sábado, 6 de julio de 2013

DE LA THEORIE DE LA RECEPTION DES TEXTES LITTERAIRES



UNE LCTURE COMPARATIVE : LE CODE, L’ŒUVRE, L’EXPÉRIENCE
ESTHÉTIQUE COMME FONDEMENT D’UNE THÉORIE DE LA RÉCEPTION :
ROLAND BARTHES, MAURICE BLANCHOT ET HANS ROBERT JAUSS

                                                « Les modèles textuels sont                              
                                             autant de décisions euristiques
                                                         Wolfang Iser, in
                                                     «La fiction en effet»[1]

0.      Préalables :

        L’approche ‘comparative’ des trois textes dont nous proposons d’expliciter ici «l’originalité, la différence, voire l’incompatibilité de point de vue», ne va pas sans nécessiter, dès l’abord, une brève mise au point stratégique, celle de leur coprésence dans un même corpus, soumis à notre jugement comparative et qui ne saurait avoir lieu sans être au préalable logiquement fondé. Il s’agit, en somme, des termes d’une comparaison. Il serait futile, voire stérile, de comparer l’incomparable. Cela revient à dire et en toute évidence que toute comparaison présuppose théoriquement un lieu géométrique à partir duquel elle parvient à opérer, et c’est l’opposition des différences et des ressemblances (ne se laisse que celles de l’homogénéité spécifique du champ cognitif dans lequel celle-ci-ci s’inscrit et opère).

      Les extraits, mis en présence ici, réfèrent à des auteurs dont les travaux et la personnalité bien que participant de pratiques et de théories distinctes appartiennent ensemble au domaine de la littérature critique (voire heuristique et épistémologique). Ce sont respectivement, par ordre d’arrivée [2] - ce qui ne constitue aucun a priori hiérarchique ou typologique – les auteurs dont les extraits à analyser révèlent déjà la position théorique initiale propre à chacun d’eux : d’abord Roland Barthes, dans un extrait de «L’analyse rhétorique», Maurice Blanchot de «L’espace littéraire» et Hans Robert Jauss dans un fragment sur «L’expérience esthétique en général et littéraire en particulier».

      Or, un second préalable se manifeste ici parallèlement au premier, il y est question du statut théorique de chacun de ces auteurs, stratégiquement mis en rapport de confrontation heuristique et épistémologique au sein de notre étude, et hypothétiquement inscrits dans un champ cognitif global, celui du moins de perspective téléologique qui sous-tend les extraits dont ils sont les auteurs et que nous aurons à analyser au cours de cette étude, autrement dit, celui de la théorie de «la réception de la littérature»  et nous posons ici comme postulat avant-coureur de cette lecture. Auparavant, la citation de quelques définitions rapides nous permettra d’esquisser de façon résumée le profil théorique de chacun d’eux.  Ainsi à la mort de R. Barthes, Susan Sontag  écrit : «De tout temps, disait-il de lui-même, il avait « travaillé successivement sous la tutelle d’un grand système (Marx, Sartre, Brecht, la sémiologie, le Texte)[3]».   En schématisant à l’extrême cet autoportrait théorique de Barthes, nous dirons que nous sommes en face d’un «sémioticien», au sens très large du terme (selon J. Kristeva)[4]. Par ailleurs, on peut lire sous la plume Tzvetan Todorov résumant Blanchot, la remarque suivante : «La parole poétique est une parole intransitive, qui ne sert pas ; elle est ne signifie pas ; elle est. L’essence de la poésie est dans la recherche qu’elle conduit de son origine. Tels sont les lieux communs romantiques que Blanchot lit dans Mallarmé, et qui domineront la doctrine exposée dans «LE LIVRE À VENIR» et «L’ESPACE LITTÉRAIRE» ; à quoi il faut ajouter un trait absent ou secondaire chez Mallarmé, mais bien chez les romantiques, à savoir la coprésence des contraires.»[5] En spécifiant encore une fois, nous dirons qu’il s’agit d’un «poéticien», au sens restreint du mot (voir R. Jakobson)[6]. Enfin, Lucien Dällenbach présente ainsi H.R. Jauss (Chef de file de l’école de Constance) comme le fondateur d’une très cohérente «esthétique de la réception» : «Le mérite de l’avoir conçue (cette esthétique) revient, comme on sait, à Hans Robert Jauss qui, dès sa célèbre leçon inaugurale de 1967, en énonce le programme et en définit l’enjeu[7].» C’est donc en un mot le théoricien de «l’esthétique de la réception».

         De ce fait, on peut provisoirement dire que l’on a affaire à trois types de points de vue différents, en d’autres termes, à trois positions théoriques, de trois auteurs dont les prémisses doivent être, à ce niveau-là, parfaitement séparés :  un « sémioticien » (R. Barthes), un «poéticien» (M. Blanchot), un «esthéticien de la réception» (H.R. Jauss) – le premier d’obédience sociologique, le second d’aspiration fonctionnaliste et le troisième de tendance communicative (a priori).

