tard l’aide de Rome à l’Espagne se révélera plus efficace, à
la fois diplomatique et financière, spécialement à la fin du règne de Philippe
II (…). Le premier résultat de ce succès [colonial] avait été d’amener les
Espagnols aux portes de l’Afrique du Nord, avec le détroit de Gibraltar
[colonie britannique, depuis 1704] comme frontière méridionale [de l’UE, 1992].
Limite insuffisante à vrai dire [selon
les rois catholiques, etc.] entre le monde chrétien et le monde islamique
africain.” - “Le Maroc: La vérité
sur le protectorat franco-espagnol, l’Epopée d’Abd El Khaleq Torrès”,
Paris, Ed. Ediff-Balland, 1994, pp.40-41. Ce à quoi le poète réfère dans les
vers:
+ “tu
meurs soudain [en martyr] au vrai tu brandis tes racines [ta marocanité]/ dans mon ombre imprévisible [les
manoeuvres colonialistes contre le Sahara et les presides marocains] où te
contemplent émus/ les hommes de Saki-Hamra [les citoyens du Sahara marocain]
précipités/ sur le chergui dont la Seine t’a couvert [l’Est marocain grignoté
par l’Armée française et le Polisario en
Algérie]// caves/ en longueur/ oeufs d’araignées parfumant le silence dictateur
[l’Histoire malmenée de l’intégrité territoriale marocaine par le colonialisme
franco-espanol tu international]/ meurtre blanc sur la margelle du désespoir
[les spoliations coloniales, passées sous silence, talon d’Achille
d’instabilité dans la région]/ le Bou-Regreg [Salé] dit qui t’émiette [le Maroc
sous le Protectorat franco-espagnol et international] et où/ ton sang rit
encore de l’ennemi public [les martyrs marocains de l’indépendance ]/ la
vengeance séchant les gorges/ vernaculaire [les hostilités séculaires contre
l’occupant hispano-portugais au Sahara et dans les presides marocains de Ceuta,
etc.]// ”
Lui
fait suite chez M. Khaïr-Eddine, le poème:
- “Exil”
(1969). Dans ce poème M. Khaïr-Eddine traque encore les vicissitudes du
colonialisme post-féodal des rois catholiques hispano-portugais et du
franquisme attardé dans les enclaves
marocaines spoliées au Nord du Maroc indépendant, depuis 1956. “Elle
[l’Espagne] n’est pas la seule, convient J.Wolf: la plupart des nations
catholiques, celles du Sud en particulier, encore imprégnées du souvenir des
croisades et dont le désir de revanche [croisades anti-marocaines] ne s’est
guère émoussé au cours des siècles, ont vite fait d’oublier que la diplomatie
marocaine avait toujours fait preuve dans ses relations avec l’Europe d’un
esprit extrêmement pacifique et libéral et l’on peut ajouter que, d’une manière
générale, les Occidentaux ont observé les clauses des traités signés avec le
Maroc seulement lorsque celui-ci était puissant et respecté.” – Op.cit.,
pp.65-66. Ce que reflète allusivement les vers ci-dessous:
+ “je
jette des fougères aux marnes réprimées [j’observe le deuil sur les enclaves
marocaines spoliées] je tempête [j’exprime ma colère]/ j’allume l’Afrique [j’alerte le continent
africain menacé par le colonialisme hispano-portugais] j’arachnide [j’use d’anciens
canons de guerre] je mite / ma neige alcoolique et ma cupule [je me vois
spolier mes enclaves, mes monts enneigés et mes ports maritimes dont Ceuta,
etc.]/ je trouve ma peau sous le ciel décrié [je vois ma race arabo-musulmane
sous le ciel chrétien dégradée] je fais/ intervenir/ le noir [je déclare le
port du noir en deuil contre la prise de Ceuta par les rois hispano-portugais]
(…)// non/ plus de colombe! [non, c’est la fin de la paix maroco-ibérique]/
elle [la décolonisation] prolifère elle est blanche [la Marche Verte pacifique
pour la récupération du Sahara marocain, en 1975] elle est/ debout [la
marocanité]/ ai-je dit/ sang [les martyrs de la résistance marocaine contre l’occupation franco-espagnole et internationale]
sans bandoeng [la Conférence afro-asiatique de mai 1955, condamnant le
colonialisme dans le monde]/ atrocement argué c’est le fifre [la propagande
pseudo-historique de l’Espagne contre la décolonisation des présides marocains
du Rif] mais quand/ donc éclatera cette
vigne d’hydrocarbures [quand cessera le complot hispano-algérien contre le
parachèvement de l’intégrité territoriale du Maroc indépendant]?” – “Soleil Arachnide”, Paris, Ed du Seuil, 1969,
pp.65, 101-103.
