L’UMA : ENTRE LES MYTHES INHIBITEURS ET
LA REALITE DANS
LE ROMAN MAGHREBIN D’EXPRESSION FRANÇAISE
L’UMA (l’Union de Maghreb
Arabe) a été fondée, le 17 février 1989, par le
Traité de Marrakech, signé par les cinq chefs d’Etats du Maroc, de l’Algérie,
de la Tunisie ,
de la Libye et
de la Mauritanie ,
et ce à la suite de la réunion de Zeralda (Algérie), le 10 juin 1988, ayant
porté sur la Commission
chargée de définir les voies et les moyens de
sa réalisation – www.uma.leguide.ma,
p.1. Pourant, on relève pardoxalement, dans la presse nationale en 2007, après
dix-huit de son existence, des titres aussi décevants qu’interrogateurs, tel
que: “18ème anniversaire de l’UMA: Un choix stratégique inéluctable,
mais dont le bilan est peu reluisant” – www.lopinion.ma,
p.1. A vrai dire, à quoi pourrait-on attribuer politico-historiquement ce
retard de l’UMA? Du point de vue ethno-culturel, il y a lieu de l’imputer à des
mythes à la fois supranationaux et nationaux, tant colonionaux qu’impérialistes
inhibiteurs de sa réalité. C’est ce que nous révèlent textuellement parlant les
thèmes du Maghreb et de l’Afrique du Nord, dans le roman maghrébin d’expression
française. “Quand on invite, objecte Mostefa Lacheraf , les écrivains [les
romanciers autochtones] à parler de la révolution populaire pourtant trahie [anti-UMA], c’est cet
héroïsme et seulement lui qu’on propose à leur verve exaltée [mythes nationaux].
Or, cette veine à exploiter toutes affaires cessantes bien après la guerre de
libération perpétue un nationalisme anachronique [mythes supra- nationaux] et détourne les gens des réalités nouvelles
et du combat nécessaire en vue de transformer la société sur des bases
concrètes [pro-UMA] en dehors des mythes inhibiteurs et des épopées sans
lendemain [du micro-nationalisme].” – Jean Déjeux, “La littérature
maghréne de Langue française”, Québec, Ed. Naaman, 1978, p.65.
Pour cerner ces mythes
inhibiteurs de la réalité de l’UMA, dans le roman
maghrébin d’expression française, nous examinerons corrélativement: I) Les
mythes supranationaux inhibiteurs de la réalité de l’UMA dans le roman
maghrébin d’expression française, II) Les mythes nationaux inhibiteurs de la
réalité de l’UMA dans le roman maghrébin d’expression française.
I- Les mythes supranationaux
inhibiteurs de la réalité de l’UMA dans le roman maghrébin d’expression
française:
Certes, les mythes supranationaux de la
réalité de l’UMA sont comme tous les mythes imprévisibles et peuvent être
parfaitement dynamisants et unitaires
(pro-UMA) ou au contraire inhibiteurs et séparatistes (anti-UMA). “A
chaque instant, remarque Alfred Fauque, des mythes nouveaux surgissent. S’ils
n’avaient qu’un but de regroupement constructif [pro-UMA], ils ne pourraient
qu’aider tous les dialogues possibles [mythes supra-nationaux unitaires], mais
en exaltant des éléments passionnels rendus communs, ils fournissent
d’incontestables commodités de combat [mythes supra-nationaux séparatistes].” –
“Les perspectives d’un dialogue Orient-Occident”, “Confluent”,
nº14, Juin/ Juillet, 1960, Ed. Imprimar-Rabat, p.393. Là encore, on pourrait
observer en ce sens parmi les mythes
inhibiteurs supra-nationaux de la
réalité de l’UMA, dans le roman maghrébin d’expression française, à la fois des
mythes supra-nationaux coloniaux, des mythes supra-nationaux idéologiques et
des mythes supra-nationaux impérialistes.
1- Les mythes supranationaux
colonialiaux inhibiteurs de la réalité de l’UMA dans le roman maghrébin
d’expression française:
“L’histoire, indique A. Fauque, est
ainsi pleine de Grecs [micro-Etats] avec leurs barbares [ultra-nationalistes]et
chacun risquait toujours d’être le barbare d’un autre [micro-Etats
ultra-nationalistes] (…). Enfin, choses tues et insoupçonnées se trouvent
parfois amplifiées par les mythes supranationaux en vigueur au cours de
l’affrontement [anti-UMA].” – Op.cit., pp.392-393. C’est ce que sous-tendent
mythiquement le colonialisme et l’impérialisme face à la démocratie, au
socialisme, la mondialisation et aux
grands blocs régionaux de l’Union Européenne (UE), de l’ALENA en Amérique du
Nord, de l’ASEAN en Asie et du MERCOSUR en Amérique latine et de l’UMA au
Maghreb, etc.
En effet, les mythes supranationaux
inhibiteurs coloniaux de réalité de l’UMA semblent légitimer idéologiquement le
blocage de de cette institution unitaire par des antagonismes de micro-Etats
utra-nationalistes ou séparatistes, issus de la lutte anti-coloniale, restituée
ethno-culturellement dans le roman maghrébin d’expression française. “Des
années après l’indépendance, souligne Franz Fanon, incapable d’inviter le
peuple à une oeuvre concrète, incapable d’ouvrir réellement l’avenir au peuple,
de lancer le peuple dans la voie de la construction de la nation [l’UMA], donc
de sa propre construction, on voit le leader [les micro-Etats] ressasser
l’histoire de l’indépendance nationale [micro-nationalisme], rappeler l’union
sacrée de la lutte de la libération [mythes supra-nationaux coloniaux].” – “Les
damnés de la terre”, Paris, Ed. Maspero, 1970, p.111. Ainsi est-il des:
1- Les mythes supranationaux
colonaux inhibieurs de la réalité de l’UMA:
Le micronationalisme a été le trait
spécifique, oserions-nous dire, des mythes supra-nationaux colonaux
inhibiteurs de la réalité de l’UMA. “Au lendemain de l’indépendance, en effet,
décèle F.Fanon, elle [la bourgoisie colonisée au pouvoir] se heurte aux
séquelles humaines du colonialisme [mythes supra-nationaux] (…). Elle va se
battre impitoyablement contre ces gens [les étrangers] «qui insulte la dignité
nationale» [mythes ultra-nationalistes] . Elle brandit énergiquement les
notions de nationalisation des cadres, d’africanisation des cadres. En fait, sa
démarche va se teinter de plus en plus de racisme [ethno-culturel] (…). Du
nationalisme nous sommes passés à l’ultra-nationalisme, au chauvinisme, au
racisme [des ethnies ultra-nationalistes].” – Op.cit., pp.100-101. D’où l’écho
de cette mythologie coloniale anti-UMA, dans le roman maghrébin d’expression
française, dans :
+ “Une enquête au pays”
(1981):
Le romancier marocain Driss Chraïbi
(1926-2007) exalte, dans ce roman, le brassage outre-frontière des populations
marocaines et algériennes et leur solidarité géo-stratégique, pendant la guerre
de libération – escamoté idéologiquement par les micro-Etats post-coloniaux
sous l’empire idéologique des mythes supra-nationaux inhibiteurs de la réalité
de l’UMA, antagonisme campé ici par le Berbère Raho, alias le commandant
Filagare (du Maroc) et franc-tireur allié du FLN (d’Algérie):
“Il [Raho] se souvenait d’avoir pleuré
ainsi, misérablement, là-bas dans le pays des Algériens, du temps où il était
le commandant Filagare [allié-FLN]. Il y avait le chagrin d’avoir infligé la
mort à des Français, des hommes de guerre peut-être bien mais ses semblables,
afin de retrouver sa propre vie [sa dignité de pseudo-fellagha torturé par des
soldats français].” (p.84).