        Ces deux préalables stratégiques posés, il reste à savoir, et ceci à travers les trois textes du corpus, les types de rapports que ces positions entretiennent d’une part entre elles, et d’autre part, entre celles-ci et le point de vue commun qui a présidé (heuristiquement et épistémologiquement) à l’établissement de ce corpus dans une optique comparative : à savoir le lieu géométrique d’une problématique et que nous avançons ici de manière formelle et à priori hypothétique, celle que suscite l’activité littéraire, comme acte de communication d’un genre particulier : celui d’ une « théorie de la réception et le schéma qui va suivre en vérifiera, par l’analyse, la pertinence au sein d’une problématique générale globalisante et synthétique de cette approche comparative de notre objet. Ainsi donc munis de deux préalables : l’un portant sur le rapport entre le corpus et la pertinence a priori de l’explication comparative, l’autre sur la diversité des points de vue théoriques en présence (définis comme procédures ou herméneutiques apparemment divergentes) et d’un postulat de base comme « hypothèse » structurante de cette lecture, qui a pour fonction logique de la faire tendre vers son accomplissement téléologique, cohérente inscrite méthodologiquement et cognitivement dans « l’objet » même qu’elle décrypte : à savoir la littérature ou l’art en général. Il prendra comme forme de référent privilégié de cette procédure celle d’un schéma de communication abstrait, notamment celui proposé par la théorie de la réception, mais dont la validité sera tributaire du résultat de l’analyse des textes étudiés (voir schéma ci-dessous)[8].































 
                   (1)  Texte                                                                         (1) Sujet et procès
                                                                                                              de production




                 (3) Sujet et                                                                          (4) Contexte
                    procès de                                                                             historique
                   réception                                                                            inconscient
                        Schéma communicative  de la «théorie de la réception »
De L. Dällenbach[9]

      Notre analyse recoupera les positions suivantes :
-         Des textes particuliers (ou analyse comparée du corpus).
-         Des théories particulières (ou les points de vue des textes du corpus et herméneutiques qu’ils développent respectivement l’un par rapport à l’autre).
-         Une théorie globale de l’art en général (ou la théorie de « l’esthétique de la réception », proposée comme synthèse théorique, sinon pratique de ces dernières).
  
        1. Analyse :

         Comme nous l’avions signalé au début de nos préalables, notre lecture comparative visera en premier lieu les extraits de textes du corpus dans leur particularité afin d’en connaître les stratégies herméneutiques spécifiques à chaque auteur, l’originalité de son point de vue et l’objectif qu’il poursuit. Cela nous permettra de vérifier : préalables, postulat de base et «hypothèse structurante» formulée à leur sujet ci-dessus.

1.1. Des textes particuliers : 

      Ces textes particuliers de notre corpus sont au nombre de trois : celui R. Barthes (ou texte A), celui de M. Blanchot (ou texte B) et celui de H.R. Jauss (ou texte C). Nous les aborderons en trois temps : d’bord au niveau des structures globales, ensuite au niveau des traits structurels divergents, enfin au niveau des traits structurels convergents (s’il y a lieu).

1.1.1. Niveau des structures globales :

En effet, ces trois extraits (textes : (t. A), (t. B), (t. C), pris dans leur globalité, se présente sous une forme logique à trois temps qui ferait songer à une structure syllogistique (majeure, mineure, conclusion : chose à vérifier sur le plan effectif) et qu’il est possible de formaliser ainsi :  

                                                X    +    Y +    Z
Cela est tout du moins une remarque purement intuitive et dont la configuration textuelle signifiante est empiriquement parlant :

             (t. A)  =  X (Problématique : code/ société/ + histoire) +
                            Y (Solution : code rhétorique = Occident + histoire) +
                            Z (Problématique : (code rhétorique/ histoire)
    
            (t. B)  =  X (Problématique : œuvre d’art / langage + monde «muet» +  
                              Nous) +
                           Y (Solution : œuvre d’art = langage des dieux (jadis) +
                              langage  des hommes (plus tard) + langage de l’art (enfin/
                              un jour) +
                           Z (Problématique : ouvre d’art/ en constante genèse +
                               nous)

             (t. C)  = X (Problématique : code : expérience esthétique/ passé + 
                                  altérité proche de «Toi») +
                           Y (Solution : Expérience esthétique = herméneutique vers +
                                  passé ou culture étrangère) +
                           Z (Problématique : Fonction esthétique/ dévoilement +
                               appel à la compréhension d’une autre conscience).

   Au niveau des trois textes : (t. A), (t. B), (t. C), la formule (X + Y + Z) a permis de saisir la structure globale de l’ordre logique en œuvre dans leur organisation générale. Et celle-ci semble chaque fois dire : X «est un problème»,  Y «en est l’explication / ou la solution», Z «en fait le point de départ d’une recherche en vue d’une théorie générale ou d’une praxis de cette solution». DE ce point de vue, purement logique, on peut affirmer une certaine ressemblance entre les trois textes décrits. Mais il faut le dire, sur le plan des contenus, il est facile de percevoir d’énormes écarts de points de vue, de procédure et de conceptions théoriques. Notons enfin de compte, pour ce qui est de la structure globale de chaque texte du corpus l’illustration au niveau de la composante Y (de la structure globale (X+Y+Z) du phénomène littéraire discuté à l’aide d’exemples empruntés à la littérature classique ou théologique, et cela comme une constante de la structure globale de ces textes (Cicéron et Bossuet pour (t. A) de R. Barthes, «Les Euménides » d’Eschyle pour M. Blanchot dans (t. B) et Homère et la Bible dans le (t. C) de H.R. Jauss). Cette analogie dans la structuration de leurs textes ici relevée rejoint-elle sur le plan des idées chez nos auteurs une convergence de leurs théories ?

  C’est ce que nous allons tenter d’éclairer, cette fois-ci, au niveau des traits structurels de notre corpus (ou micro - structures de ces derniers).

