viernes, 17 de agosto de 2012

Ecrivains russes : le bicentenaire des voix du silence


LE BICENTENAIRE DES VOIX DU SILENCE DES ÉCRIVAINS RUSSES: 1808-2008
    A l’ombre de l’oubli, de la censure, des déportations et de la mort,  “les voix du silence” du bicentenaire (1808-2008) des écrivains russes, comme l’avait suggéré André Malraux (1901-1996) au sujet des arts ( 1951), mérite d’être  revisitées, tel un fait historique initié en 1808 par le roman “Rousski Vestnik” [Le messager russe]de Sergei Glinka [1775-1847], “avec l’intention «d’exciter l’esprit populaire et de lancer des appels pour une lutte nouvelle contre Napoléon [1812-1815]», ainsi qu’il [S.Glinka] le dira plus tard dans ses mémoires.” – Dimitri Sorokine, “Napoléon dans la littérature russe”, Paris, P.O.F., 1974, p.54. Or, citant Georges Nivat, professeur à l’Université de Genève (né en 1935), Lorraine Millot assure: “Rares sans doute sont les pays qui ont autant que la Russie tenté de massacrer et manipuler leur mémoire [les voix du silence]. Et rares sans doute les cultures aussi méconnues [les écrivains russes]…” – “L’empreinte russe”, www.liberation.fr, p.1.
      Un parcours même hâtif du bicentenaire des écrivains russes ne serait que justice à rendre à leurs singulières destinées à travers les dédales idéologico-politiques des XIXe et XXe et du début du XXIe siècles, ayant pour jalons les guerres patriotiques contre Napoléon (1769-1821), Hitler (1889-1945), voire la guerre froide, sous Staline (1879-1953), etc. Aussi verrons-nous en ce bicentenaire des écrivains russes: I) Le bicentenaire des écrivains russes classiques et modernes, II) Le bicentenaire des écrivains russes soviétiques et perestroïko-glasnostistes, III) Le bicentenaire des écrivains russes post-soviétiques et actuels.
      I- Le bicentenaire des écrivains russes classiques et modernes:
      Certes, la formation d’une littérature russe nationale, voire classique et moderne, fut historiquement suscitée par la guerre patriotique (1812-1815) de la Russie contre Napoléon Bonaparte (1769-1821). Tout paradoxal que cela puisse paraître, signale D. Sorokine [né en 1950], Napoléon et les guerres qu’il avait déclenchées jouèrent indirectement un rôle important et très favorable dans la formation d’une littérature russe nationale.” – Op.cit., p.21. Mais en dépit de l’oubli et de la censure, les voix du silence du bicentenaire des écrivains russes, notamment classiques et modernes, survécut à travers la longue mémoire de la Russie, comme le dit G. Nivat:     
      La Russie a une mémoire longue, qu’elle cultive parfois de façon un peu maladive. On s’accroche ainsi à 1612 [la victoire russe sur les Polonais] ou 1812, la victoire sur Napoléon. Ce qui permet de dire: nous [les Russes] avons toujours été envahis, nous ne sommes pas un peuple agresseur. Mais cette mémoire longue est une réalité, que l’Occident souvent ne comprend pas. De même, le souvenir de la Seconde Guerre mondiale, la guerre pour la patrie, comme on dit en Russie, est cent fois plus important pour la Russie que pour nous.” – “L’empreinte russe”, Op.cit., p.2. Ce qui nous conduit à voir successivement les écrivains russes classiques (1808-1900) et les écrivains russes modernes (1900-2008).
       I.1- Le bicentenaire des écrivains russes classiques (1808-1908):
       En effet, S. Glinka (1775-1847) fut l’auteur  d’un premier roman “Rousski Vestnik” (Le messager russe -1808),  où il avait prédit l’attaque de Napoléon contre la Russie,  et ce malgré les accords de paix signés avec Alexandre Ier, à Tilsit (1707) et à Erfurt (1808). “Malgré Tilsit, écrit D. Sorokine, Glinka ne croyait pas à la paix. Il prédisait une nouvelle guerre et prophétisait même une attaque de Napoléon contre la Russie.” – Op.cit., Ibid. Par ailleurs, le secrétaire la direction de l’Union des Ecrivains soviétiques Youri Vertchenko corrobore l’audience primordiale  des écrivains russes classiques (1808-1900),  en affirmant: “Notre littérature [soviétique] est l’héritière de la tradition démocratique des classiques…” - “Dans la ligne de Gorki”, “Lettres Soviétiques”, N°308, 1984, Moscou, p.150. Or, les écrivains russes classiques symbolisent, selon Christine Zeytounian-Beloüs, le siècle d’or de la littérature russe du XIXe siècle.
