sábado, 3 de junio de 2023

Pte. anthologie de la topographie des champs de batailles dans les romans de guerre, dans le monde, aux XIXe-XXIe siècles, Dr. SOSSE ALAOUI Med.

Dr. SOSSE ALAOUI MOHAMMED

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Petite anthologie de la topographie des champs

de batailles dans les romans de guerre,

dans le monde, aux XIXe-XXIe siècles 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

                                                                                                                                             

 

 

 

 

Tétouan – 2023

Introduction

 

    Certes, cette : «Petite anthologie de la topographie des champs de batailles dans les romans de guerre, dans le monde, au XIXe-XXIe siècles », constitue une case vide dans les études littéraires. C’est ce que constatent pertinemment Audrey Camus et Rachel Bouvet en soulignant : «L’espace [v. la topographie des champs de batailles dans les romans de guerre] a longtemps été le parent pauvre des études littéraires, où il n’a véritablement fait son apparition qu’au lendemain de la Seconde Guerre mondiale […]. Durant, cette période, le constat d’un manque en la matière est régulièrement réitéré, que les études de type régionaliste – consacré à tel auteur, tel genre ou telle période – peinent à combler. C’est que le domaine est vaste : de la dimension spatialisante à la métaphore littéraire […], en passant par le territoire d’origine de l’œuvre ou l’univers imaginaire de l’auteur, les liens qui unissent espace et littérature sont d’une extrême richesse […]. La chose n’est jamais aussi manifeste que dans le cas des géographies imaginaires, où la topographie conserve une certaine opacité. »  - «Topographie romanesque » ,www.webcache.Google usercontent.com, p.1. D’où la nécessité d’explorer notamment :

 

     I. Les problèmes de la topographie des champs de batailles dans les romans de guerre dans le monde, au XIXe-XXIe siècles :

 

      Les problèmes de la topographie des champs de batailles dans les romans de guerre dans le monde, au XIXe-XXIe siècles, se résument globalement, dans ce constat négatif de Micheline Kessler-Claudet : «La chronologie du roman de guerre est toujours linéaire, pourtant elle est souvent imprécise et l’histoire événementielle des batailles y tient peu place. La topographie, elle aussi, reste floue et on trouve peu d’informations, parfois aucune, sur les positions des armées, leurs mouvements, comme si les auteurs voulaient donner à leur représentation de la guerre une plus grande généralité […]. Mais peu d’indications de dates ou de lieux [v. problèmes de la topographie], l’essentiel est ailleurs, et il semble même que ce flou soit voulu […] pour renforcer l’impression du terrible isolement des soldats dans une guerre qu’ils ne comprennent plus.» - «Partir et revenir dans le roman de la Première Guerre mondiale, ou le retour de l’écrivain », www.books. google.fr, p.75. D’où notamment :

     

     1. Le problème de mise en écriture de la topographie des champs de batailles dans les romans de guerre dans le monde, au XIXe-XXIe siècles :

 

     Du problème de mise en écriture  de la topographie des champs de batailles dans les romans de guerre dans le monde, au XIXe-XXIe siècles, Olivier Lumbroso  relate : «La description d’un champ de bataille est un motif romanesque qui pose à tout écrivain (Hugo, Stendhal, Tolstoï, Claude Simon) de redoutables problèmes de mise en écriture […] : la représentation [la mise en écriture de la topographie] d’un champ de bataille réclame des procédés descriptifs et narratifs qui permettent de varier la saisie du temps (de la simultanéité des petites actions au déroulement de fresque historique), de l’espace (de la vision limitée au panorama), du sens  (de l’ignorance du simple soldat à la stratégie du général en chef, voire à la révélation auctoriale d’un destin tragique.» - «Topologie d’un champ de bataille», www.item.ens.fr, p.1. Du fait , cela révèle les constituants de mise en écriture de la topographie des champs de batailles dans le roman de guerre mondial suivants :

 

A.       La saisie du temps et du déroulement des :

 

          - Petites actions,

          - Grandes actions,

          - fresques historiques.

 

B.       La saisie de la vision de l’espace de :

 

          - La topographie d’un lieu limité,

          - La topographie d’un panorama illimité.

 

C.       La saisie du sens de la stratégie :

 

          - L’ignorance du simple soldat de la stratégie,

          - Le sens de la stratégie du général en chef.

 

D.      La saisie révélatrice du destin par l’auteur de :

  

          - La révélation du destin tragique,

          - La révélation du destin héroïque

          - La révélation du destin parodique. 

 

 

     2. Le problème de l’espace et de la carte géographiques dans la topographie des champs de batailles dans le roman de guerre mondial au XIXe-XXIe siècles :

 

    Pour ce qui est du problème de l’espace et de la carte géographiques dans la topographie des champs de batailles dans le roman de guerre mondial au XIXe-XXIe siècles, Christine Baron atteste : «Le lien entre littérature [roman de guerre] et géographie est en revanche rarement invoqué [problème], alors que le recours aux métaphores de nature géographique pour décrire des faits littéraires ne cesse d’être une constante de la discipline […]. Autant dire que, de son côté, la littérature se situe à la croisée de chemins […], elle intègre diverses composantes du savoir humain, […], au moment même où la géographie peut se définir, elle aussi, par ces identités multiples qui ne s’annulent pas, mais dont la convergence sature de références (topologiques, mémorielles, culturelles) des espaces et rend possible leur lecture et leur interprétation.» - «Littérature et géographie : lieux, espaces, paysages et écritures», www.fabula.org , p.2.

 

     A. Le problème de l’espace géographique dans la topographie des champs de batailles dans les romans de guerre dans le monde, au XIXe-XXIe siècles 

 

     Quant au problème de l’espace géographique dans la topographie des champs de batailles, dans les romans de guerre dans le monde, au XIXe-XXIe siècles , il est lié au regard du narrateur et à la discontinuité des événements, tel que le dit Florent Couao-Zotti : «La représentation de l’espace dans les fictions littéraires […] de la guerre [les romans de guerre] s’articule autour de la dualité entre espace et dramatisation, qui entraîne une représentation de l’espace dans laquelle la topographie des lieux et son onomastique sont mises au service du romanesque, en situant le récit dans un espace à la fois animé et chaotique. L’espace est ici au cœur de la situation de crise qui affecte le personnage, dans la mesure où il s’avère invivable […]. La localisation de l’action s’opère à travers l’insertion de la trame narrative dans une toponymie et une topographie faisant référence à une zone géographique donnée. En ce sens, le rapport dialectique de l’œuvre littéraire à la société est ici manifeste.» - «L’espace de la guerre, un espace tragique.», www.theses.univ-lyon.fr, p.2.                                                                                                                 

    

    Ainsi, le problème de l’espace géographique s’articule-t-il autour des constituants suivants :

 

            - L’espace géographique dans la topographie du roman de guerre lié au regard du narrateur et à la discontinuité des événements,

 

            - La topographie des lieux et son onomastique sont mises au service du romanesque, dans un espace animé et chaotique. 

 

            - La localisation de l’action s’opère à travers une toponymie et une topographie en référence à une zone géographique donnée.

 

    B. Le problème de la carte géographique dans la topographie des champs de batailles dans les romans de guerre dans le monde,  au XIXe-XXIe siècles 

 

    D’ailleurs, Le problème de la carte géographique dans la topographie des champs de batailles, dans les romans de guerre dans le monde, au XIXe-XXIe siècles , y sert selon Aurey Camus et Rachel Bouvet à remodeler l’espace réel ou imaginaire, en affirmant : « La carte, outil du géographe, offre par ailleurs la possibilité de remodeler l’espace à l’intérieur du roman, que ce soit pour donner une consistance prétendument réelle à un pays totalement imaginaire, pour penser le monde après la découverte de l’Amérique ou pour rendre compte de l’anthropologie morale. Comme on s’en rend compte à la lecture de l’article de Lucia Manea, consacré à l’espace renaissant dans le roman historique contemporain [v. roman de guerre], la carte constitue un point d’entrée privilégié dans la topographie romanesque, en même temps qu’elle permet d’appréhender l’articulation entre espace géographique et univers mental, dont l’évolution intéresse au premier chef le romancier [de guerre]. » - «Topographie romanesque », www.pur-edition.fr , p.12. Il se dégage du problème de la carte géographique dans la topographie des champs de batailles, dans le roman de guerre, les composantes suivantes :

 

           - La carte de géographe le remodelage de l’espace romanesque et de consistance de réel à l’imaginaire,

 

           - La carte de géographie servant de compte rendu à l’anthropologie morale dans le roman de guerre,

 

           - La carte de géographie servant d’entrée, dans la topographie romanesque, d’articulation entre espace géographique et espace mental du romancier de guerre.

 

     I. Les performances de la topographie des champs de batailles dans les romans de guerre dans le monde, au XIXe-XXIe siècles :

 

       À compter les performances de la topographie des champs de batailles dans le roman de guerre mondial au XIXe-XXIe siècles, il s’avère que celle-ci assume une fonction et une forme de style tout à fait spécifiques chez les romanciers des cinq continents du monde. Isabelle Bernard Rabadi les résume en ces termes : «De fait, les approches topographiques [des romans de guerre] offrent un foisonnement de détails au milieu d’un style narratif économe, elles s’appréhendent fréquemment telle une parenthèse documentaire et explicative […]. De l’architecture aux paysages se construit le décor toujours en mouvement des fictions. L’espace peint reste en expansion et en dépli infini. Le regard du narrateur se laisse guider par la profusion et la discontinuité des micro-événements et des spectacles qu’il découvre.» - Estudios romanicos», www.webcache. googleusercontent.com, pp. 25-28.