1.1.2.  Niveau des traits structurels divergents : 

        L’ayant appréhendée dans sa globalité, la structure des textes (t. A, t. B, t. C), risque de livrer, d’un texte à l’autre ses traits divergents (ou détails incompatibles ou non). Là, nous serions tentés de dire (d’un lieu un peu voisin et qui en fait, tend à s’en rapprocher davantage, téléologiquement parlant) avec M. Georges Benrekassa : « Il n’y a pas lieu de s’étonner que ce détour ait contribué à une certaine dispersion de l’objet lui-même, et surtout que notre démarche ait été fragmentée. Cette fragmentation n’est pas accidentelle ; et si on peut discerner dans ces écrits ce que certains appellent de THÈMES notre souci a été d’abord de les fracturer.»[10]. Cette fracturation s’accompagne pour nous ici d’un souci d’analyse comparative de textes à caractère théorique, donc soucieuse de leur portée heuristique et épistémologique (voit « hypothèse structurante » énoncée plus haut). Nous examinerons donc ces traits structurels divergents à travers les procédés heuristiques ci-après :

a-     Les points de vue en présence : 

           Théoriquement, la question de points de vue peut se décider au sein d’une sorte de «Dilemme» entre la partie et le tout de l’objet à étudier. C’est ce dont parle dans une optique linguistique Oswald Ducrot dans son introduction aux «Actes de langage» de J.R. Searle : «Pour éviter ce dilemme, Saussure demande au linguiste de construire un objet qui ne soit pas une simple région délimitée à l’intérieur du donné, une partie de la matière, mais qui en soit véritablement abstrait (et non pas extrait), qui représente un aspect privilégié, et non pas un secteur privilégié des phénomènes. Inaugurant ainsi en linguistique le renversement copernicien  qui, selon Kant, ouvre à une discipline la voie royale de la science, Saussure demande au linguiste de choisir délibérément, avant toute recherche, LE POINT DE VUE selon lequel il interrogera les phénomènes et qui lui permettra de construire l’OBJET SCIENTIFIQUE proprement dit.»[11].

        À vrai dire, dans les extraits que nous comparons ici le point de vue est saisi empiriquement sans soutien métathéorique ou terminologique explicitement aguichant. Mais la lecture redoublée aidant, des lignes forces s’en dégagent et les points de vue se font reconnaître. Il s’agit en somme, ici rappelons-le également, de conforter les constats faits là aux niveaux des textes avec les statuts théoriques dégagés préalablement. Ce sera alors :

      a.1. Le texte A : (t. A de R. Barthes)  

      Dans cet extrait, dès la première ligne, R. Barthes dit : «Ainsi, la forme même du message littéraire est dans un certain rapport avec l’histoire et avec la société, mais ce rapport est particulier et ne recouvre pas nécessairement l’histoire et la sociologie des contenus». Et ce n’est qu’après qu’il indiquera «l’objet» de son étude (sachant que nous sommes là au milieu d’un article dont l’extrait n’est qu’une infime partie et c’est aussi le cas de tout le corpus). Le point de vue qui se laisse voir ici dans le texte le t. A de R. Berthes comprend au sein d’une même problématique le rapport liant la littérature, en tant que code rhétorique, (signe) à une société (sociologie) et à une histoire (rapport plus ou moins adéquat, plus ou moins exhaustif). Les éléments constitutifs du point de vue du (t. A) recoupent cette définition du «Dictionnaire de Linguistique » Larousse : La sémiotique moderne devra donc se garder de privilégier le signe linguistique ; on peut avec J. KRISTEVA, trouver déjà dans le «COURS DE LINGUISTIQUE GÉNÉRALE» de F. de Saussure cette mise en garde. La sémiotique devra refondre les systématisations linguistiques, ainsi que  les modèles logiques ou thématiques ; elle devra s’appuyer sur une science du sujet et de l’histoire : cette pratique antérieure et indispensable à la sémiotique sera la «SÉMANALYSE».»[12]. 

      Nous sommes donc en face du point de vue d’un sémioticien (ou sémanalyste). Cela confirme par ailleurs le profil théorique que nous avions postulé dans nos préalables stratégiques, autrement dit, le statut de «sémioticien» (ou sémanalyste ici) attribué à R. Barthes dans le (t. A). Notons en définitive l’élargissement de la sociologie à l’histoire qui s’y accuse de façon très notoire.

          a.2. Le texte B : (t. A de M. Blanchot)

          De façon analogique, on peut déceler dans la première phrase de l’extrait de M. Blanchot (t. B) les traits structurels du point de vue qui s’y déploie. On y lit notamment : «L’on remarque quelquefois avec regrat que l’œuvre d’art ne parlera plus jamais le langage qu’elle avait en naissant, le langage de sa naissance que seuls ont entendu et reçu ceux qui ont appartenu au même monde.». Celle-ci pourrait se décomposer en l’occurrence en livrant les traits que voici : l’œuvre d’art (comme parole d’un vécu historique originel, ou «langage» de sa «naissance»), «on» et «ceux qui ont appartenu au même monde» (marques de la rupture d’une attente du «on» qui reste à «actualiser», actualisable peut-être à travers sa dimension poétique («regret» à dépasser dans le cadre d’une «histoire idéale et schématique» dira T. Todorov à propos de la «littérature» se préoccupant de sa propre «essence» chez Blanchot[13].