+ “Les lions de la nuit”
(1985):
L’Algérien Azzeddine Bounemeur (né en
1945) évoque dans ce roman le moment historique où l’unité du Maghreb avait
réuni l’Emir Abdelkader (1808-1883) au nom de l’Algérie et le Sultan Moulay
Abderrahman (1785-1859) contre l’armée coloniale française à la tragique
bataille d’Isly (1844), passant sous silence la participation marocaine et
maghrébine. Ce qui la réduit alors à un simple mythe supra-national colonial
inhibiteur de la réalité de l’UMA.
+ “Si Salah se tenait debout au mileu
de cet îlot (…), la voie saisie par l’émotion: «Voilà le jour tant attendu par
nous tous, frères (…). Sans tous ces contacts, sans notre volonté de nous
hisser au niveau de l’Histoire, nous ne serions pas ici (…). Bien sûr, notre
peuple n’a jamais cesser de résister à l’envahisseur depuis qu’il a foulé notre
sol [mythe supra-national colonial]. L’Emir Abdelkader mena une lutte
farouche et il ne fut vaincu qu’à cause
de la trahison de la féodalité servie par le régionalisme [anti-UMA]. C’est un
mal [Etats-micronationalistes] qui nous
ronge et nous sommes tenus de le combattre impitoyablement.»”(pp.322-324).
+ “Les jardins du Nord”
(1982):
Pour la romancière tunisienne Souad
Guellouz (née en 1937) fait, avec ironie, le portrait du Bey de Tunisie un pion
impuissant, acclamé par la presse colonialiste de l’époque: La Tunisie Française ,
La Dépêche ,
etc., et manoeuvré par la
France coloniale du Général de Gaulle, lors de sa viste à
Paris, le 14 juillet 1945, pour célébrer la victoire alliée sur l’Allemagne
nazie, au prix de la mort des combattants de Tunisie et du Maghreb
compartimenté et colonisé [micro-Etats], préfigurant un mythe supra-national
colonial inhbiteur de la réalité à venir de l’UMA. Son narrateur annonce:
“Le Bey devait venir à Bizerte…
exactement le 11 juillet 1945. Il devait venir à Bizerte et de là, s’embarquer
pour la France
sur un paquebot magnifique, le Gloire. Le Secrétaire Général du
Gouvernement monsieur Gromant,
l’accompagnerait, le Général Mast, Résident Général de France en Tunisie
l’ayant déjà précédé à Paris depuis le 5 juillet pour l’y accueillir. Le Bey
serait reçu par le Général de Gaulle et là tous deux assisteraient à la revue
du 14 juillet. Dans le programme on avait même prévu une visite en Allemagne où
beaucoup de Tunisiens laissèrent leurs
peau et leurs os [anti-UMA]… au
sens propre. C’est pourquoi il fallait
que nos colonisateurs fassent un geste envers cette gentille Afrique du Nord
[pro-UMA] (et Bizerte donc…) de vaincre l’Axe… Par conséquent une sucette après
ce petit bobo (cette saignée, oui, des deux guerre ). Car c’est ainsi, vu le
ton des journaux de l’époque, La Tunisie Française , La Dépêche , etc.,
qu’étaient considérées ces futures visites du Bey en Europe. Un grand honneur
qu’on lui faisait vraiment [mythe supra-national colonial].” (pp.54-57).
Il apparaît que les mythes supranationaux
coloniaux inhibiteurs de la réalité de l’UMA ont pour ressor l’histoire
globale, souvent tue par l’histoire des micro-Etats ultra-nationalistes ou
séparatistes post-coloniaux, et ce détriment de l’ensemble régional
géo-stratégique unitaire et complémentaire maghrébin, au temps des grands blocs
économiques régionaux dans le monde de la globalisation.
“Mais on est obligé de constater,
explique A. Fauque, que les régimes [micro-Etats] divers qui se sont établis au
nom d’une vérité du moment, tendent à organiser leur histoire autour de cette
vérité [idéologie ultra-nationaliste]. Le besoin de légitimation de tous les
gouvernements ne peut les laisser indifférents à la manière dont leur peuple
les voit en fonction de son passé, de son présent et de son avenir [mythes
supra-nationaux coloniaux]. On comprend alors que plus un pays est jeune et
plus récente la forme de son gouvernement, plus son régime aura besoin
d’éléments d’autosurestimation [anti-UMA] pour vaincre les obstacles de sa
croissance. Et la psychologie des peuples enseigne que les meilleurs éléments
d’autosurestimation sont ceux que fournit le passé [micro-nationalismes], car
il permet la localisation de tous les mythes dynamisants [mythes supra-nationaux
coloniaux] et leur assure un fondement constitutif et inaliénable [pro-UMA].” –
Op.cit., p.397.
2- Les mythes supra-nationaux
idéologiques inhibieurs de la réalité de l’UMA:
Quant aux mythes supranationaux
idéologiques inhibiteurs de la réalité de l’UMA, dans le roman maghrebin
d’expression française, ils s’ancrent politiquement dans les idéologies
occendentales des régimes nationaux post-coloniaux des Etats de la région
maghrébine. “On aperçoit déjà, relève F. Fanon, que la violence [le conflit
idéologique]dans les voies bien précises au moment de la lutte de libération,
ne s’éteint pas magiquement après la cérémonie des couleurs nationales. Elle
s’éteint d’autant moins que la construction nationale [anti-UMA] continue à
s’inscrire dans le cadre de la compétition décisive [des Etats] du capitalisme
et du socialisme [mythes supra-nationaux idéologiques inhibiteurs].” – Op.cit.,
p.36. C’est ce que reflète du moins l’ultra-nationalisme anti-panarabiste et anti-panislamiste, entre
autres, dans le roman maghrébin
d’expression française, au sein de:
+ “Naissance à l’aube”
(1986):
De plus, on pourrait ressaisir, les
mythes supra-nationnaux idéologiques inhibiteurs de la réalité de l’UMA à
travers les mythes terrifiants
d’inhibitions magiques sources d’assurance et de prohibition d’agressivité
tribale dans la société sous-développée colonisée. “Entre temps, cependant,
explique F. Fanon, la vie continue [sous
le joug colonial], et c’est à travers les mythes terrifiants, si prolifiques
dans les sociétés sous-développées, que le colonisé va puiser des inhibitions à
son agressivité [mythes supra-nationaux] (…). L’atmosphère de mythe et de
magie, en me faisant peur, se comporte comme une réalité indubitable [mythes
nationaux]. En me terrifiant, elle m’intègre dans les traditions, dans
l’histoire de ma contrée ou de ma tribu [micro-Etats], mais le même temps elle
me rassure, elle me délivre un statut, un bulletin d’état civil
[ultra-nationalisme]. Le plan du secret dans les pays sous-développés, est un
plan collectif [anti-UMA] relevant exclusivement de la magie
[micronationalisme].” – Op.cit., pp.20-21. De ces inhibitions
mythico-idéologiques de l’UMA, ce roman marocain de D. Chraïbi explicite:
+ “Et, toujours vivaces, jamais
oubliés, renaissaient au galop les effluves du village d’Azemmour [mythe
idéologique anti-UMA] que les cavaliers de l’émir Oqba [mythe idéologique
pro-UMA] avaient détruit jusqu’aux fondations par un lumineux matin de l’an 681
[micronationalisme] (…).