 

    Aussi des performances de la topographie des champs de batailles dans le roman de guerre mondial au XIXe-XXIe siècles, on pourrait déduire notamment :

 

      1. Des performances de fonctions la topographie des champs de batailles dans le roman de guerre mondial au XIXe-XXIe siècles :

 

       Du résumé des performances de fonctions de la topographie des champs de batailles dans le roman de guerre mondial au XIXe-XXIe siècles, on pourrait retenir consécutivement :

 

             - Des performances de fonctions de la topographie des champs de batailles dans le roman de guerre de production d’une profusion de détails de l’espace peint,

 

             - Des performances de fonctions de la topographie des champs de batailles dans le roman de guerre de production de décor d’architecture et de paysages parenthèse documentaire et explicative,

 

             - Des performances de fonctions de la topographie des champs de batailles dans le roman de guerre de production d’un décor d’architecture et de paysage toujours en mouvement des fictions,

 

             - Des performances de fonctions de la topographie des champs de batailles dans le roman de guerre de production d’un espace peint toujours en expansion et en repli à l’infini,

             - Des performances de fonctions de la topographie des champs de batailles dans le roman de guerre de production d’un regard de narrateur guidé par ma profusion et la discontinuité des petites actions et des spectacles qu’il découvre.

 

       2. Des performances des formes de style de la topographie des champs de batailles dans les romans de guerre dans le monde, au XIXe-XXIe siècles :

 

       Or, pour ce qui est des performances de formes de style de la topographie des champs de batailles dans les romans de guerre dans le monde, au XIXe-XXIe siècles, il est à noter, outre ce qui précède, la variété de style utilisée avec Mehdi Heidari et Nâzanin Ramzâniâm : «Concernant les variétés des styles utilisés dans les livres de guerre [les romans de guerre], n remarque généralement des phrases brèves avec peu d’adjectifs et des verbes de mouvement. La lecture de ces phrases est rapide, et on retrouve ce sentiment d’urgence et de fuite dans ces phrases peu travaillées. Par contre, dans les moments graves de la guerre, où il y a présence de la mort, les phrases se font plus longues et relèvent presque de la poésie […]. Les formes des romans [de guerre] utilisées sont nombreuses : certaines se rapprochent des mémoires, d’autres du journal. Mais les textes ne sont jamais objectifs, puisqu’ils sont l’œuvre d’une personne qui a vécu la guerre de l’intérieur» - «L’Espoir d’André Malraux : roman de guerre », www.teheran.ir , pp.2, 4.

 

       De là, se déclinent les constituants de formes de style de la topographie des champs de batailles dans le roman de guerre mondial au XIXe-XXIe siècles, ci-après :

 

            - Une forme de style narratif économe sous forme de parenthèse documentaire et explicatif,

            - Une forme de style faite de phrases brèves, avec peu d’adjectifs et des verbes de mouvement,

            - Une forme de style faite de phrases peu travaillées, à la lecture rapide, inspirant un sentiment d’urgence et de fuite,

             - Une forme de style faite de phrases plus longues, relevant presque de la poésie, dans les moments graves de la guerre, où il ya présence de la mort,

             - Une forme de style de romans de guerre se rapprochant du mémoire pour certains, du journal pour d’autres,

            - Une forme de style qui n’est jamais objective, étant l’œuvre d’une personne supposée avoir vécu la guerre de l’intérieur.   

 

      III. Les extraits des cinq continents témoins de la topographie des champs de batailles dans les romans de guerre dans le monde, au XIXe-XXIe siècles :

 

       À propos des extraits des cinq continents témoins de la topographie des champs de batailles dans les romans de guerre dans le monde, au XIXe-XXIe siècles, il faut remarquer l’actualité cosmopolitique du genre, avec Sylvie Thomas, notant en 2013 : «Le thème de la guerre est très présent cette année : guerre militaire, guerre coloniale, guerre économique, guerre terroriste. En témoigne ce que beaucoup considère comme «LE» roman de la rentrée, L’ART FRANÇAIS DE LA GUERRE, d’Alexis Jenni […], qui traite des colonies du XXe siècle. Les bouleversements économiques inspirent les auteurs, tels Bernard Foglino qui prend pour héros un trader acculé dans BENVENUE DANS LA VRAIE VIE […], ou Dabor Friou qui dépeint une Norvège détraqué dans son premier roman BRUT […]. Chez les auteurs du monde anglophone reviennent Paul Auster, Philip Roth, Douglas Kennedy, Harlan Coben […]. Chez les Asiatiques, c’est le Japonais Haruki Murakami qui semble tenir la corde avec sa saga phénonène 1Q84 […].» - « Édition française : une rentrée très cosmopolite », www.ambafrance-kh.org, p.1.

 

  Aussi vu les constituants topographiques retenus à offrir en exemples aux lecteurs, il y a lieu d’y voir selon Isman Oumar Houssein : « Parce qu’il lui est impossible d’exprimer l’innommable, l’écrivain dans la guerre se fait diseur de silence. Pour Catherine Milkovitch-Rioux et Robert Pickerin, toute tentative de transposer la folie meurtrière dans l’espace littéraire procède non seulement de la volonté de «donner une image de la guerre10 », mais de celle de rendre compte de « son écho dans une conscience».  [...] Si « le cri, ce dire du trop plein de violence, reste un élément moteur de la fiction», il ne traduit pas moins une mise à l’épreuve de la parole qui, face à la destruction, se dérobe, incapable d’exprimer les maux. Le cri, en tant que parole désarticulée et inintelligible, témoigne de l’impuissance du langage […] pour dire l’indicible.» - « Les représentations de la guerre dans l’e space littéraire francophone. Le cas de la Corne de l’Afrique», www. theses.hal.science, p.1

                                                            L’auteur

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I.  Extraits témoins de la topographie des champs

de batailles dans les romans de guerre en

Afrique aux XIXE-XXIe siècles

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     Pour ce qui est des extraits témoins de la topographie des champs de batailles dans les romans de guerre, en Afrique, aux XIXe-XXIe siècles, A. A. Mazui (Kenya) en retrace les traits saillants en écrivant : «Bien que la littérature africaine d’après les indépendances ait accordé une grande attention au phénomène militaire, elle s’est relativement peu intéressée à la guerre elle-même. En parlant des militaires, les écrivains africains ont davantage évoqué les méchants   que les héros. Un antagonisme s’est développé entre les écrivains et les militaires, à l’exception des combattants de la libération en Afrique du Nord et en Afrique australe […]. Hormis celles menées par l’Égypte, la plupart des guerres vécues par les pays africains indépendants furent des guerres civiles et souvent des guerres de sécession.» -  «L’Afrique depuis 1935», www.unesco.org, p.1 D’où notamment  par exemples :

 

1. En Côte d'Ivoire :

 

·  «Allah n’est pas obligé», Ahmadou Kourouma, Ed. Seuil, 2000, ou: Les enfants soldats :

 

     Né en 1927, à Boundiali, au Nord de la Côte d’Ivoire, Ahmadou Kourouma est un écrivain et romancier ivoirien. Après ses études, à Bamako (Mali), il rejoint, en 1950, les rangs des "tirailleurs sénégalais" en Indochine. En 1954, il poursuit des études de mathématiques à Lyon (France). À l’indépendance de la Côte d'Ivoire en 1960, il retourne dans son pays.  Sous le régime du président Félix Houphouët-Boigny, il est emprisonné, puis part en exil en Algérie (1964-1969), au Cameroun (1974-1984) et au Togo (1984-1994)). En 1968, il publie son premier roman, ’Les Soleils des indépendances’. Vingt ans après, ce sera ‘Monné’, ‘Outrages et défis’.  En 1994, suit ‘En attendant le vote des bêtes sauvages’ ; et en 2000, ‘Allah n'est pas obligé’, couronné du Prix Renaudot et du Prix Goncourt des lycéens. En septembre 2002, lors de la guerre civile en Côte d'Ivoire, il milite contre l'ivoirité et la paix dans son pays. Soupçonné de soutenir les rebelles du Nord, il subit les accusations des partisans du président Laurent Gbagbo. Il meurt, en décembre 2003, son dernier roman ‘Quand on refuse on dit non ‘ paraît, en 2004. Il a aussi écrit pour la jeunesse.

Les enfants soldats

 

    La topographie du champ de bataille dans le roman de guerre, «Allah n’est obligé» d’Ahmadou Kourouma est constituée d’une visée panoramique, en Afrique, au XXe siècle, comprenant, du Liberia, la Guinée, la Sierra Leone, la Côte d’Ivoire, et d’une visée limitée couvrant la rue, les routes, la forêt, les villages, pendant la guerre civile au Libérienne, en 1990-1997.

 

     «Pour m’encourager à partir au Liberia rejoindre ma tante, Yacouba m’a appris des tas de choses sur le Liberia […], des choses merveilleuses. Là-bas, il y avait la guerre tribale. Là-bas, les enfants de la rue comme devenaient soldats qu’on appelle en pidgin américain, d’après mon Harp’s, small soldiers. Les small soldiers avaient tout et tout. Ils avaient des kalachnikovs. Les kalachnikovs, c’est des fusils inventés par un Russe qui tirent sans s’arrêter. Avec les kalachnikovs, les enfants-soldats avaient tout et tout. Ils avaient de l’argent, même des dollars américains […]. J’ai crié Walahé ! Walahé ! Je voulais partir au Liberia. Vite et vite. Je voulais devenir un enfant soldat ou un soldat-enfant, c’est kif kif pareil. Je n’avais que le mot small-soldier à la bouche […].

      Tieffi  a éclaté de rire

      «T’as pas de chance, petit Birahima, tu ne pourras jamais devenir un bon petit lycaon de la révolution. Ton père et ta mère déjà morts et bien enterrés. Pour devenir un bon petit lycaon de la révolution, il faut d’abord tuer de tes propres mains (tu entends de tes propres mains) tuer un de tes propres parents (père ou mère).  Et ensuite être initié.

      - je pourrais être initié comme tous les petits lycaons.

      Il a encore éclaté de rire […].