      Le caractère définitoire de cette position théorique inscrite comme point de vue dans le (t. B) de Blanchot se trouve abondamment connoté à travers cette réflexion de J. Starobinski dans sa préface à « Pour une esthétique de la réception » de H.R. Jauss, où citant ce dernier, il en rapporte : «La possibilité de formuler objectivement ces systèmes de références à l’histoire littéraire est donnée de manière idéale dans le cas des œuvres qui s’attachent d’abord à provoquer chez leurs lecteurs l’attente  résultant d’une convention relative au genre, à la forme ou au style, pour rompre ensuite progressivement cette attente – ce qui peut non seulement servir un dessein critique, mais encore devenir la source d’effet poétique nouveaux.» (p.51). Et Starobinsky d’ajouter en commentaire : «À ce point, la théorie de Jauss ne ferait qu’entendre et dynamiser le rapport de la LANGUE et de la PAROLE énoncé par Saussure et Jakobson, ou le rapport entre la norme et l’écart dont Spitzer ne faisait pas seulement un procédé heuristique pour l’analyse interne des œuvres, mais de surcroît un indice pertinent, éclairant l’histoire des mentalités et les mutations qui s’y produisent.»[14].

         Retenons en tout ceci que la rupture de l’attente est source «d’effet poétique» dynamisant le rapport langue/ parole (Saussure - Jakobson), et cela nous rapproche davantage du profil théorique présupposé dans nos préalables qui posent M. Blanchot comme «poéticien» (t. B) (avec cette restriction supplémentaire, celle que fonde une poétique du «contenu» actualisable de la genèse constante «de l’œuvre» à travers la lecture, «lecture unique, chaque fois la première et chaque fois la seule»[15].

      a.3. Le texte C : (t. A de H.R. Jauss) 
      
       Suivant le même procédé, considérant le phrase initiale de l’extrait de H.R. Jauss (t. C), nous y trouvons les traits constitutifs de son point de vue théorique (voir «Hypothèse structurante» postulée et la conclusion sur «la structure globale », ci-dessus) et dont il dit : «l’altérité du passé a, pour l’expérience esthétique, quelque chose de fascinant, proche du Toi étranger.». Les éléments de ce point de vue dans le (t. C) sont dans l’ordre : «L’altérité du passé» (ou «objets esthétiques» et/ ou « culturels», voire étrangers : étrangeté dans le temps et l’espace historique et socio-anthropologique), un «Toi étranger» locuteur privilégié dans un rapport de communication avec «une altérité passée» (celle des auteurs des œuvres artistiques), comme «conscience autre», «une expérience esthétique» comme médiation intersubjective entre l’objet esthétique – sujet (locuteur) et l’interprète (allocutaire) mis en rapport au sein d’un affect (ici le « fascinant » ou «l’acte jouissif» , d’une jouissance communicative active, non pas passive), enfin «le passé» (comme historicité, condition sine qua none de la possibilité de cette communication esthétique productrice/ réceptrice de l’accès à l’affect disant d’une autre conscience (créatrice originelle/ ou participatrice contemporaine).

       Or, rien n’explicite mieux et ne résume avec assez d’économie que Jauss lui-même en un passage que cite Starobinsky, passage extrait que le maître de Constance donne en conclusion dans la préface qu’il rédigea pour l’édition japonaise de son livre[16] : «La pratique esthétique, dans ses conduites de reproduction, de réception, de communication, suit un chemin diagonal entre la haute crête et la banalité quotidienne; de ce fait, une théorie et une histoire de l’expérience esthétique pourrait servir à surmonter ce qu’ont d’unilatéral l’approche uniquement esthétique et l’approche uniquement sociologique de l’art ; cela pourrait être la base d’une nouvelle histoire de la littérature et de l’art, qui requerrait, pour son étude, l’intérêt général du public à l’égard de son objet.»[17]. En somme, nous somme bien devant le profil théorique que nous avons avancé au début de cette lecture comparative qui attribue à Jauss le statut a priori de théoricien de «l’esthétique communicative en littérature». Celle-ci s’étend ici outre le domaine de l’art en général, à celui de l’histoire (à faire)  de la littérature et de l’art comme expérience esthétique (donc communicative, voire «pragmatique»[18], théorisée.

     On peut donc conclure provisoirement à une divergence dans les points de vue des trois textes (t. A, t. B, t. C) quant aux moyens (méthodes et procédés mis en œuvre : sémiotique, poétique esthétique «pragma-communicative»), non en ce qui concerne l’objet et les fins (donnés souvent implicites dans le discours spécifique de chacun des trois auteurs). Ces donnés convergents sont les objets d’art et leurs conditions de production/ réception (comme objet de connaissance, par exemple : Cicéron/ Bossuet dans Blanchot  dans (t. A) de le Barthes, Eschyle (les Euménides) dans le t. B) de Blanchot), et Homère/ la Bible dans le (t. C) de H.R. Jauss. Les fins poursuivies sont toutes d’ordre cognitif, mais diversifiés dans leurs formes : à savoir explicatif/ interprétatif chez Barthes, génétique/ dérivatif chez Blanchot, intuitif/ intersubjectif chez Jauss. Et ce qui, à notre avis, particularise leurs théories respectives, tout en les unifiant.
                                  