b- Tahar Beb Jelloun (né en 1944) dans:
- “L’aube des dalles” (1966). Le
poète décrit
l’état
de la ville de Ceuta spoliée,
avec d’autres enclaves, dont le Sahara marocains par l’Espagne franquiste par
le biais d’allusions mythologiques et de
sites géographiques maroco-méditerranéens et africains, comme: “Orphée”
descendant en enfer ramener Eurydice (Ceuta spoliée par l’Espagne) vers la
mère-patrie (le Maroc), “Prométhée africain” (Ceuta-Prométhée crucifiée par le
colonialisme hispano-portugais sur le mont Moussa/ Hercule/Abila/Hacho près de
Benyounech). Il revendiquant sa libération malgré l’amnésie volontaire
coloniale et le couvre-feu permanent qui y règne sans cesse. “Et parmi ces
mythes, constate Enrique Gozalbes Cravioto, on pourrait insérer une tradition
remontant aux âges classiques indiquant qu’il existe une continuité
consensuelle entre deux antagonismes: le personnage d’Hercule et le personnage
de Moussa [ Moussa Ibn Noceir (ou encore Moïse), conquérant musulman par Ceuta de la Péninsule Ibérique, en 711]” – “Notas
par la historia de los Judios en Ceuta (siglos IX-XVI) ”, “Monografias”,
trad. arabe de Mohamed Cherif, nº5,
Ceuta, 1988, p.25. D’où chez A. Laabi:
+
“Non tu [Ceuta-Orphée] ne le savais pas./ Ta mémoire, enveloppée dans ton
manteau sourd [la propagande coloniale post-féodale et post-franquiste, sourde
aux revendications territoriales marocaines] hésite encore [l’Espagne
retardataire, à l’ère de la décolonisation planétaire par l’ONU]/ Non Orphée tu
ne peux plus modeler ton hymne [la marocanité de Ceuta et ses consoeurs]/ à
l’amour [par l’amour contre la haine
belliqueuse coloniale]/ les vents
t’avaient parlé de l’âpre liberté [la lutte de l’indépendance t’avait appris le
martyr qu’elle a exigé]/ existence sans oracle [le statut quo colonial espagnol
se veut intrasigeant]/ A présent reviens/ reviens sur ta terre nubile
[maintenant, la marocanité t’appelle à Ceuta]/ reviens à l’Enceinte qui regorge
de sang [reviens vers ses murs empreints du sang séculaire des martyrs
marocains]/ reviens voir les bergers [les gardes coloniaux des rois catholiques hispano-portugais et
post-franquistes] dans la ville [Ceuta]/ visages d’airain [soldats
hispano-portugais impitoyables]/ femmes [musulmanes]sans voile dans les rues
répandant les boules/ de feu [combattant à la place des hommes tués]/ enfants
de toutes rues dans la folie et le désordre [les enfants orphelins abandonnés
dans les rues dévastées] (…)// reviens égrener le chapelet de la mitraille/
éblouir les nuits sanglantes du feu [reviens faire le bilan du génocide commis
les croisés hispano-portugais]/ de Prométhée africain [de Ceuta sur le mont
Moussa et ses consoeurs sur le Rif] (…)// Non tu ne peux te souvenir de ce
mardi/ où le soleil ne s’est pas couché [l’amnésie imposée sur la prise