       Je ne pouvais pas faire partie de l’élite des enfants-soldats, les petits lycaons. Je n’avais pas droit à la double ration de nourriture, aux drogues à profusion et au salaire triplé des lycaons. J’étais un paumé, un vaurien […].

       Vint un instant, un moment de silence annonçant l’orage. Et la forêt environnante a commencé à cracher tralala… tralala… tralala… de mitraillette. Les tralalas… de la mitraillette entraient en action. Les oiseaux de la forêt ont vu que ça sentait mauvais, se sont levés et envolés vers d’autres cieux plus reposants. Tralalas de mitraillette arrosèrent la moto et les gars qui étaient sur la moto […]. » - «Allah n’est pas obligé», www.Interferenceslitteraires. be,  pp. 43-180.

                    

      2. En Tunisie :

 

·  «Le Quatrième Mur», Sorj Chalandon, Ed. Grasset, 1983, ou: Je suis tombé 

 

     Né en 1952, à Tunis, Sorj Chalandon est un écrivain et romancier tunisien. Elève au lycée Jean-Moulin de Lyon, devenu journaliste, il a débuté, en 1973, à ‘Libération’ où il a été grand reporte, de 1980 à 2007. Il écrit un roman ‘Le Quatrième Mur’ en 1983. Il a reçu le prix ‘Albert-Londres’, en 1988, pour ses reportages sur l'Irlande du Nord et sa couverture du procès Klaus Barbie. Il travaille au ‘Canard enchaîné’, depuis 2009. Son premier roman, ‘Le Petit Bonzi’, paraît, en 2005, et le suivant, ‘Une promesse,’ a eu le ‘prix Médicis’, 2006. Pour le troisième, ‘Mon traître’, il a obtenu le ‘prix Joseph-Kessel’ et pour le cinquième, ‘Retour à Killybegs’, il reçoit le ‘Grand Prix du roman de l'Académie française’. 

 

Je suis tombé

 

      La topographie du champ de bataille dans le roman de guerre, au sein de ‘Le Quatrième Mur’ de ‘Sorj Chalandon’ est constituée d’une visée panoramique illimitée, de Tripoli au nord du Liban à Paris passant par Athènes, etc., au XXe siècle, et une topographie limitée : une plage, un garage éventré, un trou, le champ de bataille, où se déroule l’action de ce passage, retraçant un épisode de la guerre civile sanglante du Liban (1975-1990).

 

      «Je suis tombé. Je me suis relevé. Je suis entré dans le garage, titubant entre les gravats. Les flammes, la fumée, la poussière, je recrachais le plâtre qui me brûlait la gorge. J'ai fermé les yeux, les mains sur les oreilles. J'ai heurté un muret, glissé sur des câbles. La moitié du plafond avait été arrachée par l'explosion. Le ciment en feu frappait tout autour avec un bruit de claques. Derrière une carcasse de voiture, un trou. Une crevasse de guerre, un bitume ouvert en pétales jusqu'à son cœur de sable. Je me suis jeté dans les éclats comme on trébuche, corps chiffon, le ventre en décombres. Je tremblais […]. Mon pantalon était déchiré. Il fumait. Ma jambe élançait comme une rage de dent. Ma chemise était collée de sueur. J'avais pris mon sac, mais laissé ma veste dans la voiture de Marwan, mes papiers, mon argent, tout ce qui me restait. Je ne pensais pas qu'un char d'assaut pouvait ouvrir le feu sur un taxi. 

       - Sors de là, Georges ! 

       Nous roulions le long de la côte. Le soleil se levait derrière les collines. Juste après le virage, un tank syrien couleur sable, embusqué, immense. Il nous barrait la route. Mon Druze a juré. Il a freiné brusquement. Je dormais. J'ai sursauté. Il a paniqué, fait marche arrière sur le talus qui surplombait la mer. La carapace s'est réveillée. Presque rien, un souffle. Le métal du canon qui pivote. 

[…]  Le blindé faisait mouvement. Il grinçait vers le garage. Je ne le voyais pas, j'entendais sa force. Le canon hésitait. Droite, gauche, mécanique enrouée. L'étui d'obus avait été éjecté. Choc du métal creux en écho sur la route. Silence. 

       - C'est un T55 soviétique, un vieux pépère. 

       J'ai sursauté. Voix de rocaille, mauvais anglais. Un homme âgé était couché sur le dos, dans le trou […]. Je ne l'avais pas remarqué. 

       - Baisse la tête, il va remettre ça. 

        Keffieh, barbe blanche, cigarette entre deux doigts, il fumait. Malgré le char, le danger, la fin de notre monde, il fumait bouche entrouverte, laissant le nuage paisible errer sur ses lèvres. 

        - C'est confortable ? 

        Il a désigné mon ventre d'un geste. J'écrasais son arme, crosse contre ma cuisse et chargeur enfoncé dans mon torse […]. Je n'ai pas bougé. Il a hoché la tête en souriant. Dehors, le blindé s'est mis en mouvement.     

        Hurlement de moteur malmené. 

        - Il recule, a soufflé le vieil homme. 

        L'ombre du tank avait laissé place à la lumière de l'aube et aux herbes calcinées. Il reculait encore. J'ai attendu le rire des mouettes pour respirer […].

    Alors j'ai vu Marwan. Ses jambes dépassaient, en travers de la route. Il était retombé sur le dos, vêtements arrachés par l'explosion, sanglant et nu […].     

     - Tu as croisé la mort, mais tu n'as pas tué, a murmuré le vieil homme. 

     Je crois qu'il était soulagé […].

     Samuel Akounis 

     Pendant des mois, je n'ai pas su que Sam était juif. Il était grec et ne prétendait rien d'autre.» - «Le Quatrième Mur», www.grasset.fr, pp.3-14.

 

       3. En Rhodésie-Zambie actuelle :

 

·  «Coups de tonnerre», Wilbur Smith, Ed. Presses de la Cité, 2001 : ou Sean Courtney rentrant dans son pays le Cap et le Natal en proie à la guerre des Boers :

 

      Né en 1933, à Broken Hill, en Rhodésie du Nord, actuelle Zambie, et mort en 2021, au Cap, Wilbur Addison Smith est un écrivain et romancier rhodésien, zambien. A dix-huit, il est gravement atteint par la malaria cérébrale, il délire pendant dix jours et a fait craindre à ses médecins des lésions cérébrales incurables. Il grandit en lisant des romans d'aventures que lui passait sa mère. C'est un adolescent Et son imagination de s’est développée dans un univers de nature sauvage et de grands espaces vierges. Il a été marqué par Kipling, Hemingway, Steinbeck, Forester et surtout par sa terre natale. Après de brillantes études, en Afrique du Sud, il devient un homme d'affaires puis un écrivain à succès. Il est l’auteur de : Quand le lion a faim, When the Lion Feeds (1964), La Piste du chacal, A Sparrow Falls (1977), La Montagne de Diamants I, Les Feux du désert, The Burning Shore (1985), Le Serpent vert, Rage (1987), Le Dernier safari, A Time to Die (1989), La Piste du renard, Golden Fox (1990), Le Destin du chasseur Assegai (2009), Coups de tonnerre, The Sound of Thunder (2001), Golden Lion (2015), etc.

 

Sean Courtney rentrant dans son pays le Cap et

le Natal en proie à la guerre des Boers

 

   «C’est le récit de Sean Courtney, une sorte d'aventurier impulsif et volent, qui rentre de brousse, en ayant amassé une grosse fortune. Il retrouve son pays le Cap et la colonie du Natal en proie à la sanglante guerre des Boers. Il perdra dans l'affaire et son or, et sa femme qu'il aime. Mais dans les jours sombres qui s'annoncent, les conflits familiaux se révéleront encore plus cruels que toutes les batailles de la guerre auxquelles il participera activement dans le veld sud-africain. Après quatre années de chasse dans la brousse avec son fils Dirk, Sean Courtney revient à Pretoria à la tête d'une véritable fortune : un convoi de chariots chargés des défenses de cinq cents éléphants. Ses retrouvailles avec la civilisation sont tumultueuses : la guerre vient en effet d'éclater, opposant les colons hollandais d'Afrique du Sud, les Boers, aux nouveaux venus britanniques, qui rêvent de s'emparer des richesses inouïes de ce nouvel eldorado. A côté de ces derniers, Sean Courtney s'engage, en cette période sombre, où les conflits familiaux, notamment avec son frère jumeau Garrick, plus cruels encore que toutes les batailles passées.», www.booknode.com, p.1.

