jueves, 6 de septiembre de 2012

DIVAGACIONES D'UN HISPANISANT


DIVAGACIONES-2005 D’AHMED MOHAMED MGARA

Dédicacé aux hispanisants marocains et aux arabisants espagnols, la plaquette-journal, les     Divagaciones d’Ahmed Mohamed Mgara – Ediciones A.E.M.L.E.,Tétouan ,2005,97 p.,in-8° - rappelle très sommairement et par pure coïncidence Carnets 1940/1973 : l’esprit frappeur de Georges Henein – Ed ; Encre ,Paris, 1980, 223 p. A cette différence près que  premier émane d’une littérature hispanophone et le second d’une littérature francophone, avec un écart géographique (Maroc/France) et temporel (2005/1980), soit près d’un quart de siècle. Dans les deux cas, il s’agit en fait d’un journal intime ouvert sur la littérature et le monde. «Un journal , écrit G.Henein, au début de son livre, est parfois nécessaire pour dire que l’on a cessé d’être »-Op.cit ;p.7.

Le titre de l’ouvrage de Mgara est certes très évocateur, Divagaciones (ou digressions),ou écarts par rapport au sujet (Logos). Il fait écho aux Carnets…de Henein focalisant « l’esprit frappeur » (par subversion), toujours par rapport au langage. « Rupture avec les incantations premières devenues autant de marches militaires, rupture avec la logique de la subversion qui n’est plus que la rhétorique des geôliers »-Henein,op.cit ;p.8. De son côté, Mgara souligne comme une digression  langagière la définition d’un « hispanisant » qui ne sait pas un mot d’espagnol (en Espagne et au Maroc) . « Actuellement, écrit-il, un écrivain marocain francophone est pris pour un « hispanista » (hispanisant) par les Espagnols, simplement parce qu’il distingue les charmes d’Alhambra ou de Generalife sans différencier « tocino » (lard) de « vecino » (voisin). » - Divagaciones, Op.cit.p.9. 
                                                   
Cette remise en question de Mgara s’étend à l’histoire littéraire arabo-espagnole, victime des « Rois Catholiques », à la colonisation du Nord du Maroc (sa ville natale : Martil               /Tétouan) et à la langue espagnole , « idioma castellano », comme survivance littéraire  actuelle au Maroc et dans sa région, aujourd’hui. « Nous ne pouvons oublier les poésies et les livres que connut l’Andalousie de la tolérance, ni les écrits, depuis la première loi de l’étranger édictée par les Rois de Castilles et d’Aragon  dans le monde et depuis leur invasion contre les ethnies non chrétiennes qui habitaient ces terres. » - Op.cit.,p.7.

La même  « digression »/ « subversion » se retrouve chez G. Henein, non sans ironie dans ce passage des Carnets… : « Nous ne sommes au Moyen Age qui fut une époque de hauts faits (arabo-islamiques) .Le Moyen Age paraît ténèbres parce que l’Occident y est obscur (…) , mais Cordoue ? » Carnets…,Op .cit.,pp.144-145.Par ailleurs, la littérature hispanophone marocaine  est largement évoquée par Mgara dans son livre. Il  parle du projet d’une « association » future des « hispanisants de Tétouan et sa province » (p.10) .

Il en cite les œuvres et les noms connus , à ce jour en ces termes : « Nous pouvons citer la traduction de Don Quichotte  par feu Thami Ouazzani, celles d’Al Motamid par Trinidad Sànchez  Mercader, dans la revue (Maroc) de Jacinto Lopez Gorgé… » (p.12).Il cite également Mohamed Sabbag, Dris El Jay, etc., parmi les anciens. De la seconde génération, il nomme Mohamed Chakor, Aziza Benani, Mohamed Bouissef Rkab, Abdellah Djbilou, Saîd Jedidi et autres. Il rapporte par ailleurs parmi les jeunes hispanisants, dès 1990, Nadia Boazza, Moufid Atimo, Choukri Al Bakri, Latifo Kassidi, etc.(p.13).

De son côté, Henein parle de Lewis Carrol, Henri Michaux, Benjamin Constant, Raymond Lulle, Homère, Dante, Shakespeare, etc. – Carnets …,pp. 172-173.Henein parle aussi des écrivains et penseurs arabes : Ibn Arabi, El Hallaj, Ibn Khaldun (p.180). Les deux auteurs achèvent leurs ouvrages par une note biographique respective : « AHMED MOHAMED MGARA…EN LINEAS », par Mgara lui-même (pp.94-97) et «  Postface : UNE STATUE POUR LE DUC D’ESTE », par Eric Bourde pour G. Henein (pp.211-223).

Enfin, on peut dire avec Mgara que « Chaque bord (« divagacion » /digression) impose sa propre malédiction, répondez lui, mais l’espoir tenace vaincra les deux malédictions… » (p.56), tout en pensant avec Henein que «  La mémoire, elle aussi, a ses marges jaunies, propices à tous dépaysements. Dans cette frange baignée d’un jour incertain qui ni tout à fait l’aube, ni déjà le crépuscule, le passé garde une jeunesse médusante, le passé demeure une aventure. » - Carnets…, Op.cit., p.210.
                                                                        
   
                                                                                                                                                        
                                                                         Par Dr.  SOSSE ALAOUI MOHAMMED

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