       Le 19e siècle, écrit-elle, est considéré comme un âge d’or qu’inaugure Alexandre Pouchkine [1799-1837], poète et prosateur (Eugène Onéguine;, La dame de pique; La fille du capitaine),figure  dominante de toute la littérature russe [v. classique] jusqu’à aujourd’hui; son influence sur les écrivains modernes saurait être sous estimée ; ainsi que celle des autres grands classiques: Mikhaïl Lermontov [1814-1841] (Un héros de notre temps; Nikolaï Gogol [1809-1852](Les âmes mortes, le Nez);Ivan Tourguéniev [1818-1883] (Les eaux printanières);Ivan Gontcharov [1812-1891] (Oblomov); Léon Tolstoï [1828-1910] (Guerre et paix; Anna Karenine);Fiodor Dostoïevski [1821-1881](Crime et châtiment ; Les possédés ; Les frères karamazov); Anton Chékov [1860-1904](La cerisaie ; La ,mouette ; Nouvelles)…”- “La littérature russe contemporaine”, www.interbibly.fr, p.1. Quant aux voix du silence du bicentenaire des écrivains russes classiques, dans les îles du Goulag (1945-1953), on se rappellerait, avec le Prix Nobel de littérature russe (1970), Alexandre Soljénitsyne (né en 1918): “Je n’en ai rencontré que quelques-uns sur la multitude des îles du Gulag (…). Ceux qui ont été engloutis dans ce gouffre, alors qu’ils s’étaient déjà fait un nom, sont au moins connus. Mais combien ont pu en revenir? Toute une littérature nationale [russe classique] est enfouie là, plongé dans l’oubli [les voix du silence] non seulement sans une pierre tombale, mais sans vêtements, nue, avec seulement un numéro [du bagne].” - “Les droits de l’écrivain, suivi de Discours de Stockholm”, Paris, Ed. du Seuil, 1972, p.99. 
        Cependant, les écrivains russes classiques furent aussi la mémoire ineffaçable des voix du silence bicentenaire de la littérature russe actuelle. “Ce qui a été détruit physiquement, souligne L. Millot, s’est souvent conservé sous forme de mythes, ou grâce à la littérature. Pour détruire totalement la mémoire [des classiques], le régime bolchevique aurait dû interdire la littérature, comme Mao [1893-1976] l’avait fait. Avec une grande littérature classique, l’ennemi est dans la place. Même si on ajoute une préface marxo-léniniste à Tolstoï [1828-1910] ou Pouchkine [1799-1837], il y reste d’immenses leçons d’émancipation [libérale].” - “L’empreint russe”, Op.cit., p.2. De plus, les écrivains russes modernes eurent à connaître, dès 1917, un sort aussi peu enviable que celui de leurs homologues classiques.
        I. 2- Le bicentenaire des écrivains russes modernes (1900-1917):
             Toutefois,  le bicentenaire des écrivains russes modernes (1900-1917) augurait, dès ses débuts, d’une littéraire russe moderne d’avant-garde, tragiquement avortée par la Révolution bolchevique d’octobre 1917. Globalement, André Lagarde et Laurent Michel déclarent concernant la littérature occidentale de 1900: “A première vue, la littérature d’avant 1914 nous semble, comme le «modern style », périmée ou tributaire du XIXe siècle.” - “XXe siècle”, Paris, Ed. Bordas, 1966, p.10. De plus, A. Soljénitsyne dénonce: “Notre littérature a perdu son rôle de guide à l’avant-garde de la littérature mondiale, qu’elle occupait à la fin du siècle dernier [XIXe siècle] et au début de celui-ci [XXe siècle]; elle a également perdu cet éblouissant caractère expérimental qui la distinguait au cours des années 20. – Op.cit., p.27. Dans ce cadre, on pourrait mentionner, avec C. Zeytounian-Beloüs, des écrivains russes modernes de cet âge d’argent comme suit:
        “Le terme d’âge d’argent, dit-elle, s’applique à la période qui va de 1890 à 1920; riche en nombreux courants dont le symbolisme (Fiodor Sologoub [1863-1927], Andreï Biely [1880-1934], Zinaïda Hippius [1869-1945], Alexandre Blok [1880-1921]), le futurisme (Vladimir Maïakovski [1893-1930], Velimir Khlebnikov [1885-1922]) et l’acméisme (Nikolaï Goumiliev [1886-1921], Ossip Mandelstam [1891-1938]). On peut également citer le clarisme (Mikhaïl Kouzmine [1875-1936]), l’imaginisme (Anatoli Mariengof [1887-1962], Sergueï Essenine [1895-1925]) et bien d’autres groupes et sous-groupes… La poésie domine largement cette période ; mais des œuvres remarquables voient également le jour dans le domaine de la prose. On redécouvre aujourd’hui [en 2008] en Russie, mais également en traduction française, nombre d’auteurs du début du XXe siècle injustement occultés [des voix du silence] sous le régime soviétique.” - “La littérature russe contemporaine”, Op.cit., p.1.