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II. Extraits témoins de la topographie des champs

de batailles dans les romans de guerre en

Europe aux XIXE-XXIe siècles

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    Des extraits témoins de la topographie des champs de batailles dans les romans de guerre, en Europe, aux XIXe-XXIe siècles, Marc Hanrez écrit quant à leur origine historique littéraire européenne, en l’occurrence : «Au point de vue de l’histoire littéraire, Hemingway [XXe siècle] réussit à ne pas tomber dans certains travers des auteurs américains de la Première Guerre mondiale, qui donnaient résolument à leurs écrits un caractère d’aventure romancée. Sciemment ou non, il modela ses œuvres sur la littérature des guerres antérieures. Il retourna à la tradition es romans de guerre du XIXe siècle : La Chartreuse de Parme de Stendhal, Guerre et Paix de Tolstoï, La Débâcle de Zola et La Marque du Courage de Crane, qui pénètrent profondément dans les réalités de leur conflit. Ce qui distingue les productions résultant de l’expérience de combat dans la guerre d’Espagne, c’est qu’elles sont le fruit de la première rencontre avec la brutalité intense et le gaspillage humain de la guerre moderne.» - «Les écrivains et la guerre d’Espagne », www.books.google.fr, p.252. À savoir :

      

        1. En Russie :

 

·  «Guerre et paix», Léon Tolstoï, Ed. Le Messager russe, 1869, ou : la débandade 

 

      Né en 1828, à Iasnaïa Poliana, Yasnaya Polyana, et mort en 1910, en Russie, Léon Tolstoï est un écrivain et romancier russe.  Né d'une ancienne famille noble russe, il perd ses parents, jeune et est élevé par une tante. Ses études universitaires n'étaient brillantes, mais il s'intéresse beaucoup à la littérature. Il découvre Jean-Jacques Rousseau, qui le conforte dans cette passion. Il écrit une première nouvelle, ‘Enfance’, 1852 et eut un grand succès. Dans cette visée autobiographique, il écrit ‘Adolescence’ et ‘Jeunesse’. Engagé dans l'armée, il a vécu les conflits du Caucase, puis a décidé de la quitter, en 1856, pour voyager en Europe. De retour dans sa ville natale, il fonde une école où il dispense son enseignement. En 1862, il se marie et aura treize enfants. Il publie, en 1869, un des romans majeurs de son œuvre, ‘Guerre et paix’, qu'il consacre aux guerres napoléoniens. Son succès international est immense, suivi de ’Anna Karénine’ (1877). À la suite de cette publication, Tolstoï décide de se convertir. Il publie des œuvres témoignant de ses convictions religieuses tardives ‘Résurrection’, en 1899. En 1901, il est excommunié et écrit jusqu'en 1904 ‘le Père Serge’, ‘Hadji Mourat’, puis meurt hors de chez lui, en 1910.

 

La débandade

 

    La topographie du champ de bataille dans le roman de guerre, au sein de  ‘Guerre et Paix’ de ‘Léon Tolstoï’ comporte d’une visée panoramique illimitée, de la Russie, la France, l’Autriche, Pratzen, Novgorod, Kiev, Apchéron, Schöngraben, la digue de l’Auguezd,  au XIXe siècle, et une topographie  limitée : une colline, une maison isolée et abandonnée, un cabaret, deux au pied de la colline., le ciel, où a lieu la déroute des Russe face à l’armée de Napoléon Bonaparte, dépeignant un épisode meurtrier de la campagne de Russie, en1812.

 

        «Koutouzov, accompagné de ses aides de camp, partit au pas derrière les carabiniers. Après avoir parcouru une demi-verste en queue de colonne, Koutouzov s'arrêta devant Pratzen non loin d'une maison isolée et abandonnée (sans doute un ancien cabaret), près d'une bifurcation. Deux routes descendaient au pied de la colline. Bien qu'il n'y eût plus que des lambeaux de brouillard au-dessus du vallon et que le soleil inondât le champ de bataille, les forêts et les collines de ses ardents rayons obliques, on ne distinguait pas encore l'ennemi, et les troupes, comme le commandement, n'avançaient pas vite, attendant toujours l'affrontement. Koutouzov envoya une partie du régiment de Novgorod sur la route de gauche, et la plus petite partie du bataillon d'Apchéron à droite. Il discutait avec un officier autrichien. 

       Le prince Andréï, qui se tenait légèrement en arrière, observait les généraux qui l'entouraient, russes et autrichiens, ainsi que les aides de camp. Aucun d'eux n'avait un air naturel, et il les connaissait tous : ils essayaient tous d'adopter qui un air perspicace, qui une prestance martiale ou une allure nonchalante, mais rien n'était spontané chez eux. L'un des aides de camp utilisait une longue-vue.                 
       "Regardez, regardez, dit-il, ce sont les Français ! » […].       
       Koutouzov regarda dans la longue-vue et s'approcha de l'officier autrichien. 

       Le prince Andréï regarda devant lui et distingua à l'œil nu, en bas à droite, une colonne de Français, à guère plus de huit cents pas de lui, qui montaient à la rencontre du bataillon d'Apchéron […]. 

       Nesvitski, qui avait été envoyé à l'avant, le visage furieux, rouge et méconnaissable, hurlait que c'était la débandade parmi les troupes et il suppliait Koutouzov de se replier, affirmant que dans cinq minutes, s'il ne l'écoutait pas, il serait fait prisonnier par les Français qui se trouvaient déjà à deux cents pas de là, au pied de la colline […] Le drapeau avait déjà été pris et emporté comme un trophée par un soldat français. "Voilà un jeune homme qui a eu une belle mort", remarqua Napoléon et, en même temps, sans rien oublier, il donna sur-le-champ l'ordre de transmettre à Lannes qu'il fasse avancer la division de Friand vers la rivière.» - «Guerre et paix», www.lexpress.fr, pp.1-5.

      

      2. En Grande Bretagne-Royaume Uni :

 

·  «Les Sept Piliers de la sagesse. Un triomphe », Thomas Edward Lawrence, Trad. Charles Mauron, Ed. Payot, 1936, ou : Le village sous la fumée :

 

    Thomas Edward Lawrence, alias Lawrence d’Arabie, né à Tremadoc, Caernarfonshire, au Nord du Pays de Galles, le 16 août 1888 et mort près de Wareham (Dorset), le 19 mai 1935, fut un archéologue, officier, aventurier, espion et écrivain britannique. Il accéda à la notoriété comme officier de liaison britannique lors de la Grande révolte arabe contre les Turcs, de 1916 à 1918. L’écho de son action durant ces années est dû aux reportages du journaliste américain Lowell Thomas à son roman autobiographique ‘Les Sept Piliers de la sagesse’. Son caractère d’aventurier, sa vie et sa carrière militaire, et son talent littéraire ont assuré sa postérité en Occident comme dans le monde arabe. Porté à l’écran par David Lean, en 1962, avec Peter O'Toole, dans le rôle de Lawrence, il a rencontré un immense avec sept oscars. Le lieutenant-colonel Brémond, chef de la mission française au Hejaz, dont le rôle d'appui à la révolte arabe au côté des Anglais, quelque peu oublié, qualifie les exploits qu'il narre d’exagérés.

 

Le village sous la fumée

 

    La topographie du champ de bataille dans le roman de guerre, dans ’Les Sept Piliers de la Sagesse’ de ‘Thomas Edward Lawrence’ emprunte de même une visée panoramique illimitée, embrassant  l’Arabie, Turquie, Abd el-Aziz, Sheik Saad, d’un côté, au début du  XIXe siècle, et une topographie  limitée : une village, des murs bas de pisé, des parcs à moutons, la maison (tapis), champ de bataille d’un massacre de civiles par une formation de Turcs , contrée par un groupe d’Arabes armés, assisté par l’auteur-narrateur,  en 1916-1918.

 

       «Le village restait immobile sous ses volutes de fumée blanches pendant que nous approchions, sur nos gardes. Quelques amas grisâtres semblaient se cacher dans les herbes hautes, étreignant le sol à la façon étroite des cadavres. Nous détournions les yeux de ceux là, sachant qu'ils étaient morts, mais une petite silhouette s'éloigna de l'un en chancelant, comme pour nous échapper. C’était une enfant, de trois ou quatre ans, dont la robe sale portait une tache rouge sur l'épaule et le coté, le sang d'une blessure large et profonde, peut-être un coup de lance, juste à la naissance du cou. L'enfant courut quelques pas, puis s'arrêta et nous cria avec une force étonnante (tout était silencieux aux alentours) : "Ne me frappe pas, Baba".

        Abd el-Aziz, étouffant quelques chose - c'était son village et elle pouvait être de sa famille - se jeta à bas de son chameau et, trébuchant, tomba à genou dans l'herbe à coté de l'enfant. Ce mouvement subit effraya l'enfant, elle leva les bras et essaya de hurler ; mais elle s'effondra en un petit tas, le sang jaillissant à nouveau sur ses vêtements ; puis, je pense, elle mourut. Nous dépassâmes d'autres corps, hommes, femmes, et quatre autres bébés morts, l'air très souillés, allant vers le village dont le silence, nous le savions maintenant, signifiait mort et horreur. Aux abords se trouvaient des murs bas de pisé, des parcs à moutons, et, sur l'un, quelque chose de rouge et blanc. Je m'approchai et vis que c'était le corps d'une femme plié en travers du mur, à plat ventre, cloué sur place par une baïonnette-scie dont la pognée se dressait en l'air de façon hideuse entre les jambes nues. Elle était enceinte, et autour d'elle en gisaient d'autres, peut-être vingt en tout, tuées de diverses manières, mais toujours présentées avec un goût obscène [...]. C'était l'un de nous - la cuisse déchiquetée. Le sang s'était répandu sur le sol rouge, et il en mourait ; mais même ainsi, il n'avait pas été épargné. Selon la mode du jour de cette bataille, on l'avait encore tourmenté en lui plantant des baïonnettes dans l'épaule et l'autre jambe, le clouant au sol comme un insecte de collection. Il était pleinement conscient. Quand nous lui demandâmes : "Hassan, qui a fait cela ?" il désigna des yeux les prisonniers, désespérément blottis les uns contre les autres, brisés. Ils ne dirent rien avant que nous ouvrions le feu. Le tas qu'ils formaient cessa finalement de bouger ; Hassan était mort ; nous remontâmes en selle et rentrâmes lentement à la maison (la maison, c'était mon tapis, à trois ou quatre heures de là, à Sheik Saad) dans l'obscurité si froide, maintenant que le soleil s'était couché.» - «Les sept piliers de la sagesse. Triomphe», www.Chrysat cho.free.fr, pp.3-4.

 

      3. En Allemagne :

 

·  «In Stahlgewittern», «Orages d’acier», Ernst Jünger, Trad. Charles Mauron, Ed. Payot, 1920, ou : Ce remblai qui crachait le feu :

 

     Né en 1895 à Heidelberg, et mort en 1998, à Riedlingen, Ernst Jünger est un écrivain et romancier allemand. Témoin de l'histoire européenne du XXe siècle, il a participé aux deux guerres mondiales, comme officier de l'administration militaire d'occupation de Paris, en 1941. Il devient célèbre par son roman autobiographique ‘Orages d'acier’ (1920), inspiré de ses souvenirs de la Première Guerre mondiale. Il a été une figure majeure de la révolution conservatrice à l'époque de Weimar, mais s'est tenu éloigné de la vie politique, lors de l'accession des nazis au pouvoir. Il est l’auteur de :  Orages d'acier, In Stahlgewittern (1920), Sur les falaises de marbre (1939), etc.