- Dégagez-moi les rives, avait ordonné
le général Tariq Bnou Ziyyad Je veux voir l’Oued-el-Kébir après ma victoire.
Ici s’élèvera la capitale de l’Empire pour l’éternité [anti-UMA]. (…). Je veux que la lumière des sept cieux
entre flots dans ma ville de Cordoba et que la vie de chacun de ses habitants,
présents ou à naître , soit bercée jour et nuit par la nusique des eaux – tout
comme la musique de Dieu chante de la première à la dernière sourate du Livre
[le Coran] qui renue les âmes et nous a mis en mouvement depuis le désert
arabique [mythe idéologique pro-UMA].” (pp.122-123).
+ “Les lions de la nuit”
(1985):
En vérité, les divergences idéologiques
du tribalisme, du séparatisme et du micro-nationalisme post-coloniaux alimentent
aussi les mythes supra-nationaux idéologiques inhibiteurs de la réalité de
l’UMA. “Les échecs subis [dans le monde rural], remarque F. Fanon, confirment
«l’analyse théorique» des partis nationalistes
(…). Après le triomphe de la lutte de libération nationale, les mêmes
erreurs se renouvellent, alimentent les tendances décentralisatrices et
autonomistes [micronationalistes]. Le tribalisme [ethno-culturel]de la phase
coloniale fait place au régionalisme de la phase nationale, avec son expression
institutionnelle: le fédéralisme [anti-UMA].” – Op.cit., p.68. L’Algérien
Azzeddine Bounemeur en dépeint les contradictions dans cet extrait:
“«Notre mouvement [le FLN], leur
[combattants] dit Si Salah, est un mouvement populaire qui doit être le plus
vaste possible [mythe supra-national idéologique unitaire]. Nous ne tiendrons
pas compte de tel ou tel arch ou de telle ou telle famille [mythe
supra-national idéologique séparatiste].(p.324).
+ “La statue de sel”
(1953):
Par ailleurs, les idéologies -
sionisme, socialisme, panarabisme , indigénisme (ethno-culturel) d’obédience
coloniale - traversent idéologiquement les entités ethniques et
multiconfessionnelles, notamment juives, des Etats post-coloniaux maghrébins.
“Et il est vrai, reconnaît Abdelkebir Khatibi, que, par l’institution de l’Etat
d’Israël (lié à l’impérialisme occidental), la Diaspora juive se trouve
dans une situation infiniment complexe. Je connais de près le déchirement de
mes amis juifs. D’une part, la
Diaspora est divisée en elle-même, elle est taversée par des
mouvement politiques et idéologiques différents, sinon opposés. Et d’autre
part, le Juif de la Diaspora
est chaque fois acculé à donner une réponse à sa double identité, à sa double
fidélité.” – “Vomito blanco”, Paris, Ed. U.G.E., 1974, p.100.
C’est ce que traduit ce dialogue entre les deux tunisiens Benillouche et Ben
Smaan, du Tunisien juif Albert Memmi (né
en 1920):
“Je [Benillouche] ne savais alors que
penser du sionisme, mais cette rapide exécution [rejet de Ben Smaan] me
froissa, la menace surtout me choqua. Cependant, je sentais chez Ben Smaan un
effort d’ouverture, une générosité sincère. De son passage aux Jeunesses
Socialistes, il avait retenu un humanisme large et la nécessité d’une
libération sociale, tout autant que politique (…). Mais il avait quitté les
socialistes lorsqu’il vit que les sections locales des partis européens ne
pouvaient trouver audience et racine dans le peuple [mythe supra-national
idéologique unitaire].Il fallait un parti indigène, exprimant le peuple et
luttant pour lui [mythe supra-national séparatiste].
Ma violence dans la controverse et le
refus devenaient irrésolution, dépaysement, quand il fallait construire.
- Tu [Ben Smaan] sais ce que tu es et
ce que tu veux: tu as de la chance (…). Moi, je suis obligé de réfléchir. Tu
souhaites ardemment le retour à la culture
et à la langue arabes [pro-UMA].Moi je suis maintenant de culture
occidentale et serais incapable d’écrire ou de m’exprimer complètement en arabe.
Et pourtant, les injustices, les refus de l’Europe…[anti-UMA]” (pp.214-215).
En somme, les mythes supra-nationaux
idéologiques inhibiteurs de l’UMA se voient en plus pris dans les filets de
l’idéologie impéraliste occidentale claironnant son appui à
l’anti-colonialisme, aux minorités locales ethniques dominées, au
territotorialisme exacerbé et aux micro-nationalismes ultra-nationalistes. “Le
capitalisme et l’impérialisme, précise F. Fanon, sont convaincus que la lutte
contre le racisme et les mouvements de libération nationale [idéologiques] sont
purement et simplement télécommandés, fomentés de «l’extérieur». Aussi
décident-ils d’utilier cette tactique [propagande] efficace : Radio-Europe
Libre, comité de soutien des minorité s (…). Ils «utilisaient le peuple contre
le peuple» [colonisés] (…). Le colonisé, l’homme sous-développé sont
aujourd’hui des animaux politiques au sens le plus planétaire du terme [mythes
supra-nationaux impérialistes].” – Op.cit., p.40-41. D’où encore le caractère impérialiste des mythes supra-nationaux
inhibiteurs et la réalité de l’UAM.
3- Les mythes supranationaux
impérialistes inhibieurs de la réalité de l’UMA:
Toutefois, les mythes supra-nationaux
impérialistes inhibiteurs de la réalité de l’UMA, dans le roman maghrébin
d’expression française, viennent parachever la configuration mythologique
supra-nationale des inhibitions
politiques qui en découlent. Dans cette même optique, L.-P. Ajoulat, reconnaît
la nature provisoire des mythes occidentaux: “L’Occident [colonial] a déjà
inventé et usé tant de mythes que ses partenaires [pays ex-colonisés]ont le
droit d’être pour le moins scéptiques.