       Toutefois, le même auteur rappela l’interdit politique qui avait frappé les écrivains russes moderne et la révolution démocratique de 1917, en précisant: “La révolution démocratique [libérale] soulève espoir et enthousiasme, mais répressions et censure ne tardent pas à sévir après la révolution d’octobre [1917]. La période des années 20 est cependant très fertile, les auteurs du siècle d’argent [les écrivains russes modernes] poursuivent leur œuvre, de nouveaux écrivains se manifestent (Isaac Babel [1894-1941], Boris Pilniak [1894-1937], Mikhaïl Zochtchenko [1895-1958], Ilf [1897-1937] et Petrov [1902-1942], Daniil Harms [1905-1942]). La tentative de créer une littérature prolétarienne écrite par des ouvriers (mouvement du proletkult) ayant échoué, le pouvoir bolchevik attire à lui « les compagnons de route », intellectuels prêts à servir le nouveau régime [des soviets]. Mais avec l’arrivée au pouvoir de Staline [1924-1953] et la création de l’Union des Ecrivains [1934], le réalisme socialiste (Maxime Gorki [1868-1936], Mikhaïl Cholokov [1905-1984]) est bientôt le seul courant littéraire autorisé.” –  Op.cit., Ibid. Ainsi est-il des écrivains russes soviétiques et perestroïko-glasnostistes.
      II- Le bicentenaire des écrivains russes soviétiques et perestroïko- glasnotistes (1917-1991):
      Aussi les écrivains russes soviétiques (1917-1985) et perestroïko-glasnostistes: (1985-1991) de ce  bicentenaire marquent-ils une période plus ou moins sombre de la littérature russe durant surtout la première moitié XXe siècle. “La mise en place de l’URSS et de son régime socialiste [1917-1991], lit-on dans un article du Net, va pousser en avant la tendance du socialisme réel dans la littérature nationale [russe soviétique]. Cette doctrine littéraire est simple, il s’agit d’utiliser le talent des écrivains pour vanter les mérites et les réussites du régime [soviétique] ainsi que pour expliquer la propagande officielle. Le régime s’occupe d’organier la vie littéraire et l’orientation des thèmes via l’Union des Ecrivains [soviétiques] qui relève directement du commissaire  politique Jdanov [1896-1948].” - “Littérature vieux russe”, www.cours-de-russe.com, p.1.
       Les voix du silence bicentenaire des écrivains russes dissidents persécutés y est ensuite évoquée en ces termes: “Très rapidement, les écrivains réfractaires [russes classiques et modernes] seront contraints à l’exil, à la prison, au camp [d’internement] ou tout simplement exécutés comme Nikolaï Goumiliev [188-1921] ou Ossip Mandelstam [1889-1938]. Les poètes futuristes Vladimir Maïakovski [1893-1930] et Marina Tsvetaeva [1892-1941] choisiront le suicide. Malgré la politique littéraire officielle, certains auteurs comme Mikhaïl Boulgakov [1891-1940], Boris Pasternak [1890-1960], Andreï Platonov [1899-1951], Ossip Mandelstam [1889-1938], Isaac Babel [1894-1941] ou Vassili Grossman [1905-1964] continuent leur travail de romancier de manière clandestine en espérant être publiés de manière posthume ou à travers le régime des samizdat (publications artisanales clandestines).” – Op.cit, Ibid. Cela nous conduit alors à explorer le camp des écrivains russes soviétiques staliniens entre 1924 et 1953.