 

Ce remblai qui crachait le feu

 

    La topographie du champ de bataille dans le roman de guerre, dans ’Orages d’acier’ de ‘Ernest Jünger’ résulte aussi d’une visée panoramique illimitée, embrassant  l’Allemagne, l’Angleterre, l’Europe, le monde,  d’une part, au début du  XIXe siècle, et une topographie  limitée : un chemin creux, deux tranchées à contre-pente, un remblai, une ligne du front, un parapet, un champ d’entonnoirs, champ de bataille de la guerre positions entre Allemands et Anglais, assisté par l’auteur-narrateur,  en 1914-1918.

 

      «Des hommes de ma compagnie bondirent d'en haut dans le chemin creux. Je brûlais. J'arrachai ma capote et la jetai. [...] Dans un quelconque entonnoir, je sautai sur une forme humaine, vêtue de Manchester brun, qui déchargeait son pistolet. C'était Kius, en proie à un état d'âme semblable au mien, et qui me tendit en guise de salut une poignée de munitions […] Notre attention se fixait maintenant sur le remblai, qui se dressait devant nous comme la muraille menaçante d'une forteresse. Le terrain labouré de coups qui nous en séparait était peuplé d'Anglais égaillés par centaines. Les uns cherchaient encore à atteindre le remblai, d'autres étaient engagés dans des corps à corps. Kius me rapporta par la suite quelques détails que j'écoutai avec le sentiment qu'on éprouve quand on entend narrer par un tiers des folies commises en état d'ivresse. C'est ainsi qu'il avait pourchassé un Anglais à coups de grenades tout le long d'un bout de tranchée. Quand il fut à bout de munitions, il poursuivit sa chasse, "pour forcer l'adversaire", à coups de mottes de terre dure, tandis que debout, en haut, sur le parapet, je me tenais les côtes de rire. […] Ce fut la première fois à la guerre où je vis se heurter des masses humaines. Les Anglais défendaient, sur la face arrière du remblai, deux tranchées établies à contre-pente. Des coups de feu furent échangés, à quelques mètres de distance ; des grenades volèrent en arc.   Je sautai dans la première tranchée ; m'élançant derrière la première traverse venue, je me heurtai à un officier anglais, à la vareuse déboutonnée, dont pendait sa cravate, par laquelle je l'empoignai pour le plaquer contre un parapet de sacs. Derrière moi, la tête chenue d'un commandant apparut ; il me cria : "Abats ce chien !"  C'était inutile. Je passai à la tranchée inférieure, qui grouillait d'Anglais. On se serait cru au milieu d'un naufrage. Quelques-uns lançaient des "oufs de cane", d'autres tiraient avec des colts, la plupart s'enfuyaient. Nous avions désormais l'avantage.» - « Orages d'acier », www.webcache.googleusercontent.com, pp.1-4.

 

      4. En France :

 

·  «L’Espoir», André Malraux, Trad. Charles Mauron, Ed. Payot, 1937, ou : Les premières attaques de Madrid :

 

   Né en 1901, à Paris, et mort, en 1976, à Créteil (Val-de-Marne),     André Malraux, alias Georges André Malraux, marié le 26 octobre 1921 à Clara Goldschmidt, divorcé le 9 juillet 1947, remarié à Riquewihr (Haut Rhin) le 13 mars 1948 avec Marie-Madeleine Lioux, est un écrivain, aventurier, homme politique et intellectuel français. Autodidacte et tenté par l'aventure, il gagne l'Indochine où il écrit au journal anticolonialiste et est emprisonné en 1923-1924 pour trafic d'antiquités khmères. De retour en en France, ‘La Voie royale’ (1930) et gagne la célébrité avec ‘La Condition humaine’ (1933), un roman engagé,  inspiré de la révolution de la Chine et en reçoit  le Prix Goncourt. En 1936-1937 ? Militant, aux côtés des Républicains espagnols , cela le conduit à écrire son roman ‘L'Espoir’ (1937), dont le film ‘Espoir, sierra de Teruel’ (1938). Il rejoint la Résistance en mars 1944 et participe aux combats lors de la Libération de la France. Après la grande guerre, il s’attache au général de Gaulle, et au RPF, et devient,  ministre de la Culture de 1959 à 1969.Il écrit alors de nombreux ouvrages sur l'art comme ‘Le Musée imaginaire’ ou ‘Les Voix du silence’ (1951).

 

Les premières attaques de Madrid

 

      La topographie du champ de bataille dans le roman de guerre, dans ’L’Espoir’ d’André Malraux’ forme ainsi ’une visée panoramique illimitée, cernant Madrid, Valence, les Asturies, l’Espagne, Paris, l’Europe, New York, l’Amérique, le monde, vers le milieu du XXe siècle, et une topographie  limitée : le Central téléphonique, les lignes de ruines, les trois plus grands hôpitaux, l'Hôtel Savoy, les églises, les musées, la Bibliothèque Nationale, le Ministère de l'Intérieur, l'Atocha, la rue de Léon, le centre, vers la Puerta del Sol de Madrid, brûlent sous les obus des avions Franco, lors de la guerre civile espagnole,  en 1936.

 

    «Au début du mois de novembre 1936, le gouvernement républicain espagnol a quitté la capitale pour Valence, les maisons, Les premières attaques de Madrid ont lieu, et, alors que Franco avait proclamé qu'il ne bombarderait jamais la population civile, face à la résistance inattendue de la ville, le commandement nationaliste s'exaspère et veut finalement essayer de démoraliser la population par des bombardements aériens. Il compte que le moral madrilène, soumis à rude épreuve par les combats et la disette s'effondrera sous les bombes. La ville brûle et la population civile est massacrée. […]. Un crépuscule sinistre se levait sur l'Age du Feu. Les trois plus grands hôpitaux brûlaient. L'hôtel Savoy brûlait. Des églises brûlaient, des musées brûlaient, la Bibliothèque Nationale brûlait, le Ministère de l'Intérieur brûlait, une halle brûlait, les petits marchés de planches flambaient, les maisons s'écroulaient dans des envolées d'étincelles, deux quartiers striés de longs murs noirs rougeoyaient comme des grils sur des braises; avec une solennelle lenteur, mais avec la rageuse ténacité du feu, par l'Atocha, par la rue de Léon, tout cela avançait vers le centre, vers la Puerta del Sol, qui brûlait aussi […]. Enfin Shade, plus qu'il ne comprit, devina, car il avait entendu le même rythme un mois plus tôt : en réponse à une phrase qu'il n'entendait pas, le bruit de tambour humain scandait : no pasaran. Shade avait vu la Pasionaria, noire, austère, veuve de tous les tués des Asturies, conduire dans une procession grave et farouche, sous des banderoles rouges qui portaient sa phrase fameuse « Il vaut mieux être la veuve d'un héros que la femme d'un lâche », vingt mille femmes qui, en réponse à une phrase indistincte, scandaient le même no pasaran; il en avait été moins ému que de cette foule bien moins nombreuse, mais invisible, dont l'acharnement dans le courage montait vers lui à travers la fumée des incendies.».- « L'Espoir», www.devoir-de-philosophie.com , p.1.

 

     5. En Belgique :

 

·   «Le Mystère de la femme sans tête», Myriam Leroy, Ed. Seuil, 2023 : Au quartier général des nazis, Ohé c’est moi que vous cherchez :

 

      Née en1982, à Bruxelles, en Belgique, Myriam Leroy est une écrivaine, romancière, réalisatrice de documentaires et journaliste belge. En 2005, elle achève ses études de journalisme à l'université catholique de Louvain puis devient maître de conférence invitée à l’école de journalisme de Louvain. Elle est l’auteure de : Ariane (2018), Les Yeux rouges (2019), Le mystère de la femme sans tête (2023), etc.   


Au quartier général des nazis, Ohé c’est

c’est moi que vous cherchez

 

      La topographie du champ de bataille civil dans le roman de guerre, dans «Le Mystère de la femme sans tête » de Myriam Leroy forme ainsi une visée horizontale limitée, cernant la rue des Navets, le foyer, les proches et les voisins de l’héroïne martyre résistante Marina Chafroff-Maroutaëff, la police locale et le quartier général des nazi au centre de Bruxelles, en Belgique, vers le milieu du XXe siècle,  en 1939-1945.


     «Marina Chafroff-Maroutaëff n’avait que mépris pour les smokkeleirs qui vendaient à prix déloyaux des denrées alimentaires au marché noir. Seuls les bourgeois, les profiteurs de guerre et les Allemands avaient les moyens d’y faire leurs courses. Elle les détestait, tous. À chaque fois que Marina passait devant la rue des Radis, épicentre du trafic de beurre à Bruxelles […], elle espérait une explosion, un bombardement qui réduirait en flaque ces imbéciles. Mais aujourd’hui, elle y était aussi, avec son seau, un peu d’argent et beaucoup de dégoût. […]  Quand la police débarquait pour un contrôle, ils repliaient leurs tables et disparaissaient en un battement de cœur dans les soupiraux […]. Ça leur avait fait du bien, et pas seulement à l’estomac : les Belges ne pensaient qu’à bouffer, les pénuries alimentaires constituaient l’essentiel de leurs conversations. […] Les gens pouvaient enfin parler d’autre chose. Du froid de l’hiver, par exemple, le plus rude depuis trois-quart de siècle. Et des astuces pour y survivre : ne quitter son manteau qu’au lit, se servir de briques tirées du feu comme bouillottes, couper du bois dans les parcs, dévisser l’assise des bancs publics et la débiter en bûchettes… […] Ce soir était le dernier que Marina vivrait avec ses fils. Elle voulait leur laisser le souvenir tiède d’une mère attentionnée. […] Elle avait longuement hésité avant de se rendre aux Allemands. Se rendre signifiait laisser Nikita et Vadim à son mari, à cet homme pourvu d’autant de talent […] quand il était bien luné. Puis elle était parvenue à la déduction que jamais Youri ne se chargerait d’éduquer les enfants et que ce serait leurs grands-mères qui le feraient. Marina avait été soulagée. […] Alors oui, Marina préparerait un gâteau ce soir, le mangerait, ferait ses adieux aux siens puis marcherait jusqu’au quartier général des nazis et leur dirait Ohé c’est moi, c’est moi que vous cherchez. » - «Le Mystère de la femme sans tête»,
www.decitre.fr, p.1.