Maintenant, il est vrai que son
impérialisme culturel [ethnique] recule en hâte devant les révélations des ethnologues comme
devant les proclamations des hommes de couleur eux-mêmes [mythes pro-UMA];
maintenant, surtout que l’emprise politique des nations blanches
[colonisatrices] sur des terres lointaines [pays colonisés] cède la place à des
Etats maîtres de leur avenir [micro-Etats post-coloniaux], il a fallu procéder
à une reconversion précipitée des idéologies [mythes supra-nationaux
impérialistes] en cours. Plus questions «d’assimilation» ni même de «mission
civilsatrice» des peuples avancés [anti-UMA], le sous-développement
[mythe pro-UMA] devient subitement la clef de tous les problèmes
d’outre-mer et surtout le fondement de toute coopération entre l’Occident et le
monde extérieur [Etats supra-nationaux impérialistes].” – “L’assistance
technique nouveau mythe”, “Confluent”, Op.cit., p.319. Ce
dont rendent comptent les romans maghrébins que voici:
+ “La mémoire
tatouée”
(1971):
Dans ce roman, le
Marocain Abdlkebir Khatibi (né en 1938) dénonce
les terribles méfaits de l’impérialisme occidental en guerre contre le nazisme
durant la Seconde
conflit mondiale, sous l’égide des U.S.A. sur les peuples du Maroc et du
Maghreb, augurant des mythes supra-nationaux impérialistes inhibiteurs de la
réalité actuelle de l’UMA. F. Fanon en dresse le bilan avec dépit en ces
termes: “Le bien-être et le progrès de
l’Europe ont été bâtis avec la sueur [des émigrés] et les cadavres des nègres,
des Arabes, des Indiens et des Jaunes [des tirailleurs indigènes]. Cela, nous
décidons de ne plus l’oublier (…). Le colonialisme et l’impérialisme ne sont
pas quittes avec nous quand ils ont retiré de nos territoires leurs drapeaux et
leur force de police [mythes supra-nationaux impérialistes].” - Op.cit.,
pp.54,58. Cela devient un antagonisme mythique anti-impérialiste et pro-UMA
chez le narrateur d’A.Khatibi:
“Radio-Berlin captait l’attention de nos
pères [mythe national pro-UMA]; l’histoire internationale entra dans ma petite
enfance par la voix du sinistre dictateur [mythes supra-nationaux
impérialistes].
Expédition, en cas d’alerte, dans un
terrain vague maritime. Nous laissions derrière nous une ville éteinte: le vol
et le pillage étaient rois (…). La guerre des autres [mythe impérialiste
anti-UMA] passa vite, comme un combat imaginaire et lointain, sans morts, sans
sang palpable, un combat aux adversaires invisibles et qui se termina par des
épisodes d’abord déplaisants. Fuck fuck lady, nous demandaient les Américains
[soldats US] en distribuant du chewing-gum. J’appris avec eux la direction du
bordel [mythe impérialiste anti-UMA].” (pp.11-12).
+ “Nedjma” (1956):
Par ailleurs, l’Algérien Kateb Yacine
(1929-1989) fustige dans son roman, avec un relent ethno-culturel païen, les
impérialismes sanguinaires historiques qui avaient dominé la Numidie (le Maghreb),
depuis les Romains jusqu’aux Français et aux Espagnols (l’Arc de Triomphe) en
passant par les Turcs (la
Sublime Porte ). “Chaque statue, dénote F. Fanon, celle de
Faidherbe ou de Lyautey, de Bugeau ou du sergent Blandan, tous ces
conquistadors juchés sur le sol colonial n’arrêtent pas de signifier une seule
et même chose: «Nous sommes ici par la force des baïonnettes…» [mythes
impérialistes anti-UMA ]” – Op.cit., p.43.Il en reconstitue la mémoire mythique
en ressassant:
“Constantine luttant pour Cirta et Bône
pour Hippone comme si l’enjeu du passé, figé dans une partie apparemment
perdue, constituait l’unique épreuve pour les champions à venir [mythes
supra-nationaux impérialistes]: il suffit de remettre en avant les Ancêtres
pour découvrir la phase triomphale, la clef de la victoire refusée à Jugurtha [mythe impérialiste
pro-UMA], le germe indestructible de la nation écartelée entre deux continents,
de la Sublime Porte
[Asie] à l’Arc de Triomphe, la vieille Numidie où se succèdent les descendants
Romains, la Numidie
dont les cavaliers ne sont jamais revenus de l’abatoir, pas plus que ne sont
revenus les corsaires qui barraient la route à Charles Quint …Ni les Numides,
ni les Barbaresques n’ont enfanté en paix dans leur patrie. Ils nous la laissent
vierge dans un désert ennemi, tandis que se succèdent les colonisateurs, les
prétendants sans titre et sans amour [mythe impérialiste anti-UMA]…” (p.175).
+ “Le Quai aux fleurs ne répond plus” (1961):
De même, le romancier tunisien Mustapha
Tlili (né en 1937) incrimine l’Occident impérialiste en Afrique [au Maghreb],
en Amérique latine, aux U.S.A. dans sa minorité noire, dans une lettre adressée
par un Iranien au journaliste Jalal Ben
Cherif, pour de de l’interview qu’il fit
avec un curé dans L’Humanité, illustrant ainsi un mythe supra-national
impérialiste inhibiteur de la réalité de l’UMA, dans le roman maghrébin
d’expression française. “Les dirigeants nationalistes, argue F. Fanon, savent
que l’opinion internationale est forgée uniquement par la presse occidentale
[mythe supra-national impérialiste anti-UMA]. Or, quand un journaliste
occidental nous interroge, c’est rarement pour nous rendre service [mythe
supra-national impérialiste pro-UMA].” –
Op.cit., p.38. Le narrateur en brosse
les abus historiques ici:
“La lettre de l’Iranien, c’était
elle, qui, de toutes les réactions de
tes lecteurs publiées par L’Huma à la suite de ton interview du curé
(..) avait presque réussi à te réveiller de ta détresse (…). Lis la maintenant
que tout est foutu.
“Cette fois, bravo, monsieur: vous
avez visé juste, vous n’êtes pas passé à côté du problème comme vous nous avez
accoutumés de faire depuis que je vous lis! [mythe supra-national
impérialiste](…). Car en fait quel est le problème? Il est simple, à mon
avis, très simple: il s’agit de savoir si notre entreprise de salut [notre
prise de conscience], nous les damnés de la terre, les peuples d’Afrique [l’UMA],
d’Asie [l’ASEA] et d’Amérique latine [le MERCOSUR], la minorité
noire des U.S.A. [l’ALENA], nous devons espérer quoi que ce soit de
l’Occident, je dirais même: nous avons à faire quoi que ce soit avec
l’Occident, l’ennemi mortel, l’ennemi de toujours, lui qui a, des siècles
durant, cherché à nous miner jusqu’au plus profond de notre être, le plus souvent violemment [le
colonialisme traditionnel anti-UMA], mais parfois aussi, surtout de nos
jours, sous les formes les plus insidieuses [mythe supra-national
impérialisme anti-UMA].” (p.162).