sanglante de Ceuta par les croisés des rois catholiques]/ où les dalles
n’étaient plus des dalles/ où un homme [marocain] mordit la crosse d’un fusil
[ennemi d’indignation] avant/ d’éventrer le brasier de chair et d’acier [pour
mourir en martyr dans la ville incendiée par les envahisseurs coloniaux]/ où sa
mort paraphée de tous les poings levés [sa mémoire saluée par la protestation
générale du dans tout le Maroc]/ Non, pas de couvre-feu pour le soleil [non,
rien ne peur arrêter la décolonisation irréversible de Ceuta et du reste des
enclaves marocaines spoliées]/ Non il [le soleil de la marocanité] ne s’est pas
couché [est toujours levé], tu entends Orphée [Ceuta-Orphée]/ ses rayons/
perçaient les procession mortuaires/ sa clarté roulait dans les ruisseaux/ des
enterrements clandestins [il survit à travers des siècles de luttes et de
martyrs marocains] (…)/
les
veuves [des martyrs marocains] ne portaient pas le deuil/ le soleil dansait
dans leur yeux [l’espoir de la délivrance future]/ pendant que d’autres
imprimaient la première tache/ de sang [d’autres entament de la résistance
continue]/ Ils ont creusé les rues/ ouvert à coup de pic dans le roc de
l’Enceinte [par des barricades à Ceuta assaillie]des/ entrailles béantes [des
cadavres de victimes civiles et militaires]/ mais l’Enceinte [au bout du
compte, la frontière colonialiste de Ceuta] a fondu [s’est dissipée dans
l’esprit des combattants marocains] sous le regard des enfants [à la vue des
nouvelles générations marocaines]/ redevenue gemme terre sable [frontières de
muraille et fils de fer barbelés inconsistante devant le temps de la lutte]/
dans la plaine, on buvait du ruisseau obscur l’eau/ de toutes les peines en ces
longs jours de haine/ où la douleur régnait sans âge [ainsi se poursuit la
mémoire des méfaits séculaires des croisades coloniales hispano-portugaise et
poste franquiste contre le Maroc luttant pour sa totale décolonisation]//” – “Cicatrices
du soleil ”, Paris, Ed. F. Maspéro, 1972, p.90-92.
II.2- La
marocanité de Mellila et des îles Zafarines dans la poésie marocaine francophone
(1969-2007):
Certes, la marocanité de Mellila et des îles Zafarines, comme celle de Ceuta ou du Sahara marocain, n’est pas à démontrer, mais l’idéologie colonialiste d’Isabelle la Catholique et le franquisme creusant un fossé de haine entre l’Islam et la Chrétienneté ne semble pas avoir cessé d’envenimer les esprits de l’Espagne coloniale post-féodale et post-franquiste – en témoigne la visite en 2007 du roi espagnol aux villes de Ceuta et Mellia colonisées par son pays, au Nord du Maroc, depuis 1415 et 1494, faisant fi des luttes et revendications marocaines pour leur décolonisation, depuis. Ce fut encore le cas devant l’ONU et d’autres instances internationales, depuis au moins 1960.