           II.1- Le bicentenaire des écrivains russes soviétiques staliniens (1924-1953):
       Durant la période stalinienne (1924-1953), C. Zeytounian-Beloüs relève, à côté des voix du silence du bicentenaire des écrivains russes non staliniens, les écrivains soviétiques staliniens et post-staliniens, comme suit: “Nombre d’auteurs [russes non staliniens] sont interdits de publication (Mikhaïl Boulgakov [1891-1940], Anna Akhmatova [1889-1966], Boris Pasternak [1890-1960]). Beaucoup finissent dans les camps [d’internement]. Quant aux écrivains staliniens encensés à l’époque, la plupart sont peu lisibles de nos jours [en 2008], sinon au second degré. Des œuvres de talent peuvent néanmoins voir le jour durant les années de guerre [1941-1945]   (Vassili Grossman [1905-1964], Victor Nekrassov [1911-1987], Olga Bergholtz [1910-1975]).” - Op.cit., p.2. Ce fut le cas  ensuite des écrivains khroutcheviens (1953-1964). 
     II.2- Le bicentenaire des écrivains russes soviétiques khrouchtcheviens (1953-1964):
     Du fait, le bicentenaire des voix du silence des écrivains russes khrouchtcheviens (1953-1964) correspond, selon C. Zeytounian-Beloüs, à la mort de Joseph Staline (1879-1953) et au début [1964] de Leonid Brejnev (1906-1982). “La mort de Staline et la destalinisation de années 50, dénote-t-elle, entraîne une vague de parutions. Des poètes «parlant vrai » réunissent des stades d’auditeurs enthousiastes (Andreï Voznessenski [né en 1933], Evgeni Evtouchenko [né en 1933], Bella Akhmadoulina [né en 1937]), c’est la période des bardes qui chantent leurs poèmes en s’accompagnant à la guitare (Boulat Okoudjava [1924-1997], Vlaimir Vyssotski [1938-1980]). La prose connaît aussi un renouveau. Cependant la libéralisation a ses limites [v. ses voix du silence]. Avec l’arrivée d Brejnev au pouvoir en 1964 ont lieu les premiers procès des écrivains dissidents [russes non soviétiques]. Les textes que la censure rejette sont diffusés grâce au samizdat (auto-édition) et au tamizdat, édition faite en Occident et introduite en fraude dans le pays. Des écrivains interdits de publication vivent dans la marginalité (Venedikt Erofeïev [1938-1990])” – Op.cit., Ibid.
       Pourtant, un relâchement relatif de la censure se produit vers la fin de la période brejnevienne (1970-1980). “La censure, indique également C. Zeytounian-Beloüs, se relâche à la fin des années 70 et de nombreuses œuvres de talent peuvent voir le jour. On distingue la prose paysanne (Valentin Raspoutine [né en 1937]) et la prose des villes (Iouri Trifonov [1925-1981]). Le fantastique connaît un grand effort (les frères Strougatski [Arkadi – 1925-1991]). Une génération d’écrivains nés après guerre ou dans l’immédiat avant-guerre essaye de briser les interdits (Andreï Bitov [né en 1937], Anatoli Kim [né en 1937]). Apparaît également une nouvelle vague poétique qui survit surtout en samizdat (Dmitri Prigov [né en 1940], Lev Rubinstein [né en 1947], Elena Schwartz [née en 1948], Viktor Krivouline [], Ivan Jdanov [né en 1948], Alexeï Parchtchikov [né en 1949], Olga Sedakova [née en 1949]…).” –  Op.cit., Ibid. Ensuite, ce furent les écrivains soviétiques perestroïko-glasnostistes (1982-1991).