Néanmoins, A. Fauque énonçait déjà avec justesse: “Actuellement,
il semble que ce soit l’impérialisme, vieux cheval [de Troie] de retour, dont
le caractère général [mimétique] lui permet d’être partout: en Europe, Asie,
Afrique [UMA] et tout récemment en Amérique. Celui-là paraît devoir être le
mythe à tout faire de l’avenir, car il offre, en plus, l’avantage d’une
utilisation multilatérale [mythes supra-nationaux impérialistes inhibiteurs].”
– Op.cit., p.393. De plus, les mythes nationaux inhibiteurs de la réalité de
l’UMA, dans le roman maghrébin d’expression française, ne font pas non plus
défaut. Ils s’articulent de leur côté en mythes étatiques, ethno-linguistiques
et anti-démocratiques. Ils s’y articulent comme suit:
II- Les mythes nationaux inhibiteurs
de la réalité de l’UMA dans le roman maghrébin d’expression française:
Les mythes naionaux inhibiteurs de la
réalité de l’UMA, dans le roman maghrébin d’expression française, pèchent
surtout par excès d’ultra-nationalisme conflictuel et de chauvinisme réactionnaire
et violent (militariste). “On sait, rappelle A. Fauque, que notre siècle [XXe
s.], qui a découvert l’étroitesse des nationalismes exclusifs
[ultra-nationalistes], au lieu de les atténuer, a réussi à les vitaliser en les
groupant autour des mythes opposés [micro-nationalistes]. Déjà, en 1939, ceux
du «fascisme» et de la «démocratie» [voire du socialisme] ont réuni deux
ensembles différents de nations pour leur entrée en guerre. Depuis l’habitude
en est prise.” – Ibid. D’où en l’occurrence:
1- Les mythes nationaux
micro-étatiques inhibieurs de l’UMA:
Les mythes nationaux micro-étatiques
inhibieurs de la réalité de l’UMA sont, par leur territorialisme et leur
micro-nanationnalisme radicalement
contestés, au Sénégal, par Mamadou Dia,
cité par F.Fanon: “Leur erreur [des leaders de l’OUA], notre erreur, a été,
sous prétexte de lutter contre la balkanisation, de ne pas prendre en
considération ce fait précolonial qu’est la territorialisation (…). Nous nous
sommes laissés séduire par le mirage de la construction la plus satisfaisante
pour l’esprit, et, prenant notre idéal pour une réalité, nous avons cru qu’il
suffisait de condamner le territorialisme et son produit naturel, le
micronationalisme, pour avoir raison d’eux, et pour assurer les succès de notre
entreprise chimérique [l’OUA].” – Op.cit., pp.102-103. Le roman maghrébin
d’expression française reflète les mythes supra-nationaux inhibiteurs de la
réalité de l’UMA, dans par exemple:
+ “Une enquête au pays”
(1981):
Du fait, les mythes
nationaux micro-étatiques inhibiteurs de la réalité de l’UMA s’inscrivent, de
façon ironique, à travers une allusion au front Polisario, dans ce roman du
Marocain D.Chraïbi, symbolisant le conflit territorial, entretenu par Algérien
qui, usant de toutes manoeuvres pour créer un micro-Etat satellitaire sur le
Sahra marocain, bloquant du même coup la réalisation de l’UMA, et ce
depuis la Marche Verte du
Royaume pour sa récupération pacifique, en
1975, de l’occupant espagnol. “Cette aspiration à l’unité maghrébine,
écrit Michel Rousset, est partout manifeste malgré les vicissitudes que
connaissent les relations [du Maroc] avec les voisins algériens. Il semble que
l’on soit désormais unanime pour accepter de séparer les divers plans des
relations intermaghrébines, et permettre, en tous cas, aux relations
culturelles et scientifiques de se développer sans contrainte.” – “Lettre de
Rabat”, “Maroc Europe”, 1993-Nº4, Rabat, Ed. La Porte , p.221. Le narrateur
de D. Chraïbi semble narguer cette situation, en y soliloquant sur le compte de
l’inspecteur de police Ali:
“Il connaissait toutes les ruelles de
la médina, il y était né, y avait grandi, y avait appris sa vie d’homme. Il
avait tout pour lui: un vocabulaire argotique capable de faire dresser les
cheveux sur la tête d’un Marocain, un costume râpeux, un tête de miséreux. Il
chantait aussi bien l’Internationale en arabe [socialisme panarabe] que
l’hymne palestinien [l’OLP]ou celui du polisario [le FLN].” (pp.120-121).
+ “L’incendie” (1954):
Quant au roman de l’Algérien Mohammed
Dib (né en 1920), il représente le Maghreb pendant la guerre d’Algérie, un
monde compartimenté par le colonialisme,
à l’aide de frontières étanches, militarisées, interdisant les visites
entre parents (de Aïni) résidant des deux côtés de la frontière
algéro-marocaine, à Tlemcen e tà Oujda. Cela augurait paradoxalement de
la situation frontalière post-coloniale et des mythes nationaux inhibiteurs étatiques
de l’UMA. “Le monde colonial, note F.Fanon, est un monde compartimenté (…).
Cette approche du monde colonial, de son arrangement, de sa disposition
géographique va nous permettre de délimiter les arêtes à partir desquelles se
réorganisera la société décolonisée [le Maghreb].
“Le monde colonisé est un monde coupé en
deux [national et étranger]. La ligne de partage, la frontière en est indiquée
par les casernes et les postes de police [frontières étanches]. Aux colonies
[micro-Etats], l’interlocuteur valable et institutionnel du colonisé [du
Maghrébin], le porte-parole du colon et du régime d’oppression est le gendarme
ou le soldat.” – Op.cit., p.7. M. Dib
campe cet ananchronisme historique par l’Algérienne Aïni interdite de se rendre
de Tlemcen à Oujda:
“- Le monde n’est plus le monde,
commença par dire Aïni. Mes petites soeurs, il se passe des choses peu
ordinaires chez nous. Savez-vous ce qu’on m’a dit à la gare? Je m’approche;
l’homme des billets me dit: «Ma petite mère, on ne peut plus voyager sans
autorisation spéciale.» Mais je lui réponds: Je suis toujours allée à Oujda
sans avoir eu besoin d’autorisation. Il me dit alors: «Ça a changé, ma petite
mère!» Et pourquoi ça a changé? Et pourqoi? Faut croire que le monde aussi a
changé. «Eh oui, ma petite mère, le monde a changé, il me dit. Je comprends
qu’il a changé! C’est depuis qu’il y a la guerre.» Alors comme ça, je lui dis,
ça change juste au moment où je veux aller à Oujda! «Ce n’est pas spécialement
pour toi qu’on a fait ça», il me dit. Alors si ce n’est pas spécialement pour
moi, je lui dis, c’est pourquoi? Pourquoi? il me dit. Mais c’est à cause de la
guerre!» J’ai de la famille à Oujda, je lui dis, je voudrais seulement aller
voir les miens. Je t’assure que ce n’est pas pour autre chose. «Il te faut un
sauf-conduit, il me dit, sinon je ne pourrai pas te donner de billet.»”