“Il est grand temps, rapporte J. Wolf, que cette union nationale [de l’Espagne] se constitue [en 1492] car les Espagnols multiplient exactions, pillages, dépradations et s’acharnent à faire au Maroc une guerre à la petite semaine, creusant progressivement un fossé de haine entre l’Islam et la Chrétienneté. Non contents d’occuper leurs presides, ils sont au sommum de l’intolérance religieuse et font preuve d’un fanatisme imbécile dans l’application du testament d’Isabelle la Catholique qui prescrit, rappelons-le, de «conquérir l’Afrique et combattre sans merci les Infidèles pour la foi chrétienne». Ils vont réussir à s’emparer de Larache en 1610 (grâce à la trahison du prince Al Mamoun, fils du sultan Al Mansour) et de Maâmora [Mahdia], à l’embouchure de l’oued Sebou, en 1614. Mais sur les Portugais et les Espagnols coalisés, les Saâdiens réussiront à récupérer Fort Chebka (Santa Cruz de Mar Pequña), en 1527, Santa Cruz de Cap Guir (1541), Safi et Azemmour, la même année, Ksar es-Sghir, sur le détroit de Gibraltar, en 1550 et enfin Asilah en 1589.” – Op.cit., p.58. D’où la revendication actuelle de la marocanité des enclaves de Mellila, des îles Zafarines, etc., spoliées, au Nord du Maroc, par l’Espagne post-féodale et post-franquiste, dans la poésie marocaine francophone.
a- Ahmed Mouchafi (1929), dans:
- “J’ai mal” (1969). Le poète conteste ici le colonialisme des enclaves marocaines de Ceuta, Mellila et des îles Zafarines,encore occupées, à l’époque de l’émancipation universelle, prônée depuis 1945 par l’ONU. Il fustige même ses compatriotes nationaux et arabes de ne rien faire pour liquider ce colonilisme occidental rétrograde et anachronique, survivance des croisades anti-marocaines des rois catholiques hispano-portugais et du franquisme anti-démocratique révolus. “Le 12 janvier 1956 , restitue J. Wolf, Rafaël Garcia Valino [Haut Commissaire espagnol de la zone Nord occupée du Maroc ] navait-il pas déclaré sous le sceau secret de Larbi Leuh: «Bien sûr, l’Espagne compte finalement accorder l’indépendance totale au Maroc, mais cela ne se fera que progressivement [une décolonisation totale renvoyée aux calendes grecques] (…).» Mais maintenant que c’était chose faite et que la souveraineté de l’empire chérifien s’annonçait pour très bientôt [en France], sans que personne eût demandé leurs avis, ils [les Espagnols] essayaient encore de sauver la face, persistaient à tenir pour des réalités leurs anciens mirages ou à proclamer que ce chapitre colonial ne pouvait se clore sans leur intervention alors que, malheureusement pour leur amour-propre, l’Histoire en marche se passait délibérément de leur concours [v. les colonies britannique de Hong Kong (1842) et portugaise de Macao (1557), rendues à la Chine, en 1997 et 1999].” – Op.cit., p.308. Dans cette optique, le poète dans ces vers:
+ “J’ai mal [je
souffre]en vous mes frères/
qui laissez violer vos droits [votre marocanité]/ en plein public, universellement [décolonisation des enclaves du Rif spoliées par l’Espagne
franquiste]/ vous gargarisant de résolutions émasculées [malgré les décisions de l’ONU, depuis 1960],/
tournant en rond,/ décervelés,/ noyant votre couardise/ d’attente stérile/ et de fatalisme/
trop facile [vivant dans l’attentisme face aux manoeuvres
colonialistes et pro-colonialistes contre l’intégrité
territoriale du Maroc indépendant]/ et sert,/ vous le savez trop bien,/ les
meurtriers de votre mère-/ paries [le Polisario hispano-algériens],/ les spoliateurs de nos entrailles [la marocanité de Mellila, les îles Zafarines, etc.].// Nations arabes
[le monde arabe, l’UMA],/ nation de mon
Occident-/ extrême, estropiées de la moëlle épinière, [le Maroc aux enclaves du
Rif spoliées]
(…),/ par les valets du cannibalisme [les anthropophages coloniaux et
pro-coloniaux franco-espagnols/
par les phillistins de la foi [les croisés colonialistes post-féodaux et pro-franquistes].” – “Souviens-toi,
la colère”,
Casablanca, Ed. Libres, 1969, pp.11-13.
b- Tahar
Ben Jelloun (né en 1944), dans :
- “Qui
se souvient de la terre brune” (1972). Le poète évoque allusivement la ville
de Mellila (“la cité de mer cap sur le
soleil”, descendant “les plaies du Rif”) et les îles Zaffarines (“les plaies”
et “le roc du Rif entaché de sang “, “la terre brune oubliée”) usurpées par
l’Espagne coloniale post-féodale et pro-franquiste (“l’oeil
en sang du souvenir andalou”) au Nord du Maroc indépendant. “Pour l’empire
chérifien [le Maroc], souligne J. Wolf, le péril commence dès la prise d’Alger en 1830.