 

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III. Extraits témoins de la topographie des champs

de batailles dans les romans de guerre en

Asie aux XIXE-XXIe siècles

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      Des extraits témoins de la topographie des champs de batailles dans les romans de guerre, en Asie, aux XIXe-XXIe siècles, Sylvie Thomas indique concernant le thème de la guerre à la rentrée littéraire, asiatique de l’automne 2013 : « La rentrée littéraire est en France un véritable évènement national ! Chaque mois de septembre éclosent des centaines de nouveaux titres. Cet événement témoigne de la vitali de l’édition française qui répond aux goûts variés des lecteurs et qui continue de s’ouvrir, cette année davantage encore, aux auteurs étrangers (…). Chez les auteurs du monde anglophone reviennent Paul Auster, Philip Roth, Douglas Kennedy, Harlan Coben, le polémique James Frey. Chez les Asiatiques, c’est le Japonais Haruki Murakami qui semble tenir la corde avec sa saga phénomène 1Q84 - «Edition française : une rentrée très cosmopolite.»,  www.ambafrance-hu.org , p.1.

 

     1. Au Japon :

·  «L’unité fer et sang pour l’empereur d’Okinawa», Akira Yoshimura, Ed. Actes Sud, 2014, ou : L’unité fer et sang pour l’empereur d’Okinawa :

 

     Né en 1927, à Tokyo, et mort en 2006, à Tokyo, au Japon, Akira Yoshimura est un écrivain et romancier japonais. Il a marqué de son empreinte la littérature japonaise contemporaine. Il est l’auteur de : Naufrages (1999), Liberté conditionnelle (2001), La jeune fille suppliciée sur une étagère (2002), La guerre des jours lointains (2004), Voyage vers les étoiles (2006), Le convoi de l’eau (2009), Le grand tremblement de terre de Kanto (2010), L’Arc-en-ciel blanc (2012), Mourir Pour la patrie (2014), etc.

L’unité fer et sang pour l’empereur d’Okinawa

  La topographie du champ de bataille dans le roman de guerre, «Mourir pour la Patrie» d’Akira Yoshimura’ façonne de même ’une visée panoramique illimitée, couvrant le Japon, les USA, la préfecture d’Okinawa, l’archipel de Kerama (Tokashibi, Aka, Zamami, Geruma), le château de Suri, le Sud de Naha, l’Océan pacifique, vers le milieu du  XXe siècle, et une topographie  limitée : l’école d’Okinawa, l’estrade, le dortoir, le jardin de la maison, la forêt de bambou, les tranchées, le sommet de la colline, le poste de surveillance aérienne, la côte de Kerama, pendant e la Seconde Guerre mondiale,  espagnole,  en 1945.

      «La cérémonie s’acheva une fois que chaque élève eut reçu son diplôme.

      Après le départ du gouverneur, l’officier en charge de l’école, le lieutenant Kōji Kanbara, monta sur l’estrade.

       - Tous les élèves de l’école, à l’exception de ceux de première et de deuxième année, ont reçu leur ordre d’incorporation avant-hier, le 25 mars 1945. Vous êtes à présent soldats de l’armée impériale, comme les autres élèves des écoles secondaires de la préfecture d’Okinawa qui forment les unités Fer et Sang pour l’Empereur (…). Parfaitement immobiles, Shinichi et ses camarades ne le quittaient pas des yeux. […]

      — Dépêchez-vous de dormir ! L’ennemi pourrait débarquer demain ! lança la voix courroucée d’un élève plus âgé. […]

      Les bombardiers venus des porte-avions ennemis au large se mirent à attaquer dès les premières heures du jour suivant qu’il passa à creuser avec ses camarades. […]

     L’armée japonaise ferait tout pour l’anéantir et elle remporterait la victoire. Le devoir des unités Fer et Sang pour l’Empereur était de combattre vaillamment. Tous les élèves pâlirent.

     Une cinquantaine de ses camarades restèrent cependant les mains vides car les fusils manquaient. Ils allèrent en informer l’officier qui les commandait. Il n’en parut pas surpris et leur ordonna aussitôt de se fabriquer des lances en bambou. […] Tous les élèves crièrent leur assentiment. Au même instant, quelqu’un hurla «Attaque aérienne !» et l’air s’emplit du sifflement des bombes et de détonations.  […]      

     Dans le souterrain, les instructeurs de chaque section formèrent les nouvelles recrues à la manipulation des grenades et leur donnèrent des choses à faire dans l’attente de leur affectation. […]       Le poste de surveillance aérienne, dissimulé par la végétation et des filets de camouflage, avait été installé dans une forêt dense au sommet de la colline. Les nombreux arbres au troncs noircis, ou gisant sur le sol, montraient qu’elle avait été bombardée. Un jeune sergent-chef et trois soldats s’y trouvaient. Shinichi et ses camarades se présentèrent et annoncèrent qu’ils venaient prendre leur poste. Le jeune sous-officier examina les quatre garçons engoncés dans leurs uniformes trop grands sans cacher sa surprise.

   - Nous appartenons à l’unité Fer et Sang pour l’Empereur de l’école secondaire numéro un de la préfecture d’Okinawa, déclarèrent-ils en chœur.» - «Mourir pour la Patrie», pp. 7-19, www.vitrine.eden livres. Fr , p.1.

 

     2. En Chine :

 

·   «La joueuse de go», Shan Sa, Ed. Seuil, 2023, ou : Les terroristes en Mandchourie :

 

      Née à Pékin en 1972, Shan Sa est une écrivaine et romancière chinoise. Après avoir écrit dans sa langue une œuvre poétique, elle quitte en 1990 Pékin et le chinois pour le français. Elle travaille alors avec le peintre Balthus. En 1997, elle écrit la ‘Porte de la Paix céleste’, et reçoit ‘la bourse Goncourt du Premier roman’. Il est traduit dans de nombreux pays. Son deuxième roman, ‘Les Quatre Vies du saule, est publié et a eu le prix Cazes (1999). ‘La joueuse de go’, est paraît et reçoit le prix Goncourt des lycéens, en 2001.

 

Les terroristes en Mandchourie

 

     La topographie du champ de bataille dans le roman de guerre, «La Joueuse de go» de Shan Sa embrasse aussi ’une visée panoramique illimitée, comprenant la Chine, la Mandchourie, le Japon, Tokyo, la Corée, Pusan, une gare mandchoue vers le milieu du XIXe siècle, et une topographie limitée :  le salon de la maison, l’école, le jardin, l’école militaire, le quai du port, un bois, le train, la neige, la terre couverte de givre durant la guerre sino-japonaise, en 1931-1945.

 

      «De petite taille, Mère m'arrive à la poitrine. Le deuil prolongé de son époux a asséché son corps. Quand je lui annonce mon affectation en Mandchourie, elle pâlit.

      - Mère, je vous en prie, il est temps que votre fils accomplisse son destin de soldat.

       Sans mot, elle se retire dans sa chambre. Toute la soirée, son ombre affligée se profile sur la cloison de papier blanc. Elle prie.

      Ce matin, la première neige est tombée sur Tokyo. A genoux, les mains à plat sur le tatami, je me prosterne devant l'autel des ancêtres.  […]

       Au salon, ma famille m'attend. Assis sur leurs talons, tous observent un silence cérémonial. Je salue d'abord Mère, comme au temps où j'étais gamin et la quittais pour l'école. Je me mets à genoux et lui dis : okasama, je m'en vais. Elle me rend un salut profond. […]    

     - La Mandchourie est un pays frère, crie-t-elle. Malheureusement les terroristes cherchent à corrompre l'amitié de nos deux empereurs. Ton devoir est de veiller sur une paix difficile. Entre la mort et la lâcheté, choisis sans hésiter la mort ! […]

      La rive s'éloigne, avec elle le grondement du port. L'horizon s'élargit, l'immensité nous submerge.

      Nous débarquons en Corée à Pusan. Tassés dans un train, nous roulons vers le nord. Le troisième jour, au crépuscule, le convoi s'arrête. Nous sautons joyeusement à terre pour nous dégourdir les jambes […] Au-dessus de ma tête, dans le ciel, des oiseaux tournent. Soudain, j'entends un cri étouffé. Des hommes s'enfuient dans un bois.            

     A une dizaine de pas, Tadayuki, frais émoulu de l'école militaire, est étendu à terre. Le sang jaillit de sa gorge en un flot continu. Ses yeux demeurent ouverts. Dans le train, je ne cesse de revoir son jeune visage déformé par un rictus d'étonnement. Mourir, est-ce aussi léger que s'étonner ?

     Le train arrive à une gare mandchoue au milieu de la nuit. La terre, couverte de givre, scintille sous les réverbères. Dans le lointain, des chiens hurlent.». – «La joueuse de go», www. grasset.fr, pp.1-2.