(p.149).
+ “La Rage aux tripes”
(1975):
Parallèlement, le Tunisien M. Tlili
consacre son roman à la guerre d’Algérie dans le cadre d’un mythe national
étatique inhibiteur de la réalité de l’UMA, inscrit au sein d’une utopie
étatique d’un intellectuel ultra-nationaliste, Jalal Ben Cherif, rêvant
d’attirer l’attention internationale par ses traités philosophiques, dans un
Etat micro-nationaliste indépendant, dont il serait le porte-parole [le leader] auprès de
l’intelligentsia occidental. “Aucun leader quelle que soit sa valeur, prône F.
Fanon, ne peut se substituer à la volonté populaire [démocratie libérale] et le
gouvernement national [l’Etat micro-nationaliste] doit, avant de se préoccuper
de prestige international [mythe étatique anti-UMA], redonner dignité à chaque
citoyen, meubler les cerveaux, emplir les yeux de choses humaines, développer
un panorama humain [un développement humain] parce qu’habité par des hommes
conscients et souverains [mythe étatique pro-UMA].”- Op.cit., p.139. Tlili en
dévoile les velléités dans ce passage, par Junkee s’adressant à Jalal:
“L’Algérie indépendante aura besoin
d’intellectuels, d’un futur agrégé de philosophie comme toi, un grand
professeur qui réorganisera son enseignement, attirera l’attention
internationale sur elle par ses grands travaux et sera son porte-parole auprès
de l’intelligentsia occidentale. Tu seras ce personnage-là. Mais voilà, la
lettre d’oncle Salah [sur le massacre des siens] a tout foutu en l’air.” – A.
Memmi, “Ecrivains francophones du Maghreb”, Paris, Ed. Seghers,
1985, p326. Or, ces mythes nationaux étatiques inhibiteurs de la réalité de
l’UMA se doublent par ailleurs d’autres purement éthno-linguistiques et
tribaux.
2- Les mythes nationaux
ethnolinguistiques inhibiteurs de la réalité de l’UMA:
En effet, les mythes nationaux
ethnolinguistiques inhibiteurs de la réalité de l’UMA vont de pair avec la
politique coloniale séparatiste et
l’ultra-nationalisme post-colonial des micro-Etats anti-unitaires dans la
région. “La langue, affirme A.M. Hocart, est certainement l’un des principaux
ciments de l’unification nationale [pro-UMA], puisque les nations existantes
correspondent grosso modo à des zones linguistiques [ethno-culturelles]. Or,
comment ces zones linguistiques se sont-elles formées? Par la diffusion de la
langue parlée [mythe anti-UMA] par la classe dominante. C’est ainsi que
l’Anglais a déjà supplanté le Cornique, le Erse, le Gallois; et à l’heure
actuelle, le dialecte des classes dirigeantes continue à combattre des
dialectes locaux [mythe pro-UMA], sous prétexte que ces dialogues ne sont que
des patois (…). L’unification linguistique va de pair avec l’uniformisation des
moeurs et des coutumes [mythe micro-nationaliste ethno-linguistque], ainsi
qu’avec la centralisation administrative [mythe nationale ethno-lnguistique].”
– “Le mythe sorcier”, Paris, Ed. Payot, 1973, p.141. A cet égard,
citons:
+ “Une enquête au pays”
(1981):
Cependant,
la langue coloniale, la langue nationale et les langues orales se heurent au
sein des micro-Etats post-coloniaux, incarnant les mythes nationaux
ethnolinguitiques inhibiteurs de l’UMA, restitués dans le roman maghrébin
d’expresson française. “Les hommes politiques qui prennent la parole, qui
écrivent dans les journaux nationalistes, opine F. Fanon, font rêver le peuple [mythe national ethnolinguistique].
Ils évitent la subversion [mythe unitaire] mais, en fait, introduisent de
terrible ferments de subversion [mythes séparatistes] dans la conscience des
auditeurs ou des lecteurs. Souvent on utilise la langue nationale [pro-UMA]ou
tribale [anti-UMA]. C’est, là encore, entretenir le rêve [mythe national
ethnolinguistique], permettre à l’imagination de gambader hors de l’ordre colonial
[mythe séparatiste]. Quelquefois encore ces hommes politiques disent: «Nous les
nègres [les berbères], nous les arabes», et cette appellation lourde
d’ambivalence pendant la période coloniale reçoit une sorte de sacralisation.
Les hommes politiques nationalistes jouent avec le feu [mythes anti-UMA].” –
Op.cit., p.31. C’est à quoi réfère le
récit antique, ethno-culturel de la mère de l’inspecteur Ali dans le roman de
D. Chraïbi:
“Et les estompant toutes [les clameurs
des membres de la tribu], la voix de sa mère venant du passé et poursuivant le
récit antique:
«… Ils ont toujours convoité la terre
[les étrangers] (…). Ils ont apporté avec eux ce qu’ils appelaient la loi, des
livres qu’ils nous ont obligés à lire: le livre des Youdis [l’hébreu], celui
des Nazaréens [le latin, le portugais, le français et l’espagnol], le Coran des
islamiques [l’arabe] …, quantité d’autres qu’ils ont prétendus saints et sacrés
(…). Ça n’en finira jamais. Parce que les dieux [mythiques] ont brouillés nos têtes,
ils ont mélangé leur langage de mensonge et de magie au nôtre, ils ont effacé
de notre mémoire des temps anciens [mythe national ethno-linguistique]. Et
ainsi nous sommes divisés, les frères contre les frères et nos propres paroles
contre les mots de la tribu (…). Ils ont vendu du sable aux Touareg et ils
feraient croire à n’importe quoi [mythe pro-UMA] (…). Ici ou là, dans la plaine et dans
d’autres pays et jusqu’aux points les plus reculés, c’est partout la même
civilisation [l’UMA]. Mais les dieux l’ont divisée en sens contraires, avec
plusieurs visages et plusieurs langues dans la bouche] Et ainsi, les decendant
du peuple de la terre [du Maghreb] ont été encore plus divisés [mythe anti-UMA]
…» ” (pp.207-208).