Il devra engager la bataille avec la France en 1844-1845, puis avec sa bonne
vieille ennemie, l’Espagne [colonisant déjà Mellila,
Ceuta, etc.], qui réapparaît dans le secteur sous le couvert des mêmes rengaines: elle a
redéterré opportunément le branlant attirail anti-maure [anti-marocain]
d’Isabelle la Catholique [v. l’offre, en 1553, par la reine d’Espagne Isabelle
II (1830-1904) de ces bijoux pour financer la guerre de Tétouan contre le Maroc, en 1859-1860] et, sans craindre le
ridicule, elle [l’Espagne] prétend, à toutes forces, tenir son rôle dans la «la
lutte contre les infidèles [Musulmans]»” – Op.cit., p.65. T.Ben Jelloun en remémore les
traces dans cet extrait:
+ “Debout sur le flux de la vague,
l’enfant [le Marocain]/ charmait le songe épars pendant que/ sable [la patrie]
remuait l’oeil en sang du souvenir andalou [la Reconquista et les croisades
coloniales anti-marocaines des rois hispano-portugais] (…)/ De quel rire
sanglant [état d’âme
meurtri] épèlerais-je la/ cité [Mellila,
les îles Zaffarines, etc.] qui voyage [qui passe] de mer en étoile [Ceuta
port occupé en dérive sous la croix] de corps en désert [de cité en ruines spoliée] cap sur le soleil [allant vers la
marocanité]?// Je cadre la cécité /
des autres [je dénonce l’obscurantisme colonial mystifiant] et plante un désir
[un voeu ] dans l’immense marécage [l’amnésie de la propagande coloniale] notre territoire [notre intégrité territoriale].
Je me souviens de l’arbre descendant [la marocanité des presides occupés par
l’Espagne post-franquiste] les plaies du Rif [des enclaves spoliées du Maroc
méditerranéen] (…).// Ville jumelée [Ceuta et Mellila occupées] au ciel vagabond [au destin instable]/ le kif [la contrebande du
narco-dollars]/ fleurit sur tes flancs [Kétama au Sud de Mellila et des îles Zaffarines] (…)// Ville
[Mellila]/ je te renvoie à la mer [ta marocanité géo-historique]/ et je regarde le rocher
[v. l’île du Peñon d’Aloceima, occupée par
l’Espagne, en1674] fermé sur la blessure/ endormie
[replié sur l’occupation
hispano-portugaise et post-franquiste des enclaves
usurpées du Rif, depuis 1415]//
Nous avons rompu la mer et bu la trêve
éparse [nous
avons coupé le large
et consommé les luttes cycliques maroco-ibérique]/ de la nuit [de l’obscurantisme
post-féodal et post-franquiste] nous
avons fomenté un rêve [la décolonisation de Mellila, de Ceuta et des îles du
Rif]dans le/ tombeau de la citadelle [de la “Casbah des
Combattants”, sur l’île de Badis ou
Peñon de Velez de la Gomera, mitoyen de Mellila, lébérée des Espagnols par le roi Moulay Ismaël, en
1702]// nous
sommes partis au Rif habiter l’arbre et le roc [vivre parmi les cèdres de Kétama et leurs bâteaux corsaires rapides et
sur l’île du Rocher d’Alhoceima ou Peñon de Alhucemas, colonisée,
en 1673]/ nous avons écouté le vent [la voix du chroniqueur marocain] nous
rapporter la va-/ gue d’une voix rude et belle voix lointaine enta-/ chée de
sang à l’aube séparée voix humaine [évoquant
l’écho des cris des martyrs de la marocanité des presides spoliés]/ accessible au bout du rêve pourquoi te nommer
[marocanité et foi dans la décolonisation à venir] / qui se souvient de la terre brune se
souvient [la marocanité de Mellila, Ceuta, etc.]/ de la clarté née soudain d’un
printemps sur les cimes [l’apparition de la marocanité par-dessus tout]…// il
n’y a plus que traces d’une mémoire
décimée [reste la persistance de la revendication des presides malgré l’amnésie
de la propagande colonialiste féodale et pro-franquiste].” – “Cicatrices
du soleil”, Op.cit., p.103-105
c- Abdellatif Laabi (né en
1942), dans:
- “Le régne de barbarie” (1976).