          II.3- Le bicentenaire des écrivains russes soviétiques perestroïko-glasnostistes (1982-1991):
      Dans la perspective du bicentenaire des voix du silence des écrivains russes soviétiques perestroïko-glasnostistes [pour la transparence et la liberté d’expression] (1982-1991), on observe, sous  Mikhaïl Gorbatchev (né en 1931), la disparition de la censure et la multiplication des publications stigmatisant les erreurs politiques du passé et du présent. “Durant les années 1980, remarque Nickolay Anastasyev, la «perestroïka» [la  transparence] a dissipé dans une large mesure le climat de répression dans lequel les arts et la culture [les voix du silence des écrivains russes] baignaient depuis longtemps dans l’ex-Union soviétique. Le changement s’explique essentiellement par le rejet d’idéologies dépassées et [qui] avaient peu de chose à avoir avec l’économie. En revanche, l’effondrement du communisme et le passage d’une économie centralisée à une économie de marché [la globalisation] a bouleversé complètement les arts pratiquement en une nuit. Le vent des transformations économiques s’est mis violemment à souffler sur la culture [v. la littérature russe].”- “Les politiques culturelles dans la Russie post-soviétique”, www.unesco.org, p.1.
       En témoignent à cet égard les écrivains russes soviétiques perstroïko-glasnostistes  cités par C. Zeytounian-Beloüs au sujet de “La littérature de la perestroïka”, dans: “ Sous Gorbatchev [1982-1991], avec la glasnost (liberté d’expression) proclamée en 1987, la censure disparaît et les publications se multiplient. Les revues littéraires, notamment Novy Mir et Znamia, connaissent des tirages sans précédent. Les écrivains s’emploient à stigmatiser le erreurs du passé et du présent (Tchinguiz Aïtmatov [né en 1928], Anatoli Rybakov [né en 1911]) ou expérimentent avec le style (Valeria Narbikova [née en 1960], Viktor Erofeev [né en 1947]). On publie les écrivains de l’émigration, dont certains rentrent au pays (Alexandre Zinoviev [né en 1922], Edouard Limonov [né en 1942]), on comble les vides, on rattrape les retards.” - “La littérature russe contemporaine”, Op.cit., p.2. Et cela nous conduit donc à sonder les voix du silence du bicentenaire des écrivains russes post-soviétiques et actuels, entre 1992 et 2008.   
       III- Le bicentenaire des écrivains russes post-soviétiques et actuels (1992-2008):
        La période post-soviétique actuelle (1992-2008) ne peut manquer de faire paraître le bicentenaire (1808-2008) des écrivains russes, sous l’emblème des voix du silence, sinon de l’énigme et de l’effrayant. “Dans le triste héritage légué à la Russie contemporaine [1992-2008] par un passé despotique [soviétique], écrit Russomania, son image de pays lointain, exotique, à la fois énigmatique et effrayant, représente une large part (…). Cette situation a marqué la configuration de l’ensemble du champ culturel, influant en particulier sur l’évolution de la littérature (…). La coexistence des générations [d’écrivains russes] et des genres (…). L’éclatement de l’Union soviétique [1991] et la disparition de la censure ont créé une vraie tour de Babel de la culture [d’ouverture]: l’espace russe a soudain été envahi à la fois par des écrivains étrangers, autrefois interdits, par la littérature de l’émigration et de la dissidence, par la pensée intellectuelle occidentale et la philosophie russe, par l’art occidental et l’underground russe; tout cela, pour le lecteur, se présentait comme des nouveautés à la mode, au même titre que les textes [russes post-soviétiques] effectivement nouveaux (…). Tout d’abord, certains auteurs classiques vivants de l’underground littéraire [les voix du sience] connaissent une seconde jeunesse.”  - “La littérature russe actuelle”, www.russomania.com, p.2. D’où par-là même le  bicentenaire des écrivains russes post-soviétiques (1992-2000).
      III.1- Le bicentenaire des écrivains russes post-soviétiques (1982-1991):
       Certes, à l’occasion de leur bicentenaire, on relève diverses tendances littéraires chez les écrivains russes post-soviétiques (1992-2000), à savoir: la mise à nu de la société soviétique et post-soviétique, le non-conformisme des écrivains russes émigrés, le renouvellement des genre et des styles de la prose russe par les universitaires, les grands tirages du roman policier russe,  la recherche d’une nouvelle identité collective et la réévaluation  de l’héritage intellectuel des classiques russes. “Mais, si auparavant, dit Russomania, leur tâche [des écrivains russes post-soviétiques] était de démolir la façade flatteuse [les voix du silence] de l’histoire soviétique [1917-1982] (…), ils se sont efforcé, dans les années 90 [1992-2000], d’atteindre l’objectif inverse, de restaurer l’harmonie de l’existence, en rassemblant les débris de la vie précédente, emportée par le vent des bouleversements révolutionnaires des années 80 [1982-1991], et en les intégrant à un nouveau tableau du monde.