     1.1.3. Niveau des traits structurels convergents : 
     
      Outre les traits signalés plus hauts et qui sont d’ordre empirique, les textes (t. A, t. B, t. C) ont pour lieu de convergence deux plans épistémologiques : le premier de nature interdisciplinaire, le second de caractère intersubjectif.

a.     Le plan interdisciplinaire et le plan intersubjectif :
     En ce sens, examinons respectivement ces deux plans interdisciplinaire et  intersubjectif des traits structurels convergents du corpus.

     a.1.  Le plan interdisciplinaire des traits structurels convergents du corpus :

     Les traits structurels convergents que comporte le plan interdisciplinaire du corpus sont notamment : la sociologie explicitement formulée dans le (t. A) de Barthes (« sociologie des contenus »), connotée et implicitement désignée dans le (t. B) de Blanchot («le même monde», «un monde déployé»), expression ambiguë que différencie et contextualise le mot «Grecs»  dans le premier cas référant à la société athénienne d’Eschyle, mais qui devient fiction, contextualisée  par le terme «lecture» dans le second cas), manifestement évoquée dans le (t. C) de Jauss (mais de façon oblique par l’item «situations sociales» des manifestations de l’art). Ainsi la sociologie est mise à contribution dans les trois textes, soit comme théorie (t. A), soit comme matériau, «objet de connaissance» (t. B et  t. C). L’histoire y acquiert l’unanimité : «l’histoire des contenus»,  par opposition sans doute à celle des formes littéraires chez Barthes (t. A), «jadis»/ «les Grecs»… (forme très allusive à l’histoire, vue sous un jour moins scientiste, plus subjectif voire anecdotique) chez Blanchot (t. B), «situation historique»/ «altérité passée» (combinaison d’une référence bivalente des conceptions du (t. A) et du (t. B) chez Jauss (t. C).

     Il en va de même pour l’esthétique qui fonde l’objet même du propos heuristique de ces textes : «Message littéraire»/ «code» rhétorique dans le (t. A), «l’œuvre d’art» dans (t. B) et «l’expérience esthétique»/ «la fonction esthétique»/ «l’activité esthétique»/ «l’objet esthétique» dans (t. C) – pléthore terminologique, redondance, forme d’une théorisation intensive dans ce texte. Quant à la référence à une théorie de la communication, elle est également inscrite dans chacun des textes du corpus : «la forme du message littéraire» chez Barthes (t. A), «parole»/ «langage»/ «parole de l’origine» chez Blanchot (t. B) (qui articule ici deux modes de communication : effective, ordinaire, pragmatique et fictive, subjective, imaginante, idéelle, voire idéale) – ceci  d’ailleurs pourrait être imputé à la nature de l’objet sémiologique de cette communication, visible également dans l’exemple de Barthes cité («message littéraire»), «les témoignages les plus parlants»/ «documents muets»/ «appel à la compréhension d’une autre conscience» chez Jauss (t. C) (à la communication fictive et effective s’ajoute ici la communication zéro du «document muet», ou «réception zéro», selon Wolf Dieter Stemplel[19]). Par leur référence plus ou moins explicité mais omniprésente, les trois textes confirment sur le plan interdisciplinaire la convergence des traits structurels qui les composent à ce niveau de l’analyse. Qu’en est-il alors sur le plan intersubjectif ?

        a.2.  Le plan intersubjectif  des traits structurels convergents du corpus :

        Un coup d’œil jeté sur les modalités de la parole dans ces textes montre leur quasi-appartenance à un même type de métadiscours. Pour ce faire, mis à part les marqueurs argumentatifs, dressons un tableau rapide des sujets dans la pronominalisation de la prise de parole (ou focalisation du discours dans (t. A), (t. B) et (t. C) :
       
Texte (t. A)
Texte (t. B)
Texte (t. C)
          On
          il ya
      il (conceptuel)
   (Barthes)
    On
    nous
    il (conceptuel)
         (Blanchot)
      Toi ( !)
      (nos)
       on   
       il (conceptuel)
              (Jauss)


Tableau des sujets de prise de parole

      Notons l’absence du «je», mais la présence du «on» qui l’inclut à une équation d’intersubjectivité plurielle de la parole théorique, et cela dans l’ensemble du corpus. Le « nous » lui fait pendant dans le (te. B) et le (t. C). Mais le neutre scientifique du «il y a» (t. B) et (t. C) ou «il» (conceptuel) qui souvent peut céder la place au nom (substantif conceptualisé) constituent la marque du discours rationnel théorisé. Le «Toi» du (t. C) de Jauss marque de façon explicite l’implication intersubjectif voilée dans le cas de «on» ou du «substantif conceptualisé» (l’histoire, la lecture, le lecteur, les Euménides, etc.).
Ainsi se trouve une nouvelle fois rapprochés, sur le plan des traits structurels convergents la ressemblance des  métadiscours de ces textes au niveau d’une relation intersubjective/ objective (avec exclusion radicale du subjectif). À cet égard, Jauss dit dans son «Entretien avec Charles Grivel» : «L’esthétique de la réception est une théorie de l’intersubjectivité qui pris congé du lecteur solitaire et de l’interprète en ma d’originalité.»[20]. Il ne nous reste plus qu’à savoir désormais si dans ce corpus, nous sommes devant une seule et même théorie, ou en face de plusieurs théorie réductibles ou non à une seule d’entre elles.