Dans ces vers, le poète préfigure l’occupation coloniale des
presides marocains de Mellila, des îles Zaffarines, etc., à laide de symboles
anthropomorphiques tels que l’intrusion sur le sol marocain d’une entité étrangère pathologisante du
colonialisme des rois catholiques hispano-portugais bacille), rendant sa
marocanité difforme, frêle (par le fouet de l’esclavage) et frappée
d’impuissance, par les galopades de leurs croisés donquichottesques, issus de la Reconquista et de l’inquisition (1492),
lancés aveuglément contre le Maghreb (le Maroc, l’Afrique du Nord, l’Afrique,
etc.) pour y semer la discrimination raciale, la traite des esclaves, la
falsification géo-historique (sphinx féodalo-franquiste
travesti), l’amputation territoriale et le pillage impérialo-colonialiste
(Maghreb aux mains trouées) des peuples, des pays et des Etats, soumis par la
force de la région.
“Prenant le relais des Lusitaniens,
explique J. Wolf, les Espagnols, dès 1581, complétèrent
ce beau travail [de chevalerie de la croix] “au nom du Christ”. La dégradation systématique dans
le domaine des sciences et de la pensée fut complétée.
Sebta, réduite
d’abord au rang de simple havre de pêche [totalement déculturée], devint dans la suite un preside: à la fois place militaire,
port de passage et zone franche [lieu de contrebande, de trafics illicites,
etc.] sur la côte nord du Maroc. Elle l’est toujours et l’Espagne
reste obstinément
sourde [par l’idéologie des rois catholiques et du
franquisme] aux appels du patriotisme marocain, de la raison et du modernisme
libérateur [l’ère de la décolonisation finissante, au XXe
s.]. Elle [l’Espagne, nation élue] exige que la Grande-Bretagne évacue Gibraltar, mais
entend bien conserver [la décolonisation ethnocentrique] Sebta et
Mellila jusqu’à la fin des temps. Car telle est la logique de tous
les colonialistes du monde, dont les Espagnols sont pratiquement les ultimes
représentants à notre époque où l’émancipation générale est
de règle [v. la charte de l’ONU].” – Op.cit., p.47. En témoigne poétiquement
ici A. Laabi en ces strophes:
+ “«Bacile [antigène, individu difforme et chétif, un
croisé colonial contaminant Ceuta]/ scorpion solitaire [par un ancien canon
destructeur]/ galope galope/ [par la chevalerie en croix des rois catholiques
et l’armée franquiste coloniales]/ chaque fouet à ma face (p.36) [l’usage du
fouet de l’esclavage contre le peuple marocain des presides colonisés]».//
- «gloire gloire [le délire
donquichottesque]/ nous sommes le peuple élu [les croisés du pape
colonialiste]/ érigé/ sur les pointes de la fatalité (p.45) [un peuple post-féodal, pro-franquiste et anti-maroco-musulman»//
«Maghreb! Maghreb! [ le Maroc/ l’Afrique du Nord/ l’Afrique, etc.]/ doigt ségrégué
de la main enfouie [l’enclaves-index marocaine de Ceuta spoliées à la population musulmane
discriminée au nom de diverses lois]»/ stature
de sphinx travesti [mystification géo-historique de la marocanité des presides
marocains spoliés]/ Maghreb aux mains trouées [des amputations
territorales pour le pillage et le contrôle de Mellila, des îles
Zaffarines, etc., par l’Espagne coloniale post-féodale et pro-franquiste au
dépens du
Maroc indépendant].”