        “A cet égard, le récent triomphe de Vassili Axionov [né en 1932], l’idole des années 60 ; est très significatif. Après de longues années d’émigration, il brille à nouveau au firmament littéraire, lauréat du prix Booker russe 2004 pour Voltairiens et Voltairiennes (…). Dmiri Prigov [né en 1940], lui aussi, s’est attelé à la reconstruction du passé. Dans la trilogie qu’il vient d’achever, il tente de décrypter le mystérieux algorithme de la vie russe (avec son roman « Vivez à Moscou ») (…). Vladimir Sorokine [né en 1955], conceptualiste de la jeune génération, a gagné une popularité sulfureuse (en partie grâce aux procès et aux violente attaques dont il fait l’objet de la part de l’organisation extrémiste [communistes] «Ceux qui marchent ensemble »). Dans ses romans datant de cette époque [les années 90] (« Un mois à Dachau », « Moscou heureuse », « Le lard bleu », entre autres), il met à nu les fantasmes collectifs d’une société post-soviétique traumatisée.” – Op.cit/, pp.2-3.
        Pour  consacrer réellement le bicentenaire des voix du silence des écrivains russes post-soviétiques, il faut reconnaître avec C. Zeytounian-Beloüs la grande richesse du paysage littéraire russe de ces dernières années: “Tous les genres y fleurissent avec bonheur, indique-t-elle. Les auteurs de la génération soviétique et antisoviétique (Vladimir Makanine [né en 1937], Ludmila Petrouchevskaïa [née en 1938], Iouri Mamleïev [né en 1931]) y côtoient ceux de la perestroïka [glanostistes]   et de la post-perestroïka  (Tatiana Tolstoï [née en 1951], Alexeï Slapovski [né en 1957], Oleg Ermakov [né en 1961], Ludmila Oulitskaïa [née en 1943], Mark Kharitonov  [né en 1937], Leonid Guirchovitch [né en 1948]). Une foule de noms nouveaux apparaissent chaque mois (Mikhaïl Chichkine [né en 1961], Iouri Bouïda [né en 1954], Anton Outkine [né en 1967], Dmitri Bykov [né en 1967], Irina Polkanskaï [née en 1952], Olga Slavnikova [née en 1959], Marina Vichnevestskaïa [née en 1947], Dmitri Bortnikov [né en 1968], Dmitri Bavilski [né en 1969], Sergueï Bolmat [né en 1960], Andreï Guelassimov [né en 1965], Leonid Youzfovitch [né en 1947]). La poésie reste également très vivante.” - “La littérature russe contemporain.”, Op.cit., p.3. Suivent dans cette même optique les écrivains russes actuels (2000-2008).
      III.2- Le bicentenaire des écrivains russes actuels (2000-2008):
      Pour ce qui est de la dernière décade du bicentenaire des voix du silence des écrivains russes actuels (2000-2008), on perçoit, selon Russomania, deux directions novatrices opposées dans le paysage littéraires russes des années 2000. On y lit notamment:
      “Deux directions novatrices opposées, autre  caractéristique du paysage littéraire russe: l’ampleur du diapason des expériences et la diversité des pratiques innovantes individuelles ne permettent pas de discerner de courant majeur de recherche esthétique. L’effacement des frontières entre «pères» et «enfants» (…), embrouille encore plus les cartes [les voix du silence de leur bicentenaire triomphant]. Cependant, au début des années 2000, on a pu remarquer dans la prose des jeunes auteurs des tendances qui permettent de penser que nouvelles générations littéraires son en train de voir le jour. On peut ainsi esquisser les contours de deux directions novatrices opposées, « nouveau trash » [les écrivains russes de l’absurde et de la cruauté du chaos post-soviétiques] et « soft wave» [les écrivains russes du refus des stratégies de la provocation et de la simplification du langage].” - “La littérature russe actuelle”, Op.cit., p.5.