2. Des théories particulières :

      En passant en revue « l’objet » dont s’occupe ici chacun des textes du corpus, le point de vue fondateur qui s’y observe, nous constatons (en se référant directement au schéma communicatif de la théorie de la réception, ci-dessus) les faits suivants : le (t. A) a pour objet le «code rhétorique» (ou « sujet et procès de la production», ici la bourgeoisie et le code historiquement et socialement situé, du message littéraire chez Barthes), le (t. B) ayant pour objet de réflexion théorique «l’œuvre d’art» (le (t. B) de Eschyle, par exemple) et le (t. C) ayant pour objet d’étude «l’expérience esthétique» (ou «sujet» et procès de la réception. Ainsi, dans l’ordre du fonctionnement du «schéma de la théorie de la réception », chacun des points de vue découverts ci-dessus occupe suivant l’objet d’étude qui est le sien l’un des quatre pôles communicatifs  qui le compose :

                       - Le (t. A) : «Sujet et procès de production» (1)
                       - Le (t. B) : «Texte» (2)
                       - Le (t. C) : «Sujet et procès de la réception» (3) 

         Tandis que les trois textes par leurs «objets» d’étude situent leurs points de vue respectifs au niveau des pôles (1) pour (t. A), (2) pour (t. B), (3) pour (t. C), le pôle (3) autrement dit, celui du «contexte historique inconscient» reste le lieu géométrique commun aux trois «objets» et aux trois «points de vue» du corpus dans son ensemble. Cela aura caractérise et par la même occasion la place stratégique de chacune des théories particulière observée ici, et sa mise en rapport  avec les autres, au sein du «schéma de la théorie de la réception» qui semble, non seulement les représenter toutes, mais les délimiter dans le cadre d’un réseau d’interrelations (de communication) qui les englobe parfaitement et les structure en «rapports de praxis théorique» : la fonction productrice (1), (le produit textuel (2), la fonction réceptrice (3), corrélés ensemble à leur référent ontologique « d’objet esthétique », le « contexte historique  inconscient» (4).

     Par conséquent, nous pouvons dire que la sémiotique (t. A) comme la poétique (t. B) et l’esthétique de la réception (t. C) constituent autant de réalisations possibles de la «théorie de la réception» en littérature (du moins dans leur principe fondamental heuristiquement épistémologiquement parlant). Quant à leur performance, l’analyse qui précède vient de montrer leurs limites par rapport au schéma, qui théoriquement les englobe et les explique toutes. Qu’en est-il de cet appareil théorique préconisée par principalement par H.R. Jauss (et dont heuristiquement, nous avons laissé entendre au niveau du «point de vue» et de «l’objet» que sa théorie se plaçait au même niveau que les deux autres) - Chose à laquelle il serait aberrant de souscrire, si nous tenons compte, ne se laisse que des remarques pertinentes relevées à son sujet le long de cette lecture comparative de notre corpus ? D’où pour mieux en rendre compte le recours nécessairement à :

    2.1. La théorie globale de l’art en général :

     De par sa structure globale, ses traits structurels convergents et divergents, on peut dire déjà que «la théorie de la réception» présente des avantages sérieux sur ses concurrentes. C’est ce que nous allons tester à travers les codes herméneutiques en œuvre dans les trois textes, en tant que théories particulières concurrentes : (t. A), (t. B), (t. C). Nous le ferons au pôle (4) du «schéma de la réception», ou pôle du « contexte historique inconscient». Cela constitue, à notre avis, un point théoriquement constitué comme champ ouvert aux trois théories en question, c’est-à-dire, la sémiotique de Barthes, la poétique de Blanchot et la théorie de l’esthétique de la réception (ou théorie communicative) de Jauss. On y évaluera l’économie, l’adéquation et l’exhaustivité de chacune d’elles.

     2.2. Le test d’évaluation :

     Pour commencer, il est d’à propos de voir dans l’ordre suivi jusqu’à présent, l’appareil herméneutique de chacun des textes au point (n°4) du schéma de la réception (ou «pôle du contexte historique inconscient »). Ils se présentent de la manière suivante :

          2.2.1. L’herméneutique du (t. A) de R. Barthes :

           Dans un article «Structure et herméneutique», G. Genette écrit à ce sujet : «À propos d’une même œuvre, la critique herméneutique parlerait le langage de la reprise du sens et de recréation intérieure, et la critique structurale de la parole distante et de la reconstruction intelligible»[21].  Mais plutôt dire avec R. Barthes, dans «S/ Z», le code des « herméneutiques » (ou unités formulant des réponses, des vérités relatives des déchiffrements)[22]. Et ce sont ces unités relatives à des textes d’ordre théorique (ici historiquement interprétés) que nous allons interroger. L’herméneutique du (t. A) d’obédience sémiotique se présente, en effet, comme suit : l’histoire y est prise comme :

          - une grille d’analyse (canonisée : de «Cicéron» à «Bossuet», c’est 
             la « rhétorique classique» et du « milieu du XIXe siècle à 
             maintenant», celle-ci a subi une « mutation profonde », non sans 
             artefacts),
          -  l’explication est empruntée à la sociologie, réductionnisme ou  
             extrapolation (la cause probable est «la crise de la conscience
             bourgoise»),
           - le problème reste celui de savoir s’il y a lieu «évolution   successive» ou    
             par «translation», peut-être, selon un rythme endogène « analogue à 
             celui qui le changement de mode»,
          -  « l’évolution de la rhétorique » demeure inexpliquée malgré la mise en
             équation de la rhétorique et de «la mode», comme auparavant de  
            «l’histoire» et de la « sociologie ».