– Abderrahman Tenkoul, “Littérature marocaine d’expression française”, Casablanca, 1985, p.83.
d- Mohamed Aziz Lahbabi
(1922-1993), dans:
- “Nous sommes trois” (1959). Le
poète chante ici le nouvel ordre mondial de la décolonisation, du droit
international, de la coexistence
pacifique et du bon voisinage, du réglement pacifique des contentieux
par le dialogue et la diplomatie entre
les peuples et les Etats du monde, selon
la charte de l’ONU, depuis 1945. Il annonce prophétiquement la fin des hostilités sur la terre (“le volcan cessant de
parler de sa langue de feu”), l’appel à la liquidation totale du
colonialisme et au développement
au Maroc et
dans le reste du monde (“la terre s’est
ranimée en exquis épis”), l’abolition difficile et angoissée de la loi de
jungle entre les nations (“dans la vaste forêt le vent irradie sa
présence d’un coeur essoufflé d’angoisse”). Enfin, le Maroc rompt le silence
sur ses enclaves spoliées: le Sahara récupéré en 1975, Ceuta, Mellila et les îles
Zaffarines ,
encore colonisées par l’Espagne
post-franquiste, nostalgique de l’ère post-féodale des rois catholiques hispano-portugais, de 1492. Il
réclame alors l’unanimité du monde autour de
parachèvement de l’intégrité
territoriale du Maroc, qui ne saurait plus tarder.
Aujourd’hui, l’économique, selon F.
Fanon, prime le partage colonial de l’Afrique: “Une Conférence de Berlin [en
1885] avait pu répartir l’Afrique déchiquetée [dont le Maroc] entre trois ou
quatre pavillons. Actuellement, ce qui est important ce n’est pas que telle
région africaine soit sous souveraineté française [espagnole] ou belge:
ce qui importe, c’est que les zones économiques soient protégées [l’économie des marchés] (…). Aujourd’hui on ne mène pas de guerre de
répression contre tel sultan rebelle [v. le roi du Maroc, S.M. Mohamed V, exilé en 1953-1955] (…). Les militaires continuent, bien sûr, à jouer avec les poupées
datant de conquête [v. en 1982, les Malouines
argentines, réoccupée par la G.-B.
et en 2002, l’île marocaine de Persil-Leïla, réoccupée par l’Espagne
coloniale pro-franquiste], mes les milieux financiers [les USA, la FMI, etc.]
ont vite fait de les ramener à la réalité [du marché mondial].” – Op.cit.,
p.29. C’est ainsi que le poète prônait prophétiquement:
+ “Le volcan [les croisades coloniales des rois catholiques
hispano-portugais et pro-franquiste de 1492] cessant de parler/ De sa langue de
feu brûlant [des armadas de croisés fanatiques ravageurs et
pillards]/ La terre s’est ranimée [le monde s’est en majorité décolonisé sous l’égide de l’ONU, depuis 1945] (…)// Dans la vaste forêt [le monde de la loi de la
jungle colonialiste de l’Espagne post-féodale et pro-franquiste]/ le vent [le modernisme libérateur des territoires
marocains colonisés] irradie sa présence [son exigence mondiale]/ En branches
[dans les enclaves du Sahara, Mellila, des îles
Zaffarines, etc.,
attendant de leur décolonisation par le pays administrant
espagnol, etc.] qui s’émeuvent et
frissonnent/ Mollement au rythme d’un coeur essoufflé d’angoisse [pacifiquement
et patiemment pour dissiper l’amnésie volontaire et les phobies post-féodale et pro-franquites éculées].//
“Alors je piétine les tessons du silence/
Brisé sur le sol de l’automne [je revendique de vive voix la marocanité des enclaves spoliées par la colonialisme hispano-portugais, cédant le pas à l’ère de la démocratie, des
Droits de l’Homme, de la tolérance et de la décolonisation universelle]/ Comme