+ “La dernière impression”
(1958):
Aussi le roman de l’Algérien Malek
Haddad met-il en scène la vie morose de Berbères nord-africains émigrés à
Aix-en-Provence (France)en bute à la différence de leur us et coutumes et la langue parlée de leurs enfants
provençalisée qu’ils tiennent quand même à utiliser entre eux, mettant en vue
de façon cruciale les mythes nationaux ethnolinguistiques inhibiteurs de la
réalité l’UMA, dans le roman maghrébin d’expression française. Il en esquisse
le portrait collectif suivant:
“Dans la vieille ville
d’Aix-en-Provence, il y a beaucoup de Nord-Africains [berbères] (…). Et c’est
un spectacle quelque peu insolite de voir parfois déambuler les robes larges et
bariolées d’une femme berbère ou trancher le turban clair d’un vieil exilé qui
ne s’est pas résigné à porter la casquette ou à aller nu-tête. Saïd n’aimait
pas voir ces orphelins de mère-patrie (…). Et c’est petits gamins de la rue des
Candeurs, s’ils se mêle un accent provençal à leurs mots [mythe anti-UMA],
c’est quand même en arabe qu’ils parlent [mythe pro-UMA]. A Aix-en-Provence
comme ailleurs, c’est le même refrain, c’est la même rengaine. Lune froide ou
soleil, les Algériens sont des problèmes [mythe national ethnolinguistique].”
(pp.129-132).
+ “La statue de sel”
(1953):
Dans une optique
multiconfessionnelle, les mythes nationaux ethnolinguistiques inhibiteurs de la
réalité de l’UMA prennent dans le roman du Tunisien A. Memmi la figure
symbolique d’Alexandre Benillouche, un Arabo-Berbère juif tunien, confronté à
une véritable crise identitaire d’apprtenance national, ethnoliguistique.
“C’est la période [anti-coloniale] où
les intellectuels, notifie F.Fanon, chantent les moindres déterminations du
panorama indigène. Le boubou se trouve sacralisé, les chaussures parisiennes ou
italiennes délaissées au profit des babouches [mythe pro-UMA]. Le langage du
dominateur écorche soudain les lèvres
[mythe national ethno-linguistique]. Retrouver son peuple, c’est quelquefois dans cette période vouloir être
nègre, un chien de nègre, tel que le veut le Blanc . Retrouver son peuple,
c’est se faire bicot, se faire le plus indigène possible, le plus
méconnaissable, c’est se couper les ailes qu’on avait laissé pousser [mythe
anti-UMA].” – Op.cit., pp.152-153.
A . Memmi met dans la bouche du héros dans ce sens:
“Mordakhaï, Alexandre, Benilouche.
Benillouche enfin, Ben-Illouche ou le fils de l’agneau en patois berbéro-arabe
[mythe pro-UMA]. De quelle tribu montagnarde mes ancêtres sont-ils sortis? Qui
suis-je enfin? (…).
“Un jour, j’ai cru me découvrir issu
d’une famille de princes berbères, judaïsés par la Kahina , cette reine
guerrière qui fonda un royaume juif en pleine Atlas [mythe anti-UMA].” –
Op.cit., pp.86-87.
A vrai dire, les mythes nationaux ethnolinguistiques
inhibibiteurs de la réalité de l’UMA, exigent pour être dépassés comme les
mythes supra-nationaux vers l’avènement de ce marché commun maghrébin , comme
ses homologues dans le reste du monde,
suggère Michel Jobert, son équitabilité sur une base démocratique. “Les
divers marchés communs qui tentent de s’organiser dans le monde ne réussiront
que s’ils sont équitables [mythe pro-UMA]. Cela vaut pour l’Amérique du Nord et
celle du Sud, l’Afrique noire et le Maghreb les pays du Golfe, l’Asie du
Sud-Est, l’Europe même qui risquerait de se défaire par accumulation de
dogmatismes irréalistes [mythe national ethnolinguistique], tel un fédéralisme
négateur des identités de base [mythe anti-UMA].” – “Le fond de l’air”,
“Le Nouveau Siècle”, Nº7, Novembre 1993, Casablanca,
Ed.Maghrébines, p.107.
3- Les mythes nationaux
anti-démocratiques inhibiteurs de la réalité de l’UMA:
En vérité, les mythes nationaux
anti-démocratiques inhibiteurs de la réalité de l’UMA, dans le roman maghrébin
d’expression française, constituent un fait historique du colonialisme et des
partis politiques anti-démocratiques
qu’il avait souvent promus de façon conflictuelle, dans les pays colonisés.
C’est aussi ce que met en cause F.Fanon en ces lignes:
“Quelquefois, le colonialisme tente de
diversifier, de disloquer la poussée nationaliste. Au lieu de dresser les
cheikhs et les chefs contre les «révolutionnaires» des villes, les bureaux
indigènes organisent les tribus et les confréries en partis [mythe anti-UMA].
Face aux partis urbains qui commençaient à « incarner la volonté naionale»
[mythe pro-UMA] et à constituer un danger pour le régime colonial, des
groupuscules [partis anti-démocratiques et anti-UMA] prennent naissance, des
tendances, des partis à base ethnique ou régionaliste surgissent. C’est la
tribu dans son intégralité qui se mue en parti politique conseillé de près par
les colonialistes. Le parti unitaire [parti démocratique et pro-UMA ] sera noyé
dans l’arithmétique des tendances. Les partis tribaux [partis
anti-démocratiques et séparatistes] s’opposent à la centralisation, à l’unité
et dénoncent la dictature du parti unitaire [partis démocratiques et
unitaires].” – Op.cit., p.73. Dans le roman maghrébin d’expression française,
cela est observable dans:
+ “Légende et vie d’Agoun’chich”
(1984):
Dans ce roman du Marocain Mohamed
Khaïr-Eddine (1941-1995), le narrateur départage territorialement le pays en un
Sud ultra-nationaliste, indigène et berbère (Tafraout), fief de partis
ethniques et de mythes nationaux anti-démocratiques et anti-unitaires
[anti-AMA]et un Nord fief apparemment nationaliste allogène et
arabo-occidentalisé, fief de partis nationalistes et de mythes nationaux
démocratiques et unitaires [pro-UMA].
Il y met les métropoles coloniales
qui ont dénaturé l’ordre traditionnel de la société tribale [anti-UMA],
diamétralement opposée aux partis nationalistes démocratiques unitaires
[pro-UMA], taxés de chauvinisme et de racisme soumis à l’influence moderniste
et négative extérieure. Son narrateur régionaliste imbu de mythes nationaux
anti-démocratiques dit avec dépit à leur
endroit, dans ce passage:
“A Tafraout [Sud du Maroc], l’étranger
n’est pas considéré comme un inrus, c’est un pélerin qu’on accueille avec égard
[mythe pro-UMA]. Le chauvinisme et le racisme [partis nationaux anti-démocratiques et séparatistes]
n’ont pas atteint ce bout du monde [partis démocratiques et unitaires] victimes
de l’aliénation extérieure [mythe anti-UMA].” (p.19).
+ “Le grain dans la meule”
(1966):
De son côté, le roman de l’Algérien
chrétien Malek Ouary (né en 1916) décrit le caratère géographiquement enclavé
de la société berbère kabyle, et de ses partis ethniques ultra-nationalistes
préfigurant, ainsi les mythes nationaux
anti-démocratiques inhbiteurs de la réalité de l’UMA. “Le colonialisme, qui
avait tremblé sur ses bases devant la naissance de l’unité africaine [mythe
pro-UMA], indique F.Fanon, reprend ses dimensions et tente maintenant de briser
cette volonté en utilisant toutes les faiblesses du mouvement [mythe anti-UMA].