     C’est l’échec de l’herméneutique prenant «l’histoire» comme grille d’analyse (Histoire de l’Occident) de l’histoire du code rhétorique (en somme l’histoire prise comme modèle et objet, à la fois de sa propre analyse) : c’est aussi celui de la sémiotique du (t. A) face au «contexte historique inconscient» (4) du schéma de la réception.

          2.2.2. L’herméneutique du (t. B) de M. Blanchot :

           Dans l’optique du (t. B), en tant que théorie poétique, l’histoire est prise dans le sens de :

         - dispositif chronologique idéal producteur «d’œuvres d’art»,
         - l’explication est celle d’un scénario en trois temps : le temps des dieux, le
           temps des hommes (politique en quelque sorte), le temps des œuvres
           d’art (comme vestiges du passé),
         - le problème est un sentiment nostalgique de l’âge d’or, origine de   
           l’œuvre d’art,
         - D’où dans le cas de la littérature, la lecture mimétique constante de la
           genèse du contenu de l’œuvre (projection sans doute subjective, voire
           aléatoire).
        
         Dans le cas de l’herméneutique du (t. B), le défaut réside dans la pseudo-historicité de la vision (nonobstant la référence aux Grecs et à Eschyle). C’est la superposition de l’empirique au mythique (voire à «l’utopique») dans un rapport d’extrapolation perpétuel. Car comment expliquer la mise en rapport d’un problème d’historicité objectif (l’art des Grecs) avec le fantasme d’une lecture d’un individu, qui subjectivement et arbitrairement s’y projette à la quête d’une origine à jamais déficitaire ? L’aspect fantastique de l’herméneutique poéticienne n’a d’excuse que la « jouissance » que le sujet pourrait éventuellement en tirer. Quant à son historicité inconsciente, elle demeure fantomatique, fuyante, illusoire, en un mot inaccessible à la connaissance de l’histoire.

        2.2.3. L’herméneutique du (t. C) de H.R. Jauss :

        Elle considère l’histoire comme «une altérité passée», autrement dit, comme «un objet de la connaissance», éloigné dans le temps. Jauss en tant que théoricien de l’esthétique de la réception constitue son herméneutique de la façon qui suit, il oppose :

              - aux documents historiques, sociologiques, anthropologiques «muets»
                et sans témoins (lecteur ou observateur extérieur)/ la fascination
                parlante de l’expérience esthétique (autrement dit à la sémiotique/    
                «l’esthétique de la réception», 
             - à la projection subjective arbitraire/ la découverte et la
               compréhension des étapes d’une appropriation d’un savoir du passé
               dans l’expérience des présents successifs par l’entremise de
               l’expérience esthétique, jetée comme un pont vers l’altérité des passés
               lointains ou des cultures étrangères (en d’autres termes, à la poétique/
               la fonction esthétique en tant qu’activité médiatrice d’une
               communication ouverte sur le monde (ou herméneutique de sa
               connaissance),
            - à «l’étrangeté» du secret du «Toi étranger»/ le dévoilement et l’appel à
              la compréhension d’une «autre conscience» (par identification,
              dialogue a posteriori), en transformant l’objet culturel en objet
              esthétique (jouissance active et source de connaissance).

     Il résulte de ce parcours des trois herméneutiques : sémiotique (t. A), poétique (t. B) réceptionnienne (t. C) que cette dernière les reprend touts en les assumant dans un dépassement de leurs contradictions et difficultés cognitives et théoriques. Elle apparaît capable de plus de généralité, de cohérence logique et d’exhaustivité. H.R. Jauss définit sa théorie en se démarquant de celles qui lui sont contemporaines en disant dans son «Entretien avec Grivel» : «Dans la mesure où notre champ de  recherche alla au-delà du moment de l’art autonome et de la littérature moderne, où il entendit inclure des traditions littéraires se situant en deçà ou au-delà du concept humaniste de l’œuvre, une question apparut, quelque peu négligée par l’esthétique classique, celle qui porte sur l’expérience de l’art, donc sur la praxis esthétique : on en trouve la présence dans toutes les manifestations de l’art, la productrice (poièsis) , la réceptrice (aithèsis), la communicative (catharsis). Il s’ensuivit qu’il fallait compléter l’analyse du lecteur implicite par celle du lecteur historique, la reconstruction de l’horizon d’attente impliqué dans l’œuvre par celle d’un autre horizon, celui que définit pour le lecteur , dans son approche de l’œuvre, le monde où il vit.»[23].

     Cela résume de façon décisive, l’étendue et la portée de l’herméneutique (t. C) et sa supériorité opérationnelle sur ses concurrentes, celles du (t. A) et (du (t. B). On pourra schématiser ce rapport dans le tableau ci-après :
 

Théories particulières

Théorie de la sémiotique
(t. A)
«Documents muets»

Théorie de la sémiotique
(t. B)
«Projection subjectif arbitraire»

Théorie globale

Théorie
Communicative de l’esthétique de la réception
« Pont herméneutique de l’expérience esthétique »

      Cela vient en dernier lieu confirmer notre hypothèse de base « d’une théorie structurante » sous-tendant les corpus et validant par la même occasion nos préalables émis sur la lecture comparative de corpus.

           3. Conclusion :
           En conclusion, il est légitime de dire que du point de vue heuristique comme épistémologique, la lecture comparative a vérifié et réalisé les conditions de sa pertinence quant à l’explication comparée des textes du corpus, autrement dit celles postulées au début de cette étude (préalables, postulat et hypothèse de base).