       Maintenant, on parle en Russie d’une censure commerciale qui se substitue à la censure politique passée dans l’édition des œuvres des écrivains russes actuels. “La crise économique [des années 90] s’aggravant, les gens lisent moins. La censure commerciale se substitue à la censure politique. Les tirages sont en chute libre. Une littérature populaire de très mauvaise qualité tient le haut du pavé.” – Op.cit., pp.2-3. D’un autre  côté, on émet sur le Net, un même constat négatif des voix du silence du bicentenaire des écrivains russes actuels en ces termes:
       “À la fin du vingtième siècle [en 2000], la littérature russe doit passer par une phase délicate: celle de la renaissance, par-delà le sel semé par des décennies de socialisme soviétique [1917-1991]. Les besoins de cette période [2000-2008] sont de deux types: former et découvrir de nouveaux talents et créer une économie de l’édition en Russie. Les maisons d’édition trouvent de l’argent pour se développer en vendant des romans de piètre qualité littéraire. Peu d’écrivains [actuels], comme Viktor Pelevine [né en 1962] ou Vladimir Sorokine [né en 1955] sortent du lot. Les maisons d’édition publient peu d’œuvres étouffées [des voix du silence des écrivains russes] sous la période communiste ou connues par samizdat. La poule aux oeufs d’or de l’édition russe est, comme partout ailleurs, la littérature policière. Les polars empreints d’ironie de Daria Dontsova [née en 1952] connaissent un grand succès. Les 50 romans policiers qu’elle a pour l’instant écrits se son vendus à des millions d’exemplaires et son traduits dans plusieurs pays européens.” - “Littérature vieux russe”, Op.cit., p.2.
     Néanmoins, deux points forts de ce bicentenaire (1808-2008) manifestes chez les écrivains russes actuels (2000-2008), ce sont le roman russe (du XXIe siècle) et les prix Nobel de littérature (1933-1987).  On  relate dans l’article du Net à ce sujet en l’occurrence:
    “Au début du vingt-et-unième siècle [2000-2008], la demande du public russe s’est fortement accrue, en qualité comme en quantité. En conséquence, l’économie de l’édition russe est obligée de fournir à ses clients en cherchant et en rémunérant de nouveaux talents littéraires. Le nombre de maison d’édition et de tirages augmente. Certains critiques littéraires ont vu dans le roman « Une Saga moscovite » (en russe Moskovskaya saga) de Vassili Axionov [né en 1932] un nouveau «Docteur Jivago» [de B. Pasternak 1822-1895, paru en 1958], une épopée russe racontant la survie pénible de la famille Gradov sous le stalinisme (…). Les polars de Boris Akounine [né en 1956] avec son personnage fétiche Eraste Fandorine son publiés en Europe et en Amérique du Nord (…). La littérature traditionnelle [les voix du silence des écrivains russes] trouve aussi un nouvel essor avec de auteurs venus de régions éloignées comme Nina Gorlanova de Perm [née en 1947]  avec ses histoires sur les difficultés quotidiennes et les joies de l’intelligentsia provinciale ou encore Youri Rykhéou de Tchoukotka [né en 1930] qui raconte les problèmes identitaires des Tchouktches.” – Op.cit., p.2.
   Quant aux lauréats russes morts et vivants du prix Nobel de littérature, il faudra citer, en 1933, celui de d’Ivan Bounine (1970-1953); en 1958, celui de Boris Pasternak (1890-1960); en 1965, celui de  Mikhaïl Cholokov (1905-1984); en 1970, celui de Alexandre Soljénitsyne (né en 1918) et en 1987, celui de Joseph Brodsky (1940-1996).
      En conclusion, pour consacrer  aussi brièvement qu’honorablement ce grandiose bicentenaire des voix du silence des écrivains russe de 1808 à 2008, on ne saurait mieux dire que cette remarque appréciative et  très suggestive de Nikolay Anastasyev: “Pourtant,  on ne saurait brosser un tableau totalement noir du secteur de la culture dans la Russie d’aujourd’hui [en 2008]. C’est ainsi par exemple que le nombre de maisons d’édition privées [aidées surtout des sponsors russes et des mécènes étrangers] ne cesse de croître et que certaines d’entre elles publient ce qu’on pourrait appeler de la littérature sérieuse (…). Certes, la culture [les voix du silence bicentenaire des écrivains russes] survivra en Russie. Mais pour pouvoir s’épanouir normalement, certains moyens lui sont indispensables. La Russie se doit donc de réexaminer ses priorités et d’adapter sa politique culturelle [v. littéraire] aux changements qui sont survenus depuis 1992.” - “Les politiques culturelles dans la Russie post-soviétique” – Op.cit., pp.1-2. 
     
                                              Dr. SOSSE ALAOUI MOHAMMED
        
          

        

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