la saveur du vide s’est affadie [le temps des conquêtes et des terres brûlées est révolue]/ Nous nous
sommes trouvés trois [à la Bataille des Trois Rois, en 1578]/ En
commune ferveur associés [par nos martyrs];/ La Nature [la géo-historicité],
Ton Souvenir [l’Andalousie et la Reconquista] et moi [le Maroc Etat séculaire
face à ses enclaves spoliées au nom
d’une idéologie coloniale post-féodale et profranquiste périmée].//
Mon refrain [ma revendication légitime de la marocanité des presides marocains] dissipant les fantômes [exorcisant notre
voisinage des spectres de la Reconquista et des croisades coloniales des rois
catholiques hispano-portugais anti-marocains]/ Je n’ai plus peur [je suis
rassuré]/ Je ne suis plus… seul [je
participe au concert des nations plaidant la décolonisation des territoires sous domination
étrangère à l’ONU].//”- C.P.M., “Anthologie maghrébine”,
Paris, Hachette, 1965, p.1522.
A vrai dire, il se dégage de la poésie
marocaine francophone, comme auparavant de son homologue la poésie marocaine arabophone, un intérêt particulier porté à la cause nationale de décolonisation des enclaves de Ceuta, Mellila et des îles
Zaffarines marocaine par l’Etat daministant espagnol encore sous l’empire de
l’idéologie fanatique de
Reconquista et des croisades des rois
catholiques hispano-portugais et post-franquistes révolues. “La terre, écrit par ailleurs le poète marocain A. Laâbi, symbolise maintenant, en
profondeur, la patrie [v. la marocanité]. Elle
n’est perçue qu’en fonction du Retour, c’est-à-dire de la libération [la décolonisation totale de ses territoires]. Le poète combattant, démontre par
là qu’il a renouvelé le pacte [de la démystification de la propagande
mensongère coloniale] des prédécesseurs [post-féodaux et pro-franquistes] (…). Le truquage de
l’histoire [du pays colonisé], ajoute-t-il, le racisme culturel [et religieux],
sont partie intégrante de toute idéologie coloniale.” – “La poésie
palestinienne de combat”, Op.cit., p.19.
Pour conclure, il faut reconnaître que la marocanité des
enclaves de Ceuta, Mellila et des îles
Zaffarines, encore sous domination coloniale espagnole, à l’ère des ultimes décolonisations (v.
Hong-kong, Macao), constitue légitimement certes une unanimité majeure et une volonté radicale dans la poésie marocaine arabophone (1959-2007) et francophone
(1969-2007). Elle plaide d’une même voix l’abolition de
l’idéologie de la Reconquista (1492) et des croisades des rois catholiques
hispano-portugais anti-marocains (1415-1956) et revendique la marocanité des enclaves du Rif spoliées, au Maroc indépendant, depuis 1956. “Or,
pourrait-on dire avec F. Fanon, l’intellectuel colonisé [v.le poète] qui veut faire oeuvre
authentique doit savoir que la vérité nationale [la vérité de l’intégrité
territoriale nationale], c’est d’abord la réalité nationale [la réalité
géo-historique et politique nationale] (…). Sur le plan de la poésie [v.
marocaine arabophone et francophone],
nous pourrions faire les mêmes constatations (…).
Comprendre ce poème [cette poésie], c’est comprendre le rôle qu’on a à jouer [pour assurer la
marocanité de Ceuta, Mellila et les îles
Zaffarines
spoliées par l’Espagne post-féodale
et pro-franquiste],
identifier sa démarche [sa stratégie anti-coloniale], fourbir ses armes [forger
les moyens d’action nationale].”- “Les damnés de la terre,
Op.cit., pp.156,162.
Dr. SOSSE ALAOUI MOHAMMED
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