    De façon générale, au niveau structurel comme au niveau micro-structurel des textes du corpus (t. A, t. B. t. C), nous avons observé des divergences et des convergences, et cela  au niveau de la structure globale commune aux textes du corpus (formulée : [X + Y + Z] explicitant l’ordonnance logique des idées des textes, des points de vue respectifs (comparés au profil théorique a priori de leurs auteurs, établis à cet effet dans notre postulat de départ), des théories particulières qui en découlent (traits structurels divergents et convergents de la théorie structurante. Nous avons alors constaté que les trois textes du corpus recouvraient chacun un point de vue et un objet d’étude différents (le «code rhétorique» dans la sémiotique de Barthes (t. A), « l’œuvre d’art littéraire » dans la sémiotique, « l’œuvre d’art littéraire » dans la poétique de Blanchot (t. B) et « l’expérience esthétique » dans la « théorie communicative » de Jauss (t. C). Par rapport aux herméneutiques des théories particulières, le «schéma de la réception» (v. Dällenbach) nous a permis de fonder analytiquement la théorie de la réception esthétique de Jauss, comme théorie structurante globale de la sémiotique de Barthes et de la poétique Blanchot. Mais comme le dit si bien G. Benrekassa : « Le langage théorique sur les textes est radicalement incapable de mettre en forme de manière «objective» un discours de/ sur la signifiance du sujet… »[24]. D’où la nécessité de constater que cette théorie reste en deçà d’une performance empirique suffisante, et attend d’être théoriquement et heuristiquement parachevée, au contact des œuvres littéraires et artistiques concrètes, de l’histoire  et du monde. 

                                              Dr. SOSSE ALAOUI MOHAMMED


[1]  Iser, Wolfang : « La fiction en effet », in «Poétique», N° 39, Septembre 1979, pp.276 et 298.  
[2] Notre corpus : Barthes, Roland : « L’analyse rhétorique», in «Littérature et société», Ed. de l’Institut de Sociologie de l’Université de Bruxelles, 1967, p.34 ; Blanchot, Maurice, « L’espace littéraire », Ed. Gallimard, 1955, p.277-278 ; Jauss, Hans Robert, «Sur l’expérience esthétique en général et littéraire en particulier : Entretien avec Charles Grivel», in «Revue des Sciences humaines», N° 177, 1980-1, pp. 18-19.
[3]  Sontag, Susan : « Roland Barthes : L’esprit, le jeu le pathétique », in «Magazine littéraire» ; texte reproduit par le journal «Almaghrib Culture», N°1316, p.III., Octobre 1981 (Maroc).
[4] Dubois, Jean,… : «Dictionnaire de linguistique », Lib. Larousse, 1973, voir sémiologie »/ « sémiotique », pp.434-435. 
[5] Dubois, Jean,… : «Dictionnaire de linguistique », Op.cit., § ‘poétique’, p.381.
[6] Jakobson, Roman : «Linguistique et poétique», in «Essais de linguistique générale», Ed. de Minuit, 1963, pp.209-248.
[7] Dällenbach, Lucien : «Actualité de la recherche allemande», in «Poétique», N°39, Septembre 1979, p.259.

[8] Benrekassa (Georges) : «Le concentrique et l’excentrique : Marges de lumière», Ed. Payot, 1980, p.27.
[9] Dällenbach (Lucien) : Op.cit., p. 260 : “Schéma de la théorie de réception ».
[10] Benrekassa, Georges : «Le concentrique et l’excentrique : Marges des lumières», Op.cit., p.27.
[11] Ducrot, Oswald : « De Saussure à la philosophie des actes de langage », in  introd. à « Les actes de langage» de J.R. Searle, Ed. Herman, 1972, p.8.
[12] Dubois, Jean,… : «Dictionnaire de linguistique », Op.cit., § ‘la sémiotique’, pp.434-435.
[13] Todorov, Tzvetan : Op. cit., p.136.
[14] Starobinsky, Jean : in Préface à «Pour une esthétique de la réception» de J.R. Jauss, Ed. Gallimard, 1978, pp.15-51.
[15] Blanchot, Maurice : Op.cit., p.271.
[16] Starobinski, Jean : Op.cit., p.19.
[17]  Op.cit., p. 19.
[18]  Stierle, Karlheinz : «Réception et fiction », in «Poétique», N°39, Septembre 1979, p.299.
[19] Stemplel, Wolf Dieter : « Aspects génériques de la réception », in «Poétique», N°39, Septembre 1979, p.357.
[20] Jauss, Hans Robert, «Sur l’expérience esthétique en général et littéraire en particulier : Entretien avec Charles Grivel», Op.cit., pp. 18-19.

[21] Genette, Gérard : «Structure et herméneutique», in «Esprit», N°35, 1967, p.161, cité in H.R. Jauss, dans : «Pour une esthétique de la réception», note 16, p.116. 
[22] Raymond, Jean «Le commentaire comme forme « active » de la critique», in le journal « Le Monde », supplément du 9 mai 1970, p.III (sur Balzac lu par R. Barthes : S/ Z).
[23] Jauss, Hans Robert, «Sur l’expérience esthétique en général et littéraire en particulier : Entretien avec Charles Grivel», Op.cit., p. 8.


[24] Benrekassa, Georges : «Le concentrique et l’excentrique : Marges des lumières», Op.cit., p.238

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