 

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IV. Extraits témoins de la topographie des champs

de batailles dans les romans de guerre en

Océanie aux XIXE-XXIe siècles

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      Des extraits témoins de la topographie des champs de batailles dans les romans de guerre, en Océanie, aux XIXe-XXIe siècles, Jean-François Vernay remarque notamment : «Le paysage est considéré comme un outil thématique (le thème de l’Arcadie) ou bien il fait partie intégrante d’un genre (…). Le paysage est un élément clef pour les (…)  écrivains, dans leur rapport à l’identité nationale (…). La cartographie en tant qu’acte d’écriture est une métaphore privilégiée de cette géographie littéraire. On passe de la perception à la conception (…). Lors de l’entreprise coloniale [v. roman de guerre], les colons se sont très vite rendu compte qu’il leur fallait un nouveau lexique pour exprimer leur sentiment d’altérité et étiqueter les nouvelles réalités. Étant aux antipodes de leur pays natal, ils durent faire face à une nouvelle géographie, un autre climat, une population différente et des structures administratives particulières. Il faut donc comprendre l’urgence à mettre des noms sur des espaces inexplorés comme un moyen de créer de nouvelles existences et de poser des repères. » - «Panorama du roman australien des origines à nos jour, 1831-2007 », www.books. google.fr, pp.14-15.  D’où à titre d’exemples :

                          

     1. En Nouvelle Calédonie :

 

·   «Nouméa... Guadalcanal», Jean Vanmai, Ed. L’Océanie, 1988, ou : Des morts vivants :

 

    Né en 1940, à Koumac, petite cité du nord de la Calédonie, Jean Vanmai est un écrivain et romancier calédonien. Sa mère originaire est issue du Nord du Vietnam, comme son père, y est venu, en 1937, pour travailler dans la mine. En 1960, à l’âge de vingt ans, sa famille s’embarque sur l’Eastern Queen, pour Hai Phong. Il hésite, entre les siens et la Nouvelle-Calédonie, qui est désormais sa vie et son avenir et y reste. Il reçoit une formation d'électrotechnicien qui lui ouvre des biens des voies et épouse Hélène Wendt de Futuna, dans le Pacifique), et dont il a trois enfants. Il s’active dans la sphère culturelle de sa communauté. Il est l’auteur de :  Chân Dan (1980), Fils de Chân Dang (1983), Nouméa-Guadalcanal (1988), Pilou-Pilou (1998), etc.

 

Des morts vivants

    La topographie du champ de bataille dans le roman de guerre, dans ’Nouméa-Guadalcanal’ de Jean Vanmai’ forme ’une visée panoramique illimitée, couvrant le Japon, l’Amérique Asturies, l’Asie le Pacifique, vers le milieu du XXe siècle, et une topographie limitée : la jungle, les excavations rocheuses, un pays, la terre trempée, lors de la Guerre du Pacifique, en 1941-1945.

 

     «L'aspirant Hitoshi Suganuma, amaigri et souffrant, n'était plus que l'ombre de lui-même. Comme beaucoup de ses camarades dispersés dans l'épaisseur étouffante de la jungle, il avait choisi de poursuivre la lutte par des actions de guérilla contre les ennemis mortels de son pays, plutôt que de suivre les troupes fraîchement débarquées. Suganuma ne désirait pas, en effet, être regroupé avec d'autres malades pour être ensuite maintenu en première ligne face aux armes américaines. Ce serait pour lui une mort presque inutile. Bien qu'il se rendît compte que sa condition physique était maintenant des plus précaires (…).

     Oui, Suganuma s'était vaillamment défendu. Il avait aussi tué et sans doute blessé beaucoup de Yankees. […] Car ils procèdent avec intelligence et sont doués, j'en suis maintenant convaincu, d'une faculté d'adaptation et d'improvisation remarquable, pouvant faire face à toutes les situations lorsque cela s'avère nécessaire.

     Poursuivant son raisonnement, il dit cette fois :

     – C'est tout à fait l'opposé de nos méthodes qui, elles, demeurent désespérément immuables, dès lors que les plans sont adoptés. C'est en tout cas la leçon que j'en tire, en analysant attentivement les évolutions de la situation sur l'île... à nos dépens.

     Déconcerté, se demanda alors :

     – Finalement, est-ce cela le fameux raisonnement logique que l'on prête aux hommes blancs ?

     Mais ses sourcils se froncèrent soudainement, lui donnant un air tourmenté :

     – Nos chefs les plus brillants et qui échouent à chaque tentative d'une façon lamentable, en laissant des morts par centaines sur le terrain, se sont-ils donc aussi lourdement trompés sur la valeur de leurs adversaires ?... Eux, qui prétendent posséder l'art de la guerre et qui sont convaincus de notre invincibilité, n'ont su jusqu'à ce jour que provoquer d'inutiles charniers en tentant de reprendre cette île de Guadalcanal, tombée aux mains des Américains, ajouta-t-il ensuite avec des yeux attristés (…).

        – À moins d'un miracle, tout semble joué... Il ne me reste plus qu'à attendre l'heure de la mort… Autant que possible tel un Samouraï !...»  - «Nouméa... Guadalcanal», www./webcache.googleusercontent.com, p.1.

 

      2. En Australie :

·   «La voleuse de livres», Markus Zusak, Ed. L’Océanie, 1988, ou : C’est plutôt la faute des bombes :

 

     Né en 1975, à Sydney, Markus Zusak est un écrivain et romancier australien. Il est le benjamin  des quatre enfants d'un père autrichien et d'une mère allemande. Il vit à Sydney, avec sa femme et sa fille et enseigne l'anglais à l'université de Sydney. Il est l’auteur de : The Underdog (1998), Combat de frères (2000), When Dogs Cry (2002), The Messenger (2003),  La Voleuse de livres (2007), etc.

 

C’est plutôt la faute des bombes

 

     La topographie du champ de bataille dans le roman de guerre, «La voleuse de livres»  de ‘Markus Zusak’ édifie ’une visée panoramique illimitée, couvrant l’Allemagne, une ville, le ciel, vers le milieu du XXe siècle, et une topographie  limitée : trois entailles dans le sol, l’épave d’un avion écrasé,  des monticules de terre et de béton, des rues veines   ouvertes, des montagnes de décombres, un sous-sol, un paysage ravagé, au début  de la Seconde Guerre mondiale,  en 1939.

 

      «L’avion toussait encore. De la fumée s’échappait de ses deux poumons. En s’écrasant, il avait creusé trois profondes entailles dans le sol. Ses ailes étaient maintenant des bras sectionnés à la racine. Pour cet oiseau de métal, c’en était fini de voler. [...] Le garçon arriva le premier, le souffle court, portant une boîte à outils. En émoi, il s’approcha du cockpit et observa le pilote, cherchant à savoir s’il était vivant. Il l’était encore. La voleuse de livres apparut trente secondes plus tard. Des années avaient passé, mais je la reconnus. Elle haletait.

     De la boîte à outils, le garçon sortit un ours en peluche.
Il passa la main à travers le pare-brise éclaté et le déposa sur le torse du pilote. L’ours souriant resta niché contre l’homme ensanglanté. […]     Ce que voulait avant tout la voleuse de livres, c’était regagner son sous-sol pour écrire, ou pour relire une dernière fois son histoire. […] Sans compter que le sous-sol n’existait plus. Il faisait maintenant partie de ce paysage ravagé [...].

     Les couleurs tombent les unes sur les autres. Le noir gribouillé sur le blanc global éblouissant, lui-même sur l’épaisse soupe rouge. Oui, souvent, quelque chose vient me rappeler la fillette, et j’ai gardé son histoire dans l’une de mes nombreuses poches pour la raconter de nouveau. Elle fait partie de celles, aussi extraordinaires qu’innombrables, que je transporte. Chacune est une tentative, un effort gigantesque, pour me prouver que vous et votre existence humaine valez le coup.

     La voici. Une parmi une poignée d’autres. La voleuse de livres.         

    Venez avec moi, si ça vous tente. Je vais vous raconter une histoire.                

    Je vais vous montrer quelque chose.» - «La voleuse de livres», www.qui chottine.fr, pp.18-24.

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V. Extraits témoins de la topographie des champs

de batailles dans les romans de guerre en

Amérique aux XIXE-XXIe siècles

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       Des extraits témoins de la topographie des champs de batailles dans les romans de guerre, en Amérique, aux XIXe-XXIe siècles, Vincent Jaury et Oriane Jeancourt Galignani écrivent en particulier : «Les États-Unis ont toujours vécu à l’ombre de la guerre. Hier, la Corée ou le Vietnam, maintenant l’Irak et l’Afghanististan. Et les écrivains ont toujours tenté de répondre à un formidable défi : représenter les conflits sur lesquels flotte la bannière étoile. Aujourd’hui encore, dans la grande tradition de Crane, d’Hemingway ou de Dos Passos, de jeunes romanciers se prêtent au jeu. Ben Toutain, Kevin Powers, et Stephen Dau dépeignent ces affrontements du XXIe siècle, au Moyen-Orient, entre domination des images, fin de l’héroïsme et fascination d’une société pour la violence. Mais loin du réalisme qui jusque-là soutenait majoritairement les romans de guerre américains, ils livrent leurs visions poétiques ou grotesques, de cette actualité devenue, déjà, Histoire.» - «Les écrivains américains face à la guerre : d’Hemingway à Kevin Powers, comment la littérature voit l’Amérique au combat »,  www.transfuge.fr , p.1. En témoignent :

                          

     1. Aux USA :

 

·   «Pour qui sonne le glas », Ernest Hemingway, Ed. L’Océanie, 1940, ou :   Mort et torture face à l’Hôtel de Ville d’un village de la Guerre civile espagnole :

 

       Né en 1899, à Oak Park, près de Chicago, et mort suicidé, en 1961, dans sa propriété de l’Idaho, aux USA, prix Nobel de littérature (1954), Ernest Hemingway, ou Ernest Miller Hemingway, est un écrivain et romancier américain. En 1917, il entre au Kansas City Star comme reporter, puis s’engage sur le front italien. Après avoir été quelques mois correspondant du Toronto Star dans le Moyen-Orient, il s’installe à Paris pour apprendre le métier d’écrivain. Il voyage aux États-Unis, en Afrique, au Tyrol, en Espagne. En 1936, il prend part à la guerre civile espagnole dans l’armée républicaine et à la grande guerre, à Paris comme correspondant de guerre avec la division Leclerc (1939-1945). Il est l’auteur de : Le soleil se lève aussi (), Pour qui sonne le glas (1940), Le vieil homme et la mer (1953), etc.