Le colonialisme va mobiliser les peuples africains en leur révélant l’existence
de rivalités «spirituelles» (…). Les missionnaires rappellent opportunément aux
masses que de grands empires noires [berbères], bien avant l’arrivée du
colonialisme européen, ont été démantelés par l’invasion arabe [partis
anti-démocratiques et séparatistes]. On n’hésite pas à dire que c’est
l’occuption arabe qui a fait le lit du colonialisme européen; on parle d’impérialisme
arabe et l’on dénonce l’imperialisme cuturel de l’Islam [partis démocratiques
unitaires].” – Op.cit., p.104. On en lit dans le roman de M. Ouary:
“Les Kabyles ont choisi à dessein ces
emplacements pour y établir leurs cités. Chose curieuse, les constructions ne
semblent rien devoir à l’artifice des hommes tellement elles s’insèrent
harmonieusement dans le contexte géographique des lieux. La structure de ces
cités s’apparente à celle des princpautés [micro-Etats]de l’antique Grèce
[partis anti-démocratiques et séparatistes]; elles sont fédérées entre elles
par un lien tribal plus ou moins lâche selon les nécessités de la sécurité
collective [mythes pro-UMA].
“Un sens exacerbé de l’autonomie
individuelle rejette d’instinct toute constitution organisée et permanente
d’autorité positive [mythes anti-UMA].” (pp.81-82).
+ “La statue de sel”
(1953)
De la même manière, le roman d’A. Memmi
dénude les mythes nationaux anti-démocratiques inhibiteurs de la réalité de
l’UMA en mettant en scène les antagonismes ethno-culturels maghrébins, couvés
par le colonialisme et les partis nationaux anti-démocratiques et séparatistes
(anti-UMA) et les partis nationaux démacratiques et unitaires [pro-UMA].
“La naissance de partis nationalistes
dans les pays colonisés, rapporte F.Fanon, est contemporaine de la constitution
d’une élite intellectuelle et commerçante [mythe pro-UMA] (…). La notion de
parti est une notion importée de la métropole . Cet instrument des luttes
modernes est plaqué tel quel sur une réalité protéïforme, déséquilibrée [mythe
anti-UMA] (…). La grande erreur, le vice congénital de la majorité des partis
politiques dans les régions sous-développées a été, selon le schéma classique,
de s’adresser en priorité aux éléments les plus conscients: le prolétariat des
villes, les artisans et les fonctionnaires, c’est-à-dire une infime partie de
la population qui ne représente guère plus de un pour cent (…). Ici le
«modernisme» est roi [partis démocratiques et unitaires]. Ce sont ces mêmes
milieux qui vont lutter contre les traditions obscurantistes, qui vont réformer
les coutumes, entrant ainsi en lutte ouverte contre le vieux socle de granit
qui constitue le fonds national (…). Encadrés
par les marabouts, les sorciers et les chefs coutumiers, les masses
vivent encore au stade féodal, la toute puissance de cette structure
moyenâgeuse étant alimentée par les agents administratifs ou militaires
colonialistes [partis anti-démocratiques
et séparatistes].” – Op.cit., pp.63-65. En témoigne cet embryon de parti démocratique et unitaire, en gestation dans le roman d’A. Memmi:
“A la
récréation, Ben Smaan me [Benillouche] rejoignit et m’annonça qu’il voulait me
parler. Je me déclarait prêt à l’écouter mais, plissant ses petits yeux dans sa
figure large, il me dit mystérieusement qu’il préférait un endroit clos. Nous
prîmes donc rendez-vous en ville. Il m’apprit qu’il était le secrétaire
régional d’un mouvement de jeunesse politique exclusivement des fils du pays
[mythe pro-UMA]; puis me proposa d’en faire partie. Cela me fit un très grand
plaisir mais je fus bien embarrassé. Je souffrais certes de me découvrir de
plus en plus étranger aux Européens, mais je n’avais jamais envisagé d’aller
vers les Musulmans. Je croyais que cette voie m’était fermée par les Musulmans
eux-mêmes [partis anti-démocratique et séparatistes] (…).
- Précisément, me dit Ben Smaan, c’est
une nouveauté de notre programme. Nous voudrions aussi des Juifs; nous
voudrions exprimer les aspirations de toute la nation [mythe pro-UMA] (…).
- Peut-être, bien que les temps aient
changé. Mais voilà justement du travail pour les gens comme nous, nous qui
savons parler, expliquer, convaincre: nous devons hâter la prise de conscience
et l’union de tous les fils du pays. Pourquoi se priver du concours des Juifs,
d’une notable fraction de la population, particulièrement active, puissante et
habile [parti démocratique et unitaire]?” (pp.213-214).
Il s’avère là que les mythes nationaux
anti-démocratiques inhibiteurs de la réalité de l’UMA, dans le roman maghrébin
d’expression française, sont l’oeuvre des Etats post-coloniaux travaillés par
un territorialisme et un micro-nationalisme périmés, issus de la politique
ethno-culturelle séparatiste coloniale (myhe anti-UMA ), en oppostion radicale
avec les partis nationaux démocratiques et unitaires (pro-UMA).“La violence du
colonisé, explicite F.Fanon, unifie le peuple [mythe pro-UMA]. Le colonialisme
est séparatiste et régionaliste [mythe anti-UMA]. Le colonialisme ne se
contente pas de constater l’existence des tribus, il les renforce, les
différencie [micro-Etats]. Le système colonial alimente les chefferies [mythes
ethniques anti-UMA] et réactive les vieilles chefferies maraboutiques [mythe
religieux anti-UMA]”- Op.cit., p.51.
En conclusion, on peut dire que ni les mythes
supra-nationaux ni les mythes nationaux inhibiteurs de la réalité de l’UMA,
dans le roman maghrébin d’expression française, n’échappent à l’impact
ethno-culturel et idéologique du colonialisme et de l’impérialisme occidentaux,
générateurs d’Etats micro-nationalistes et de blocages anti-démocratiques et séparatistes autour de
cette institution économique régionale, susceptible de relever les défis de la
mondialisation en cours. “Le mythe, au contraire [de l’oeuvre littéraire],
affirme F. Fanon, appartient par définition au collectif , justifie,
soutient et inspire l’existence et l’action d’une communauté [l’UMA], d’un
peuple [mico-Etats], d’un corps de métier [une économie]ou d’un société secrète
[parti ultra-nationaliste].” –Op.cit., p.151. Or, au-delà des mythes
romanesques ou pas, la réalité de l’UMA nous sollicite historiquement. “Un certain degré de
réalisme, suggère Abdelali Benamour, devrait désormais caractériser nos
analyses [du monde]. Quant au Maghreb [l’UMA], tout en l’appelant de nos voeux,
a-t-on le droit d’attendre indéfiniment cette échéance en retardant d’autres et
en perdant des opportunités?”- “La révolution tranquille”, “Le
Nouveau Siècle”, Op.cit., p.132.
Dr. SOSSE ALAOUI
MAHAMMED
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