 

Mort et torture face à l’Hôtel de Ville d’un village

 de la Guerre civile espagnole

 

     La topographie du champ de bataille dans le roman de guerre, Pour qui sonne le glas’ de ‘Ernest Hemingway’ forge ’une visée panoramique illimitée, couvrant l’Espagne, les USA, le monde, vers le milieu du XXe siècle, et une topographie limitée : un village, une colline, une place de l’hôtel de ville, la boutique d’un coiffeur, lors de la Guerre civile espagnole, en 1936-1939.

          

      «Nous étions attachées par les poignets, une longue file de jeunes filles et de femmes, et ils nous poussaient sur la colline, à travers les rues, jusqu'à la place. Sur la place, ils se sont arrêtés devant une boutique de coiffeur qui était en face de l'hôtel de ville. Là, les deux hommes nous ont regardées et l'un a dit : «Celle-là, c'est la fille du maire!»  et l'autre a dit : « Commence par elle. ». Alors, ils ont coupés la corde de chaque côté de mes poignets et l'un a dit : «Refermez la ligne ! ». Ces deux-là m'ont prise par les bras et m'ont fait entrer dans la boutique du coiffeur, et ils m'ont soulevée pour me mettre dans le fauteuil et ils m'y ont maintenue. Je voyais ma figure dans le miroir, et la figure de ceux qui me tenaient, et la figure des trois autres qui se penchaient sur moi, et je ne les connaissais pas. […] Et je me voyais avec une seule natte et une touffe de cheveux à la place de l'autre. Et puis il a coupé l'autre natte mais sans la tirer, et le rasoir m'a fait une petite entaille à l'oreille, et j'ai vu le sang qui coulait [...]. Donc, il avait coupé les deux nattes tout près de ma tête avec un rasoir, et les autres riaient, […] et il disait : «C'est comme ça qu'on fait des nonnes rouges. Ça t'apprendra à t'unir avec tes frères prolétaires. […]    Et quand il a eu fini, il a pris le flacon d'iode sur l'étagère du coiffeur, ils avaient tué le coiffeur aussi, parce qu'il faisait partie d'un syndicat ; il était étendu devant la porte de la boutique, et ils me l'avaient fait enjamber quand ils m'avaient amenée là, et alors, avec le pinceau du flacon de teinture d'iode, en dessinant les lettres lentement et soigneusement comme un artiste, et je voyais tout cela dans la glace et je ne pleurais plus parce que mon cœur était de nouveau glacé, à cause de mon père et de ma mère, et ce qui m'arrivait maintenant n'était rien, et je le savais. » - « Pour qui sonne le glas», www. tpe-l-espagne.skyrock.com, p.3.

 

      2. Au Canada :

·  «Le chemin des âmes, Three Day Road», Joseph Boyden, Ed. Albin Michel, 2006, ou :   Du fond de la tranchée :

 

      Né en 1966, à Toronto, en Ontario, au Canada Joseph Boyden est un écrivain et romancier canadien. Il est issu d’origines irlandaises, écossaises et indiennes. Il est l’auteur de :  Le chemin des âmes, Three Day Road (2006), Les Saisons de la solitude, Through Black Spruce (2008), etc.

 

Du fond de la tranchée

 

     La topographie du champ de bataille dans le roman de guerre,Le chemin des âmes’ de ‘Joseph Boyden’ dépeint ’une visée panoramique illimitée, surplombant l’Europe, le Canada, la Belgique, vers le milieu du XXe siècle, et une topographie limitée : une tranchée, la terre, le ciel, les fils de fer barbelés, des cadavres, les cratères ennemis, les fermes belges, pendant la Première Guerre mondiale, en 1914-1918.

 

     «Nous restons blottis là-dessous, à écouter les obus qui s'éloignent petit à petit, dans des chocs sourds et des frissons, comme des bêtes féroces qui reniflent la terre, et la martèle, cherchant toujours d'autres hommes à déchiqueter […].

    «Je dirai aux anciens les choses étranges que j'ai vues, les aéroplanes qui montent très haut dans le ciel pour se mitrailler l'un l'autre, et les cadavres, tant de cadavres autour de nous qu'on ne les voit même plus gonfler sous la pluie, et cette rumeur à propos de petites bombes, pleines d'un gaz empoisonné qui brûle la gorge et les poumons, si bien qu'on s'étrangle et qu'on meurt dans de terribles souffrances, et les patrouilles, la nuit, quand on se faufile comme un renard pour aller réparer des fils de fer et nettoyer les cratères ennemis, et les obus, qui arrivent en sifflant de nulle part, un beau matin, pour arracher les bras, la tête, les jambes de l'homme auquel vous parliez la veille.

    Mais surtout, je dirai aux anciens comment, après un bombardement, la vie reprend son cours ordinaire, presque aussitôt, comment l'esprit ne tolère pas qu'on s'attarde sur l'horreur de la mort violente, car sinon l'on deviendrait fou. […].

    Le seul spectacle qui ne soit pas décourageant, en cet endroit, se trouve dans le ciel. […]. Ếtendu au fond de la tranchée, par une journée calme, je me dis que l'existence d'un soldat consiste à contempler le ciel ; à ramper sur terre pendant la nuit ; à vivre sous terre durant le jour.

    J'ai l'impression qu'avec leurs obsessions, ces wemistikoshiw ont partagé ma vie en trois.

    Il y a eu ma vie d'avant, quand je ne les connaissais pas encore, eux et leur armée ; il y a ma vie présente, à la guerre ; et si j'en réchappe, il y aura ma vie d'après, quand je serai rentré chez moi.

    Sans doute est-il magique, ce nombre trois. Tu m'as enseigné, Niska, que tôt ou tard, chacun de nous devra descendre, trois jours durant, le chemin des âmes ; et j'en viens à me demander s'il existe des liens entre leur monde et le mien. Il faut que je découvre si nous avons quelque chose en commun, une certaine magie, peut-être. Cela pourrait m'aider à m'en sortir.» - « «Le chemin des âmes», www.webcache.googleusercontent.com, pp.30-312.

 

      3. En Colombie :

·  «Cent ans de solitude», Gabriel García Márquez, Ed. Éditions du Seuil, 1968, ou :   Un pays en guerre civile :

 

   Né en1927, à Aracataca, en Colombie, et mort en 2014, à Mexico, au Mexique,  prix Nobel de littérature (1982), Gabriel García Márquez est un écrivain et romancier, journaliste et activiste politique colombien, il reçoit en. Il poursuit en autodidacte ses études, après avoir quitté son école de droit pour se lancer dans le journalisme. En 1958, il épouse Mercedes Barcha avec qui il a deux fils : Gonzalo et Rodrigo García, devenu réalisateur. Il voyage en Europe et vit actuellement à Mexico, où il a lancé l’hebdomadaire mexicain ‘Cambio’. Depuis 1999, il souffre d’un cancer lymphatique. Il est l’auteur de : Cent ans de solitude (1967), Chronique d'une mort annoncée (1981), L'Amour aux temps du choléra (1985), etc.

Un pays en guerre civile

 

     La topographie du champ de bataille dans le roman de guerre, «Cent ans de solitude» de Cabriel Garcia Marquez simule une visée panoramique illimitée, recouvrant la Colombie, le pays d’une frontière à l’autre, vers les milieux des XIXe-XXIe siècles, et une topographie limitée : un village, une maison, un pays, une cellule de condamné, un lieu de peloton d’exécution, au cours de la Guerre civile colombienne,  en 1860-1962.

 

     «Le colonel Aureliano Buendia fut à l'origine de trente- eux soulèvements armés et autant de fois vaincu. De dix-sept femmes différentes, il eut dix-sept enfants mâles qui furent exterminés l'un après l'autre dans la même nuit, alors que l'aîné n'avait pas trente-cinq ans. Il échappa à quatorze attentats, à soixante-trois embuscades et à un peloton d'exécution. Il survécut à une dose massive de strychnine versée dans son café et qui eût suffi à tuer un cheval. Il refusa l'Ordre du Mérite que lui décernait le président de la République. Il fut promu au commandement général des forces révolutionnaires, son autorité s'étendant sur tout le pays, d'une frontière à l'autre, et devint l'homme le plus craint des gens au pouvoir, mais jamais il ne permit qu'on le prît en photographie […].    José Arcadio le Second continuait à relire les parchemins.  Rien n'était plus discernable dans la broussaille touffue de son système pileux que ses dents hachurées de vert-de-gris et ses yeux immobiles. En reconnaissant la voix de son arrière-grand-mère, il tourna la tête vers la porte, essaya de sourire et, sans le savoir, répéta une ancienne phrase d'Ursula.

   - Que voulez-vous, murmura-t-il, le temps passe.

   - C'est un fait, répondit Ursula, mais pas à ce point là.

    En disant ces mots, elle se rendit compte qu'elle était en train de lui adresser la même réplique qu'elle avait reçue du colonel Aureliano Buendia dans sa cellule de condamné et, une fois de plus, elle fut ébranlée par cette autre preuve que le temps ne passait pas - comme elle avait fini par l'admettre - mais tournait en rond sur lui-même. » - «Cent ans de solitude», www.litterature-pour-tous.com, pp.1.

 

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